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ÉPICLÈSE EUCHARISTIQUE

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JLLUD AUX xiviFiCET (quatetuis et facit ipsiim elicere vitæ functiones…), ul vilam ipsam ad vilam revocet ef ficiatque ut perennis vitæ fluxus imperio et sacratione alte reprcssus ilerato accipiat ciirsum suum. Cf. Markovitch, op. cit., p. 231-232, 307-308.

Il faut reconnaître que cette interprétation, toute mystique qu’elle soit, et dépendante, au reste, de la théorie spéciale de Cicnfuegos concernant le sacrifice eucharistique, a des fondements dans la tradition, surtout dans la tradition sjriaque. Cette sorte de vivification ou de résurrection mystérieuse du corps du Christ, opérée par le Saint-Esprit, se retrouve précisément comme explication de l’épiclèse liturgique, chez le nestorien Narsès († 502), Homil. in expos, mgst., édit. Connolly, p. 21 sq. ; chez Jacques de Saroug († 521), Connolly-Bishop, op. cit., p. 149, et Downside Review, novembre 1908, décembre 1910 ; peut-être aussi chez saint Éphrcm, Connolly-Bishop, op. cit., p. 147-148..Seulement, tandis que la terminologie de ces docteurs syriens demeure assez imprécise quant à l’efficacité des paroles de l’institution, Cienfuegos pose en principe que ces paroles produisent le corps du Christ ; mais elles le produisent à l’état de mort mystique. Le but de l’épicièse est de le vivifier. Le.Saint-Esprit aurait donc une opération réelle à remplir au moment même où il est invoqué. Neque (invoccUur Spiritus Sanctus)… ut nihil efficial PRO ruKC : esset enim vana imploratio captionibus et sequivocis sensibus expositu, et absque justa causa introducta. Cienfuegos, loc. cit. La question serait de savoir en quoi consiste exactement cette opération du Saint-Esprit, que Cienfuegos appelle vivific : rtion du corps eucharistique du Clirist.

D’autres auteurs en sont venus, en somme, à y voir, sous des noms divers, l’idée d’application des effets du sacrement ou du sacrifice. Bougeant distingue deux aspects de l’eucharistie : l’un incomplet ou inadéquat, l’autre complet ou adéquat. Dans le premier, dit-il, elle a tout ce qu’elle peut avoir d’essentiel ; dans le second, tout ce qu’elle peut avoir de complet et de parfait. Le premier état est produit par les paroles du Christ. Mais les Orientaux, continue Bougeant, pensent que le corps et le sang du Christ seraient pour nous sans utilité, si le Saint-Esprit, par sa puissance divine, ne les rendait sanctifiants. Ils l’invoquent donc comme si rien n’était fait encore, et le prient de donner au sacrcmînt une manière d’être intégrale et parfaite, c’est-à-dire de lui donner tout ce qu’il peut avoir de perfection non en lui-même, mais par rapport à nous. En d’autres termes, l’épiclèse a pour effet non de pro<luirc simplement le cor|)S du Christ, ce qui est déjà accompli par les paroles de l’institution, mais de le rendre, selon les expressions de la liturgie, un corpus vivificum, corpus cœleste, corpus salutare, de faire que le sacrement ait son effet complet et que nous soient appliqués les mérites de.Jésus-( ; hrist. Bougeant, Traité tMologique sur la forme de la consécration, Lvon, 1729, p. 251-253. Cf..Markovitcli, op. cit., p. 302-303. Bougeant estimait que son interprétation pouvait satisfaire tout homme impartial. On doit dire cepen<lant que, en dépit de la manière ingénieuse dont il l’exprime, elle retombe à peu près dans celle qui a été mentionnée sous le n. 2, et qui, on l’a vii, se heurte à la teneur même des épiclèsex. Celles-ci, nous l’avons assez montré, ne demandent pas seulement au Saint-Esprit de rendre le corps et le sang du Christ profitables aux fidèles ; elles le sollicitent, en propres termes, d’opérer la transsubstantiation.

