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    1. ERREUR##


ERREUR, EMPÊCHEMENT DE MARIAGE

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prononcer la nullité du mariage pour cause d’erreur, que la dite qualité a été vraiment recherchée par le contractant comme une condition sans laquelle il n’aurait point donné son consentement. Cf. Lehmkuhl, op. cil., n. 961. b. Si l’erreur touchant la qualité rejaillit sur la personne elle-même, car alors elle équivaut l’i une erreur touchant la personne. Mais le point difïïcile est de fixer quand est-ce que l’erreur sur la qualité rejaillit sur la personne. En cflct, le droit canonique ne détermine aucune qualité qui puisse rejaillir ainsi sur la personne, si ce n’est celle de la condition servile, dont nous parlerons plus loin. C’est pourquoi les juristes discutent longuement sur ce thème. Cf. Sanchez, loc. cit., n. 26 sq. ; Pichler, loc. cit., n. 105. Cependant on peut dire, avec l’opinion la plus commune, que l’erreur touchant la qualité doit être regardée comme rejaillissant sur la personne si cette qualité constituait, dans l’esprit du contractant, la détermination ou la désignation individuelle de la personne, par ailleurs inconnue, par exemple, si quelqu’un voulait contracter avec la fille aînée qu’il ne connaîtrait que sous ce qualificatif, et qu’on lui présentât la cadette, le mariage devrait être tenu pour invalide. Cf. S. Thomas, op. cit., dist. XXX, q. i, a. 2, ad 3°™ ; Bangen, De spon.talibus et malrimonio, Munich, 1860, tit. r, p. 84 sq. ; Santi, Prækcliones juris canonici, Ratisbonne, 1898, 1. IV, tit. i, n. 137 ; Feije, De impedimentis cl dispensalionibus malriinoniidibus. Louvain, 1893, n. 112 ; Sebastianelli, De rc malrimoniali, Rome, 1897, n. 47 ; Gasparri, toc. cil., n. 896 sc{. INIais il faut remarquer que si, dans le cas précité, l’intention du contractant ne s’était pas principalement dirigé sur la personne précisément en tant que tille aînée, l’erreur ne devrait plus être regardée comme substantielle. Aussi bien convient-il de donner, avec d’autres auteurs, cette règle complémentaire : que l’erreur touchant la qualité de la personne rejaillit sur la personne elle-même lorsque la qualité en question se trouve recherchée comme la fin du mariage, et que le contrat matrimonial est l’unique moyen de réaliser cette fin, c’est-à-dire d’obtenir la susdite qualité. Cf. Gobât, Theolog. cxpcriment., t. ix, n. 113, cité par Pichler, /oc. Cî7., et Bangen, Zoc.c ; 7., p. 85 ; Lehmkuhl, /oc. c17., n. 963. 2. L’erreur de droil.

L’erreur de droit, soit qu’elle porte sur l’essence et l’objet formel du mariage, soit qu’elle vise une propriété essentielle du mariage, ou encore son caractère sacramentel, ne doit pas être tenue pour une erreur substantielle et ne rend pas invalide le contrat matrimonial, à moins que celui qui tient cette erreur n’ait l’intention positive de contracter d’après son concept erroné, par exemple, touchant le divorce, ou, autrement dit, ne soumette son consentement à cette idée fausse comme à une condition proprement dite ; en effet, si cette intention contraire et positive n’y vient faire obstacle, il sutTit que le contractant ait la volonté générale de contracter un mariage véritable, comme Dieu l’a institué, ou même simplement, un mariage conforme à celui que les autres ont coutume de contracter ; et on doit dire que cette volonté générale a pour vertu de remédier à l’erreur privée, en question, et de l’absorber en quelque sorte. En particulier, pour ce qui regarde l’erreur à propos du droit mutuel que doivent se donner les époux touchant les relations charnelles, elle ne saurait être présumée, au for externe, lorsque les époux ont atteint l’âge de la puberté, et la preuve ne pourrait être que difficilement établie, d’autant plus que la nature se charge ordinairement elle-même d’enseigner ces choses. Cf. Benoît XIV, De synodo diœcesana, Rome, 1750, 1. XIII, c. xxii, n. 7 ; Décrets de la S. C. de la Propagande, en 1852, et du Saint-Office, en 1868, 1892 ; De Beckvi, De sponsalibiis et malrimonio, Bruxelles, 1903, p. 57 sq.

