Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 5.2.djvu/556

Cette page n’a pas encore été corrigée
2411
2412
FILS DE DIEU


1, 3 ; XII, 8. D’après A. Lelong, op. cit. (notes sur ces passages et introduction, loc. cit.), après Funl<, l’identité du Christ avec cet ange serait très probable. Cette opinion a été combattue autrefois par Th. Zahn, op. cit., p. 263-282, récemment par O. Bardenhewer, op. cit., p. 95. Nous nous rallions à cette dernière manière de voir. Aucun texte, en effet, ne donne au Fils de Dieu si souvent nommé le titre d’ange ou à un ange le titre de Fils de Dieu. Ensuite Michel est clairement opposé au Fils de Dieu, Sim., VIII, iii, 3 : le Fils de Dieu, c’est le grand arbre de cette similitude ou la loi donnée au monde, tandis que le grand ange glorieux, i, 2 ; iii, 3, qui se tient près de l’arbre et en distribue les rameaux, c’est Michel qui gouverne le peuple et est préposé à l'évangélisation des peuples. Quant au parallèle signalé entre ces fonctions et celles du Fils de Dieu, Sim., V, vi, 2, 3 ; IX, vi, 7, il ne peut que par hyperbole être dit remphr « exactement le même rôle ; » en ré ; lité les cas sont sufiîsamment différents : Michel simplement gouverne, fait prêcher la loi (qui est le Fils de Dieu) et veille sur les croyants ; le Fils de Dieu est la loi même, ou le maître de la vigne qu’il a purifiée par ses immenses labeurs ; il est représenté, il est vrai, comme un homme de taille colossale, entouré des six anges qui avaient travaillé à la tour, Sim., IX, VI, 1, 2 ; mais c’est de nouveau le propriétaire de la tour, ce que n’est pas l’ange, et si six anges seulement l’entourent, c’est qu’il s’agit des ouvriers de cette tour. En résumé, tout nous porte à croire que le septième ange suprême de la tradition juive qu’Hermas aura mis tout à part, c’est précisément non le Fils de Dieu, mais saint Michel l’ange glorieux ; et les deux sont nettement distincts.

b. Le Fils de Dieu et le Saint-Esprit. — « Pour Hermas, c’est le Saint-Esprit qui s’est incarné… La Trinité se compose de Dieu le Père, du Saint-Esprit préexistant à la création, et d’un homme (Jésus) qui a mérité par ses vertus d'être associé au Saint-Esprit et de devenir par voie d’adoption le Fils de Dieu. Sim., V, v, VI ; IX, i. » A. Lelong, op. cit., p. lxxix. Examinons d’abord ces textes, en commençant par le dernier, Sim., IX, i, 1-3, assurément le plus clair contre l’orthodoxie d’Hermas. Celui-ci avait eu successivement des révélations par l'Église sous deux figures, puis par l’ange de la pénitence (le Pasteur) et cela d’après ses progrès dans la vie intérieure ; mais le Pasteur lui déclare maintenant qu’au fond, c'était le même esprit saint (ou Esprit-Saint), qui par ces divers intermédiaires lui parlait et cet esprit, c’est le fils de Dieu, è/.eïvo yàp xb TivsCij.a 6 uib ; toO 0eoC èuTtv. Cela est elair s’il s’agit du Saint-Esprit ; mais ne pourrait-il pas s’agir ici de l’esprit saint déterminé, xô }.a)?, o-av, celui qui donnait des révélations à Hermas ? Tb 7tviO[j.a -h âyiov est employé par Hermas en divers sens : ainsi, Sim., IX, xxiv, 2, parle des bergers « revêtus du saint esprit des vierges » (qui sont les vertus). Cf. Mand., XI, viii, 9. D’autre part, le Fils de Dieu et l’Esprit-Saint, lorsqu’il s’agit d’eux au sens certainement personnel, ne semblent jamais être conçus par Hermas que selon la foi traditionnelle ; nous avons parlé plus haut de Fils de Dieu ; les fonctions du Saint-Esprit en nous sont décrites, i/a/irf., V, IX, XI ; cf. Sim., V, VII, 1, 2 ; IX, xxv, 2 ; enfin on sait l’indétermination du mot TTvïjjj.a même avec les adjectifs ôyiov, Oci : ov, etc., dans la première littérature chrétienne ; le n/e)[i.ix àyiov de Luc, i, 35, a été entendu du Verbe divin par beaucoup de Pères, cf. Justin, Apol., 1, 33, 6 ; Callistc, dans Philosophoumena, IX, 12 ; Hippolyte, Advcrsus Noet., iv ; Tertulllen, Adversus Praxeam, xxvi ; S. Cyprieii, Quod idola dii non sint, xi ; S. Athanase, De incarn., xviii ; S. Hilaire, De Trinil., ii, 26, et saint Paul lui-même, Rom., i, 4, désigna probablement la nature divine du Christ par

les mots Tivsijua àypaûvi, ? ; cf. I Cor., xv, 45 ; II Cor., m, 17 ; I Tim., iii, 16 ; I Pet., iii, 18 ; Heb., ix, 14 ; J. Lebreton, op. cit., p. 252-253, 316 ; enfin pseudoClément, // Cor., IX, 15 ; xiv, 2.

