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EUCHARISTIE D’APRÈS LES PERES


l’unité. Ibid., III, iii, 12, col. 414 C’est tout et c’est peu. Le pain et le vin sont des symboles qui désignent et donnent le Christ, ils doivent donc le contenir de quelque manière, mais l’auteur ne dit pas laquelle. Il fait bien remarquer qu’il faut dégager l’intelligible pour contempler sa divine beauté, mais il ne soulève même pas le coin du voile. Et son interprète, Pacliimère, est tout aussi discret ; il parle bien des symboles, mais de symboles qui ne sont pas vides de réalité ; il fait même allusion à la conversion. « Tandis que la plupart ne s’arrêtent, dit-il, qu’à la contemplation des symboles divins, sans aller au delà, le hiérarque porte la vue de son esprit jusqu’aux prototypes de ces symboles, qui sont le corps et le sang mêmes du Seigneur, croyant que les dons offerts (le pain et le vin) ont été changés en eux (en ce corps et en ce sang) par l’Esprit-Saint, TiioTê’Joùv on y.ai ta 7rpoîC£j|j.eva sic èy.sïva jj.£Teê).viOr|(7av tm àYi< ; > xal Ttav-toupyû > nvejixati. » De eccl. hier., III, ii, col. 453.

8 » Succès de la docliinc eiicharisliqiie de saint Cyrille.

— L’argument tiré de l’eucharistie en faveur du dyophysisme de l’incarnation devait être repris par Éphrem, patriarche d’Antioche de 527 à 545, mais sans succès ; il était, en effet, appelé à disparaître. La doctrine eucharistique de saint Cyrille resta, au contraire, traditionnelle parmi les grecs. Une fois que le concile de Chalcédoine eut été reconnu et accepté sous l’empereur Justin († 527), Léonce de Byzance(t vers 543) fit triompher l’enseignement de saint Cyrille, dans ses divers écrits contre les monophysites et les nestoriens. De qui croient-ils recevoir le corps et le sang, demande-t-il à ceux qui pensent comme Théodore de Mopsueste ? Cont. incor. et nest., iii, 43, P. G., t. lxxxvi, col. 1385. Pour lui, c’est bien la propre chair et le propre sang du Christ, la chair qui a été crucifiée, le sang qui a été versé, que l’on reçoit dans la communion mystique du pain de l’eucharistie, tï-jv [iuotixyiv TOÛ Tr)ç E’jyapiTTÎa ; apro-j |X£Ti).r)’! /iv, îôt’a ; crapxôç StâSoCTiv slvat SEixviicriv, Adv. nest., vii, 3, col. 1765 ; chair devenue spirituelle après la résurrection pour nous communiquer une énergie capable de nous ressusciter un jour. Ibid., v, 22, col. 1744. Mais Léonce n’a pas abordé la question de la conversion proprement dite.

Un peu plus tard, dans le même vi'e siècle, Eutychius, patriarche de Constantinople de 552 à 582, se sert encore du mot antitype pour désigner le pain et le vin avant la consécration, et déclare qu’à la cène, le Christ s’est mêlé à l’antitype, à(X(j.î ?a ; iautov Tôj àvTiT’jTto). De paschate ci eucharistia, 2, P. G., t. LXXXVI, col. 2393. Il veut que personne ne doute de la présence réelle du corps incorruptible du Christ depuis la résurrection, et immortel, et saint, et vivifiant, et du sang du Seigneur, introduits dans les antitypes par les prêtres. Que personne ne doute que ce corps « se trouve tout en tous. » Ibid. A côté de cette affirmation du réalisme, conforme à la tradition, cette expression nouvelle, è|ji.|i[|aç, semblerait écarter l’idée d’une |j.îTagoXri ou d’une [xE-aTtoiriO-c ;. En l’employant, Eutychius n’a d’autre but que de montrer que le corps du Sauveur est tout entier et sans division dans l’eucharistie ; il ne prétend pas indiquer le mode précis de cette présence.

