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FÉNELON

136 ; Suppl. ii, p. 32 ; De Backer Sonimervogel, Bibliothèque de la C" de Jésus, t. iii, col. GOO 631 ; l. ix, col. 322 ; Hurler, A’omencta/or, t. v, col. 594-598 ; Kirchenlexikon, t. IV, cri 1322-1324 ; Biographie nationale (belge), t. vii, p. 3-S ; Dictionnaire de biographie chrétienne, pubUé par Mijîne, t. II, col. 174-177 ; Biographie universelle de Mlchaud, etc. , T. Brucker.

FÉNELON (François de Salignac de Lamothe). — I. Jusqu’à sa nomination à l’archevêché de Cambrai. II. L’archevêque de Cambrai. III. L’apologiste, le philosophe, le théologien, l’homme. I. Jusqu’à sa nomination a l’archevêché de Cambrai. — 1° Famille, éducation. — Il naquit le 6 août 1C51, au château de Fénelon, en Périgord, d’une famille illustrée dans les armes et dans la diplomatie. Sa mère était Louise de la Cropte de Saint-Abrc. Né du second mariage d’un père quinquagénaire, il avait du premier lit quatre sœurs et sept frères ; l’un de ceux-ci eut pour fds le Fanfan si cher à son oncle, et si connu sous ce nom familier dans la correspondance de l’archevêque de Cambrai. Le jeune Fénelon passa ses premières années au château paternel, sa « pauvre Ithaque, » comme il l’appellera plus tard (lettre au marquis de Fénelon, 2 août 1714) ; à l’âge de douze ans, nous le rencontrons à l’université de Cahors, où il fit ses cours d’humanités et de philosophie. Charmé de tout ce qu’il apprenait des heureuses dispositions de l’adolescent, le marquis Antoine de Fénelon, l’ami de M. Olier, le promoteur d’une association contre les duels, l’un des plus beaux types au xviie siècle de l’honneur chrétien et chevaleresque, appela à Paris son jeune neveu et le plaça au collège du Plessis. De là, l’étudiant passa au séminaire de Saint-Sulpice. Sous la direction du second supérieur de Saint-Sulpice, Tronson, l’abbé de Fénelon s’initia ; iux études et aux devoirs du sacerdoce ; et, après avoir reçu les ordres sacrés, il entra dans la communauté de prêtres qui desservait la paroisse. A un certain moment, dans l’ardeur d’une jeunesse nourrie de réminiscences classiques et plus encore de pensées apostoliques, il projeta de s’adjoindre aux missions de la Grèce et du Levant ; un frère aîné était déjà parti pour le Canada. De cette époque date la lettre célèbre qu’il écrivit au duc de Beauvilliers dont il était devenu l’ami. " Je pars. Monseigneur, et peu s’en faut que je ne vole, mais je médite un plus grand voyage. La Grèce entière s’ouvre à moi, le sultan effrayé recule, etc. » Lettre enthousiaste, mais non pas lettre folle, quoi qu’on ait dit. C’est un jeune homme et un apôtre qui l’écrit, et qui se rappelle peut-être la mort héroïque du duc de Beaufort devant Candie, dans le siècle où Mallierbe avait prédit aux Orientaux opprimés la venue d’an neveu de Gndefroij, et où Boileau avait donné rendez-vous à Louis XIV aux bords de iHellesponl. Épilres, iv.

Premiers emplois et premières (vuvrrs. — L’abbé de Fénelon ne s’embarqua point pour l’Orient ; il fut chargé à Paris même de l’œuvre des Nouvelles catholiques, jeunes filles récemment converties du protestantisme qu’il fallait affermir dans la vraie foi. Fénelon remplit durant dix ans ce ministère. Pour être moins distrait dans l’exercice de ses fonctions, il avait quitté Saint-Sulpice auquel les liens les plus étroits l’attaclièrent toujours, et il s’était installé chez le marquis Antoine de Fénelon, qui jouissait d’un appartement dans l’abbaye de Saint-Germain. Un autre oncle du même nom lui résigna en 1681 le prieuré de Carenac, bénéfice d’un revenu de 3 000 à 4 000 livres, le seul que Fénelon ait possédé jusqu’à l’âge de quarante-quatre ans.

