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1885
1886
GROPPER — GROSSETESTE


prit une part importante aux délibérations de la commission qui préparait la xiv 8 session. Le 25 octobre, il y traita, dans un discours de quatre heures, la doctrine de la pénitence, dont il défendit le caractère sacramentel contre Luther et Bucer. Le 14 décembre, il dressait, avec son ami Everhard Billick, une liste de seize propositions hérétiques sur le sacrifice de la messe et le sacrement de l’ordre. Le jour de l’Epiphanie 1552, il prononçait le discours solennel en face des Pères assemblés. Ce discours fut imprimé la même année à Cologne. Mais les temps devenaient difficiles pour le concile. Adolf de Schauenbourg quittait Trente en mars. Il est probable que Gropper revint immédiatement avec lui.

Les éminents services qu’il avait rendus à la cause catholique avaient été reconnus à Rome. Paul IV, au consistoire du 18 décembre 1555, lui conféra la pourpre cardinalice, avec le titre de Sainte-Lucie in Silice. Malgré toutes les instances du pape, Gropper refusa d’abord cet honneur. Il fit valoir des raisons de santé qui lui rendaient impossibles le voyage et le séjour à Rome. Il continuait, du reste, à Cologne son œuvre de restauration catholique. Le roi des Romains, Ferdinand, l’ayant sollicité de prendre part au colloque de Worms (septembre 1557), il refusa. Une affaire plus importante allait l’amener à Rome même, où il avait cru ne pouvoir jamais venir. Adolf de Schauenbourg était mort le 20 septembre 1556. Son frère Antoine, qui lui succéda sur le siège de Cologne, ne régna pas même deux ans (18 juin 1558). Le chapitre élut alors le comte Gebhard de Mansfeld, dont l’orthodoxie était plus que douteuse. Aussi Gropper prit-il immédiatement le chemin de Rome, pour empêcher la confirmation de cette élection. Ses adversaires, pour parer le coup, le dénoncèrent à l’Inquisition, à propos de sa doctrine sur la justification et de quelques phrases peu précises sur la primauté de saint Pierre. A peine arrivé, Gropper dut composer un mémoire justificatif. Mais les cardinaux et Paul IV lui-même, si sévère pourtant sur les questions de doctrine, ne semblent pas avoir pris l’affaire au sérieux. Sa justification fut pleinement acceptée Le pape le consulta sur les affaires religieuses d’Allemagne. Gropper lui soumit un mémorandum dans lequel il préconisait le concile général comme seul moyen d’arriver à l’union. Mais toutes ces intrigues et le surcroît des affaires dont il s'était chargé l’avaient épuisé. Il mourut à Rome le 13 mars 1559. Le pape lui-même voulut prononcer son oraison funèbre au service qui eut lieu à Santa Maria del Anima.

Liessem, Johann Groppers Leben, Cologne, 1876 ; K. Varrentrapp, Hermann von Wied, Leipzig, 1878 ; L. Pastor, Die kirelilichen Reunionsbestrebungen wàlirend der Regierung Karls V, Fribourg, 1879 ; F. Jostes, Daniel von Soest, Paderborn, 1888 ; E. Schwarz, Hislorisches Jahrbuch, t. vu (1886), p. 392-423 ; t. xviii (1897), p. 821 sq. ; van Gulik, Johannes Gropper, Fribourg, 1906 ; Hefner, Die Enstehungsgeschichte des Trienter Rechtfertigungsdekrets, Paderborn, 1909 ; L. Cardauns, Zur Geschichte der kirelilichen Unions und Reformbeslrcbungen von 1538 bis 1542, Rome, 1910 ; L. Schmitz-Kallenberg et W. Kohler, dans Briefmappe, Paderborn, 1911, p. 120-141, 244-247 ; St. Elises, Romische Quartalscliri/t, t. xx, p. 175 sq.

