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ETHIOPIE (ÉGLISE D


concernant la propagande de reuniique de Candace et rapporté par le P. d’Almeida, dans Beccari, lier, œlh., t. V, p. 133, 142, est une assertion ultérieure, fantaisiste, sans aucun fondement ni aucun vestige dans la tradition cultuelle de l’Église d’Ethiopie. On sait, d’ailleurs, que Candace était la dénomination générale des reines de Mcroë. 2. Les Indes citérieures où saint Barthélémy prêcha sont en Asie, et le culte traditionnel de l’Éghse persane en fait foi. 3. De même, nul vestige dans les fêtes, les oflices, ni dans les monuments religieu.v, d’un titre spécial à la reconnaissance régionale, nul souvenir traditionnel ne fait mention du passage de saint.Matthieu dans le royaume d’Aksum. Les noms de Hirtacus et d’Iphigénie et les détails de la légende impliqueraient un contre-sens onomalogique et un alibi historique. Cf. d’Almeida, op. cit., p. 142.

L’identification des noms.16to7r ; a et "IvSia, faite sans y regarder de plus près, résulte du vague indéterminé de ces termes dans les auteurs des sept premiers siècles.

L’introduction du christianisme et la fondation de l’Église d’Ethiopie sont dues à saint Frumence ou Kedus Faramanaios, dit Villuminalenr ou Kasalé-Z )er/iâ/ !, dans les circonstances aventureuses et romanesques relatées par Rufm, II. E., 1. I, c. ix, édit. Cedrenus, t. i, p. 384, et substantiellement d’accord avec la légende d’Aksum. D’Almeida, op. cit., p. 136. Des rives de la mer Rouge, sans doute d’Adoulis, port et emporium importants depuis les Ptolémées, les deux frères Frumence et Édésius, d’origine phénicienne, furent emmenés captifs à la cour du roi d’Ethiopie, à Aksum (Axiimitæ, Auximilæ des auteurs grecs et romains), capitale alors à l’apogée de sa gloire. L’auteur du périple de la mer Erythrée, qui la visita en l’an 67 de notre ère, rapporte que l’on y parlait couramment la langue grecque. Les deux prisonniers gagnèrent les faveurs du prince et furent chargés par lui d’offices de confiance et même de l’éducation de ses fils, héritiers présomptifs du trône. Ils profitèrent de l’influence et de l’ascendant que leur donnait une si haute situation pour initier les gens de la cour à la connaissance de Jésus-Christ, pour faciliter aux marchands grecs qui fréquentaient le pays l’exercice de leur religion, et pour gagner peu à peu des adeptes à l’Éghse chrétienne.

Au terme de leur service près des princes, ils obtinrent la liberté de reprendre la route de leur patrie. Ils prirent congé de la cour et s’en revinrent à Alexandrie. Pendant qu’Édésius alla jusqu’à Tyr revoir leur famille, Frumence resta à Alexandrie pour renseigner complètement saint Athanase sur les dispositions des Éthiopiens, si propices à l’expansion de l’Évangile. Le patriarche ne pouvait trouver un missionnaire plus apte à cet apostolat que Frumence lui-même. Il lui conféra les saints ordres et le sacra évêque de l’Église nouvelle qui allait s’ajouter aux vastes conquêtes de la « prédication de saint Marc » . Tout ce récit, ajoute Ru fin, est dû à Édésius lui-même, qui, lui aussi, devint prêtre de l’Église de Tyr.

Frumence, officiellement charge de l’évangélisation du royaume d’Aksum, s’y rendit et y fut accueilli à bras ouverts avec les auxiliaires que saint Athanase dut lui donner pour l’aider aux grands travaux de l’enseignement et de l’éducation des âmes, selon l’Évangile. Les conversions furent promptes et nombreuses. Le saint évêque trouva même des âmes d’élite déjà mûres pour les ordres sacrés et qui collaborèrent à l’essaimage tout autour de la ruchemère d’Aksum. Selon la légende éthiopienne, d’Almeida, op. cit., p. 136, ces événements s’accomplirent sous le règne des deux frères Abraha et Atsabaha

(Aizanas et Saïzanas des inscriptions ; Éla-Auda et Éla Azguagua du synaxaire ou martyrologe éthiopien), en l’an 333 du calendrier éthiopien, correspondant à l’an 341 du calendrier latin.