Il nous reste à considérer le passage, Sim., V, v-vi, dont le fond est une parabole destinée à recommander les œuvres surérogatoires. Un maitre planta une vigne, puis la confia à un esclave qui fut fidèle serviteur et même fit plus que son devoir ; le maître appela alors en conseil son fils et ses amis et, vu la conduite de ce serviteur, tous furent d’accord qu’il fallait lui donner la liberté et même l’admettre au rang de fils adoptif ; plus tard, celui-ci fut assez bon pour faire participer ses coserviteurs à ses nouveaux biens. Voici maintenant l’application de la parabole : le maître, c’est Dieu ; le fils (de la parabole évidemment et non pas le fils de Dieu, comme plusieurs ont compris), c’est le Saint-Esprit (phrase sans doute authentique, bien qu’elle manque dans trois documents sur quatre) ; l’esclave, c’est le Fils de Dieu ; les amis, ce sont les anges, etc. Dans cette première explication, le Fils de Dieu est nettement distingué du Saint-Esprit et ce fut un contre-sens d’affirmer que ce texte donnait l’Esprit-Saint pour fils de Dieu. Seulement le vrai Fils de Dieu y semble n’avoir qu’une filiation adoptive, du moins si l’on veut presser un peu la comparaison parabolique : ce qu’il ne faut pas trop faire en général dans Hermas. Mais lui-même nous explique ici directement cette comparaison. Comment représenter le Fils de Dieu par un esclave ? demande Hermas ; et l’ange répond, vi, 1, 2 : le Fils de Dieu n’a de l’esclave que l’apparence ; en réalité, Dieu a établi son Fils maître absolu de sa vigne avec une puissance sans limites ; alors celui-ci a purifié la vigne par d’immenses labeurs, puis il en a été récompensé. Notons que le Fils ici est Fils avant la rédemption et même avant sa mission, ce qui semble décisif contre toute conception de filiation adoptive acquise par la rédemption ; cependant sur la récompense méritée par le Fils de Dieu et qui était précisément dans la parabole la filiation adoptive pour l’esclave, le Pasteur poursuit, vi, 4-7, « cela signifie : l’Esprit-Saint qui préexistait, qui a créé toute la création. Dieu l’a fait habiter dans une chair de son choix. Cette chair le servit parfaitement… ; pour cette noble conduite. Dieu voulut faire de cette chair l’associée du Saint-Esprit, parce que sur la terre, pendant qu’elle portait le Saint-Esprit, elle ne s'était jamais souillée ; ainsi sera récompensée toute chair qui aura servi de demeure sans tache au Saint-Espi it. » C’est ici qu’on a vu l’incarnation de l’Esprit-Saint et la divinisation (peut-être même simplement transitoire) de l’homme Christ Fils de Dieu. Pour sauvegarder l’orthodoxie d’Hermas, plusieurs interprètent ici encore « esprit saint » par « nature divine » ; en soi, cela serait possible, voir plus haut ; mais cela ne semble pas probable dans le contexte à cause du caractère trop clairement personnel de l’Esprit-Saint symbolisé, créateur, habitant dans l’humanité (= la chair) du Christ comme dans la nôtre, etc. D’autre part, il nous paraît qu’on tire trop et de trop grosses conséquences de quelques phrases paraboliques, confuses et isolées ou à peu près. Nous verrions plutôt ici la simple description de la vie méritante du Christ en tant qu’homme, sous la direction du Saint-Esp ; it habitant en lui comme en nous tous (le même verbe, xaffjixEtv, est employé, vi, 5, 6, 7), en qui il ne s’incarne pas évidemment, ce qui est très évangélique et très juste ; puis, la description de la récompense de cette humanité, associée à la gloire de l’Esprit servi, c’est-à-dire de Dieu, en raison du parallélisme parabolique ; tout au plus y aurait-il là un peu d’adoptianisme non pas rigide (rien que la filiation adoptive), mais mitigé : filiation adoptive dans l’humanité outre