A. HUMBERT.

    1. GROSSETESTE Robert##


GROSSETESTE Robert, théologien anglais, naquit vers 1175 à Stradbrook, dans le comté de Sutîolk, de 1 arents très pauvres. Il reçut l’instruction élémentaire dans une école de Lincoln, puis il fut envoyé à Oxford où il étudia non seulement la théologie, mais encore la jurisprudence et la médecine, comme en fait foi une lettre par laquelle Giraud de Barri le recommandait à Guillaume de Vere, évêque de Hereford, avant 1199. On dit couramment qu’il étudia ensuite à Paris, mais aucun auteur contemporain ne mentionne ce fait ; quoi

qu’il en soit, dans les premières années du xiiie siècle nous le trouvons à Oxford, avec le titre de recteur des écoles, qui fut ensuite changé en celui de chancelier. En 1224, sur la demande d’Agnello de Pise, provincial des frères mineurs, il ouvrit ses cours publics dans la maison que ces religieux venaient d'établir à Oxford, et y enseigna jusqu’au moment de sa promotion à l'épiscopat en 1235. Il exerça pendant ce temps différentes charges importantes du ministère pastoral, et à la mort d’Hugues de Wells, évêque de Lincoln, il fut élu par le chapitre pour lui succéder. Le diocèse de Lincoln, qui était alors le plus grand d’Angleterre et s'étendait sur neuf comtés, offrait un champ considérable à l’activité réformatrice du nouvel évêque. Grosseteste ne recula pas devant la tâche, et il se mit incontinent en devoir de commencer la visite de son troupeau. Il se trouva en face de difficultés qui firent de son ôpiscopat une lutte continuelle. Son chapitre tout d’abord prétendait n'être pas soumis à la visite épiscopale ; il ne put en venir à bout qu’après une dispute de six ans, et il fallut l’intervention du pape pour trancher la question en faveur de l'évêque. Il eut aussi des démêlés avec les monastères, qui possédaient dans son diocèse beaucoup de bénéfices, et qui, paraît-il, étaient loin de pourvoir comme ils l’auraient dû aux nécessités spirituelles du peuple ; il travailla pendant tout son épiscopat pour les forcer à établir et à payer dans chaque paroisse un vicaire résident. Il réussit en partie, mais les moyens qu’il employa pour arriver à ses fins furent si violents que Matthieu Paris l’appelle un persécuteur des moines.

Mais ce qui a rendu Grosseteste très populaire auprès des écrivains anglais protestants, ce sont ses démêlés avec le Saint-Siège ; on a même été jusqu'à faire de lui un précurseur de la Réformation. Ceci est faux ; l'évêque de Lincoln a toujours reconnu la primauté du pape et son droit de commander à l'Église entière ; il proclame sa croyance maintes et maintes fois dans ses lettres, il engage le roi à se soumettre à celui qui, dit-il, est son père et sa mère ; il sait bien aussi avoir recours au souverain pontife dans ses difficultés soit avec son chapitre, soit avec les monastères, soit avec le roi. Il n’a résisté au pape que sur un point : il refusait de conférer des bénéfices à des Italiens qui étaient incapables de les desservir, parce qu’ils ne parlaient pas anglais, et qui souvent ne mettaient même pas le pied en Angleterre. Il réclamait aussi contre le nombre excessif de bénéfices ainsi donné à des étrangers, ce qui appauvrissait considérablement l'Église d’Angleterre. Il a parfois parlé durement, surtout dans une lettre célèbre qu’il écrivit, a-t-on dit, à Innocent IV, mais qui était adressée à un secrétaire du pape qui portait aussi le nom d’Innocent ; mais même dans cette lettre il proteste de sa soumission au pape, qui est dans la hiérarchie ecclésiastique le type et le représentant du Christ, et il trouve une formule curieuse pour concilier sa résistance avec son respect pour l’autorité pontificale. « C’est par obéissance, dit-il, que ie désobéis, que je proteste que je me révolte. »

Il favorisa beaucoup les ordres mendiants, qui étaient alors dans toute la ferveur de leur institution primitive, Nous l’avons vu enseigner à Oxford dans l'école des franciscains, qui furent toujours ses préférés, et parmi lesquels il trouva son plus intime ami, Adam Marsh (de Marisco), voir 1. 1, col. 387 ; mais il aimait aussi les dominicains, et ce fut l’un d’entre eux, Jean de Saint-Giles, qui l’assista au moment de sa mort, en qualité de médecin aussi bien que de théologien. Il mourut en 1253. Plusieurs tentatives furent faites pour obtenir sa canonisation, mais sans succès.

La liste de ses ouvrages donnée par Pegge, un de ses biographes, remplit vingt-cinq pages in-4° ; la plupart sont encore en manuscrit. Il avait une science enev-