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FIN DU MONDE


cela, quand tout sera réduit en poussière, Dieu ressuscitera tous les hommes et procéderaau jugement, 172182. J. Gefïcken, Die Oracula sibyllina, dans Die griechischen civistliclien Sc/ir/Z/s/e/Zer, Leipzig, 1902, p. 101102. Cf. J. Lagrange, Le messianisme chez les Juifs, p. 64. Du V « livre de ces Oracles, qui est de la iin du 1e siècle, il ne faut pas citer les vers 155-161, ni les vers 206-213, qui visent, les premiers la ruine de Rome et de l’Italie au moyen d’une étoile qui tombera du ciel, Gefïcken, op. cit., p. 111-112, les seconds la ruine de l’Inde et de l’Ethiopie par un incendie allumé du ciel. Ibid., p. 114. Mais d’autres passages annoncent directement la fm du monde. Les méchants se cacheront ; è'fffat 5' àx vecpswv oixopoç uupô ; aî(T901J.svoio, et il n’y aura ;. lus de moisson tant que le genre humain n’aura pas reconnu Dieu qui gouverne tout. Alors les Hébreux seuls recueilleront les fruits de la terre, 274-285. Ibid., p. 117. Il s’agit donc de bonheur temporel pour les Juifs. La finale du livre décrit le conflit des astres à la fin des temps. Le ciel lui-même s'ébranlera et jettera en bas les étoiles, qui incendieront l’océan et la terre, et l'éther demeurera sans astre, 512-531. Ibid., p. 129. Des notions astronomiques sont mêlées à la vision prophétique. Cf. J. Lagrange, op. cit., p. 100-101. Ces descriptions n’ont rien de commun, en dehors du fait même de la conflagration générale, avec celle de saint Pierre, qui, s’il n’est pas original, ne leur a emprunté du moins aucun trait.

Mais il y a lieu de se demander si l’apôtre n’est pas l’interprète de la pensée des prophètes et de celle de Notre-Seigneur. En effet, dans les avertissements qu’il donne à ses lecteurs, il se propose expressément de leur rappeler les prédictions des saints prophètes et le commandement du Seigneur, transmis par les apôtres. Pour résoudre l’objection des moqueurs qui se raillent de la promesse de Jésus au sujet de son second avènement, il fait constamment appel à l’Ancien Testament. En parlant de la création et du déluge, il se réfère visiblement à la Genèse. Le jour <Iu Seigneur est une expression prophétique qui est revenue sur les lèvres de Jésus. Pour expliquer le retard de la parousie, il cite, iii, 8, le ps. lxxxix, 48es allusions aux paroles du Maître et à l’enseignement des apôtres ne sont pas moins nombreuses. L’existence elle-même des moqueurs des derniers jours a été annoncée par les apôtres, Jud., 18 ; ils sont les fauteurs de troubles et d’hérésies mentionnés dans les Épîtres pastorales. I Tim., iv, 1 ; Il Tim., iii, l. La longanimité du Seigneur en vue du salut des hommes est salutaire, « comme notre bien-aimé frère Paul vous l’a écrit selon la sagesse qui lui a été départie, » 9, 15, et elle est conforme à la volonté divine de sauver tout le monde, I Tim., ii, 4, même les Juîfs rebelles. Rom., ix-xi. Le jour du Seigneur, qui viendra comme un voleur, est une parole de saint Paul, I Thess., v, 2, fondée sur une comparaison employée par le Maître lui-même. Matth., xxiv, 43. Cf. Apoc, III, 3 ; XVI, 15. La leçon de saint Pierre se termine par une exhortation à la vigilance, iii, 17 ; c’est précisément la grande leçon qui résulte du discours eschatologique de Notre-Seigneur et qui se résume en ces mots : Veillez et tenez-vous prêts. Et on voudrait que dans une exposition, si nourrie d'Écriture, iii, 16, sur le point précis de l’objection des moqueurs, l’auteur, quel qu’il soit, ne fût-il pas même l’apôtre saint Pierre, comme les critiques rationalistes le prétendent, ait introduit sur l’embrasement final du monde un enseignement étranger à la doctrine des prophètes, de Jésus et des apôtres, qu’il aurait emprunté aux Babyloniens, aux Perses, aux stoïciens ou même aux Juifs de son temps 1 Les moqueurs auraient eu beau jeu alors de se railler

de la réponse donnée à leur objection. Tout emprunt à une source non scripturaire paraît donc invraisemblable, sans compter qu’on ne peut en faire la preuve directe. Il est dès lors plus rationnel de conclure que saint Pierre a interprété, au sujet même de la conflagration dernière, les prédictions des anciens prophètes et l’enseignement du Maître et des autres apôtres.

