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Mais Habert entendait bien ne pas lâcher ses adversaires. Dans la préface de La fréquente communion il était dit que Pierre et Paul avaient fait pénitence. Et l’auteur ajoutait : « De sorte que l’on voit dans les deux chefs de l’Église, qui n’en sont qu’un, le modèle de la pénitence. » Cette proposition ne venait pas d’Arnauld. Elle avait été introduite par Martin de Barcos, qui avait surveillé l’impression de l’ouvrage. C’est contre cette proposition qu’est dirigé le volume de Habert : De cathedra seu prirnatu singulari S. Pétri in Ecclesia catholica apostolica et romana libri duo, Paris, 1645. Il assimilait ses adversaires à Marc-Antoine de Dominis et les accusait de renouveler ses erreurs. Arnauld défendit la proposition dans les nouvelles éditions de La fréquente communion. Barcos, de son côté, publia d’abord un petit volume : De l’autorité de S. Pierre et S. Paul qui réside dans le pape, successeur de ces deux apôtres, Paris. 1645, puis, plus spécialement contre Habert, l’ouvrage plus considérable intitulé : La grandeur de l’Église romaine établie sur l’autorité de S. Pierre et S. Paul, Paris, 1646. Toutes ces polémiques avaient mis en relief les mérites de Habert. Il fut nommé à l’évêché de Vabres et sacré à Paris le 17 décembre 1645, par Dominique Séguier, évêque de Meaux.

Cet épiscopat n’interrompit point l’activité littéraire de Habert. En 1646, paraissait son grand ouvrage dogmatique : Theologise græeorum Patrum vindicatæ circa universam materiamgratiæ, libri III, Paris, 1646 ; Wurzbourg, 1863. L’auteur ne se contentait point d’exposer la doctrine des Pères grecs sur la grâce. Il la confrontait avec les données de l’Écriture et des conciles, de saint Augustin et de saint Thomas et ce qu’il appelait l’enseignement traditionnel de la Sorbonne. Toute son érudition, qui est grande, allait à interpréter les textes dans le sens de son système particulier sur la grâce efficace. Il s’y explique sur ses contemporains et en particulier sur le P. Gibieuf. Il agissait tout autant qu’il écrivait. A l’assemblée du clergé de 1650, il rédigeait la lettre dans laquelle on sollicitait du pape la condamnation des cinq propositions. Ceci lui valut une critique anonyme : Considérations sur la lettre composée par M. l’évêque de Vabres pour être envoyée au pape en son nom et de quelques autres prélats dont il sollicite la signature, s. 1., 1650. Enfin, en 1656, il publiait un commentaire sur les Épîtres « épiscopales » de saint Paul : In B. Pauli epistolas très épiscopales ad Timolheum et Titum et unam ad Philemonem expositio perpétua. C’est le dernier ouvrage de Habert. Il mourut d’apoplexie, le 15 septembre 1668, et fut inhumé dans la cathédrale qu’il avait bâtie.

Ch. Jourdain, Histoire de l’université de Paris, t. r, passim ; H. Reusch, Der Index der verbotenen Biicher, Bonn, 1885, t. ii, p. 451, 462, 463, 467 ; Gallia ebristiana, t. i, p. 282 ; P. Féret, La faculté de théologie de Paris. Époque moderne, t. iv, p. 311-317 ; Hurter, Nomenclaior, Inspruck, 1910, t. iv, col. 65-67.

A. HUMBERT.

    1. HABERT Louis naquit soit à Blois même##


2. HABERT Louis naquit soit à Blois même, soit à Francillon, près de Blois, en 1635. Il prit le bonnet de docteur le 15 mai 1658, selon Moréri et Féret. Luimême, dans la préface de la Défense de l’auteur de la théologie au séminaire de Châlons, dit expressément : « A peine j’eus reçu le bonnet de docteur en 1668, que je fus employé successivement par différents prélats, » p. 3. De ces prélats le premier fut Colbert, d’abird évêque de Luçon, transféré ensuite à Auxerre. Habert le suivit. Mais son activité ne commença à se développer qu’à Verdun, où l’amena, en 1681, l’évêque Hippolyte de Béthune. Celui-ci, à peine installé, établit un séminaire dont le premier directeur fut Habert. Il y enseignait la théologie et l’Écriture

