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ESÏHER (LIVRE D’)

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réjouissances profanes, Spiegcl, op. cit., t. iii ; p. 577, que n’en supposent les Piirim. Enfin, l’iiypothèse ne peut qu’être bien fragile qui ne s’appuie en dernière analyse que sur la variante so-jpoa-.a de la recension de Lucien, Esth., ix, 26, alors que le même recenseur donne partout ailleurs la forme loo’jpai.

4. « La fête des Purim ne peut avoir rien de commun avec le Zagmug babylonien (la fête du nouvel an), qui se trouve souvent mentionné dans la littérature cunéiforme dès les temps les plus anciens jusqu’aux néo-babyloniens, parce que : a) une fête du nouvel an (ass., bab. en nisan)ne peut être transférée au dernier mois de l’année (héb. en adar, Esth., ix, 17 sq.) ; parce que : b) une fête du nouvel an ne peut perdre son caractère comme tel dans le cours du temps ; parce que : c) le Zagmug qui a consisté essentiellement en sacrifices et en offrandes religieuses, Keilinschriftliche Bibliolhek, t. ii, p. 73 ; t. iii, 2, p. 27, ne peut avoir été converti, sans plus, en fête carnavalesque ; parce que : rf) le Zagmug avait lieu dans les dix premiers jours du mois, et non au 1-1 et au 15, comme les Purim, et parce que : c) l’assemblée du Zagmug se tenait, d’après les inscriptions, sous la présidence, non de Marduk, mais de Xébo. Si, plus tardivement, Marduk dut présider à son tour, il n’est pas, lui qui fixait les sorls d’autrui, à identifier avec Mardochée dont le sort fut fixé par Aman. Le Zagmug, enfin, n’a rien à faire avec Istar, tandis que, dans le cas du livre d’Esther, Esther joue le prcmier rôle. Cette dernière considération a même induit les auteurs (.Jensen, Zimmern) à laisser tomber l’hypothèse Zagmug. C’est pourquoi ils ont cherché à identifier les Purim avec la fête bien connue d’Istar = Sirius. Die Kcilinschriflen iind das A. Test., p. 517. Seulement, il est notoire que cette fête d’Istar = Sirius avait toujours lieu au mois d’ab quillet)… Hormis le rapport étymologique réel entre les noms Mardochée et Marduk, Esther et Istar, l’hypothèse assyriologique n’a rien de vraisemblable. Ce rapport philologique ne prouve toutefois pas le moins du monde la))arenté des types, surtout que de tels noms étaient très communs à l’époque néo-babylonienne et persane » (S. Jampel). Pour la suite de l’hypothèse, il n’est point du tout acquis et certain que Hiiman (Uinan), bien que ce nom entre comme composant dans celui de dieux et de rois élamiles, soit lui-même le nom d’un dieu, du grand dieu élamite, Hillerbcck, Siisa, Leipzig, 1893, p. 174 ; que Wasli (Mtisli) soit une bonne lecture du nom élamite de la déesse susienne que l’on veut trouver derrière celui de la répudiée d’.Xssuérus : beaucoup d’assyriologues lisent Barli (Sayce, Weissbach, Ilommel) ; que, dans la mythologie babylonienne, le cousinage de.Marduk et d’Istar soit bien établi, puiscju’à l’époque néo-babylonienne les deux sont époux. Picisncr, Sumeriscli-bahi/lon. Ili/mmen, Berlin, 1896, n. H, revers, I. H. L’épopéc de Gilgamés est loin de concorder dans l’essentiel même avec le récit d’Esther : là, le héros chaldéen lutte contre istar dont le roi d’Élam garde et protège le temple, tablette iv, col. v, 1-6 ; tab. v. col. i ii, 1 sq. ; tab. vi ; tandis qu’ici c’est Mardochée ((nlganiés) qui, avec l’aide d’Esther (Istar). triomphe d’.Vman. On ne voit pas que Habylonc ou Ninive soit intéressée à la ruine de ce dernier parce qu’élamile : car.Aman, dans Esth., m, 1 ; IX, 21, est cxyiressément rattaché à la race d’AmaIcc. Et que devient le mythe naturiste dans toute cette confusion ?

5. La fêle des Sacécs ne ressemble en rien à celle de » Purim, hormis la ripaille, hupielle était commune à toutes les fêles persanes. Le rapprorhement du couronnement d’un esclave du couronnement de Mardochée pèche en ceci, qu’à la fête des Sacées, l’esclave, dérlsoirement couronné, du reste, était mis à mort.

DICT. DF. TIIKOI, . CTMOI, .

