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ESPRIT-SAINT

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Père et le Fils font deux ; ils font même trois avec le Snint-Esprit, eu égard à Véconomie qui introduit le nonibrc, xiii, col. 193. Le Saint-Esprit, en tant qu’il participe à la nature divine, prend jiarl avec le Père et le Fils à l’œuvre de la création, qui appartient à l’unité de la Trinité, xii, col. 191. Toute la vérité réside dans le Père, dans le Fils et dans le Saint-Esprit, selon l’économie de la foi chrétienne. « Croire en un seul Dieu sans admettre dans l’unité divine le Fils et, après lui, le Saint-Esprit, c’est n’avoir que la foi des Juifs… Quelles seraient l’œuvre de l’Évangile et la substance du Nouveau Testament, si depuis lors il n’y avait pas d’obligation de croire que Dieu est un en trois personnes, le Père, le Fils et le Saint-Esprit ? » xxx, col. 220.

Nous pourrions multiplier les textes de V Adversus Praxcam, où la divinité du Saint-Esprit, la sainteté essentielle. Liber de monogamia, iii, t. ii, col. 983 ; la vis vicaria Christi, De »rœscr., xiii, t. ii, col. 31, est affirmée de la nuiuière la plus explicite. Mais ceux qu’on vient de lire démontrent jusqu’à l’évidence l’orthodoxie de la doctrine de Tertullien.

Cet écrivain ne se borne pas à reconnaître formellement la nature divine du Saint-Esprit. Il afnrme aussi contre le modalisme de Praxéas sa personnalité distincte. Pour désigner celle-ci, il emprunte au droit romain le terme juridique de personne : il fait usage d’autres mots, tels que modidus, species, forma, qradus. Ce dernier mot, d’après Bull, indique l’ordre des relations, quo Pater a se existai, FiUus a Pâtre immédiate prodeal, Sunctus vero Spiritus a Pâtre per Filinm procédât. Op. cit., 1. II, c. vii, n. 6, p. 96. Le Saint-Esprit est la personne qui occupe en Dieu le troisième rang (personnel). Aduersiis Praxeam, ui, t. ii, col. 181. Il est le troisième après Dieu et le Fils, comme le troisième par rapport à la source est le ruisseau qui sort du fleuve et le troisième par rapport au soleil est la lumière qu’envoie le rayon. Jbid.. viii, col. 187. L’Esprit-Saint est le troisième degré en Dieu, ix, col. 188 ; le troisième nom de la divinité, le troisième degré de la majesté divine, xxx, col. 219, 220. Il y a un Saint-Esprit qui parle, un Père auquel il parle, un Fils duquel il parle. Le Saint-Esprit se distingue donc réellement de la personne à laquelle il parle et de la personne dont il parle. De même, le Saint-Esprit qui est envoyé se distingue de celui qui l’envoie. Chaque personne a une projiricté relative qui la constitue dans son individualité personnelle, xi, col. 191.

Il est donc juste de dire, avec Tixeront, que l’enseignement de Tertullien sur le Saint-Esprit est de tout point remarquable. Op. cit., p. 338. Petau cependant penche à croire que Tertullien s’est trompé sur la Trinité. 1. I. c. xiv, n. 3-C, p. 370-372. Harnack découvre che ? lui les vestiges du subordinatianisme le plus marqué. Dogmengeschicide, t. i, p. 532. On pourrait, en elYet, trouver une saveur subordinatiennc dans quelques expressions impropres ou très dures (le Tertullien. A. d’Alès, La ilièologic de Tertullien, Paris, 190.5, p. 101. Teriullien appelle le Saint-Esprit et le Verbe portioncs Dei, moduli. Ibid., xxvi, t. II, col. 213. Ces termes ne diffèrent point, quant à la significatio’.i, des mots persoiia, xi, col. 190 ; xii, col. 191 ; xviir, col. 200 ; xxi, col. 204 ;.species, viii, col. 186 ; XIII, col. 194 ; gradiis, ii, col. 180. Ils ne suppriment pas en Dieu la distinctio personalis, xv, col. 196. Vax moduli et porlionis, observe Themassin, potest ofjendicula esse, scd ca vel condonandu est homini tam mulla alla constantissime edenti consubstantialilatis argumenta, vel ad hoc trahenda ut non sonent nisi derivationem a Pcdre, c. xxxvii, n. 4, p. 554 ; xxxviii, 9, p. 557, 558 ; Scheeben, La dogmatique, n. 839, t. ii, p. 568. Mais nous ne devons pas oublier que Tertullien a forgé la terminologie latine de la sainte Trinité,

