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EUCHITES — EUDES


leusement observées en Orient. Ce mépris des règles n’allait pourtant pas jusqu’à vouloir se séparer ostensiblement de l’Église. Ils participaient donc à la communion eucharistique, dans un but purement politique ; car, contrairement à la doctrine de saint Paul, ils ne croyaient pas à la présence réelle de Jésus-Christ dans l’eucharistie et traitaient ce sacrement, ainsi qu’on l’a vu plus haut, comme une chose indiflérente. Théodoret, H. E., iv, 10, P. G., t. lxxxii, col. 1145 ; Timothée, loc. cil., col. 49. Et tel était leur souci de ne point rompre avec l’Église que les faux semients et les parjures ne leur coûtaient pas. Volontiers même ils reniaient de bouche leurs propres erreurs et anathématisaient leurs propres partisans. Timothée, loc. cil., col. 52. Étaient-ils formellement convaincus de professer ces mêmes erreurs, ils n’en attestaient pas moins Dieu qu’il n’en était rien, ou, les reniant aussitôt, se déclaraient prêts, plutôt que d’être chassés de la communion, à subir tant qu’on voudrait les rigueurs du régime pénitentiel. Un tel aplomb dans la négation des faits les plus avérés, une telle hypocrisie ne trompèrent bientôt personne ; et cela achève de les peindre sous le jour le plus défavorable. On comprend qu’avec des principes de conduite aussi commodes et des théories si rassurantes ils aient fait tant de recrues et se soient si longtemps maintenus en dépit des sanctions ecclésiastiques et des lois impériales ; on comprend surtout qu’ils soient finalement tombés dans le dévergondage et l’immoralité, offrant ainsi des sujets tout préparés à perpétuer les abominations si justement reprochées plus tard aux pauliciens et aux bogoniiles.

(hôtelier, Eccle.^iæ græcæ monumenla, Paris, 1677-1686, t. III, p. 401 sq. ; TiUemont, Mémoires pour servir à l’hisloire ecclésiastique des six premiers siècles, Paris, 1701-1704, t. viii, p. 527-537 ; t. xiv, p. 449-451 ; Ceillier, Hi’s/oire des auteurs sacrés et ecclésiastiques, Paris, 1858-1864, t. iv, p. 645-647 ; Jacobi, Ueber die Euchieten, dans Zeitschriji fur Kirchengeschichte, 1888, t. ix, p. 507-522 ; DoUinger, Seklengeschichle des Mittelallers, Munich, 1890 ; Conybeare, The ketj o/ truth, Oxford, 1898 ; Mgr Duchesne, Histoire ancienne de V Église, Paris, 1907-1910, t. ii, p. 582-584 ; t. iii, p. 303-305 ; Migne, Dictionnaire des hérésies, Paris, 1847, 1. 1 ; Smith et Wace, Dic/iorio ; // o/ clu-islian biogniphfj ; Hauck, Realencyklopàdie fiir prolestantische Théologie und Kirche, v" Messalianer, 3° odit., Leipzig, 1896 sq. ; Wetzer et Welte, Kirchenlexikon, 2’édit., Fribourg-en-Brisgau, 1880 sq. ; Ul. Chevalier, Répertoire. Topo-bibliographie, Paris, 1905, col. 1057.

G. Bareille.

EUDiCMONJOANNES André, controversiste, était Grec d’origine et de l’ancienne famille impériale desPaléologues. Il naquit à la Canée, dans l’île de Crète, en 1560 ; venu jeune en Italie, il entra dans la Compagnie de Jésus en 1581 et professa avec succès la philosophie à Rome et la théologie à Padoue et fut recteur du collège des Grecs à Rome. Quand le pape Urbain VIII envoya son neveu, le cardinal Barbcrini, comme légat en France, en 1625, il lui adjoignit le P. Eudæmon comme théologien conseil. Ce Père mourut peu après son retour à Rome, le 24 décembre 1625. Il a publié plusieurs écrits pour la défense de son ami Bellarmin contre les attaques du calviniste Lambert Daneau (Danœus), de Jean Barclay, de Lancelot Andrews. Voir Bellarmin, t. ii, col. 560. Il donna aussi une apologie du P. Garnet, supplicié à l’occasion de la conjuration des Poudres, et la soutint de diverses répliques contre l’Anglais Robert Abbot, contre le pamphlet Anli-Colon, enfin contre D. Leidhresser et Isaac Casaubon. Contre le même Casaubon, il défendit aussi les Annales de Baronius. Les ennemis des jésuites lui ont attribué, sans aucune preuve et contre la vraisemblance, une critique très vive de la politique du cardinal de Richelieu, qui parut vers le temps de la légation du cardinal Barberini, sous le

titre : G. G. R. Theologi ad Ludovicum XIII… legem christianissimum admonilio… qua breviler et nervose demonslrntur Galliam fœde et turpiler impium fœdu iniisse, el injuslum bellum hoc lempore contra calholicos movisse (1625).