Enfin, les Sacées étaient solennisées le 16 juillet ; c’est pourquoi les Purim du 15 adar n’ont rien de commun avec elles » (S. Jampel).

6. « Il est purement arbitraire de placer au 14 adar une fête du jour de Nicanor ; car le l"’et le II" livres des Machabées, comme aussi Josèphe, nous rapportent sans équivoque que, dans la ville de Jérusalem, ladite fête a été placée au 13 adar exclusivement. .. Supposer pourtant que les 14 et 15 adar auraient été auparavant consacrés ; des fêtes en considération de la légenda d’Esther est impossible, et cela au regard de l’histoire religieuse…, car il est tout à fait inimaginable qu’Israël se soit trouvé disposé en tous pays ù fêter ces deux jours sur le fond d’un roman absolument ignoré jusqu’alors… La comparaison du récit d’Esther avec les poèmes babyloniens de la création et de la descente d’Istar aux enfers ne repose en dernière analyse que sur la similitude des noms Marduk-Mardochée, Istar-Esther… Le reste n’est que boiteux » (S. Jampel).

7. Beaucoup de manuscrits du roman des Mille et une nuits ne possèdent pas l’introduction qui paraît tant ressembler à Esth., r, II. L’ensemble des contes dans sa forme actuelle ne remonte pas au delà du xve siècle de notre ère et les premières traces au delà du x". Aussi presque tous les spécialistes voient-ils dans l’épisode de Shéhérazade un emprunt au liTe d’Esther, cf. Brockelmann, Gcsclùdxte der arabischen Lileratiir, t. ii, p. Gl, d’autant qu’une source persane du récit d’Esther n’a jamais pu être produite au jour.

8. A la bien étudier, rhypolhèse de P. Haupt n’est qu’une combinaison de celles qui ont été exposées et critiquées en G’^ et en 4° lieu. Elle fléchit sous le poids des mêmes incertitudes, des mêmes à-peu-près et des mêmes fantaisies qui ont fait s’écrouler celles-là.

P.-E. Faivrc, Le lime d’EslIier et la fêle des Pourim, Montauban, 189.3 ; Vigouroux, Les Livres saints et la criliiiuc ralionalisie, Paris, li)()2, t. iv, p..^97 sq. ; Cornely. Inlio(luclio siiccicilis, Paris, ]S !)7, t. i, p. 12.’i sq. ; Sismund .lampcl, Das Buch Hstlicr aiif seine ( ; eschichtlielil ; cit krilisch nnlcrsuchl, Francforl-sur-lo-AIain, 1907, p. 9."> sc). ; (".igot. Spécial introduction to tlw stiidtj o/ ttie OUI Testament, Now-York, Cincinnali, Cliirago, 190.’5, l. i, p. 360 sq. ; I- ; mmanucl Cosqiiin, Le prnloriiie-cadre des Mille et nne nuits. Les h’firndes perses et le liorc d’Esther, dans la Ucinic lublique, Paris, 1909, p. 7 sq., IGl sq. ; P. Haupt, I’: irim, Lcibzifî et Balliuioio, 19(t(>. a fait la critique do la plupart des hypolliises antérieures ù la sienne.

L’auteur du livre d’ICsther s’étant montré, comme on l’a vii, bien au fait des mœurs et des institutions persanes, beaucoup de critiques contemporains en ont conclu que « le récit ne peut être soupçonné raisonnablement n’avoir pas un fondement substantiellement historique. » Voir F. Vigouroux, L(i Bible et les découvertes modernes, 6e édit., Paris, 1896, t. iv, p. ()21-G70 ; Dieulafoy, Le livre d’Esther et le jxttais d’Assiténts, Paris, 1888 ; L’acropole de Siisc, Paris, 1892, p. 36() 389. « Il renfermerait pourtant des données f(ui ne sont »as strictement historiques. Les éléments du récit auraient été fournis ]jar la tradition à l’auteur, lequel, s’aidant de la connaissance ((u’il avait de la vie et des coutumes persanes, car il ne peut avoir vécu longtemps après la fin de remi)jre perse, combina le tout en un tableau où tout se tient. Pour cpielfiues traits, les détails se trouvaient déjà embellis ))ar la tradition iivant qu’ils fussent venus à la connaissance de l’auteur ; pour d’autres, ils durent leur forme actuelle au penchant <le l’auteur à l’ellet dramalicpie. .. Ainsi faut il accorder qu’un art manifeste a présidé à la composition du livre. Mardochée et .man se trouvent mis en un contraste))rononcé : Ics’deux édits et les circonstances de leur proniuL

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