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ÉPÎGLÈSE EUCHARISTIQUE


qiiid propterea Spiiitiis Saiicius dominiciun corpus deserit et tanqnani sqnalorem sordidi vasis nausealus abscedit ? Sed si ila est, quomodo verum est qiiod pcr apostoluni dicitur : quia indigne percipiens « judicium sibi manducol et bibil, non di/udicans corpus Domini  ? I Cor., XI, 29. Si enim, abscedenle Spirilu, non illud jamcorpus Domini, scd simpliciter communis est punis, non incidil in judici-uni qui nutlum accipil sacramentum. .. Liber qui appcllatur Gratissimus, c. ix, P. L., t. cxLV, col. 110.

Le second passage est emprunté au coninientairc du canon de la messe et accentue principalement l’efficacité consécratoire des paroles du Christ, mais en soulignant d’une manière très remarqual^le le rapport direct qu’ont avec la consécration toutes les prières qui encadrent cette formule centrale. Cum ergo saccrdos illa Christi verba pronunliat : Hoc est corpus mcuni. Hic est sanguis meus, punis et vinum in carnem et sanguinem convcrtitur illa Yerbi virtute qua Verbum caro fuclum est et habitavil in nobis, qua dixit et fada sunl… Exposil. canonis missie, n. 3, ibid., col. 881.

La question du moment précis de la transsubstantiation se pose si nettement à son esprit, que nous le voyons plus loin noter qu’elle a lieu seulement après l’achèvement de la formule énonçant le changement pour chacune des deux espèces : Hoc est corpus meuni… Quando profertur pronomen, nondiim est transsub.stanliatio. Ibid., n. 7, col. 883. Si le mystère est ainsi pleinement accompli, pourquoi y a-t-il encore, dans la suite du canon, des formules ou des rites à signification consécratoire ? La réponse de saint Pierre Damien est digne d’attirer l’attention des liturgistes et des théologiens. Talia sunt quivdam subjuncta in canone, quæ videntur innuerc quod nondum sit consecratio consummata… Hoc cupitulum ; « Qui pridic quam pateretur » in fine canonis subjici debuisset, quoniam in eo consecralio consummatur ; sed quoniam impedissel ordinem liisloriif, quasi quadam secessitaie ro.v/’tz.sr.s (sous-entendu : auclor canonis), capitulum

ILLVI) (JUASI COR CAXOSIS Il A /.V MEDIO COLLOCAVIT,

VT Qu.E SEQCisrun lyrELLir.A.Mun vR.n<EbEnE, sccun(lum illani figuram quiv sivpe fil, ut quæ ralione succédant, intellcctu præccdanl. Ibid., n. 9, col. 885. Appliquez spécialement ce principe à répiclèsc, et vous avez la solution du problème fournie par saint Pierre Damien, après qu’il en a successivement présenté toutes les données.

Les deux principales de ces données, attribution du mystère eucharistique aux paroles du Christ et à la vertu du.Saint-Esprit, se rencontrent, le plus souvent simultanément, chez les écrivains des siècles suivants. Signalons Odon de Cambrai († 1113), Exposit. canon, missæ, P. L., t. clx, col. 1063 ; Bruno d’Asti († 1123), /n Matllixum, part. IV, c. xxvi, § 104, P. /.., t. CLXV, col. 290-291 ; Sent., 1. IV, c. ix, ibid., col. 100.5-1007 ; Honorius d’Autun († 1120), Gemma animæ, 1. I, c. lii, P. L., t. clxxii, col. 559.560 ; Eucliarislion, c. vi, col. 1253 ; Kticnnc d’Autun († 1139), Troct. de sacrant, allaris, c. xiii, P. L., t. CLxxii, col. 1292-1293 ; Hildebert, évoque du Mans, puis archevêque de Tours {’^ 1133), De mijslerio missæ, P. L., t. CLXXi, col. 1186-1187 ; Exposit. missx, col. 1164-1165 ; Alger de Liège ( ; - vers 1132 ou 1135), De sacram. corp. et sang, dnminici, 1. I, c. xiv, xvi, P. L., t. (xxxx, col. 781, 788 ; P.nperl de Dcutz († 1135), In.loa., 1. VL P. L., t. ci.xix. col. 466 ; In Exod., II, 10, col. 617 ; IV, 7, col. 704 ; Hugues de Saint-Victor († 1141), Spéculum de nu/sler. Ercl., c. vii, P. L., t. cLxxvii, col. 370 ; Sicard de Crénu)nc († 1215), Milrale, 1. III, c. vi, /’. /-., t. rxxiii. col. 128 130, 1.34 ; Durand de Mende (-|- 1296), RaliQuale divin, o/fic, I. IV, c. xi.iv.

