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EUCHARISTIE D’APRÈS LES PÈRES


le pensons pas ; car les fidèles, étant initiés au mystère eucharistique, savaient à quoi s’en tenir sur la doctrine traditionnelle et sur la foi en la présence réelle, toujours sous-entendue par le célèbre catéchiste alexandrin, et très souvent objet de sa part d’un rappel ou d’une allusion directe ; ils savaient aussi avec quelle facilité leur maître.se plaisait à allégoriscr. Or, dans ces passages, Origène allégorise et parle de tout autre chose que de l’eucharistie. « Le pain et le vin de la cène, observe Mgr Batiffol, d’accord sur ce point avec M. Struckmann, L’eucharistie, p. 189, sont pris par lui pour une figure, mais la figure de tout autre chose que le corps et le sang du Christ, la figure de sa doctrine. Il ne faut donc pas chercher ici une théorie de la présence réelle, pas plus que nous n’en avons cherché dans les développements allégoriques analogues de Clément. » Il convient de se rappeler aussi qu’en allégorisant de la sorte, Origène, comme il en a fait l’aveu, esquissait une théorie essentiellement différente de l’enseignement traditionnel et ordinaire sur l’eucharistie, enseignement qu’il connaissait et qu’il approuvait. Et tout ce qu’il a dit sur l’eucharistie est le langage d’un réaliste, et nullement celui d’un symboliste. Harnack le reconnaît et ajoute qu’au sujet de l’eucharistie, il n’y a jamais eu de purs symbolistes. Dogmengeschichte, t. i, p. 436-437.

3. Saint Denys d’Alexandrie.

Après Origène, deux maîtres se succédèrent au Didascalée avant de monter l’un après l’autre sur le siège d’Alexandrie. Du premier, Héracléas, nous ne savons rien, rien de lui ne nous étant parvenu. Du second, saint Denys, Eusèbe nous a conservé quelques fragments de lettres au pape Xyste, parmi lesquels celui-ci relatif à la communion. Il s’agit d’un Alexandrin qui, s’étant aperçu que le baptême qu’il avait reçu n’était point le baptême catholique, demandait à être baptisé, ce à quoi saint Denys se refusa de donner suite, vu la longue participation de cet homme aux sacrements et notamment à la communion, décrite ainsi : e’j/apif7TÎac yàp Èua> !.o-J<TavTa, xa quve ; rtepO£i’?a|j.Evov tÔ’A|j.v)v, /tat TpaTtlÇï] uapaiTTâvTa, xal -/eïpaç s’iç Û7ro50 ; (Y)V ttiÇ âytaç rpoçr, ; TTpoTsfvavTa, xal TaÛTï)v y.aTaSelàpievov, -/.aX roO f7(x>[i.xtoz xa TOÛ aîjxaTo ; to-j Ivupîo-J -qp.MV’IriffoO XptaTOÛ [J, 5Ta(7xôvTa îxavM XP’^'" ! ’- Eusèbe, H. E., vii, 9, P. G., t. XX, col. 656. Denys est aussi un témoin de la conservation de l’eucharistie pour les malades. Voir t. IV, col. 427.

A Rome.

Saint Hippolyte, voir A. d’Alès,

La théologie de saint Hippolyte, Paris, 1906, p. 147-150.

III. Au iv"’SIÈCLE, EN Orient. — Les usages liturgiques concernant la communion, auxquels saint Denys fait une allusion si claire, dans le texte que nous venons de rapporter, sont bien connus : le fidèle s’avance, tend la main droite pour y recevoir le pain consacré et lorsque l’évêque le lui présente, en disant : Corps du Christ, il répond : Amen ; lorsque le diacre lui présente le calice en disant : Sang du Clirist, il répond également : Amen, et boit à la coupe. Le langage des auteurs ecclésiastiques continue, lui aussi, à être conforme aux usages de la liturgie. Mais, sous l’influence plus ou moins accentuée des Alexandrins, les termes de symbole, de figure, de type, se retrouvent ; d’autres mêmes paraissent, tels que àvriruTrov et w|j.oi’quj.a, et ils désignent, selon l’usage d’alors, un signe auquel est jointelaréalitéqu’il signifie, etnon un signe vide de toute réalité. De tels termes pouvant prêter à l’équivoque ou donner lieu à des malentendus, ils seront ou expliqués ou même écartés. Mais en attendant que leur sens se précise ou que leur emploi cesse, un grand progrès se manifeste dans l’exposition du dogme eucharistique ; la présence réelle est toujours au premier plan dans un relief incontestable ; le problème même de la conversion est abordé ; la conversion est

affirmée en des termes variés, ce qui prouve que la langue théologique n’a pas encore choisi et fixé un mot spécial pour l’exprimer ; mais ces termes eux-mêmes signifient d’une façon au moins équivalente ou implicite l’idée de conversion substantielle ou de transsubstantiation.