sainte. En même temps il travaillait à la réforme liturgique et spirituelle du diocèse. Sous l’autorité et le nom de l’évoque paraissaient successivement un Petit et un Grand catéchisme du diocèse de Verdun, puis un Rituel de Verdun. En 1691, fut publiée, sans nom d’auteur, la Méthode pour administrer utilement le sacrement de pénitence, qui devait acquérir une véritable célébrité sous le nom de Pratique de Verdun, et dont les éditions furent très nombreuses en France et en Italie. Habert surveillait en même temps la correction du bréviaire, avec la collaboration de dom Jérôme Pichon, de Metz, qui devint supérieur de la congrégation de Saint-Vanne. Le nouveau bréviaire parut en 1694. Mais il se heurta à l’opposition du clergé, en particulier des chanoines, qui ne purent se résoudre à l’adopter qu’en 1705. Enfin, en 1697, parut un volume de Conférences ecclésiastiques du diocèse de Verdun. Habert eut certainement une part très considérable à la rédaction de ces différents ouvrages. D’un autre côté, l’historien verdunois Boussel et l’historien lorrain dom Calmet, qui l’ont connu, sont unanimes à louer sa piété et son zèle comme grand-vicaire et officiai.

C’est pour remplir les mêmes fonctions qu’il fut appelé, vers 1700, à Châlons-sur-Marne par l’évêque de Noailles. Ici encore, il y joignit les fonctions de directeur du séminaire. Cédant aux instances de son évêque, il commença, en 1709, la publication du cours qu’il avait enseigné en ces différents évêchés, sous le titre de Theologia dogmalica et moralis ad usum seminarii Calalaunensis. Le sixième et dernier volume parut en 1712. Mais avant même qu’elle fut complètement publiée, cette théologie avait provoqué de vives oppositions, dont l’âme paraît n’avoir été un moindre personnage que Fénelon. L’archevêque de Cambrai écrivit tout d’abord une Lettre à un évêque, dans laquelle il combattait vivement la théorie des deux délectations exposée par Habert dans son traité de la grâce. Il y a, disait le théologien, deux délectations, la grâce et la concupiscence, et la plus forte des deux agit avec une nécessité morale. C’est sur ce point que Fénelon faisait porter tout le poids de la discussion. Il envoya cette Lettre au duc de Chevreuse, pour la soumettre au P. Le Tellier et lui demander l’autorisation de la publier. Il ajoutait dans sa lettre d’envoi : « Si ce système n’est pas hérétique, alors la condamnation de Jansénius est injuste, et le jansénisme n’est qu’un fantôme et une hérésie imaginaire, dont les jésuites se servent pour persécuter les fidèles disciples de saint Augustin et tyranniser les consciences en faveur du molinisme. » Mais le P. Le Tellier déclara la publication inopportune, et Fénelon, de ce côté du moins, dut se tenir tranquille.

Mais la controverse allait éclater par ailleurs. Au commencement de 17Il parut, sans nom d’auteur, une Dénonciation de la théologie de M. Habert. Elle était adressée au cardinal de Noailles, archevêque de Paris, et à l’évêque de Châlons. Suivant Habert, c’est ce dernier qu’elle visait plus spécialement. Il semble bien qu’elle soit l’œuvre du P. Lallement, de la Compagnie de Jésus. Habert ne voulut pas rester sous le coup de cette attaque, et, quelques mois plus tard, il publiait une Défense de l’auteur de la théologie du séminaire de Châlons. Il insistait sur les garanties que fournissait son passé et citait les thèses qu’il avait soutenues à Verdun et à Châlons contre le jansénisme. Puis, il essayait de démontrer la conformité de son système avec l’enseignement traditionnel de l’Église et celui de la Sorbonne. D’un autre côté, son approbateur, Pastel, prenait parti pour lui. Il faisait paraître, à peu près en même temps, une Réponse de M. Pastel, docteur en théologie, de la maison et société de Sorbonne, cl approbateur de la théologie de M. Habert. Il y soutient,