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FIN DU MONDE


pas à leur nouvel état inconupliblc, q. m. Cette cessation ne sera pas la cause sulOsante de la nonactivité des cléments ; il y faudra l’intervention de la puissance divine, qui privera les éléments de leur transmutation naturelle, q. iv. La lumière des corps célestes sera accrue à cause des bienheureux, q. v. Les végétaux et les animaux n’exisleront plus ; ils seront détruits. N'étant pas incorruptibles, il faudrait un miracle pour les perpétuer, ce qui ne convient pas, q. VI. Quand le monde sera renouvelé, Dieu ne pourrait plus y rien ajouter ni pour la beauté, ni absolument, ni pour le perfectionner, q. vu.

Duns Scot est plus sobre sur toutes ces questions. La purification finale du monde par le feu est prédite surtout par saint Pierre. II Pet., m. Elle pourra se faire de différentes manières. Quelle est la manière la plus conforme à la nature des parties de l’univers ? Ou bien elle se fera par un feu nouveau, créé en l)etite ou en grande quantité, ou plus large et plus épais autour de la terre et non pas sur toute la terre, . « ^inon successivement. Ou bien le feu sera créé sur une partie déterminée de la terre et il fera le tour de la terre. S’il est créé, il faudra qu’une quantité égale soit anéantie dans un autre corps. Quant au lieu de sa création, ce sera peut-être hors de la sphère du feu dans une matière étrangère. Les vapeurs qui sont dans l’air pourront brûler. Ce feu ne se purifiera pas lui-même ; il ne peut pas l'être et il n’en a pas besoin ; mais il purifiera l’air superposé à la terre habitable. In IV Sent., 1. IV, dist. XLVII, q. ii. D’après le Philosophe et les théologiens, le mouvement des corps célestes cessera après le jugement. Mais les autorités sur lesquelles s’appuient les théologiens, Is., LX, 19, 20 ; Apoc., xxi, 23 ; x, 6, ne prouvent pas, et l’argument de raison que donne saint Tliomas n’est pas bon : déficiente cffectu (la génération et la corruption), non icleo cessât causa (le mouvement des corps célestes). La cessation de ce mouvement n’est donc pas prouvée. Le mouvement du ciel peut être éternel ; on peut affirmer qu’il continuera, et plus probablement il en sera ainsi. Ibid., dist. XLVIII, q. II. Voir t. iv, col. 1934.

D’autres théologiens du xiii<e siècle, Henri de Gand, Pierre de Tarentaise, Pierre de la Palu, ont raisonné dans le même sens sur la fm du monde. Leurs sentiments ne diffèrent que sur des spéculations de détail. Ainsi Pierre de la Palu dit qu’après la rénovation du monde la lumière pénétrera à travers la terre jusqu’aux limbes des enfants. In IV Sent., 1. IV, dist. XLVIII, q. i. Jusqu’au xvi'e siècle, tout le temps que régna la scolastique, des considérations de même nature furent développées dans les commentaires du IV « livre des Sentences, de la IIP partie de la Sonwie théologique de saint Thomas ou des ouvrages de Duns Scot. Il serait peu intéressant de les exposer. Pour montrer la continuité de l’enseignement scolastique, résumons seulement les conclusions de Durand de Saint-Pourçain au xive siècle. Il se demande uniquement si le monde sera purifié par un feu de la même espèce que le nôtre. Mais sous cette question unique il en groupe trois. Il prouve par l'Écriture plutôt que par la raison que le monde sera purifié et renouvelé circa tempus judicii. Cette purification est appelée une rénovation ; elle enlèvera une double impureté, qui provient ou du mélange des natures ou des fautes commises. Par suite, le monde ne sera pas purifié en entier, mais seulement en tout ce qui a servi aux usages des hommes, ou bien dans les parties où les hommes ont pu parvenir, par conséquent à la hauteur qu’ont atteinte les eaux du déluge. Donc ni les cieux supérieurs, ni la sphère du feu, ni la partie supérieure de l’air ne seront purifiés ; il n’y aura que la partie inférieure de l’air qui le sera.