De Backer-Sommervogel, Bibliothèque de la €’de Jésus, t. iii, col. 482-486 ; Hurler, Nomenclator, t. iii, col. 705706 ; Réponse au livre intitulé : Extraits des assertions…, suite de la 111= partie, p. 494-496, xxvii-xxviii ; J.-M. Prat, S. J., Recherches historiques et critiques sur la C" de Jésus en France du temps du P. Coton, t. iv, p. 577, 582 sq.

J. Brucker.

    1. EUDES (le B##


EUDES (le B. Jean). — I.Vie. IL Instituts. IIL Ouvrages.

I. Vie.

Le B.Jean Eudes, que l’Église vient de placer sur les autels, fut l’un de ces prêtres puissants en œuvre et en parole que Dieu suscita en France, au XVII'e siècle, pour la réforme du clergé et du peuple. Sa carrière fut extrêmement féconde.

Début.

Jean Eudes naquit à Ri, près d’Argentan,

le 14 novembre 1601. Il fut l’aîné de sept enfants, dont l’un, François Eudes, plus connu sous le nom de Mézerai, se fit un nom dans les lettres par une Histoire de France estimée. Dès sa plus tendre enfance, Jean Eudes se distingua par sa piété. A quatorze ans il fit vœu de chasteté parfaite. Après de brillantes études chez les jésuites de Cæn, il demanda à entrer dans la congrégation de l’Oratoire, où il fut admis le 25 mars 1623. Il se forma à la vie intérieure sous la conduite des Pères de Bérulle et de Condren, deux maîtres éminents dont il goûta la doctrine et dont il prit si bien l’esprit qu’il en devint la vivante image.

Ordonné prêtre le 20 décembre 1625, le P. Eudes inaugura sa vie sacerdotale par l’exercice de la plus héroïque charité. La peste désolait son pays natal. Il sollicita et obtint la permission d’aller assister les pestiférés qui mouraient dans le plus complet abandon. Le mal ayant éclaté peu après à Argentan et à Cæn, le jeune prêtre se hâta d’y venir exercer son héroïque ministère. A Cæn, durant l’épidémie, son unique logement fut un tonneau installé dans une prairie qui garda longtemps le nom de Pré du saint, et où l’abbesse des bénédictines de Sainte-Trinité lui faisait porter chaque jour les aliments dont il avait besoin. 2° Fondation du séminaire de Cæn et de plusieurs autres séminaires. — Le lléau disparu, le P. Eudes rentra ù l’Oratoire de Cæn où il vécut jusqu’en 1643. Appliqué de bonne heure à l’œuvre des missions, il y obtint des succès éclatants qui le conduisirent bien vite à la célébrité. Les fondations du Bienheureux se rattachent toutes à ses travaux apostoliques. C’est pour assurer la persévérance des filles et femmes de mauvaise vie ramenées à Dieu par son zèle, qu’il institua en 1641 l’ordre de Notre-Dame de Charité dont nous parlerons plus loin. La même année, il commença ù faire des conférences spéciales aux prêtres dans chacune de ses missions. Il comprenait, en effet, que les missions ne produiraient jamais de fruits durables tant qu’on n’aurait pas réussi à réformer le clergé qui, ; cette époque, vivait trop souvent dans l’ignorance et la débauche, surtout dans les paroisses de la campagne. Ces conférences furent très suivies et produisirent d’excellents résultats. Toutefois, comme le P. de Condren et saint Vincent de Paul, le P. Eudes ne tarda pas ; constater qu’il est bien difficile de réformer des prêtres vicieux, et il en vint à se persuader que l’unique moyen de procurer aux fidèles des pasteurs vertueux et zélés, c’était d’en former en érigeant des séminaires, où l’on réunirait les ordinands pour les initier, pendant un temps plus ou moins long, aux vertus et aux fonctions de leur état. Il demanda à tenter l’entreprise à l’Oratoire de