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ETHIOPIE (EGLISE D’^

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lui donænl une forme subtile, anthropomorpliique, d’Almeida, dans Beccari, t. vi, p. 123 ; à la suite de discussions des savants lettrés, en 1430, sur ce sujet, ZaraJacob fit une ordonnance imposant la croyance qui donne à Dieu une forme apparente ou image, malké, en l’appuyant sur la Genèse, i, 26 ; II Cor., xi, 7, qu’il interprète d’une forme ou figure visible, prototype de la forme humaine, donc anthropomorphique. D’autres, plus spiritjialistes, interprétaient le terme ga ? ou malké dans le sens de upôaeoTrov des théologiens grecs. Mais, à part ces rares exceptions, l’esprit abyssin, habitué à suivre plutôt les représentations de l’imagination que de la pure intelligence, donne à Dieu une forme perceptible, nébuleuse. On entend couramment appeler l’être divin Salim Sabë’ou l’homme noir, c’est-à-dire environné de ténèbres qui dérobent sàtace.

2. Sur la sainte Trinité.

Dans la représentation de ce mystère, l’imagination réaliste s’égare, ou vers la négation (Za Michaël et Aska, en 1430, sous Zara-Jacob), ou vers la confusion des trois formes ou personnes distinctes. Un abonna même, Barthélemi, sous Isaac (1414-1429), aurait afiiché cette hérésie grossière.

3. Sur le Verbe incarné.

La filiation éternelle du Verbe est admise sans conteste. Mais sur son incarnation, les Éthiopiens ont été entraînés à la suite des coptes, voir plus haut, col. 930, vers les erreurs du monophysisme, du monothélisme et de la théandrie, sans prendre part, toutefois, aux grandes controverses de Byzance. Leurs spéculations théologiques ont pris direction et se sont arrêtées sur l’onction incarnatrice, voir plus loin, avec toutes les absurdes conséquences des théopaschites, ou, au contraire, des fantaisistes qui ne font des souffrances et de la mort sur lesquelles est fondée la rédemption du genre humain qu’une simple fiction de comédie : bafakâdu ou voluntate ipsiiis, c’est-à-dire parce qu’il a voulu faire ainsi.

4. Sur la procession du Saint-Esprit.

Mêmes errements que les grecs et tous les Orientaux, à la remorque de Photius. Cependant, un exemplaire du symbole dans un vieux missel contenant wæm’na wald ou Filioque a été trouvé dans le monastère de Gundé^undé par le vénérable Mgr de Jacobis, mais gratté ultérieurement par un correcteur. Serait-ce un manuscrit sorti des écoles dominicaines de Néëbi ? Voir plus haut, col. 938.

5. Sur les anges.

Les Éthiopiens les divisent en neuf chœurs, comme les a classés saint Grégoire le Grand ; en ajoutant que Sa’itân ou Sâïtânaël (Satan) formait avec son armée angélique une dixième catégorie. Ils croient aux anges gardiens, malak-ekâbé, personnels, collectifs, régionaux, etc. La superstition s’y est mêlée et les fait confondre avec les bons génies, mdlaëkt’, auxquels elle offre des sacrifices ou immolations. .. Les Abyssins croient aux génies, Qini, gânên, agânén’, bons ou mauvais, qu’ils localisent dans les arbres, les souixes, les rivières, les foyers et dans les artisans en métaux, etc.

6. Sur l’âme.

La croyance commune est que l’âme des enfants est une étincelle de celles de leurs parents. D’Almeida, dans Beccari, t. vi, p. 130. C’est le traducianisme en vertu de la loi : cresciie et multiplicamini de la Genèse, qu’ils interprètent en ce sens.

7. Sur le péché originel.

Ils admettent la ruine du genre humain en Adam, mais sans se rendre compte de la nature et de l’effet de cette tare initiale. Ils divaguent, chacun au gré de sa fruste ou lubrique imagination, sur ce mystère de la transmission du péché en nous, et l’attribuent à un vice inhérent au sein de la mère par une interprétation toute charnelle du ps. Lvii^ 4, aliénait sunt peccatores a vulva, etc.

