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FILS DE DIEU


clair qu’il doit y avoir génération de l’un à l’autre, c’est-à-dire certaines relations d’origine, de communication active et passive : donner et recevoir ; en ce sens une certaine dépendance, qui placée en Dieu même n’est évidemment pas réelle. C’est ce que fait entendre le quatrième Évangile en disant que tout ce qu’a le Fils, le Père le lui a donné ; que tout ce qu’a le Père, le Fils le possède, mais comme reçu du Père, V, 17, 19-23, 26, 27, 36 ; iii, 35 ; x, 29 ; xiii, 3 ; XVII, 2 ; XVI, 15 ; xvii, 10 ; tout cela d’ailleurs sans division, car par une seule individuelle divinité, le Père et le Fils sont l’un dans l’autre, , x, 37, 38, 32 ; XIII, 31-32 ; XIV, 10, 11, 13 ; xvii, 21. Nulle part dans la révélation cette immanence réciproque n’a été aussi accentuée que dans saint Jean.

Évidemment il ne s’agit pas ici d’un intermédiaire, ou idéal réel, qu’il faudrait dépasser pour arriver à Dieu, comme l'était celui de Philon ; mais d’un médiateur, personne divine qui ne fait qu’un avec Dieu le Père, et qui eu est pourtant réellement distinct, comme un fils de son père, distinct, seml^le-t-il, précisément et uniquement parce qu’il possède leur identique réalité ( ; v) comme reçue, comme engendrée en quelque manière, tandis que le Père la possède comme donnant et engendrant. Jésus a dit cela et Jean l’a finalement compris et nous l’a dit, tous deux non en propositions métaphysiques, mais par manière de contemplation profonde de la réalité vue. Mettre de l’incohérence dans les textes cités (consubstantialité et subordination), c’est ne pas avoir compris ce mystère d’unité profonde qui est l'âme de l’enseignement de Jésus au quatrième Évangile. Cf. J. Lebreton, op.cit., ç- 410-418 ; M. Lepin, op. cit., p. 386-395.

J. Lebreton, op. cit.. p. 397-418 ; M. Lopin, La valeur liistorique (lu quatrième Éoangile, Paris, 1910, t. ii, p. 327-395 ; Mailliet, Jésus Fils de Dieu d’après les Évangiles, p. 14.3193 ; J. B. Stevens, The jolianniiic theology, Edimbourg, 1895 ; E. E. Scott, The fourth Gospel, ils iJiwpose and theology, Edimbourg, 1900 ; W. Sanday, The criticisni o/ the fourth Gospel, Oxford, 1905 ; Th. Zalin, Dus Evangelium des Johannes, Leipzig, 1908 ; J. Knaljenbauer, Comment, in Evang. secundum Joannem, Paris, 1898 ; Th. Calmes, L' Évangile selon saint Jean, Paris, 1904 ; A. Loisy, Le quatrième Évangile, Paris. 1903, et autres commentaires.

3. Enseignement de la primitive Église.

Dans les documents de cette primitive Église (mis à part les enseignements personnels de saint Paul et de saint Jean, non comme différents, mais simplement comme distincts pour la clarté de l’exposition), il faut distinguer une partie apologétique (discours des Actes) et une parl ; ie expositive, exposition historique ou doctrinale de la vie des fidèles dans leur foi, leur morale, leurs mœurs, leur culte, etc. (partie rédactionnelle des Évangiles, récits des Actes, Épîtres de saint Pierre, saint Jacques, saint Jude).

a) Dans la partie apologétique de ces documents, les écrivains sacrés devaient évidemment s’imposer des réserves, aussi s’occupent-ils surtout de démontrer la messianité morale et religieuse de Jésus-Christ. Cependant ils parlent, eux aussi, d’un Messie transcendant, divin dans ses pouvoirs et dans sa nature, c’est-à-dire d’un médiateur établi entre Dieu et les hommes comme participant à la fois à la nature humaine et à la nature divine, du Messie par conséquent johannique et synoptique. Notons rapidement quelques affirmations insinuant cette nature divine : Sauveur universel et unique principe de salut, Act., IV, 12 ; V, 29-32 ; x, 43 ; xiii, 23, 39 ; auteur ou prince (àp/r.Yov) de la vie, iii, 14, 15 ; juge universel, ii, 29 34 ; "x, 42, assis à la droite de Dieu, ii, 34-36 ; vii, 55-57, Jésus est le Seigneur, i, 21, 22 ; x, 36, TtivTtov /.joio :, appellation divine, voir plus loin ; aussi de la droite du Père, il envoie l’Esprit-Saint, ii, 33, lequel est

