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Ces textes, qu’on pourrait multiplier, montrent donc que, d’après l’Ancien Testament, dans l’ordre naturel, le Saint-Esprit est créateur au même titre que le Père et le Fils, c’est-à-dire qu’il participe à l’être divin. Cependant, les textes cites ne conviennent pas explicitement à une personne distincte de Dieu ; ils ne se rapportent qu’à l’esprit de Dieu lui-même. C’est seulement à la lumière du Nouveau Testament que les Pères et les théologiens leur ont donné une signification qu’ils n’ont pas par eux-mêmes.

c) L’Esprit-Saint est divin ; il appartient à Dieu et il peut être dit Dieu si l’Ancien Testament lui applique les attributs de Dieu. Or, tous les attributs de Dieu lui sont appliqués. Donc l’Esprit-Saint est de Dieu, sinon Dieu même. Il est éternel. Si les premiers versets de la Genèse l’associent à Dieu dans l’œuvre de la création du monde, il a précédé le temps et il est éternel. Il est immense, parce qu’il remplit tout, contient tout, Sap., I, 7, atteint tout d’une extrémité du monde à l’autre, vni, 1 ; il est dans tous les êtres, xii, 1. (^f. Ps. cxxxix, 7-10. Il est omniscient, parce qu’il est le véritable scrutateur des cœurs, et il entend tout ce qui est dit. Sap., i, 6, 7.

d) Le Saint-Esprit n’est pas seulement puissant, d’une puissance divine dans l’ordre naturel. Il est aussi le principe, l’auteur, la source de la vie surnaturelle. Il fortifie les hommes, il les remplit de force pour qu’ils accomplissent le bien ; il leur donne l’intelligence. Job, XXXII, 8. C’est un esprit de sagesse et d’intelligence, de conseil et de force, Is., xi, 2, un esprit qui repose sur le Messie pour porter la bonne nouvelle aux malheureux, panse ceux qui ont le cœur brisé, annonce aux captifs la liberté, aux prisonniers le retour à la lumière, et console tous les affligés. Is., i.xi, 1, 2. Les justes de l’ancienne loi l’invoquent. Ils demandent à Dieu qu’il ne leur retire pas cet Esprit-Saint, Esprit de bonne volonté, Ps. li, 13-14, esprit qui les conduit dans la voie droite. Ps. ci.i, 10. Cet esprit exerce tout particulièrement son influence sur le peuple élu. Num., xi, 17. Il répand les bénédictions de Dieu sur la postérité de Jacob. Is., xLiv, 3. Il remplit de sagesse, d’intelligence et de savoir Béseléel, fils d’Uri, Exod., xxxv, 30, les prophètes, les héros d’Israël, tels que Josué, Num., xxvii, 18 ; Dcut., xxxiv, 9 ; Othoniel, Jud., iii, 10 ; Jephté, XI, 29 ; Samson, xiii, 25 ; xlv, C, 19 ; xv, 14 ; David. II Sam., xxiii, 2. Beaucoup de ces textes, nous le répétons, signifient la force de Dieu. Spirittis Domini, dit le P. Knabenbauer, ipsum dicit Deum quatenus vi ac virtute sua et luce hominis mentem animumque pervadit et penetrat, hominis sibi reddit subservientes et hominem ipsum ad majora et actiones intelligenda et penetranda evehit. Commentarius in Isaiam prophetam, Paris. 1887, t. i, p. 270. Mais l’exégèse des Pères les entend du Saint-Esprit. Les Pères en appellent au témoignage du Nouveau Testament.

« Ce n’est pas par une volonté d’homme qu’une prophétie a jamais été apportée, mais c’est poussés par

l’Esprit-Saint que les saints hommes de Dieu ont parlé. » II Pet., i, 21. L’Esprit donc, qui inspire les prophètes, qui donne sa lumière aux chefs du peuple élu, qui répand ses grâces et ses dons, n’est pas une personnification symbolique de la force de Dieu, mais une personne réellement subsistante qui participe à la nature divine. Schell, Katholische Dogmatik, Paderborn, 1890. t. ii, p. 40 : Heinrich, l. iv p. 122.