Durand interprète ainsi le ps. ci et le c. m de la Il>^ Épître de saint Pierre. Or, il est très convenable que cette purification se fasse par le feu, qui est l'élément le plus pur, sans mélange et sans défaut, au moins dans sa sphère. Quant à sa nature, si c’est un véritable feu, il sera composé de matière et de forme. Il sera créé alors de rien ou engendré d’une matière préexistante. Quelques-uns ne veulent voir en lui que Vignitio elemenii purgandi, ou une véhémente chaleur dans les éléments qui demeureront ce ((u’ils étaient. L’opinion commune des docteurs tend à cette solution. Mais s’il sera un feu véritable, il sera de la même espèce que le nôtre, comme l’eau du déluge a été une eau naturelle. Enfin, il précédera le jugement, d’après le ps. xcvi, 3 ; mais la rénovation des éléments aura lieu en même temps que la résurrection des morts ; toutefois la conflagration durera encore après. In IV Sent., 1. IV, disl. XLVII, q. m.

L’enseignement des scolastiques sur la fm du monde est réellement fondé sur l'Écriture sainte et sur les données de la tradition ecclésiastique. Mais ils adoptent tous les interprétations particulières de saintvugustin, et surtout ils y joignent des considérations appuyées pour la plupart sur la physique de leur temps. Celles-ci sont donc caduques comme la science qui leur a servi de base, et les arguments de raison n’ont que la valeur du raisonnement qui les établit. Aussi les spéculations des scolastiques ont été abandonnées avec raison par les théologiens postérieurs. Quelques nouveaux textes de la Bible ont été cités pour confirmer les spéculations rationnelles, mais ils n’avaient aucun rapport au sujet. De leur doctrine il n’est resté que l’enseignement traditionnel de l'Église, à savoir que le monde périra par le feu, mais que cette fin ne sera pas une destruction ; ce sera une purification, une rénovation et une amôhoration.

3° Les théologiens du xvi" au xviii'e siècle. — Durant cette période, la théologie, au sujet de la fin du monde, est devenue de plus en plus positive. Les théologiens ont scruté les sources de la foi : l'Écriture et la tradition de l'Église. Ils ont multiphé plus ou moins les textes, mais dans le cadre des spéculations scolastiques, dont ils ne se débarrassaient pas, parce que leurs œuvres restaient des commentaires des Sentences. Ainsi Estins prouve longuement que la doctrine du feu de la conflagration et de la rénovation du monde certa est Ecclesiæ ex sacris literis et antiquissima, id est, apostolica traditione doctrina. Sur les relations de cet événement final avec le jugement dernier, il expose les sentiments différents des docteurs et il conclut que probablement l’avènement de NotreSeigneur le précédera. Il ramène à quatre ses eflets : purifier et renouveler le monde élémentaire, éprouver et purifier les justes, faire mourir tous les hommes vivants, enfin punir les impies après le jugement. In IV Sent., 1. IV, dist. XLVII, § 14-16, Paris, 1662, t. II 6, p. 259-262.

Suarez développe davantage le sujet ; il est aussi plus critique, car il discute les opinions différentes des Pères et des docteurs. Il se demande quelle sera la future rénovation du monde. Elle ne sera pas une annihilation. Quelques auteurs cathohques ont pensé que cette rénovation serait substantielle et que tous les corps simples, terrestres et célestes, seraient substantiellement anéantis, ou au moins corrompus, et que d’autres seraient créés ou engendrés, d’une autre nature ou substance. Suarez cite Ambroise Catharin, Comment, in Episl. ad Heb., et In II-^'" Pclri, m ; Jérôme Maggi, De cxustione mundi, 1. II, c. vi, vu ; F. Vallesius, De sacra philosophia, c. lxxxix. Il croit qu’un certain nombre de Pères seraient favorables à ce sentiment. Mais leurs textes présentent seulement un sens général, suivant lequel les êtres corruptibles