3. L’erreur louchanl la vedidilé du mariage.

Cette erreur se vérifie lorsque les deux parties contractantes, ou l’une d’elles seulement, croient qu’il existe quelque empêchement dirimant, et que le mariage est invalide, alors qu’en fait, aucun obstacle juridique ne s’oppose à la validité du contrat. Or, doit-on dire qu’une telle erreur exclut le consentement matrimonial véritable ? Certains auteurs pensent que dans le cas où le contractant est de mauvaise foi, le consentement matrimonial ne peut être réel, encore qu’en fait il n’existe aucun empêchement ; et ils appliquent ce principe même lorsqu’il s’agit simplement d’un empêchement de droit ecclésiastique. La raison, d’après eux, est que le volontaire ne peut avoir pour objet une chose impossible ; et, dans la pensée des contractants, le mariage en question apparaît juridiquement impossible. Cf. Perrone, De malrimonio christiano, Rome, 1858, 1. II, a. 1 ; Giovine, De dispensalionibus malrimonialibus, Naples, 1866, t. ii, 327, n. 3 ; Gury, Théologia morcdis, Rome, 1864, t. ii, n. 895. Cette opinion ne nous paraît pas recevable, car rien n’empêche que la partie contractante, nonobstant son faux jugement touchant l’existence d’un empêchement dirimant, ne donne un véritable consentement matrimonial, et ne veuille, dans sa pensée, s’obliger par rapport au droit conjugal, soit qu’elle fasse alors abstraction de la loi de l’empêchement, soit que par quelque raison, absurde sans doute, elle cherche à s’en excuser, soit qu’elle espère pour l’avenir obtenir un arrangement de sa situation, etc. D’ailleurs, une réponse de la S. C. de la Propagande au vicaire apostolique de Constantinople, du 1*= octobre 1785, vient confirmer cette interprétation : à propos de ceux qui avaient bien la volonté de prendre une véritable épouse, mais qui se trouvaient dans l’erreur en pensant qu’il ne suffisait pas, pour la validité de leur mariage, de se présenter devant un juge turc, étant toutefois dans la disposition de contracter un vrai mariage, au cas où ils auraient appris que leur démarche était efficace, la S. C. répondit que les mariages en question devaient être tenus pour valides, pourvu qu’il n’y eût point d’autre empêchement canonique ; ajoutant que, dans le cas exposé, on ne pouvait douter de l’existence du consentement vrai, légitime, interne et réciprocjue des contractants. En outre, le pape Boniface VIII reconnaît que les mariages nuls à cause d’un empêchement dirimant venant de l’inhabilité des personnes, par exemple, en raison de la consanguinité, de l’affinité, de l’impuissance, du vœu, pourvu que la nullité ne découlât point d’un défaut de consentement, peuvent produire un effet juridique spécial qui est l’empêchement d’honnêteté publique. Sexte, tit. De sponsalibus, c. un. Ainsi donc Boniface VIII admet la possibilité du contrat et du consentement matrimonial en dépit des empêchements en question existant d’ailleurs réellement. A plus forte raison doit-on conclure à la possibilité d’un véritable consentement matrimonial, si lesdits empêchements ne sont que putatifs, et si le contractant croit faussement à leur existence. Notons d’ailleurs que, d’après le style canonique, Boniface VIII entend par le terme général de sponsalibus aussi bien le mariage proprement dit, sponsatia de præsenli, que les fiançailles, sponsatia de fuluro. Ajoutons enfin que notre sentiment, dans la question présente, se trouve corroboré par la pratique de l’Église qui, plus d’une fois, dispense de l’obligation de renouveler le consentement, et accorde la sanalio in radice en faveur de ceux même qui ont contracté de mauvaise foi un mariage invalide à cause d’un empêchement réel de droit ecclésiastique, reconnaissant ainsi que le premier consentement a été un véritable consentement matrimonial ; donc, a fortiori, s’il s’agit de quelque empêchement qui n’existe que dans la pensée erronée