Doin Cagin a proposé récemment. Paléographie musicale, 1897, t. v, p. 83 sq., une explication analogue à celle de Bougeant. Le savant bénédictin met tout d’abord en avant le prinripe d’unité d’action liturgique et la nécessité de rapporter au moment du

récit de la cène l’opération consécratrice du Saint-Esprit sollicitée par l’épiclèse. Il argumente, à ce propos, sur ces mots de l’épiclèse dans l’anaphore copte de saint Grégoire de Xazianze : tu Domine, voce tua sola commuta hœc quæ. sunt proposita. « Voce tua : mais cette voix vient de se faire entendre, ses paroles viennent d’être articulées. Dès lors, qu’estce à dire ? Il est clair ici que la valeur théologique de cette expression doit être prise dans un sens rétrograde et concomitant avec les paroles de l’institution. C’est même la raison que l’on donne quelquefois, d’une manière générale, d’expressions Taiment difficiles dans les épiclèses d’Orient. Les actes humains, dit-on, ne pouvant être que discursifs, l’explication par l’homme de tout ce qui est contenu dans l’unité sacramentelle de li consécration, ne peut se développer non plus que successivement. Il arrivera ainsi que l’essence de l’acte sera déjà posée, que l’esprit de l’homme, à plus forto raison, sa parole, en seront encore à détailler tout ce que cet acte est destiné à contenir, tout ce que le prêtre a l’intention qu’il contienne et qu’il contient déjà. » Mais l’auteur n’est point entièrement satisfait de cette explication, et voici ce qu’il ajoute : « Nous le voulons bien, c’est une explication de second plan partiellement exacte. Nous pensons toutefois qu’il ne faudrait jnis insister plus que de raison sur cette argumentation qui cesserait d’être juste si on la pressait trop et si on s’y arrêtait exclusivement.

Il y a certainement un autre point de vue que voici et qui atteint plus intimement les intentions, le contenu objectif des formules et des rites. Il y a vraiment une opération distincte et particulière attribuée au Saint-Esprit dans cette partie du canon. Le propre de la consécration, c’est d’avoir posé le mystère, l’élément divin du sacrifice, le principe de sanctification. Il reste à dispenser ce mystère suivant toutes les applications du culte et de sanctilication auxquelles la messe doit pourvoir. La sanctification des membres fidèles du Christ et leur incorporation au mystère par la communion n’épuisent jias cette application ; il y a encore à réaliser extérieurement l’offrande de la victime, à consommer le sacrifice.

Cette partie du canon serait donc, on le voit, la part d’opération attribuée au Saint-Esprit, l’œuvre sanctificatrice, de même que la partie s’étendant du .Sanctus à l’épiclèse était celle du Fils accomplissant l’ccuvre rédemptrice, comme l’BÙyjxpunia jusqu’au.Sanctus (l’anaphore de la cène juive) était le sacrilice de louange de l’ancienne loi à Dieu le Père, la reconnaissance de l’œuxTc créatrice et conservatrice. Tout cela d’ailleurs se succède suivant une progression historique évidente, surtout dans les anal )hores non abrégées (celle de la liturgie clémentine et celle de saint Basile par exemple). L’incarnation arrive ainsi à son rang, à sa date relative, puis l’institution de la cène et la consécration du corps et du sang du Seigneur, le précepte donné aux apôtres de perpétuer représentativement et efficacement ce qui s’est accompli sous leurs yeux, enfin la résurrection, l’ascension, la pentecôte, le second aèiu"ment. L’intervention du Saint-Esprit est appelée précisément au moment où le mémorial arrive à son terme et s’arrête à la pentecôte. l- ; t c’est ainsi que les choses s’étaient passées pour la première fois. L’action sacramentelle des apôtres n’avait commencé qu’à la descente du Saint-I-April. Le principe de la rédemption, du sacrilice nouveau, de la sanctification, avait été institué au jour de la passion, comme il est posé dans la messe au moment de la consécration. Il était réservé à la mission temporelle du Saint-ICsprit (Vcn valider raccomplissemeni, d’en signifi<T la ratification, en même temps qu’en était inaugurée la dlspensalion.