cju’il a légué à la postérité une quantité de mots, dont se sont servis les théologiens des âges suivants pour développer la théologie trinitaire. Tunnel, Tertullien, Paris, 1905, p. xxv. Toutefois, il a si souvent et si clairement allirmé la divinité et la personnalité du Saint-Esprit, que des faiblesses de détail ou des expressions très dures ne sauraient servir de prétexte à l’accuser de subordinatianismc. A. d’Alès, op. cit., p. 103 ; Freppcl, op. cit., t. ii. p. 312 ; Chternov, Tertullien, prêtre de Carthaye : essai sur son œuvre scientifique et littéraire, Koursk, 1889, p. 258-276.

b) Saint Cyprien a été plus homme d’action que théologien. A ce dernier titre, i ! a concentré toute son attention sur la doctrine de l’Égiise et l’invalidité du baptême conféré par les hérétiques. Ses données trinitaires, très rares d’ailleurs, n’aiiportent rien de nouveau à la théologie du Saint-Esprit. Il se borne à des allusions au rôle du Saint-Esprit dans la régénération des âmes par le baptême. Le Saint-Esprit est inséparable de la vraie Église. L’Église est une, de même que le Saint-Esprit est un ; par conséquent, le baptême, dont la validité se rattache à l’unité de l’Église et du Saint-Esprit, n’est pas valide si les hérétiques le conféraient, parce qu’on ne peut pas le séparer de l’Église et du Saint-Esprit. Epist. ad Pompeium, n. 4, P. L., t. iii, col. 1177. Par le baptême, le Saint-Esprit descend sur tous les fidèles, Epist. ad Jubaiamim, xx, P. L., t. III, col. 1160, et par le baptême ceux-ci sont à même de le recevoir. Epist., lxiii, n. 8, P. L., t. iv, col. 391. Ces textes, nous l’avons remarqué plus haut, n’ajoutent rien à la théologie trinitaire du iii<e siècle ; ils insinuent cependant que saint Cyprien reconnaît la personnalité divine du Saint-Esprit. Maran, 1. IV, c. xviii, n. 4, p. 513.

c) La doctrine de Lactance sur la Trinité n’est pas sûre. Rhetor crat ilte, non theologus, dit de lui Bull, et son jugement n’est pas erroné. Lactance songe trop à la tournure classique de ses phrases, mais il ne possède pas une connaissance approfondie des mystères chrétiens. Saint Jérôme le prend vivement à partie. A l’entendre, il aurait surtout montré son ignorance de la théologie dans son exposé de la doctrine du Saint-Esprit. Au mépris de la tradition, il aurait nié la eonsubstantialité divine du Saint-Esprit ; il aurait identifié le Saint-Esprit avec le Père et le Fils et attribué à ces deux personnes divines l’œuNTe de la sanctification. Le Saint-Esprit n’aurait eu qu’une subsistance nominale. Epist., lxxxiii, ad Pammachium, n. 7, P. L., t. xxii, co !. 748. En d’autres termes, d’après saint Jérôme, Lactance aurait enseigné le modaJisme trinitaire. In Epist. ad Gal., 1. II, eiv, P. L., t. XXVI, col. 399. La pièce incriminée par saint Jérôme comme renfermant cette fausse doctrine serait la lettre de Lactance à Démétrien. Cette pièce, malheureusement, nous ne la possédons plus, ce qui nous empêche de contrôler la justesse des accusations portées contre Lactance. Celui-ci Ijarie à plusieurs reprises du Saint-Esprit dans les Dii’inæ institutiones. C’est l’Esprit-Saint qui manifeste aux hommes les secrets desseins du Père sur le Fils, IV, 14, P. L., t. VI, col. 489, et qui parle aux prophètes. Ibid., xviii, col. 509. Il a été l’auteur de la conception virginale du Christ, 12, col. 478 : il est descendu sur le Christ en forme de co’.ombe, 15, col. 491.

Ces passages, à vrai dire, ne contiennent pas l’affirmation de la divinité du Saint-Esprit, mais ils laissent voir que Lactance établit une distinction personnelle entre le Père et les deux autres termes de la Trinité et qu’il considère le Saint-Esprit comme le héraut de Dieu auprès des hommes. II peut se faire donc que saint.Jérôme ait exagéré, ce dont il est coutumier, la portée de quelques expressions obscures de Lactance sur le Saint-Esprit. C.’est le sentiment de Maran :