Notons aussi que c’est à cette époque que reniontent les origines de l’élévation de l’hostie consacrée. Voir Élévation, t. iv, col. 2319 sq. Cette cérémonie a été instituée à l’occasion de la dilTèrence d’opinions sur le moment précis de la transsubstantiation. Deux opinions se partageaient les esprits. Les uns croyaient que la consécration du pain s’accomplit au moment où le prêtre prononce sur lui les paroles Hoc est corpus meum, et celle du vin aux paroles Hic est calix sanguinis mei. Les autres n’admettaient la transsubstantiation complète du pain et du vin qu’après la dernière formule. La première prévalut et saint TJiomas d’Aquin montra peu après qu’elle était postulée par la logique. In IV Sent., 1. IV, dist. VIII, q. ii, a. 4 : Utrum formæ expectent se in operando.

Pour précise que fût alors la croj’ancc à l’efficacité consécratoire des paroles du Christ, la doctrine de la vertu eucliaristique du Saint-Esprit n’en continuait pas moins à être aussi nettement professée. Nous avons une preuve très intéressante de ce fait dans le témoignage très explicite d’une religieuse bénédictine, sainte Hildegarde (1098-1179). Dans le premier et le principal de ses ouvrages, lo Scivias, écrit de 1141 à 1151, la grande mystique, en décrivant ses visions eucharistiques, met très vivement en parallèle la transsubstantiation avec l’incarnation. Dans l’un et l’autre mystère, le Saint-Esprit intervient. .. Ego Pater carnem et sanguinem Filii mei PEU sAMyrii’icATiosESi spiiiiTUS SANcTi in oblatione nunc glorifico… Le terme inuocatio (épiclèse) revient fréquemment. Scivias, 1. II, visio vi, n. 1, 5, 11-13, 14-15, 36, P. L., t. cxcvii, col. 514-516, 529-530. Cf. Hoppe, op. cit., p. 192-197.

Nous n’avons pas à traiter ici des discussions qui s’élevèrent entre scolastiques au sujet de la forme de l’eucharistie. Notons seulement quelques textes curieux qui se rattaclient au point d.- vue que nous étudions.

Pierre Lombard († 1161) établit clairement le départ entre la formule consécratoire, constituée par les jiaroles de l’institution, et le reste des prières du canon : … reliqua ad laiidem Dei dirunliir. Sent., 1. IV, dist. VIII, 3, P. L., t. cxc.ii, col. 856. Cela ne l’cmpêclie pas de rapporter à la consécration l’oraison Supi>lices le rogamus qui suit, et en des termes qui font tout naturellement songer à l’épiclèse : Missa enim dicitur eo quod c.Ei.Esris.vf.vr/ts (angélus) ad roA’.sE’n.i.vnr.v yimeicum corpus advesiat, juxla dicliim sacerdolis : Oniniiwtens Deus, jiibe liæc perferri per manus sancti angcli lui in sublime altarc luum. Ibid., dist. XIII, 1, col. 868.

Saint Thomas d’Aquin († 1274) signale plusieurs fois la doctrine de l’intervention eucharistique du Saint-Esprit, à l’occasion d’un texte de saint Jean Dainascène. Celui-ci vient en objection contre la thèse, déjà iiréalablement établie, que les paroles du Christ conslituent la forme du sacrement. Videtur quod verbis prædiclis non insil aligna vis crcala ad IranssubsUuilialionem faciendam. Damasccnus enim dicil, 1. IV, De fide orlhodoxa, c. xiii, quod sola virtutc Spirilus S(mcli fil conversio panis in corpus Christi. Scd virlus Spirilus Sancti non est virlus crcala. Ergo nulla virlus crcala incst liis verbis, per quam fiai transsubslanliatio. A li difficulté ainsi posée voici comment répond le saint docteur : Direndum quod diclin exclusivd adjunrta princi/iali agenli non c.vcludit aqens instrumrntide. Son enim scqiiitiir :.lolus hic /liber firil cullrlliini, ergo marlrllus nihil ad hoc operalus est. Virlus enim instriimenti non est nisi qua-dam rcdiindanlia virliilis agenlis princijxilis ; iindr in loto aclio non atlribiiiliir inslninienli) sed principali agenli secundum PtxilosopUiim. ht pnipter hoc, ex hoc quod