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ESCLAVAGE

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tout homme vertueux est libre. » Povm. moral., xxvi, 27-29, P. G., t. XXXVII, col. 853.

Saint Augustin, parlant des patriarches, fait ces rénexions, P. L., t. xxxiv, col. 589-590 : « Que les troupeaux soient asservis à l’homme, que l’homme régisse les troupeaux, voilà une juste sujétion et un juste gouvernement… Servum anlem homincm homini, vel iniquilas vel adversilas jccil : iniquilas quidem, siciit dictiim est : Maledictus Chanaan, erit servus fiatribus suis (Gen., ix, 25) ; adversitas vero sicut accidil ipsi Joseph, ut venditus a fratribus servus alienigenæ fieret (Gen., xxxvii, 28, 36). Puis après avoir rappelé l’étymologie : servus quia servatus, est etiani ordo naturalis in hominibus, ut serviant feininæ viris et filii parcntibus ; quia et illic lucc fuslitia est ut infirnùor ratio serviat fortiori. IIive iyitur in dominationibus et servitalibus clara juslilia est, ut qui excellunt ratione, e.vcellant dominutione : quod cum in lioc swcuto per iniquitatem Ixominum perlurbutur, vel per naturarum carnalium divcrsitatem, ferunt fusti temporalem perversitatem, in fine habiluri ordinatissimam <’t sempiternam felieitatem. Ainsi, aux yeux du saint docteur, l’esclavage causé par un désordre peut encore présenter quelque apparence de bien relatif ; mais il ne garantit pas cette médiocre consolation et en indique de plus certaines.

Et c’est en définitive rnnicque réponse, celle que ViejTa, dans le sermon sur le Rosaire, exposera en ces apostrophes brûlantes : « …Votre ordre religieux à vous, c’est celui des captifs sans rédemption… votre pauvreté est plus extrême que celle des frères mineurs, et votre obéissance plus étroite que celle des frères minimes. Vos abstinences méritent plutôt le nom de faim que de jeûne…, votre régie est à la fois une et multiple, parce que c’est la volonté et toutes les volontés de vos maîtres…, in hoc vocati estis, quia et Christus passas est ; et le but, la fin, c’est l’héritage du ciel pour récompense. » Vieyra, Sermons, trad. Poiret, 1875, t. VI, p. 521-522. De même, saint Augistin, De civilate Dei, 1. I, c. xiv, P. L., t. xli, col. 28 : Christiani eliam captivi ducti sunt. Hoc sane mi.ierrimum est, si aliquo duei potucrunt ubi Deum suum non invenerunt.

Saint Augustin dit encore dans un passage célèbre de la Cité de Dieu, 1. XIX, c. xv, P. L., t. xi.i, col. 643 : Dorninctur piscium. Rationalem factum ad imarjinem suam noluit nisi irrationalibus dominari : non hominem homini, sed hominem pccori. Condilio quippe servitutis jure intellirjitnr imposita peccatori. Proinde nusquam Scripturarum leginuis servum, antequam hoc vocabulo Xoc fustus peccatum filii vindicaret <Gen., IX, 23). Xomen itaquc istud eulpa meruit, non natura… (Ici revient encore l’étymologie connue)… Prima ergo servitutis causa peccatum c.< ! l, ut homo homini condilionis vinculo subderctur : quod non pi nisi Deo judicante, apud qucm non est iniquilas, et novil diversas pœnas merilis dislribuerc dclinquen tium…Verum et pœnalis servilus ea Icge ordinatur, quanaturalem ordinem conscrvari jubct perturbari vclat : quia si contra eam legeni non essct factum, nihil cssel prrnali scrvitute cocrccndum.

Sahit.Jean Chrysostome, ou l’auteur de l’Iiomélie du législateur, dans les œuvres de ce saint docteur, P. G., t. LVi, col. 101, répèle une explication analogue, après avoir cité le mot de saint Paul : In Christo Jesu… ncque servus, nequc liber : « Vous remarquez l’égalité d’honneur ?….Jésus-Christ ramène la nature à son antique bonté. I.orsfpic Adam fut créé, il n’y avait ni (Jrcc, ni Barbare, ni esclave, ni homme libre. Ce n’est point la nature rpii a crée l’esclavage, mais l’arbitraire. » l’A sur ri’: pitre aux Éphésicns, P. G., t. Lxii, col. 157 ; Si quelqu’un demande d’où vient l’esclavage, et comment il est entré dans la vie hu maine (car je sais que beaucoup posent ces questions et voudraient en apprendre quelque chose), je vais vous le dire ; L’avarice a produit l’esclavage, et l’envie, et la cupidité. Noc n’avait pas d’esclave, ni Abel, ni Setli, ni les autres de ce temps. C’est le péché qui a fait cela, c’est l’outrage aux parents, et après une réfioxion morale ; qui outrage son père n’est plus de la famille, et a fortiori qui outrage Dieu…, il continue : Ensuite les guerres et les batailles ont donné des prisonniers. Abraham, dira-t-on, a eu des esclaves. Mais il ne les a pas traites comme des esclaves.

