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ÉON DE L’ÉTOILE — ÉPHÈSE (CONCILE D’)


C. J. von Hefele, Conciliengeschichie, 2e édit., Fribourg-en-Brisgau, 1886, t. v, p. 516-517 ; trad. Delarc, Paris, 1872, t. VII, p. 310-312 ; I. von Dollinger, Beilràye zw Sektengeschichte des Mittelalters, Munich, 1890, t. i, p. 102-104. Cf. Ch. Molinier, Revue historique, Paris, 1894, t. liv, p. 158-161 ; A. de la Borderie, Histoire de Bretagne, Rennes, 1905, t. III, p. 210-214 ; H. Haupt, Realencijklopàdie Leipzig, 1875, t. v, p. 575-576 ; Th. de Cauzons, Histoire de l’inquisition en France, Paris, 1909, t. i, p. 237-240.

F. Vernet.

    1. ÉPHÈSE (CONCILE D’)##


ÉPHÈSE (CONCILE D’), IIP œcuménique, 22 juin-fin octobre 431. — I. Préliminaires. II. Histoire. III. Actes. IV. Principales décisions, texte et commentaire. V. Œcuménicité du concile. VI. Légitimité de la condamnation de Nestorius.

I. Préliminaires.

Leconcile d’Éphèse, III « œcuménique, fut occasionné par la doctrine de Nestorius sur le mystère de l’incarnation. A peine installe sur le siège de Constantinople (10 avril 428), ce personnage, tout pénétré des principes de l’école d’Antiochc, et particulièrement des opinions théologiques de Théodore de Mopsucste, dont il fut très proljablement l’élève, ne se contenta pas de manifester un zèle farouche contre les hérétiques déjà condamnés. Il crut découvrir l’hérésie au sein même de l’Église, et partit en guerre contre l’appellation de Œotoxo ;, mère de Dieu, que depuis longtemps, pasteurs et fidèles, savants et ignorants étaient habitués à donner à la Vierge Marie.

En attaquant cette expression « mère de Dieu » , Nestorius ne faisait que suivre l’exemple de Théodore de Mopsuestc, qui avait dit avant lui : « Marie a enfanté Jésus, mais non pas le Logos ; le Logos a toujours existé ; il est sans commencement, quoiqu’il ait habité d’une manière toute particulière dans Jésus. Marie est donc, à proprement parler, la mère du Clirist et non pas la mère de Dieu. On ne peut l’appeler mère de Dieu que d’une manière figurée et parce que Dieu était d’une manière toute particulière dans le Christ. » Mansi, Concil., t. ix, col. 237 ; P. G., t. Lxvi, col. 993. Ce passage de Théodore exprime en substance toute la doctrine de Nestorius, car, en ce qui concerne la manière de concevoir l’union de la nature divine et de la nature humaine en Jésus-Christ, il n’y a point de différence entre le maître et le disciple. On le savait déjà, non seulement par saint Cyrille, mais aussi par les liomélies, lettres et fragments d’écrits divers qui nous restaient de Nestorius et que, il y a quelques années, F. Loofs avait publiés sous le titre : Xestori(infi, Dic Fragmente des Nestorius, Halle, 1905. On le sait encore mieux, depuis qu’on a édité un ouvrage entier de Nestorius conservé dans une traduction syriaque. Cet ouvrage, intitulé : Le Hure d’IIéractide de Damas, a été comiiosé en grec et terminé en 451, au moment où l’auteur n’avai t plus que quelques jours à vivre. Le texte de la traduction syriaque a été publié par P. Bedjan, Paris, 1910 ; F. Nau en a fait paraître une traduction française : Le Hure d’Hiraclide de Damas, Paris, 1910. Nestorius y expose et y défend longuement sa doctrine christologique contre saint Cyrille et le concile d’Éphèse. S’il ne faut point le croire, lorsqu’il proclame son accord avec Flavien de Constantinople, Le livre d’JIéraclide, trad. Nau, p. 310, 326, 371, 374, et avec le pape saint J>éon, ibid., p. 298, 302, 330, on ne peut, par contre, si on a eu la patience de lire le Livre d’nérarlidc, qn’c{rc de son avis, lorsqu’il affirme sa solidarité doctrinale avec Théodore de Mopsneste. Ibid., p. 291 293. Sa tliéorie de l’union des deux natures peut se résumer ainsi :

1° Comme il n’y a pas de nature complète sans personnalité (Nestorius dit : sans »rnsùpon naturel) et que le Verbe s’est uni à une nature humaine complète, il s’ensuit qu’en Jésus Christ la nature humaine

conserve sa personnalité et qu’elle subsiste en elle-même, non dans le Verbe.

