Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 5.djvu/646

Cette page n’a pas encore été corrigée
1263
1264
EUCHARISTIE AU XIP SIÈCLE EN OCCIDENT


c’odilication qui s’opère, n’onl pas le mol cucharislia ni le mot transsubstanliatio. Citons la Sumina Abel de Pierre le’Chantrc (ms. de Bruges, 234), les Distinciiones de Garnier de Rochefort (ms. de Troyes 32 et 392), l’une~>et l’autre encore inédites ; ]c Liber in distinctinnibiis distinctioiuim theologicaium d’Alain de Lille, P. L., t. ccx, col. G85. Pierre le Chantre a quelques lignes sur le corps du Christ au mot Corpus.

b. Canonistes. — Pour clore toute la série des maîtres ont l’enseignement intéresse l’histoire de l’eucharistie, il faudrait revenir aux canonistes qui se mettent en devoir de commenter le Décret de Gratien. Leur œuvre de commentateurs présente des chefs d’intérêt variés, dont le moindre n’est pas le reflet que prend chez eux l’enseignement théologique. A leur tour, les canonistes subissent l’influence des théologiens.

Le fait est surtout sensible dans Huguccio qui a beaucoup de passages (dans le De consccrationé) inspirés par Hugues de SaintVictor ou littéralement empruntes au De sacramentis ; cette partie est plus longue chez Huguccio que chez les autres (ms. de Cambrai, 612, fol. 351 r° sq.). Avant lui, Etienne de Tournai a aussi beaucoup d’emprunts à l’enseignement théologique. Cf. op. cit., p. 273, 274. Schulte le reconnaît dans son histoire du droit canonique. Op. cit., p. 135. Mais l’œuvre est encore inédite, comme celles de beaucoup d’autres de ses collègues ou prédécesseurs. Quelques textes intéressants peuvent se lire dans les notes de l’étude si fournie de Gillmann : Die Sicbenzahl der Sacran-ienie bei der Glossaloren des Graiianischen Dekreis, dans Der KaihoUk, 1909, t. II, p. 182 sq. D’autres, comme quelques-uns de Sicard, Huguccio, ’etc., se rencontrent dansuneétude du même auteur sur la transsubstantiation chez les canonistes du xiie siècle. Der Katholik, lQ08, t.u, p. 417 sq.

Parmi les textes déjà imprimés et par suite plus accessibles au lecteur, Rufin, pie Summa Decrclorum des Magisler Rufinus, édît. Singer, Paderborn, 1902, etÉtien>^ « de 10XTiiB.i, Die Sumniades Stephanus Tornacensis ùber das Decreium Graliani, édit. von Schulte, Giessen, 1891, consacrent quelques pages à notre sujet. Le premier est désespérément bref, op. cit., p. 144145, le second est plus développé, p. 551-560 ; il divise en trois sections toute la dist. II de Gratien : la forma (c’est-à-dire matière et forme), le respect dans la réception et la manière de traiter ce sacrement, le triple contenu de ce mystère, p. 551. Giraud le Cambrien fera écho à cette division dans la Gemma ecclesiastica, i, 6, 9, etc. Voir plus loin. Notons ses formules sacramentum, sacramentum et res, res tantum, p. 552, où il renvoie aux ouvrages des théologiens, et son exégèse de la confession de Bérenger, can. 42, p. 555, à rapprocher de Roland, op. cit., p. 233-234 ; il se refuse à s’étendre sur les sublimités de la conversion, can. 73 : vcrba ista, fateor, parvitatem meam magis ad terrorem admiratioiiis quam ad diligenliam cxposilionis invitant, p. 557 ; mais au can. 82, il ouvre une longue dissertation sur l’union du Christ avec son Père, p. 557-561.

