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son manuscrit, à l’adresse de Picenini et de ses collègues, quelques expressions qui furent considérées comme injurieuses et que lui reprocha un défenseur de Picenini, Thomas Manella. Le P. Gotti désavoua facilement des paroles qui étaient tout à fait opposées à sa modération ordinaire. Il ne demeura que deux ans inquisiteur de Milan. En 1717, il était de retour à Bologne et était appelé à succéder à Benoît Bacchini, abbé du Mont-Cassin, qui occupait à l’université la chaire d’apologétique. De nouveau, en 1720, il fut élu prieur de son couvent de Bologne et, l’année suivante, il fut choisi pour la seconde fois pour provincial. C’est en cette qualité qu’il prit part au chapitre général de Borne, 1 er juin 1721, réuni pour donner un successeur au général de l’ordre, le P. Antonin Cloche ; Gotti réunit sur son nom un certain nombre de suffrages. En 1725, an chapitre général, réuni à Bologne pour remplacer le P. Augustin Pipia, nommé cardinal, de nouveau le provincial de Lombardie eut beaucoup de voix, sans être pourtant élu. Pendant ce temps, il continuait ses travaux d’apologiste et de controversiste. En 1727, il fit paraître : Colloquia theologicopokmica, in 1res classes distributa : in prima, sacrorum minislrorum eœlibatus ; in secundo romanorum pontificum auctoritas in conciliis et definilionibus ; in tertio aliæ calholicæ veritales propugnantur ; adjectis Grcrjorii VII vindiciis advjrsus Jacobi Picenini concordiam matrimonii cum ministerio, in-4°, Bologne, 1727. L’occasion de ce nouvel écrit, ainsi que le note dans la préface l’auteur lui-même, fut la découverte qu’il fit au cours d’une de ses visites comme provincial d’un livre de Picenini, paru en 1709 sous forme de dialogue, en faveur du mariage des prêtres. Le ministre protestant avait eu soin de répandre son écrit à profusion à Saint-Moritz, lieu déjà très fréquenté, afin que de là il passât plus facilement en Italie. C’est aussi dans ce lieu que Gotti plaça les interlocuteurs de ses dialogues. Il donne à ses personnages les noms choisis déjà par saint Jérôme pour son dialogue contre les lucifériens. Critobule défend les opinions de Picenini ; Attique, la doctrine de l’Église. Gotti nous apprend aussi qu’il avait eu dessein, dans un but apologétique, d’écrire ces dialogues en italien, mais il lui a paru plus convenable de traiter ces matières en latin ; plusieurs savants lui ont témoigné le même désir. Le volume contient trente-huit conférences, où l’auteur se révèle non seulement en parfaite possession de la doctrine, mais aussi très bien renseigné au point de vue historique sur les lois et les anciens usages de l’Église. Pendant son séjour à Bologne, le P. Gotti réunit sous le titre de Bullarium Bononiense tous les diplômes, bulles, etc., concernant le couvent de Bologne. Ce travail resté manuscrit fut d’une grande utilité au P. Brémond, qui éditait alors le bullaire de l’ordre. Il rend hommage au travail du P. Gotti dans la préface au t. i du bullaire, p. lx. Mais le principal ouvrage de Gotti est son traité de théologie, publié sous ce titre : Theologia schoïasiico-dogmalica juxla incident D. Thomse Aquinatis ad usum discipidorum, 16 in-4°, Bologne, 1727-1735 ; 6 in-fol., Venise, 1750 ; 3 in-fol., 1783. L’avertissement placé par l’auteur en tête du i cr volume est des plus précieux, montrant que la théologie de l’École doit être complétée par une étude plus attentive soit des sources propres de la théologie, soit des hérésies à combattre. Les paroles de Gotti méritent d’être citées : « On voit, dit-il, entre les mains des maîtres et des disciples, un assez grand nombre de cours théologiques, les uns déjà imprimés et les autres en manuscrit ; mais la plupart de ces traités, tout remplis de questions purement scolastiques, instruisent peu les jeunes gens sur le fond de la religion, et ils ne paraissent destinés qu’à leur remplir l’esprit de subtilités métaphysiques, ou d’une infinité de disputes, qui ne regardent ni la

D ! CT. DE THÉOL. TATUOL.