2° L’union de la personne du Verbe et de la personne humaine est volontaire, c’est-à-dire se fait par la volonté, par la compénétration amoureuse des deux, de telle manière qu’il n’y a plus qu’une seule personnalité juridique. Il y a don mutuel de chaque personne l’une à l’autre, et comme un prêt et un échange des personnalités. L’ne phrase qui revient souvent dans le Livre d’Héraclide est celle-ci : « La divinité se sert du prosôpon de l’humanité et l’humanité de celui de la divinité. » Cet échange des personnalités (prosôpons) permet d’affirmer que les deux personnalités naturelles aboutissent à une personnalité morale unique, que Nestorius appelle le prosôpon d’union : « La divinité se sert du prosôpon de l’humanité et l’humanité de celui de la divinité ; de celle manière nous disons un seul prosôpon pour les deux. » Le livre d’Héraclide, p. 212-213. Cette personnalité artificielle et purement dénominative est désignée par les termes de Fils, de Christ, de Seigneur. C’est pourquoi Nestorius affirme souvent qu’il n’y a qu’un seul Christ, qu’un seul Fils, qu’un seul Seigneur ; mais chacun de ces mots éveille dans la pensée nestorienne l’idée des deux natures-personnes, la divine et l’humaine, qui demeurent distinctes et sans confusion.

3° Du moment que la personne du Verbe, d’une part, et la personne de l’homme, d’autre part, continuent à subsister chacune en elle-même, que leur union n’est que morale et non physique et substantielle oij hypostatique, il s’ensuit qu’on ne peut attribuer à Dieu leS’erbe les propriétés et les actions de la personne humaine, et vice versa. On ne pourra pas dire de Dieu le Verbe qu’il est né de la Vierge Marie, qu’il a soufiert, qu’il est mort. On ne pourra pas appeler Marie OîoToy.o ; au sens propre du mot et sans faire des réserves. En un mot, ce que nous appelons la communication des idiomes ne doit pas se faire par rapport à Dieu le Verbe. Cette communication n’est permise que par rapport aux termes qui désignent le prosôpon d’union, c’est-à-dire par rapport aux mots Christ, Fils, Seigneur. Dès lors, on pourra très bien dire que Marie est mère du Christ, /.piaToroxo ; , parce que cenomdeChrist fait penser àla fois aux deux natures qui sont unies, à la nature divine et à la nature humaine, et tout naturellement l’esprit attribuera, dans ce cas, la naissance à la nature humaine. On affirmera aussi que la Vierge a enfanté le Fils, le Seigneur, que le Christ, le Seigneur, le h’ils est Dieu et qu’il est homme, parce que chacun de ces termes désigne à la fois les deux natures complètes, les deux personnes qui se sont fait, par l’union, mutuellement don de certains titres les dénommant toutes les deux, à cause de leur intime union.

Ces idées maîtresses de sa théorie christologique, Nestorius les expose et les répète à satiété dans le Livre d’IIéractidc, et on les retrouve sans peine dans les autres écrits qui nous restent de lui. On voit ais.’ment ce qu’une telle conception a de contraire au dogme catholique, tel qu’il a été clairement défini dciiuis. et quel danger elle présentait pour la foi. à cause de sa subtilité et de la terminoloyie vague, imprécise, fallacieuse, dont elle s’enveloppait. Nestorius parle souvent comme un orthodoxe, lorsqu’il s’agit de l’union des deux natures en une personne, mais son orthodoxie est))urenient verbale, car il n’entend pas l’unique prosôpon d’union dans le sens catholique. Saint Cyrille n’a point faussé sa pensée en lui attribuant tout ce qu’on entend habituellement sous le nom de nestorianisme : négation de la maternité divine de Marie, union extrinsèque et morale, non physique, substantielle et hypostatique de la nature divine et de la nature humaine dans