Grâce au marquis Antoine, l’abbé de Fénelon avait connu le duc de Beauvilliers qui lui fut si cher jusqu’à la fin, et Bossuet avec lequel il se lia d’une étroite amitié que la différence des âges et des situations tempérait d’une nuance de respect et de docilitéPhélipeaux, dans sa Relation de l’origine et des progrès du quiétisnie, nous l’a dépeint obséquieux envers son illustre ami, prodigue même d’éloges qui faisaient rougir Bossuet ; mais Phélipeaux est un ennemi (sa conduite et son insidieux récit l’ont bien montré) ; s’il n’a pas inventé tous les détails qu’il raconte, il les a exagérés ou mal interprétés. Une admiration sincère et très légitime, exprimée en termes peut-être enthou—, siastes par un jeune méridional qui désirait et qui savait plaire (ce fut là une des ressources et aussi un des faibles de Fénelon), a paru de la flatterie à l’abbé retors qui, lui, flattait l’évêque de.Meaux sans grâce, mais non sans liabileté.

C’est vraisemblablement sous l’inspiration de Bossuet que Fénelon écrivit la Réfutalion du système de Mcdebranche, laquelle n’a été pubKée qu’en 1820. Fénelon combat l’opt’misme de.Malebranche par la réduction à l’absurde, et par une démonstration directe de l’incompatibilité de la liberté divine avec ce système. « C’est un chef-d’œuvre de dialectique et de raison que cette réfutation, a dit Ollé-Laprune. Fénelon est à l’aise dans les plus ardues spéculations. Sans tomber, comme Arnauld, en d’interminables disputes, il excelle à retourner dans tous les sens un principe, et il ne clôt la discussion qu’après l’avoir épuisée… » La philosophie de Malebranche, part. II, c. i, 4, Fénelon cl la réfutation de l’optimisn-te. Fénelon l’épuisé trop quelquefois : > Dans ce débat, connue plus tard dans l’affaire du quiétismc, il laisse percer çà et là cette extrême subtilité, excellente sans doute pour trouver le joint d’un sophisme, mais qui fait souvent perdre à la vérité quelque chose de sa force et de sa grandeur… Ce n’est pas la grande manière de Bossuet, chez qui la réfutation est presque toujours précédée d’une savante et lumineuse exposition. Fénelon commence par réfuter ; il déploie les ressources infinies de sa dialectique, il presse à outrance son adversaire, et quand il vient à la partie dogmatique de la tlièse, tout plein encore de la chaleur du combat, il ne procède pas avec ce calme, cette mesure, cet ordre enfin, sans lequel, comme le remarque saint Augustin, il est si facile de s’égarer dans les hautes régions de la théodicée. Ces défauts n’ont pas échappé au regard si ferme de Bossuet… » P. Charles Daniel, De l’optimisme en philosophie et en tliéologie, dans les Éludes de philosophie, de théologie cl d’histoire, septembre 1859.

Conversion des protestants. — Vers ce même temps, préoccupé comme toute la France du retour des protestants à l’unité catholique, et des moyens de la fac.liter, Fénelon écrivit son Traité du ministère des pasteurs. Il y développe la thèse de la nécessité et de l’existence d’une autorité publique, remontant aux apôtres par une succession ininterrompue, et chargée par le Sauveur de maintenir dans la vraie foi le peuple clirétien. Cette autorité, les ministres protestants ne l’ont pas, l’élection populaire n’a pu la leur donner. .vec une érudition solide, avec une claire argumentation, l’abbé de Fénelon explique des textes patristiques que le protestantisme, que le richérisnie aussi avaient en vain allégués. Ces travaux de contre vers _ l’avaient préparé à de difficiles devoirs. Après avo’.r prononcé au cours de 1685 ce sermon pour la fête de l’Epiphanie, dont on a signalé, non sans quelque ironie peut-être, les somptuosités oratoires, mais dont on ne saurait inéconnaîtrc l’accent vraiment apostolique ( « cjne chacun de ceux qui sont libres se dise : Malheur à moi si je n’évangélise, etc. » II partie), durant l’année 1686, de concert avec les abbés de Langeron, Claude Fleury, Bertier, futur évêque de Blois, et Miloii, futur évêque de Condom, Fénelon fut envoyé dans les provinces de l’ouest. Il fallait essayer de convertir ces protestants de la Saintonge et du Poitou, naguère