Ces succès eurent du retentissement jusqu’à Byzancc et y donnèrent occasion à un document ofiiciel qui confirme le fait de cette mission extraordinaire en Ethiopie confiée à saint Frumence par snint Athanase, patriarche d’Alexandrie. Il s’agit d’une lettre adressée en 356 par l’empereur arien. Constance, aux rois d’Aksum Aïzanas et Saïzanas, Apoloyia ad Constuntium, P. G., t. xxv, col. 636, dans laquelle il les met en garde contre Frumence, évêque d’Aksum, sacré et délégué naguère par Athanase et par conséquent son disciple et l’adepte de sa doctrine. Il leur demande de l’envoyer à Alexandrie, afin d’y subir un examen sur la foi, près de George, évêque arien, dont il avait favorisé l’intrusion au siège patriarcal de saint Marc, à la place de saint Athanase, condamné à l’exil. « Ce document authentique, dit M. Guidi, Dict. d’histoire et de géographie, t. i, col. 211, confirme le récit de Rufin, etc. ; il en corrige l’erreur géographique et en précise la chronologie (337-361). »

30 Préservation de l’arianisme. — De plus, nous en recueillons la précieuse assurance que l’arianisme n’eut rien à voir dans la jeune Église, malgré cette démarche impériale et malgré les efforts de Théophile de Dibus, s’il est vrai, comme le relate l’arien Philostorge, 1. III, 46, P. G., t. lxv, col. 481-489, qu’il soit allé à Aksum pour y infiltrer le venin subtil et contagieux. Dans le Tigré, précisément le terrain où elle aurait pu s’implanter, l’horreur de cette hérésie est restée proverbiale jusqu’à présent, même apud vulgus ; car l’arianisme ou le nom exécré d’Arius sert de terme d’imprécation et de réprobation en face d’une proposition révoltante.

Extension progressive.

La grâce merveilleuse

dont l’apostolat de saint Frumence avait été favorisé, produisit de grands effets de conversion et de salut autour du noyau primitif, et des oratoires grecs d’abord privés y devinrent des églises et des centres de jour en jour accrus et multipliés. Sans doute, Vinfinitus numerus barbarorum de Rufin, d’après Édésius, convertis à la foi chrétienne, peut être une expression orientale toujours hyperbolique ; mais, pour le moins, on y voit une expansion certainement considérable, soit autour d’Aksum dans le Tigré dont les populations ont l’œil sur la cour impériale pour en suivre les exemples, soit autour d’Adoulis sur les rives de la mer Rouge, dans ses villas sur le haut plateau et partout où les négociants grecs avaient un comptoir devenu un centre chrétien, soit enfin dans l’archipel de Dahlâk, alors fort exploité par une population civilisée et où les ruines semées plus tard par les pirateries des musulmans attestent l’antique prospérité industrielle et religieuse par les relations commerciales avec la baie d’Adoulis. — 1. Dans leur laconisme lapidaire, deux inscriptions retrouvées à Aksum, M. Th. von Heuglin, Eeisc naJi Abessinen, p. 146-147, on constate un signe assez clair de la transformation rehgieuse opérée dans les idées et le culte de la cour, grâce aux instructions de Frumence. Elles sont toutes les deux au nom d’Aïzanas, l’aîné des royaux disciples du missionnaire ; mais la divergence textuelle témoigne d’une évolution complète des convictions dans l’esprit du roi, accomphe durant l’intervalle qui sépara les dates de la première inscription et de la seconde. La première est païenne, idolâtrique ; la deuxième ne reconnaît qu’un seul vrai Dieu, créateur et maître de l’univers. Sans doute, on n’y lit pas une profession expresse de l’Évangile, mais bien déjà le premier article du symbole des apôtres. C’était la vérité fondamentale