Le saint docteur reprend autre jiart plus à fond tout le problème. In Genesim, scrm. iv, P. G., t. liv, col. 593. Dieu a entouré notre nature décliue de plusieurs servitudes comme d’autant de liens. La première est celle qui soumet la femme à son époux, sans doute de providentielles affections la tempèrent ; mais c’est le péché qui a établi la nature de la servitude. Une seconde servitude plus lourde a aussi dans le péché son principe et son occasion ; suit l’histoire de Cham : il a perdu par la malice de sa volonté la prérogative de sa nature. Il est encore une troisième servitude plus pesante vis-à-vis de ceux qui gouvernent. Cf. S. Augustin, De Genesi ad liller., xi, 38, P. L.. t. xxxiv, col. 450.

Saint Isidore, P. L., t. lxxxii, col. 199, transmet la tradition qu’il a reçue : Jus naturale est convnune omnium nalionum, et quod ubique instinctu naturæ, non constitutum a lege habcatur, ut… eommunis omnium possessio, et omnium una liberlas. Jusgentium est… captivitates, servitutes. Elgm., v, 4, 6. 2° Les scolastiques et les moralistes.

Les docteurs

scolastiques et à leur suite les moralistes ont traité CCS questions, et nous ramènerons à trois chefs les notions doctrinales qu’ils discutent : origine de l’esclavage ; légitimité ; obligations.

1. Origine.

C’est un châtiment, répond saint Tliomas ; c’est une peine, c’est une volonté de la loi positive, comprimant la malice des uns, suppléant la faiblesse des autres, un arrangement que, somme toute, les hommes ont trouvé expédient. In IV Sent., 1. IV, dist. XXXVI, a. 1, ad 2°"> : Servilus est contra primam intentionem naturæ, sed non contra sceundani. quia naturalis ratio ad hoc inclinât, et hoc appétit natura, ut quilibel sit bonus : sed ex quo aliquis peccat, natura eliam inclinai ut e.v peccato pœnam reporlet ; cl sic servilus in pœnam peccali in troducta est. Ibid.,

d 3’"". Servilus, quie est quædam pœna dclerminata,

est de jure positiva, et a naturali proficiscitur, sicut determinatum ab indeterminato. Surn. theol., ii, q. xcvi, a. 4, après avoir dit que l’esclavage n’eût ]>as existé dans l’état d’innocence : liber est causa sui, servus auteni ordinatur ad alium. Ht quia nnicuique est appelibile proprium bonum, et jier consequens conlrislabile est unicuique quod illud bonum quod deberet esse suum ecdat alleri tantum. IP H, q. lvii, a. 3, ad 2°"’: Ilunc hominem esse servum, absolule considerando, mugis quam alium non habet ralioncni naturalem, sed solum secundum aliquam ulililatem consequenlem, in quantum utile est huic quod regatur a sapientiori, et illi quod ab hoc juvetur, ut dicitur in I Polit, cap. V, circa finem. ! ’II’, q. xr.iv, a. 5, ad.’i'"" : Distinctio posscssionum et servilus non sunt induclsr a natura, sed per hominuni ralioncm ad ulilitalem humanec vitse.

Saint Bonaventure répond : l’esclavage n’est pas naturel à rhomnie ; iln’cstnaturelqu"àrhommedéchu : l’esclavage a pour origine de fait, la guerre ; en principe, le péché. Après avoir cxpliqué. In IV Sent., 1. II, dist. XLIV, a. 2, q. ii, que certaines choses sont de dictaminc naturx siniplicilr, d’initrcs de <lii lamine naturic secundum stalum naturæ inslilul.T, d’autres enfin de dictaminc naturæ secundum stalum naturx