foi, ni la science ecclésiastique, ni par conséquent aucune de ces vérités qui font aujourd’hui l’objet de nos controverses avec les luthériens, les calvinistes, les anabaptistes, les sociniens et les autres sectaires des derniers siècles ; trop souvent ceux mêmes qui se vantent d’avoir fait leurs études de théologie se trouvent hors d’état d’expliquer quels sont précisément les dogmes de ces différentes sectes : ils ne sauraient dire ni ce qu’elles ont de commun, ni ce qui les divise et entre elles et avec nous… Quelques savants ont déjà traité les vérités de la foi, d’une manière purement dogmatique et plusieurs autres ont agité les questions de l’École, seulement en scolastiques. On pouvait encore désirer qu’un théologien entreprît d’unir l’un et l’autre, et c’est ce que je me suis proposé de faire… » On le voit, c’est encore une idée d’ordre apologétique et d’utilisation immédiate qui est à la base de la méthode de Gotti. A ce point de vue elle marque une évolution intéressante de la méthode théologique. Il a soin d’ailleurs de faire remarquer, et en cela il est vraiment traditionnel, que « dans toute la Somme théologique il ne se trouve pas une seule question, ni un seul article, qui ne serve en sa manière ou à réfuter quelques erreurs, ou à prouver quelque vérité utile à la religion. » Ce grand ouvrage attira plus encore l’attention sur Gotti. Alors qu’il n’était encore qu’archevêque de Bénévent, le cardinal Vincent-Marie Orsini avait su apprécier les rares qualités d’esprit et de cœur du provincial de Lombardie ; aussi, devenu pape sous le nom de Benoît XIII, dans le consistoire secret du 30 avril 1728, il nomma le P. Gotti patriarche titulaire de Jérusalem et l’agrégea au Sacré-Collège. Le 7 mai, il recevait ses insignes cardinalices des mains du cardinal-légat de Bologne, Gregorio Spinola, et le 19 du même mois, il fut sacré par le cardinal Buoncompagni, archevêque de Bologne, assisté des évêques de Forli et de Fænza. Il reçut le chapeau à Rome le 10 juin. Le pape le fit entrer aussitôt dans presque toutes les Congrégations romaines. Malgré tout le travail que lui donnait le soin de tant d’affaires, le cardinal Gotti ne cessa jamais d’écrire contre les ennemis de l’Église. En 1734, il fit paraître son traité : De eligenda inlcr dissenlientes christianos sententia seu de vera inler christianos religione eligenda. Liber adversus Joannem Clcricurn reformata-, al ainnt, religionis hominem, in-8°, Rome, 1734 ; Ratisbonne, 1740 ; Vienne, 1749, avec les thèses soutenues par le P. Keri, S. J. L’occasion de ce nouvel écrit du cardinal Gotli fut le traité que fit paraître Jean Le Clerc, écrivain prolestant de Hollande, sous le titre : Du choix il’un sentiment. Ce livre avait été ajouté à la nouvelle édition du traité de Grotius : De verilale religionis christianrc liber, in-8°, Amsterdam, 1709. Dans cet écrit, l’Église telle que les protestants l’avaient faite, surtout d’après les doctrines de Calvin, était donnée pour la véritable Église de Jésus-Christ. L’ouvrage du cardinal Gotti détruit ces prétentions et, en quatorze chapitres, expose les caractères de la véritable Église. Peu après la publication de cette réfutation, il fit paraître une autre démonstration de la vérité de la religion chré tienne sous ce titre : Veritas religionis christian.se et librorum, quibus innilitur contra atheos, polyiheos, idololalras, mohammedanos et Judseos demonslrala, 12 in-4°, Rome, 1735-1740 ; 2 in-fol., Venise, 1750. Cette édition contient en plus les Colloquia theologico-polemica et le De eligenda. Le cardinal Gotli jouissait de la faveur du roi de Sardaigne, Victor-Amédée, etde son fils Charles-Emmanuel ; il fut également directeur de laprincesseClémentineSobieski. Pendant le conclave de 1740, qui fit monter sur la chaire de saint Pierre Benoît XIV, le cardinal Gotti contracta une maladie de poitrine, qui bientôt dégénéra. Néanmoins il ne se relâcha pas de son assiduité à l’étude, et c’est dans la dernière période de sa vie qu’il commença

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