En Egypte.

1. Didyme l’Aveugle (j- 395), qui

occupa pendant un demi-siècle l’école catéchétique d’Alexandrie et qui compta parmi ses élèves Rufin et Jérôme, ne semble pas s’être servi comme ses prédécesseurs des mots de symbole et de figure, ou du moins, ce qui nous reste de ses œuvres n’en porte pas trace. Parlant de la pâque, il dit à un endroit : < Nous la célébrons chaque année, chaque jour ou plutôt à chaque heure, participant au corps et au sang du Christ, |XET£/_ovTe ; lo-j croiij.aTo ; xa’iToC y.ïy.xxoç a-jto-j. Ils savent ce que je veux dire, ceux qui ont été jugés dignes du suprême et éternel mystère. " De > piritu Sancto, III, 21, P. G., t. xxxix, col. 905. D.dyme dit encore que le Seigneur est le pain de vie et que les fidèles se nourrissent de ses chairs et de son sang, qui sont un aliment et une boisson véritables. Inpsalmos, col. 1336. Cf. G. Bavdy, Didyme l’Aveugle, Paris, 1910, p. 151-154.

2. Sérapion de Thnniis.

L’eucologe de Sérapion de Thmuis († 358), découvert en 1894, est le texte liturgique le plus ancien que nous possédions ; il renferme le canon de la messe où se trouve le mot (o[j.o ; (.)[j.3 ;. I A toi (Seigneur), est-il dit dans l’anamnèse, nous offrons ce pain, figure du corps du Monogène. Ce pain est la figure du saint corps… Et nous offrons ce calice, figure du sang. » Le pain est (oij.ot’wij.a tod (ytx>j.a-co :, le vin (o[xoi’(i)|j.a TO-j a’.'|j.aToç, et le sacrifice ojp.oiufjia toO ûavirou ; c’est l’équivalent de (j’jij.gc/Àov ou eï-z-mv qui se trouve dans Eusèbe de Césarée, et de àvTÎTjnov, dont parle Eustathe d’Antioche. Il est à remarquer que le pain et le vin sont qualifiés de symboles du corps et du sang avant la consécration ; et cela n’exclut pas le réalisme ; car, à l’épiclèse qui suit le récit de l’institution, on lit : « O Dieu de vérité, que ton saint Verbe vienne sur ce pain, pour que le pain devienne le corps du Verbe, "va Y6vi, Tatô apxoç o-Mua Toù Ao’you, et sur ce calice, pour que le vin devienne le sang de la vérité. » De plus, il est spécifié, dans la prière qui suit la communion, que ce pain et ce viii, devenus corps et sang du Christ, sont une v.otvtovia du corps et du sang, et un remède de vie, cpâpp.a/.ov Çai-riÇ. Cf. Funk, Didascalia et constit. apostolorum, Paderborn, 1906, t. ii, p. 173-179 ; Revue du clergé français, du l^idécembre 1909, p. 522-525.

3. Macaire l’Égyptien (f vers 395), contemporain et compatriote de Sérapion, nous apprend, dans une seule phrase de l’une de ses homélies, que le mot antitype doit s’entendre d’un symbole plein de réalité, que l’on participe à cette réalité cacliée qui paraît être du pain et que l’on mange spirituellement la chair du Seigneur. Parmi les choses, dit-il, que les rois et les prophètes de l’Ancien Testament n’ont pas sues, il y a celle-ci, c’est que èv t-^ È-/.x).r, (71a TcpotrcpIpETai apto ; xai olvoç, àvTETyTTOV zr^ç o-apxô ; a-JTOù xa oî [A£TaXa(J.êâvovTEç èx TOTJ (paivoixlvou apTO-j TrvsufJ-aTixMç Trjv o’ipv.a To-J Kupt’ou ÈTÔt’o-jTt. Homil., xxvii, 17, P. G., t. xxxiv, col. 705.

4. Saint Athanase († 373) ne parle pas plus de symbole ou de figure que Didyme. Plusieurs fois, dans ses Lettres festales, ayant à traiter du devoir pascal que les fidèles ont à remplir, il fait allusion au réalisme de l’eucharistie sans insister sur un dogme qu’il suppose connu. En voici quelques passages, celui-ci tout d’abord où il oppose l’usage chrétien à la coutume juive : Les Juifs, dit-il, célèbrent leur pâque en mangeant de la chair d’un agneau sans raison, nous aujourd’hui, cum Patris Verbum comedimus, cordium nostrorum