Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 5.2.djvu/535

Cette page n’a pas encore été corrigée
2369
2370
FILS DE DIEU


(le la Vulgatc, trahissant certainement, çà et là, une main chrétienne (Crampon). La sagesse va se glorifier elle-même « dans l’assemblée du Très-Haut…, en présence de sa Majesté. » Dans une première strophe, 3-8 (5-13), elle rappelle son origine, puis décrit ses œuvres :

Je suis sortie de la bouche du TrèsHaut

Et comme uue nuée je couvris la terre ;

J’habitai sur les hauteurs les plus élevées

Et mon trône fut sur une colonne de nuée.

Seule j’ai parcouru le cercle du ciel

Et je me suis promenée dans les protondeurs de l’abîme.

Parmi tous les peuples j’ai cherché un lieu de repos.

Alors le créateur de toutes choses me donna ses ordres

Et il m’a dit : Habite en Jacob, Aie ton héritage en Israël.

n s’agit là évidemment de la sagesse avec laquelle Dieu a formé le monde, puis dirigé spécialement le peuple hébreu ; le ego ex ore Allissimi prodivi fait allusion à Gen., i, 3 sq. : Dixil Deus… ; c’est par sa parole sage (et puissante) que Dieu a tout fait ; il y a là une prem-ère identification précieuse à noter entre la sagesse et la parole créatrice de Jahvé. Les deux strophes suivantes, 9-14 (14-19) et 15-21 (20-31), après une nouvelle affirmation de l'être éternel de la sagesse, poursuivent la description poétique de son rôle religieux en Sion :

Dés le commencement et avant tous les siècles, j’ai été créée Et je ne cesserai pas d'être jusqu'à l'éternité. J’ai exercé le ministère en sa présence dans le tabernacle. Et ainsi j’ai eu une demeure fixe en Sion…

Le mot « créer » , répété, xxiv, 8, 9 (12, 14) ; i, 4, (7?), traduit le grec y.xCCto qui peut correspondre à l’hébreu,-z- :, comme Prov., viii, 22, et signifie alors simplement « former » . Voir dans Scheeben, op. cit., p. 547, les analogies qui peuvent faire appeler la génération du Verbe une création au sens large.

Une quatrième strophe indique où se trouve pratiquement cette sagesse qui habite en Sion, 22-27 (32-39) :

Tout cela, c’est le livre de l’alliance du Dieu Très-Haut. C’est la loi que M)ïsj a donnée pour l’héritage de l’assemblée Celte loi fait déborder la sagesse… [de Jacob.

Enfin la cinquième strophe 28-32 (40-47) concerne personnellement le fils de Sirach.

c) C’est encore un poème que le c. vu de la Sagesse de Salomon, œuvre alcxandrine peut-être contemporaine de l’Ecclésiastique (œuvre palestinienne), mais ayant une théologie bien plus développée, grâce à l’influence, du moins partielle, de la philosophie grecque. C’est un poème, ou plutôt une partie du grand poème. Sap., i, 1-ix, 17. Cf. L. Mariés, Rc marques sur la forme poétique du livre de la Sagesse, dans la Revue biblique, 1908, p. 251-257. Après les chants de l’immortalité et du jugement, vient le chant de la sagesse, vi, 12-ix, 17. De celle-ci, la strophe, vii, 17-viii, 1, décrit la splendeur en ces termes :

En clic, il y a un esprit (ou elle est uu esprit) intelligent, saint,

t-'uique, multiple, immatériel.

Actif, pénétrant, sans souillure,

Infaillible, impassible, aimant le bien, sagacc.

Ne connaissant pas d’obstacle, bienfaisant.

Bon pour les hommes, immuable, assuré.

Tout-puissant, surveillant tout.

Pénétrant tous les esprits.

Les intelligents, les purs et les plus subtils.

Car la sagesse est plus agile que tout mouvement.

Elle pénétre toutes les parties de l’miivers à cause de sa

Elle csl le souffle de la puissance de Dieu, [pureté.

DICT. DE THÉOL. CATHOL.

Une pure émanaiion{i/.-<', 'Arn'/) de la gloire duDieu tout-puissanl.

Aussi rien de souillé ne peut tomber sur elle.

