Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 5.djvu/121

Cette page n’a pas encore été corrigée
217
218
ÉPICLÈSE EUCHARISTIQUE


in iraiisformatioiie Spiriliis lui sancti… ; le Posi inijsteriiim de l’Assomption de Marie, conçu en ces termes : Descendat, Domine, in his sacrificiis tiiæ benediciionis coœlernus et cooperaior Paraclitus Spirilus, ut oblalionem, quam tibi de tua terra fructificante porref/imus, cselesti permuneratione (lisez permutatione), te sanctiflcanle, sumamus : ut translata fruge in corpore, calice in cruore, proficiat meritis quod obtulimus pro delicto. P. L., t. Lxxii, col. 245. Comparez aussi, dans le Jlissale Gallicamim velus, qui représente la liturgie gallicane du milieu du viie siècle, le Posl sécréta suivant où l’on remarquera une épiclèse du Verbe et du Saint-Esprit à la fois : Descendat, precamur, omnipotens Deus, super haoc quæ libi offcrimus, Vcrbum tuum sanctum ; descendat inerstimabilis (jloriie tuæ Spirilus ; descendat anliquæ indulgentiæ tuæ donum, ut fiai oblatio nostra hostia spiritalis in odorein suavitatis accepta : eliam nos fanuilos luos per sanquinem Christi tua nninus dexlera invicia custodiat. Quant au missel mozarabe, il possède des Posl pridie-épclèses en telle abondance, que la preuve est ici plus éclatante encore. Voir les 38 spécimens qu’en donne Hoppe, op. cit., p. 78-92, d’après l’édition de Lestey reproduite dans P. L., t. lxxxv, col. 250 sq. Il faut y ajouter certains Posl pridie du Liber ordinum mozarabe, édité par dom Fcrotin, Paris, 1904, col. 265, 269, 311, 370.

Notons, en passant, à propos de cette exubérance liturgique, que le nombre des Posl pridie, Posl secrcla ou Posl mijsteria est très considérable, les liturgies de type gallican ayant ce qu’on appelle le caractère embolismique, c’est-à-dire intercalant dans le canon de la messe des pièces de rechange pour chaque messe. Il nous est resté une trace de cet usage dans nos diverses préfaces et dans les petites variantes du Communicantes et de VHanc igitur pour les grandes fêtes de l’année. Autrefois, c’était, pour les liturgies en question, très différentes eu cela des liturgies orientales, le système habituel. Mais la diversité de forme que, sur un fond identique, comportaient ces oraisons, était bien plus grande que celle dont témoigne l’usage actuel. Nous ne pouvons qu’indiquer ici cette particularité, mais nous croyons qu’elle est d’un haut intérêt, à la fois liturgique et théologique, pour l’étude des changements dans l’épiclése occidentale. Voir S. Salaville, L’épiclése dans le canon romain de la messe, dans la Revue cmguslinienne, mars 1909, t. XIV, p. 303-318.

Le lecteur aura remarqué, je pense, la portée théologique du nom de Posl mijsterium ou de son synonyme l’ost sécréta désignant l’épiclése occidentale et supposant déjà opéré le mystère de la consécration que maintes formules sollicitent cependant encore, tout comme les épicléses orientales. Orsi, op. cit., p. 90-96, reconnaissait déjà parfaitement l’équivalence de ces formules <^allicanes et mozarabes avec les épiclèses d’Orient. Cette équivalence est même précieuse, au point de vue dogmatique et apologétique, pour réfuter l’exclusivisme de la théorie grecque touchant la forme de la consécration.

A Milan, l’épiclése n’a disparu qu’au viiie siècle, affirme Hausclien, op. cit. Cf. Schermann, dans Hômisclw Quartalsclirift, 1903, p. 248. Quelle forme y affectait-elle ? A défaut d’autres indications, voici comment elle se présente dans un ancien manuscrit du ix"= ou du X'e siècle, à la messe du j<Hidi saint. Les paroles de l’institution y sont suivies immédiatement de la prière ci après, où l’on n’aura pas de peine à rcconnaitrc l’ananmèsc et les traces d’une éiiiclèse (lu Fils : Jlwe facimus, hæc celebramiis, lua. Domine, prireepta servantes, et ad communionrm invisibilem lioc ipsum, quod corpus Domini suminuis, mortem Domini nunliamus. Tuum vero est, omnipotens Pater,