Des affirmations semblables se retrouvent dans saint Sophrone de Jérusalem († 638), saint Maxime le Confesseur († 662), deux adversaires du monothélisme, et dans saint Germain de Constantinople († 733), l’adversaire des iconoclastes. Steitz reconnaît en eux des témoins du réalisme. Le réalisme, en efïet, continue à être le point central de l’enseignement eucliaristique chez les Pères grecs. Quant à la théorie de la conversion, elle reste dans l’état où elle se trouvait au ve siècle ; l’absence de toute attaque sur ce

point particulier explique pour une part leur silence. D’autres sujets, imposés par les circonstances, sollicitent leur attention et leurs efforts ; de telle sorte que la théologie de l’eucharistie ne fait plus de progrès en Orient. Et lorsque saint Jean Damascène résume la pensée grecque orthodoxe, il est un écho fidèle de la tradition ; s’il n’introduit pas des éléments nouveaux, il montre du moins ce qui a été éliminé et ce qui a été conservé de la doctrine de ses prédécesseurs. A ce titre, il doit être consulté.

Voir toutefois L’eucharistie chez les nestoriens au vie siècle (d’après les traités syriaques de Mar Qiore), dans le Bulletin de littérature ecclésiastique, 1907, p. 77-79. La doctrine de Théodoret sur la permanence du pain et du vin dans l’eucharistie a ainsi persévéré chez les nestoriens.

9 » Saint Jean Damascène (f vers 753). — Un premier point sur lequel saint Jean Damascène nous renseigne, c’est que des expressions telles que àvTi’-jTta n’ont été employées jadis que pour désigner le pain et le vin avant leur consécration. De fide orth., iv, 13, P. G., t. xciv, col. 1153. Lui-même s’en sert, non pour laisser croire que les symboles eucharistiques ne sont pas vraiment le corps et le sang du Christ, mais pour marquer qu’ils sont l’image de l’avenir : actuellement ils nous font participer à la divinité du Sauveur, mais ils annoncent pour plus tard la vision intuitive. Ibid., col. 1153. Reprenant la formule de Théodore de Mopsueste et de Macarius Magnés, qu’il ne nomme pas, il écarte donc toute équivoque et dit : « Le pain et le vin ne sont pas une figure du corps et du sang du Christ, mais le corps même divinisé du Sauveur, puisque le Seigneur a dit : Ceci est mon corps, et non : ceci est la figure de mon corps ; Ceci est mon sang, et non : ceci est la figure de mon sang. » Ibid., col. 1148. Pour qu’il en soit ainsi, il faut évidemment un acte de la toute-puissance divine ; mais le Verbe, qui a tout créé, ne peut-il pas le produire ? oj SOva-a : -o/ aptov éa’jToO gû>j.x Tioir^nai, y.al tûv olvov v.a tÔ -jôcop aî[xa ; Ibid., col. 1140. Et si l’on demande comment le pain et le vin deviennent le corps et le sang du Christ, c’est, dit-il, par une intervention du Saint-Esprit semblable à celle qui a eu lieu dans l’incarnation, ibid., col. 1141, et qui dépasse toute parole et toute pensée. C’est vraiment le corps uni à la divinité, le corps né de la sainte Vierge, qui est présent, parce que le pain et le vin sont convertis au corps et au sang du Christ, oxt aÙTo ; ô aproç y.a : oîvo ; [xêTaTco’.oûvTai et ; <jài|j.x xat ataa 0£oC. Ibid., col. 1144. c( Si vous voulez savoir comment, qu’il vous suffise d’apprendre que c’est par l’opération du Saint-Esprit, et de la même manière qui a permis au Seigneur de prendre chair dans le sein de la sainte Mère de Dieu : nous ne savons rien déplus, sinon que la parole de Dieu est véritable, et efficace, et toute-puissante. » Ibid., col. 1145. Présence réelle du corps historique du Christ et véritable conversion, telles sont les deux vérités nettement formulées par saint Jean Damascène : il ne cherche pas à sonder ces mystères, il les affirme tout simplement, en rappelant le fait de l’incarnation et en s’appuyant sur l’intervention même de Dieu.’De même, ajoute-t-il, que naturellement le pain par la manducation, le vin et l’eau quand on les boit, se changent au corps et au sang de celui qui les mange et les boit, de telle sorte qu’ils ne deviennent pas un corps différent de celui qui existait auparavant, de même le pain, le vin et l’eau, préparés d’avance, se convertissent, par l’invocation et l’intervention du Saint-Esprit, au corps et au sang du Christ, et ils ne sont pas deux (corps), mais un seul (corps) et le même (celui de Jésus-Christ). » O’jtiù ; ô tîjç TtpoSiædo ; ap : o ;, o-vo ; -i, x « ’t -j^uip, 6cà xrç èTrixXïiæa) ; y.al èn’.foiTiqo-Eto ; toO â-j-io-j