e) L’Esprit du Seigneur, dans les prophéties messianiques, repose avant tout sur celui en qui Dieu se complait et qui répandra la justice parmi les nations. Ps. xi.ii, 1 ; i.ix, 21. La rédemption est l’effusion de la grâce de l’esprit de Dieu dans les âmes ; effusion qui engendre un esprit nouveau. Ezech., xi, 19 ; xxxvi. 23. L’Esprit de Dieu, se répandant sur toute chair, produit une floraison admirable de charismes surnaturels, Joël, H, 28-29 ; il tourne les cœurs des habitants de Jérusalem vers celui qu’ils auront transpercé. Zach., xii, 9, 10. Le Saint-Esprit est donc associé à l’œuvre de la rédemption. Les écrivains inspirés de l’Ancien Testament ne se bornent pas à prédire les épisodes sanglants de la vie du Christ : ils prédisent aussi l’épanouissement de la vie surnaturelle dans les âmes, et attribuent à l’Esprit de Dieu cette œuvre de sanctification et d’élévation. Même les auteurs inspirés du Nouveau Testament en ont appelé à l’Ancien, à propos du Saint-Esprit, par exemple, à la prophétie de Joël, II, 28, 29, pour affirmer l’action du Saint-Esprit sur l’Église primitive. Ces auteurs reconnaissent donc implicitement que l’Ancien Testament, qui rend témoignage au Fils, rend aussi témoignage à l’Esprit-Saint.

f) D’après la théologie chrétienne, les textes les plus clairs de l’Ancien Testament sur le Saint-Esprit se trouvent dans le livre de la Sagesse. L’Esprit-Saint y est représenté comme l’éducateur des hommes, fuyant l’astuce, s’éloignant des pensées dépourvues d’intelligence, se retirant de l’âme à l’approche de l’iniquité, aimant les hommes et ne laissant pas impuni le blasphémateur pour ses discours impies. Sap., i, 5, 6. Le c. vii énumère les perfections de l’Esprit de Dieu, intelligent, saint, unique, multiple, immatériel, actif, pénétrant, sans souillure, infaillible, impassible, aimant le bien, sagace, ne connaissant pas d’obstacles, bienfaisant, bon pour les hommes, immuable, assuré, tout-puissant, surveillant tout, pénétrant tous les esprits, les intelligents, les purs et les plus subtils. Sap., vii,22, 23. D’après quelques exégètes, ces textes de la Sagesse contiennent l’expression aussi formelle que possible de la divinité du Saint-Esprit. Lesêtre, Le livre de la Sagesse, Paris, 1896, p. 67. L’esprit de sagesse n’est pas dans ce livre une abstraction, une personnification oratoire. Il a les attributs de la divinité. On énumère ses perfections avec une clarté et une ampleur inaccoutumées. Ibid., p. 20 ; R. Cornely, Commentarius in librum Sapientiœ, Paris, 1910, p. 280-288. D’autres cependant considèrent cette sagesse connue un attribut de Dieu commun aux trois personnes divines. Corneille de la Pierre, Commentarius in Sapientiam, Venise, 1761, p. 650. Quoi qu’il en soit, il est certain que les Pères de l’Église, en particulier saint Grégoire de Nazianze, Orat., xxxi, n. 29, P. G., t. xxxvi, col. 167, et saint Augustin, Epist., clxix, ad Evodium, c. ii, n. 7, P. /, ., t. xxxiii, col. 744, attribuaient ces textes au Saint-Esprit. Saint Ambroise y voit une preuve de la divinité du Saint-Esprit : Sicut Pater et Filius ita et Spiritus immaculatus est et omnipotens, quia græce ira πα τοδύνχηον, παντεπίσλοπον Salomon dixit, eo quod omnipotens et speculator sit omnium, sicut lectum esse in libro Sapientiæ supra est demonstratum. De Spiritu Sancto , I. III, c. xxiii, n. 169, P.L., t. xvi, col. 815816. Cf. c. xviii, n. 135, col. 808. Remarquons que quelques-unes des épithètes, énumérées par le livre de la Sagesse, peuvent aussi s’entendre de la sagesse créée, qui est objectivement et subjectivement une image de la Sagesse incréée. Heinrich, t. iv, p. 124125 ; Schell, t. ii,p. 46-47.

4. Le Saint-Esprit apparaît parfois dans l’Ancien Testament comme une personne distincte du Père et du Fils.

Le livre de la Sagesse affirme que dans la Sagesse habile, demeure l’Esprit-Saint. Or, cette Sagesse incréée, d’après la doctrine commune des Pères et des théologiens, est plus ou moins nettement une hypostase divine, le Verbe de Dieu. Heinrich, t. IV, p. 25-114. Il doit donc y avoir une relation intime entre la Sagesse divine et l’Esprit qui vit en