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FILS DE DIEU


Zeitgeschichle odcr Jiidenliim und Hddenliim ziir Zeit CliTisli imd der Apostel, 2 in-8°, Ratisboniie, 1910, t. ii, p. 28-70 ; Corluy, La Sagesse dans l’Ancien Testament, dans Compte rendu dn Congrès scientif. internat, des callioliqnes, 1889, p. 61-91 ; M. J. Scheeben, La dogmatique, trad. Belet, Paris, 1880, t. II, p. 539-554 ; P. Gontier, Le dogme de la sainte Trinité, in-12, Paris, 1909, p. 47-53 ; S Weber, Die Goltheit Jesu in den altlestamentlichen O/Jenbarungigescliich’e, dans Jésus Christus, Friljourg-cn-Brisgau, 1908, p. 48-67.

La théologie juive palestinienne.

La pensée

religieuse juive, à partir des livres inspirés, s’est développée sous des influcnees purement humaines. Cf. Hackspill, Études sur le milieu religieux et intellectuel, dans la Revue biblique, 1900, p. 564-578. Il faut étudier cette évolution, parce qu’elle est utile à connaître comme point de comparaison pour le développement ctirétien, et de plus, parce qu’elle est nécessaire pour l’intelligence de ce développement, qu’on le prenne dans son stade évangélique ou apostolique ou patristique primitif ; le milieu de l'Évangile, du premier apostolat et des premiers travaux patristiques, est, en effet, essentiellement juif, palestinien ou helléniste. Et cela est surtout vrai de la théologie trinitaire.

Sur le sujet qui nous intéresse, la doctrine judaïque a été très étudiée et se trouve suffisamment connue ; nous allons résumer les résultats acquis.

J. Tixeront, Histoire des dogmes, t. i, La titéologie anténicéenne, p. 35-43 ; J. Lebrelon, op. cit., p. 134-136, 143152, ici encore excellente étude à laquelle nous devons beaucoup ; J.-M. Lagrange, Le messianisme chez les Juifs, Paris, 1909 ; Hackspill, lieuue biblique, 1901, p. 203-215, 377-384 ; R. Travers Herford, Christianity in Talmud and Midrasch, Londres, 1903 ; V. H. Stanton, The Jewish and the Christian Messiah, 1886 ; J. Drumniond, The Jewisli Messiali, 1877 ; P. Volz, Jùdische Eschatologie von Daniel bis Akiba, Tubingue, 1903 ; W. Bousset, Die Religion des Judentumsim Neutest. Zeitalter, 2e édit., Berlin, 1906 ; W. Balj densperger. Die messian. apokalypt. Hoffnungen des Judeniums, 3e édit., Strasbourg. 1903 ; L. Gry, Les Paraboles d’Hénoch et leur messianisme, Paris, 1911 ; Le Messie dans le Targum des prophètes, Lausanne, 1911, etc., sans oublier les histoires générales de Schûrer, t. ii, § 29 ; J. Felten, toc. cit. ; F. Weher, Jùdische Théologie aiif Grand des Talmud und verwandter Schriflen, 2e édit., Leipzig, 1897, etc., et les articles encyclopédiques nombreux.

On s’accorde à donner comme une des principales caractéristiques de la théologie judaïque, à partir surtout de la domination grecque, un sentiment plus profond et de plus en plus accentué de la transcendance de Dieu. Par réaction, sans doute, contre le polythéisme trop humain des Hellènes, les Juifs affirment ardemment le monothéisme et la sublimité de la divinité infiniment séparée de la créature. Bien que Dieu soit plutôt conçu plus éloigné de l’homme que plus divin, cf. Lagrange, op. cit., p. 52-53, cette tendance, en soi, était excellente. Sous diverses influences qu’on ne peut analyser ici, la pensée juive en tira malheureusement sa théorie d’intermédiaires divers destinés à relier la créature et le créateur, ou au moins celle de divers substituts du Nom devenu ineffable. Par contre, le relief de l’iiypostase distincte, sagesse divine engendrée, diminuait et s’effaçait.

D’une façon générale, la théorie des puissances intermédiaires se développa surtout à Alexandrie, celle des substituts dans le judaïsme palestinien ; nous ne parlons maintenant que de celui-ci. On a souvent exagéré la portée de ces diverses conceptions au point de vue trinitaire, spécialement en ce qui concerne le Fils de Dieu ; essayons de mettre les choses au point.