Dieu, v, 3, 4. Comment Jésus possède-t-il sa nature transcendante, divine ? comme Fils, ix, 20 ; xiii, 33, et peut-être iii, 13, 26 ; iv, 27, 30, si uït ; ŒoO dans ces textes équivaut à utbç Osoj, comme l’a compris la Peschito, voir Dalman, Die Worte Jesu, p. 228, comme parlait la sagesse, Sap., ii, 13 ; xii, 20, se référant elle aussi à Isaïe, xlii, 1 sq., comme parlera la tradition chrétienne dans la Didaché, les deux Clément, Athénagore, etc. ; aussi on ne s'étonnera pas de voir le Seigneur Jésus établi dans une étroite dépendance à l'égard du Père, ii, 33, 36, non pas nécessairement dépendance réelle et adoptianistc, comme le répètent ici Reuss, Holtzmann, Loisy, mais dépendance mystérieuse, comme il peut y en avoir en Dieu. On nous objecte là-dessus surtout Act., XIII, 33, où saint Paul rapporte à la résurrection du Christ le texte du ps. ii, 7 : Filins mens es tu, ego hodie genui te ; mais il est certain que l’apôtre ne veut pas dire que Jésus avant sa résurrection n'était pas du tout fils de Dieu, voir plus loin ; il faut donc comprendre que la résurrection a pleinement manifesté Jésus comme Fils de Dieu, ainsi qu’il est dit, Rom., i, 4. Cf. E. Mangenot, loc. cit., p. 405-408.

b) Dans la vie des fidèles et l’enseignement que les apôtres leur donnent, la nature divine du Christ et le mode dont il la possède sont plus clairement affirmés. a. Jésus est Dieu, car il devient, fait extraordinaire dans un milieu juif, objet universel de culte et de religion comme le Père et avec le Père. On le prie, i, 24, etc., et saint Etienne lui dit : Domine, ne statuas illis ho ; peceatum… Domine Jesu, suscipe spiritum meum, vu, 55-60, comme Jésus lui-même avait prié son Père. On lui consacre des hymnes et des doxologies religieuses, par exemple : à lui honneur, gloire, puissance dans les siècles des siècles, amen, autrefois réservées à Jahvé. Apoc, v, 9-13 ; Eph., v, 19 ; Col., iii, 16 ; I Tim., iii, 16 ; Jud., 25 ; Rom., xvi, 27 ; II Tim., IV, 18 ; II Pet., iii, 18 ; Apoc, i, 6 ; v, 13 ; vii, 10 ; cf. Heb., xii, 20, 21 ; IPet., iv, 11. Tous les actes de la vie chrétienne les plus religieux, on les adresse à Jésus-Christ ou on les fait « au nom » de Jésus, comme autrefois à Jahvé ou au nom de Jahvé : foi, Act., IX, 14, 21 ; xvi, 31 ; xx, 19 ; II Pet., i, 2 ; Jac, II ; invocation, Act., ii, 21 ; ix, 14, 21 ; I Cor., i, 2, 3 ; II Tim., ii, '22 ; cf. Joël, iii, 2 ; baptême, Act., II, 38 ; X, 48 ; xix, 5 ; xxii, 16 ; souffrance et mort même, Act., v, 41 ; ix, 16 ; xv, 26 ; xxi, 13 ; Rom., XIV, 7-9 ; miracles, Act., iii, 6 ; ix, 34 ; xvi, 18 ; cf. m, 16 ; IV, 10 ; xix, 13, 14 ; apostolat, Act., ix, 5 ; cf. viii, 12 ; V, 28, 40 ; iv, 17. De toutes les réalités les plus surnaturelles, les plus divines, Jésus est dit le principe comme Dieu le Père : vocation apostolique, Act., I, 2, 14 (/.jpii zxpî'.oYvwira) ; xxvi, 17 ; la grâce, XV, 11, cf. presque toutes les inscriptions et les finales des Épîtres de saint Paul ; l'évangile, parole de Dieu, Act., viii, '25 ; xiii, 12, 48-49 ; xv, 35-36 ; XIX, 10, 20 ; cf. VI, 7 ; viii, 14 ; xiii, 6, etc. On dit encore la crainte du Seigneur, Act., ix, 31 ; la conversion au Seigneur, Act., ix, 35 ; xi, 21 ; cf. xxvi, 20 ; le service du Seigneur, Act., xiii, 2 ; xx, 19 ; Jac, i, 1 ; la voie du Seigneur, Act., xviii, 25, 26 ; la volonté du Seigneur, Act., xxi, 14 ; la parousie ou le jour du Seigneur, Jac, v, 7 ; II Pet., iii, 4, 8-15, et très souvent saint Paul, I Cor., iv, 5 ; v, 5 ; II Cor., i, 14 ; I Thés., II, 19 ; iii, 13 ; v, 2, 23 ; II Tlies., ii, 1, 2, etc. b. Or ce Seigneur, c’est Jésus-Christ très souvent ; bien plus, « Seigneur » est devenu comme son nom propre, nom certainement divin. Outre les textes que nous venons de citer, voir encore I Pet., i, 3 ; II, 3 ; iii, 15 ; II Pet., i. 2, 8, 11, 14, 18 ; ii, 20 ; iii, 2, 8-15, 18 ; Jac. i. 1 ; u. 1 ; Jud., 4, 17, 21, 24, 25 ; de plus, tout le long du troisième Évangile dans la partie narrative, c’est le imt de saint Luc pour