Elle est le resplendissement (%T.a’j-f(i>y[j.a) de la lumière éternelle

Le miroir sans tache de l’activité de Dieu

Et l’image (six ; /) de sa bonté.

Étant unique, elle peut tout ;

Restant la même, elle renouvelle toutes choses [saintes.

Et à travers les âges, elle se répand dans toutes les âmes

Puis, après une description des recherches faites par le sage pour obtenir cette épouse au-dessus de tout, la sagesse, viii, 2-21, vient cette prière admirable demandant à Dieu d’envoyer la sagesse assise près de son trône, ut mecum sit et mecum laboret ; sait enim illa omnia et intelligil, ix, 1-12. « Il est difficile de pousser plus loin, sans parler comme saint Jean, le caractère personnel de la sagesse incréée. » Touzard, loc. cit., p. 152. On lira dans Scheeben, op. cit., p. 551, un très bel exposé de cette admirable gradation d’images qu’emploie le sage aux versets 25 et 26, cherchant toujours quelque chose de moins matériel à la fois et de plus consistant dans les émanations créées. Voir aussi Origène, De principiis, 1. I, c. ii, n. 8 sq., P. G., t. xi, col. 136 sq. On sait que l'Épître aux Hébreux, i, 3, pour décrire l’origine éternelle du Fils de Dieu, ne trouva rien de mieux que de citer Sap., vii, 26, cum sit splendor gloriee et figura subslanliiB ejus. Cf. Col., i, 15.

Dans le même livre, il faut noter encore quelques textes. En elle-même, la sagesse est un « esprit » , I, 0 ; IX, 17, et tout le c. i, où sagesse. Esprit de sagesse, Esprit du Seigneur, Esprit-Saint semblent identifiés ; elle est assise près du trône de Dieu, ix, 4. Dans le monde elle est le principe d'œuvres multiples à allure personnelle ; elle est l’ouvrière de tout ce qui existe, vii, 21 ; viii, 6 ; comme elle peut tout, vii, 27, elle dispose tout avec douceur atteignant avec force d’une extrémité du monde à l’autre, viii, 1 ; elle choisit parmi les œuvres de Dieu, viii, 4 ; enfin elle sanctifie, guide dès les temps anciens le peuple saint d’Israël, c. x.

Conclusion. — Il ne peut y avoir de génération ea Dieu que dans l’ordre intellecluel ; la fécondité divine qui fait un Fils de Dieu doit donc être cherchée dans cet ordre où l’intelligence conçoit, enfante la science et la sagesse. Et c’est pourquoi, sans révéler clairement aux Juifs le mystère de son Fils, Dieu dirige leur contemplation vers les origines de sa sagesse. Mémo dans les derniers livres sapientiaux pris en eux-mêmes, il faut reconnaître, en effet, que le relief d’une double personne vivante en Dieu n’est pas complètement net et clair. Cf. Lebreton, op. cit., p. 118 ; J.-B. Pelt, Histoire de l’Ancien Testament, 5e édit., Paris, 1908, t. II, p. 410 ; Franzelin, De Deo trino, 3e édit., p. 112, Ad. Tanquerey, Synopsis theol. dogm. spec, 12^ édit. Paris, 1909, t. i, p. 418 ; F. Prat, art. Logos, dans le Dictionnaire de la Bible, t. iv, col. 325. Cependant il y a en eux plus que de la poésie humaine, nous l’avons remarqué ; plus que du raisonnement humain. En effet, la conception de la sagesse, que nous venons d'étudier, n’est pas née dii besoin d’intermédiaires que les Juifs éprouvèrent alors en face de leur Dieu de plus en plus transcendant (explication courante et certaine d’après Schiirer, Geschichle des jiidischen Volkes im Zeitaller Jesu Christi, 3e édit., t. iii, p. 380), car ce besoin se fit sentir dans la spéculation juive extracanonique, mais non dans nos livres canoniques. Cf. Lagiange, dans la Revue biblique, 1908, p. 495-496 ; J. Felleu, loc. cil. En particulier les développements du livre de la Sagesse ont dû être influencés, mais non causés par la philosophie platonicienne ou stoïcienne. Revue biblique, 1907, p. 87-93. C’est donc Dieu qui peu à peu éleva la pensée religieuse de son peuple de la sagesse humaine soit spéculative (connaissanre

V. - 75