1. Puissances intermédiaires.

On trouve déjà des traces de cette conception dans le livre des Testaments, Testament de Juda, xxv, 1, 2 (iie siècle

avant Jésus-Christ), de même dans MeA : f//a surExod., XX, 23 ; Khagiga, 12 a, du Talmud de Babylone (textes dans J. Lebreton, p. 134, 135). Mais au fond en Palestine on ne perdit pas le dogme de l’influence immédiate de Dieu sur le monde et les intermédiaires rarement nommés furent plus nominaux que réels. Cependant, d’une manière semblable, on distingua comme le côté extérieur de l’influence divine, sa parole, sa présence glorieuse (Chekina), son nom, et le côté intérieur immanent de la divinité laissé dans le mystère. Ce point de vue, notons-le, éloignait les Juifs de la théologie trinitaire ; mais il les tenait plus dans la vraie théodicée que les plus ou moins réels intermédiaires de la spéculation alexandrine. Ce ne fut que très tard que les rabbins du Talmud, par opposition précisément à l’alexandrinisme et au gnosticisme aux nombreux éons, inventèrent le Métalrôn ; celui-ci n’a d’ailleurs rien de divin ; c’est tout simplement le premier ange, la première créature assise sur le premier trône inférieur à celui de Dieu. Voir Talmud de Babylone, Sanhédrin, 38 b ; Talmud de Jérusalem, Ta’anith. 65 b ; Mekilta, 45 b, etc. ; cf. Lagrange, op. cit., p. 224-228, 296-300 ; J. Lebreton, p. 151 ; Herford, op. cit., p. 287 ; F. Weber, op. cit., p. 178-180.

2. Substituts du nom divin.

On a parfois considéré la Memra ou la Chekina judaïques comme des intermédiaires divins dans le genre de la Sagesse des livres canoniques, voir Tixeront, op. cit., p. 36, 37 ; M. Lepin, op. cit., p. 49 ; Hackspill, Revue biblique, loc. cil. on s’accorde maintenant à n’y voir plutôt que de simples substituts du nom divin.

a) La Memra (><-ia'3, forme emphatique de ^n » ; ^ = parole). Voir spécialement Lebreton, op. cit., p. 145-148 ; Hackspill, Revue biblique, 1902, p. 59 sq. ; Weber, op. cit., p. 180-184 ; M. Ginsburger, Die Anthropomorphismen in den Targumim, Brunswick, 1891, p. 7-20 ; Kohler, art. Memra, dans The Jewish encijc’opedia.

Les targums, dont la rédaction définitive est tardive (ni*'-ve siècle après Jésus-Christ), nous renseignent cependant sur la pensée judaïque plus ancienne (ie siècle après et même avant Jésus-Christ). Cf. E. Mangenot, Dictionnaire de la Bible, t. v, col. 19962008. Or ils nous parlent sans cesse de la Memra Jahvé, parole de Jahvé. II semble qu’elle intervient chaque fois que Jahvé exerce un acte qui n’est pas jugé assez divin. Dans les métaphores corporelles, au lieu de la bouche, de la voix, de la main… de Dieu, on lit : la bouche, la voix, la main… de la Memra Jahvé, par exemple, Onkelos, Deut., iv, 33 ; v, 21 ; Exod., xxxiii, 22 ; Jonatlian, Is., i, 16 ; xxx, 27, 33 ; I Reg., VIII, 15 ; XX, 36. De même, dans les métaphores désignant des passions humaines ; par exemple, Onkelos, Lev., XXVI, 30 ; Gen., vi, 6 ; Jonathan, II Sam., xxii, 16 ; 1 Sam., XV, 10-35, au lieu de « Je me repens, » « ma Memra se repent. » La Memra est encore comme une médiatrice ; on jure par elle (Onlœlos, Gen., xxi, '23 XXII, 16 ; XXIV, 3) ; on se convertit à elle (Jonathan Is., XLV, 22) ; Abraham crut en elle (Onkelos, Gen., XV, 6) ; c’est elle qui secourt (Onkelos, Gen., xxi, 20 ; XXVI, 24, 28 ; xxviii, 20, etc.) ; le pacte de l’alliance se fait avec elle (Onkelos, Gen., xvii, 10) ; elle remplit le rôle de créateur, de souverain juge (Jonathan, Is., XLV, 12) ; évidemment c’est la Memra Jalivé qui a protégé, guidé, etc., les patriarches, le peuple, les prophètes (Onkelos, Gen., vi, 6-7 ; vii, 16 ; xv, 1-6, etc.). On trouvera, dans les références indiquées, ces textes et d’autres encore ; voir un résumé systématique dans L. Labauche, Leçons de théologie dogmatique, Paris, 1911, p. 20-28. Les targums de Jonathan et de Jérusalem mettent parfois, à la place de Memra, Dibbuva, qui a le même sens.