Et, de fait, on trouve dans les Écritures assez d’indices, qui ont servi de fondement à l’annonce de la ruine finale du monde par le feu. L’agent de la dissolution de l’univers, le feu, est symboliquement mentionné dans l’Ancien Testament. Plusieurs jugements de Jahvé contre les ennemis d’Israël sont décrits par les prophètes comme des théophanies et des jugements dans et par le feu de la colère divine. Voir Feu du jugement, col. 2239. Tous ces oracles, fussent-ils purement métaphoriques, ont pu servir de base à la doctrine de saint Pierre sur le jugement et la purification du monde par un feu réel. Cette conclusion, rendue vraisemblable déjà par cette considération précédemment exposée, que l’apôtre appuie tout ce passage sur l'Écriture, le devient bien davantage encore, lorsque nous constatons qu’en matière d’eschatologie générale, il emprunte à Isaïe, li, 16 ; Lxv, 17 ; Lxvi, 22, les termes de « nouveaux cieux » et de « nouvelle terre » , où la justice habitera, iii, 13. L’apôtre saint Paul, d’autre part, auquel saint Pierre se réfère expressément à propos de la longanimité salutaire de Notre-Seigneur dans le retard de sa parousie, avait dit que le Seigneur Jésus se manifestera èv Tnjp ç/oyôr, II Thess., i, 8, et que le jour du Seigneur, ce jour que saint Pierre nomme, iii, 10, manifestera les œuvres de chacun par le feu qui les éprouvera. I Cor., iii, 18. Je n’ignore pas que le premier de ces passages peut s’entendre, comme ceux de l’Ancien Testament, d’un feu métaphorique et que le second est interprété de différentes manières. Il reste à tout le moins que l’image du feu demeure attachée à la manifestation des jugements de Dieu sur les hommes et sur leurs œuvres. Ayant à parler du dernier jugement de Dieu sur le monde entier, saint Pierre a adopté les paroles des prophètes et de l’apôtre saint Paul, il les a prises à la lettre et il les a entendues d’un feu réel, qui doit dissocier toutes choses, même les éléments des êtres matériels ; il a interprété ainsi, d’après la tradition orale, connue et reçue dans le milieu des destinataires de sa lettre, les oracles prophétiques et l’enseignement apostolique, et son interprétation devait être suffisamment fondée pour qu’elle ait pu concourir à résoudre les objections des moqueurs de son temps, qui ne devaient rien trouver à y opposer. Il a introduit cette donnée nouvelle dans une eschatologie qui est celle des Évangiles synoptiques et qui diffère de celle de l’Apocalypse, où le jugement dernier doit être précédé et annoncé par toute une série d'événements, xix, 11XX, 15, quoiqu’il se rencontre avec saint Jean au sujet de la création de nouveaux cieux et d’une nouvelle terre. Apoc, xxi, 1. Une parole de NotreSeigneur, Luc, xvii, 26, lui a fourni la comparaison avec le déluge. La doctrine sur la conflagration générale n’est donc pas étrangère à la révélation chrétienne et elle a été reçue dans l'Église, nous le verrons plus loin, comme faisant réellement partie de cette révélation.

La rénovation du monde ancien.

La dissolution

du monde corporel par le feu sera le commencement de l'éternelle consommation de toutes choses. Dans cet état permanent, l’univere matériel n’aura pas été anéanti ; sous l’action du feu, instrument purificateur mis en œuvre par la volonté de Dieu, ce monde sera purifié, transformé, rénové. Nous avons déjà entendu le prophète Isaïe, saint Pierre et saint Jean après lui,