Quant à Etienne de Tournai, op. cit., p. 269-276, il emprunte beaucoup à Rufin, ici comme ailleurs. Il cite un bon nombre d’avis des théologiens, par exemple, p. 273, et emploie fréquemment le mot transsubstantiatio, tianssubstaptiare, p. 273, 274, etc., qu’il n’a pas rencontré chez Rufln. Sur les accidents il rectifle un usage courant qui risquait de réduire à trois les accidents qui persistent : et nota quod cum principaliter dici soleat in specie panis et vint tria accidentia post consecrationem remanere, scilicct, colorem, saporem, odorem, rémanent tamen et alia ut in pane rotimdiias, in utroque vis satiandi, si quantitative sumatur, et multa alia, can. 31, p. 272. Ces quelques exemples

peuvent suflire pour montrer la marche progressive de la théologie de l’eucharistie chez les canonistes comme chez les théologiens. En attendant la publication des Sommes, gloses et commentaires inédits, on pourra utilement consulter les gloses du Décret reproduites dans la marge des diverses éditions, par exemple, celle de 1505, Paris, qui a beaucoup de Jean de Fænza (vers 1190), ou celle de Lyon, 1C34 ; beaucoup sont dues à Jean le Teuton qui a conservé celles de ses prédécesseurs ou ajouté de nouvelles, avant le concile de Latran, par exemple, De consecralione, II, c. i, 2, 71, 72, 77, 94, etc. Vers la fin du siècle surgissent un certain nombre de recueils de pure compilation : ils méritent d’être signalés comme les témoins de la vogue dont jouissent les traités de Hugues de SaintVictor et de Pierre Lombard ; ce sont d’abord quelques résumés de ces auteurs comme les n. 560 de la bibliothèque de l’université de Gand (deux abrégés), les résumés du jl/ag^/s/er, parBandînus, P. L., t. cxcii, col. 965-1112, par Gandulphe de Bologne, ms. Heiligenkreuz 142 ; Turin, lat. A. ô7, etc. Puis avec le Spéculum universale de Raoul l’Ardent déjà cité, il faut mentionner ce recueil qui voyage jusqu’à Sidon en Palestine (ms. du Vatican, lat. 1345, fol. 73-74 ; voir aussi Fournier, art. cit., de la Bibliothèque de l’École des chartes, 1897, t. lviii, p. 664), et d’autres longs traités théologico-canoniques enfouis dans les bibliothèques.

3. Sources diverses sur les Sommistes, anecdotes, polémiques. — Ajoutons encore à cette liste quelques auteurs qui ne rentrent pas dans la catégorie des Sommistes, mais dont les œuvres semées d’anecdotes, de souvenirs personnels, de discussions théologiques, où l’exemple escorte la théorie, per exempta pariter et precepta, nous donnent de précieuses informations sur les maîtres et les doctrines des grandes écoles. Ce sont avant tout Giraud le Cambrien (1147-1223 environ) et Césaire de Heisterbach. Le premier, ancien étudiant de Paris, qui a connu Pierre le Mangeur et d’autres docteurs, nous laisse des pages toutes remplies de théologie et de droit canon. Sa Gemma ecclesiastica, surtout, présentée par l’auteur lui-même à Innocent III en 1197, De rébus a se gestis, III, 18, dans les Giraldi Cambrensis opéra, édit. Brewer, Rerum britannicarum medii sévi scriptores, Londres, 1862, t. XXI a, p. 119, dans une dédicace plutôt originale (présentant cdii libras, sed nos libros), eut un immense succès auprès du pape et de la cour romaine. Voir surtout les c. i, 1-11, 40-52, etc. ibid., t. xxi b, p. 12, 115, etc.

Le célèbre Césaire de Heisterbach, qui écrit un peu plus tard, fournit aussi quelques bons renseignements : on y assiste, entre autres, à l’introduction des doctrines de l’école dans le clergé paroissial, les cloîtres et le troupeau des fidèles. Voir la dist. IX qui résume d’abord l’enseignement des docteurs sur l’eucharistie, puis le confirme, comme Girauld, par des exemples. Prologus, édit. J. Strange, Cologne, Bonn, 1851, t. ii, p. 164 sq.

A la série des exposés systématiques des Sentenciers se rattachent les écrits des polémistes qui s’en prennent, souvent avec une injuste acrimonie, aux idées des théologiens dialectiques. Il faut citer ici, outre Gautier de SaintVictor, Contra quatuor labifrintos Franciæ, voir plus loin, qui écrit peu après le concile de Latran (1179), la controverse de Folmar, de l’abbaye de Triefenstein (Petra Stillans) dans le diocèse de Wurzbourg, le long du Main. Elle se produit vers l’année 1160 et prend fin peu après 1164, puisque Éberhard I', archevêque de Salzbourg, est mort depuis peu (1164), quand Folmar écrit sa rétractation. Episl., V, P. L., t. cxciv, col. 485 ; cf. Hauck, Kirchengeschichle Deutschlands, 1903, t. iv, p. 443-