millere nunc nobis unigenilum Filium tuum quem inquærentibus spontemisisti. Qui quumsis ipse immensus et inœstimabilis, Deum quoque ex le immensum et inwstimabilem genuisli, ut cujus passione redemptionem Inimani generis tribuisti, ejus nunc corpus tribuas ad salulem. Per eunulem Christum Dominum nostrum, pcr quem lisec omnia. Domine, semper bona créas, sanctificas, vivificas, benedicis et nobis famulis luis largiler prœstas ad augmentum fldei et rcmissionem omnium peccatorum. Muratori, Liturgia Romana velus, t. i, p. 133. Cf. Missale Ambrosianum, Milan, 1831, p. 142-143 ; Hoppe, op. cit., p. 92-93 ; Duchesne, Origines du culte chrétien, 2^édit., Paris, 1898, p. 208, note 2.

2° L’épiclése dans la liturgie romain". — Pour ce qui regarde la liturgie romaine, on peut répéter aujourd’hui encore ce qu’écrivait Hoppe, op. cit., p. 93, en 1864 : « La question de savoir si le canon de la messe romaine contenait une épiclèse, reste jusqu’ici une question ouverte. > Acette époque, le même auteur répondait catégoriquement par l’affirmative à une telle question, et il consacrait une bonne partie (le son ouvrage, p. 93-210, à démontrer le bien-fondé de son opinion. Après avoir refait avec lui l’examen des nombreux documents qu’il a réunis, je crois devoir me rallier pleinement à son avis, bien que quelques auteurs récents (P. de Puniet, Edm. Bishop, Hatiffol, Varainc) adoptent l’opinion contraire ou se montrent encore hésitants. Rausclien, op. cit., 2e édit., p. 112, note 3 ; trad. Decker et Ricard, p. 1908, note 3, est trop affirmatif quand il dit, avec renvoi à Funk, Kirclengeschichllictie Abhandiungen, t. iii, p. 86, que tout le monde s’accorde à reconnaître l’existence de l’épiclése romaine. Disons du moins que beaucou]) de liturgistes, tant anciens que modernes, la reconnaissent en effet.

L’épiclése, croyons-nous, a existé autrefois dans la liturgie romaine, et il est possible encore aujourd’hui d’en retrouver les traces. Une lettre du pape saint Gélase (492-496) à l’évêque Elpidius de Volterra atteste cette existence à la fin du ve siècle. Voici ce passage : Sacrosancta religio qure catholica tenet disciplinam, tantam sibi reverentiam vindicaf, ut ad eam quilibet nisi pura conscientia non audeat pervenirc. Nam quomodo ad divini miislcrii consecrationem civlestis Spirilus invocalus adveniet si sacerdos, qui cum adesse deprecatur, criminosis plenus aclionibus reprobetur ? Thiel, Epislolec romanorum ponlificum genuinæ, t. i, p. 486. Cf. P. L., t. lix, col. 143. La réponse est trop facile, qui consiste à ne voir dans ce texte d’un pape qu’une allusion à la liturgie orientale ou à celle de^oiterra. mais non point à la liturgie romaine. Varaine, oji. cit., p. 124 126. La phrase de saint Gélase nous paraîl avoir une jiortée générale et témoigner pour Rome tout autant que pour le reste de la chrétienté. Ailleurs encore, dans son traité De duabus naturis, le même auteur, au cours d’une comparaison qu’il étaplit entre l’eucharistie et l’incarnation, affirme que le pain et le vin « sont changés en substance divine jiar l’opération du.Saint-Ksprit, »

/i Iwnc scilicet divinam transcunt Sancto Spiritu

perficienle subslanliam. Thiel, op. cit., t. i, p. 77. Il est bien vrai qu’ici, argumentant contre le monophysisme, saint Gélase s’inspire probablement, dans l’ensemble de son ouvrage, d’écrits orientaux. Cf. Saltct, I.essourcesde /"I^paviTTi- ; de Théodoret (extrait de la Revue d’histoire ecclésiastique, t. vi, n. 2, 3, 4, Louvain, 1905, p. 52 53). Mais cette observation ne nous semble pas diminuer la valeur de son témoignage.

On a cru longtemps que l’épiclése romaine attestée par saint Gélase se trouvait avant le récit de l’institution cl échappait ainsi, du moins, à la (lifficullë