Au xix"e siècle, d’aucuns faisant école, à Gondar, avec un lettré nommé Arué, ont nié le péché d’hérédité et ont admis à la place la capacité de l’enfant, après sa conception au sein maternel, d’avoir déjà la conscience responsable et sujette à pécher. Voir Krapf, Gobât, etc. Fiction inventée à l’appui de l’opinion dite des trois naissances, pour le besoin de la régénération spirituelle. Voir plus loin.

8. Sur le sort des âmes après la mort.

Pas plus que les coptes et les autres Orientaux, les Éthiopiens ne croyaient et encore ne veulent croire que les âmes des justes qui en sont dignes entrent dans le ciel ou dans la jouissance de la vision béntiflque, sans aucun délai. Pour eux, elles vont provisoirement dans le sein d’Abraham, c’est-à-dire au paradis terrestre, en attendant la résurrection de leurs corps et le jugement dernier. Les âmes des criminels errent en divers lieux souterrains ou sous-marins. Le purgatoire n’avait pas lieu d’exister entre ces deux Siot ou enfers. Cependant toutes les Églises d’Orient ont, aussi bien que l’Église latine, l’usage d’offrir pour les défunts des prières et le saint sacrifice ; l’Église d’Ethiopie en particulier a pour ses morts un culte traditionnel, une pieuse obligation familiale si stricte qu’on se ruinerait en dépens plutôt que d’y faire défaut, c’est-à-dire d’un Tezear ou commémoration par des messes le 8 « et le 30 « jour après la mort, et puis, tous les ans ; de plus, selon leurs moyens, ils offrent des aumônes aux moines pour faire réciter le psautier de longs jours ; ils font des distributions de vivres aux indigents, etc., tout cela sans savoir, sinon instinctivement sous la troublante impression de craintes et d’inquiétudes inexpliquées, qu’il y a une juste colère vindicative à apaiser, une miséricorde à rendre propice en faveur de leurs défunts.

9. Sur les observances judaïques.

Ce point concerne uniquement l’Église d’Ethiopie, et le concile en a ordonné l’abrogation. Il s’agit principalement : a) de la circoncision, dont la coutume a persisté et dont le roi Glaodios (Claude), a excusé la pratique parce qu’elle est hygiénique et purement civile ; mais une crainte superstitieuse en fait une obligation ; b) la purification de quarante jours après la naissance d’uu’garçon et de quatre-vingts jours pour une fille, avant le baptême ; c) la distinction des viandes, permises ou prohibées ; d) l’observation sabbatine du samedi. Voir plu « haut. Zara-Jacob en rendit l’obligation très stricte, avec prescription de se réunir à l’église, le samedi comme le dimanche.

10. Sur la liste canonique des Livres saints. — Les Éthiopiens ont pris le canon des coptes sur les livres qu’ils regardent comme saints ou inspirés. Il est calqué sur le dernier canon des Constitutions apostoliques. Ils ajoutent aux livres de l’Ancien Testament : a) le Kufalé ou Petite Genèse ; b) le livre. d’Hénoch, malgré les énormités qu’on y lit ; c) le Pasteur d’Hcrmas ; d) l’Ascension d’Isaïe ; e) les III « et IV « livres d’Esdras ; /) les livres des Machabées tout différents des nôtres, voir Gad’la-Marcurios, et au Nouveau Testament, deux lettres et les huit livres de saint Clément (Constitutions apostoliques).

11. Sur les sacrements. — Le concile eut également à faire admettre par les délégués éthiopiens des réformes dans l’administration et l’usage des sacrements. Il fut constaté que théoriquement l’Église d’Ethiopie possédait les sept sacrements, mais que, dans la pratique, de graves omissions ou altérations s’étaient gUssées.

a) Baptême ou Tamkal’. — Un abus préjudiciable à nombre de nouveau-nés est le délai de quarante ou quatre-vingts jours, en vertu de la purification judaïque. Voir plus haut. Le baptême se fait par une triple immersion. La formule varie selon la diversité des