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EXUPERE (SAINTE

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cjne le clergé toulousain, contrairement aux usages ordinaires, eût été choisir dans l’Aquitaine un prêtre étranger pour le mettre à la tête de l’Iîglise de Toulouse, dans la province narbonnaise. Il faut donc, croyons-nous, renoncer à l’hypothèse de Baronius et voir dans saint Exupère, évêque de Toulouse, un personnage distinct tout à la fois du rhéteur d’Ausone et du prêtre de saint Paulin de Noie.

Quant à préciser les divers points de sa vie, il faut y renoncer aussi faute de documents. On ignore, par exemple, la date et le lieu de sa naissance. Sans doute, une tradition locale le fait naître à Arreau. dans la vallée d’Aure, actuellement dans le diocèse de Tarbes et le département des Hautes-Pyrénées, où une chapelle lui est dédiée de temps immémorial ; mais cette tradition v.c s’appuie sur aucun document primitif, et elle i st trop récente, de l’avis de Tillemont, Mémoires ! >oiir servir à riiistoire ceci., Paris, 1705. t. x, p. 826, pour être suffisamment autorisée. Une autre tradition locale le fait mourir sans date précise à Blagnac, à quatre kilomètres de Toulouse ; mais celle-ci, beaucoup plus vraisemblable, peut être regardée comme certaine, quoi qu’en pense Tillemont, loc. cit., qui est obligé de reconnaître « qu’il est bien plus aisé et bien plus ordinaire de marquer le lieu et le jour où les saints sont morts que ceux où ils ont pris naissance. »

A défaut d’autres détails biographiques et de précisions impossibles à produire sur le commencement, la durée et les faits de son épiscopat, ce que l’on peut assurer, sur la foi de témoignages certains, c’est qu’il fut évêque de Toulouse avant 450 et qu’il mourut après 411. Saint Paulin de Noie le cite parmi les principaux évcques de la Gaule de son temps, à côté de Delphin et d’Amand de Bordeaux, de Simplicius de Vienne, d’Alithius de Cahors, de Diogénien d’Albi, de Vitricius de Rouen. Dans Grégoire de Tours, Hist. Franc, ii, 13, P. L., t. lxxi, col. 210, saint Jérôme ante son amour des pauvres, son dévouement, sa charité, son amour des Écritures. Vers la fin de 405, le moine toulousain Sisinnius arrivait en Palestine, porteur d’une lettre des prêtres Riparius et Desiderius, qui dénonçaient au fougueux polémiste de Bethléhem les agissements hétérodoxes par lesquels Vigilance troublait leur voisinage. Sisinnius portait également wne. lettre pour Jérôme et d’abondantes aumônes jiour les moines. Que contenait cette lettre ? Jérôme nous la laissé ignorer, car il n’y a pas répondu ; il a du moins témoigné sa gratitude, en dédiant à l’évêque de Toulouse le commentaire du prophète Zacharie, auquel il travaillait alors. In Zachurium, 1. I, prol., P. L., t. XXV, col. 1415-1418. « Le frère Sisinnius, (lit-il, 16 ; V/., l. II, prol., col. 1454, 1455, est pressé d’aller en Egypte afin d’y porter aussi l’odeur des suaves parfums que vous avez envoyée aux frères, et que les champs altérés soient arrosés, non par le fleuve d’Ethiopie (le Nil), mais par les cours d’eau les plus abondants des Gaules. » "rrois ans plus tard, en 409, le même Jérôme, dans sa lettre à Agerucchia, Episl., ( ; xiii, 16, P.L., t. XXII, col. 1057, 1058, déplore les ruines accumulées par les barbares dans les Gaules, et ajoute : « Je ne puis sans verser des larmes jironcncer le nom de Toulouse ; si jusqu’à ce moment elle n’a pas succombé, elle le doit aux mérites du saint évêque Exujjére. » Dans sa lettre au moine Rusticus, écrite en 411, il s’exprime ainsi : « Le saint évêque de Toulouse, lîxupère, imitant la veuve de Sarepta, nourrit les autres, tout en souffrant lui-même de la faim ; le visage pâli par les jeûnes, il est tourmenté l)ar la faim d’autrui ; il a dépensé tous les biens du Christ pour apaiser les souffrances des pauvres. Nul l)ourtant n’est plus riche que celui qui porte le corps <lu Seigneur dans une corbeille d’osier, et son sang

dans une coupe de verre. » Episl., cxxv, 20, P. L., t. xii, col. 1085.

Assurément saint Exupère devait joindre à son éminente charité la vigilance pastorale qui prend soin de supprimer les abus, conmie en témoigne sa lettre au pape Innocent, et de maintenir la pureté de la foi. Faut-il donc voir en lui le dénonciateur de Vigilance ? Vigilance, en elTet, troublait au commencement du vo siècle le sud-ouest de la Gaule : il avait été dénoncé à saint Jérôme, qui écrivait, en 404 : Miror sanctum episcopum, in cujus parochia esse dicitur, acquicsccre fiirori cjiis. Episl., cix, 2, P. L., t. XXII, col. 907. Jérôme ne nomme pas l’évêque, mais Devic et Vaissete ont cru qu’il s’agissait vraisemblablement de saint Exupère, étant donné que, parmi les questions qu’il adressait au pape Innocent vers la fin de cette même année 404, l’une regardait l’incontinence des clercs, et que celle-ci pouvait bien être motivée par l’une des erreurs de Vigilance. Hisloire de Languedoc, Toulouse, 1875, t. ii, p. 88. Il est difhcile d’admettre cette hypothèse, car ni dans sa réponse aux prêtres Riparius et Desiderius, les véritables dénonciateurs de l’hérétique, ni dans son traité contre Vigilance, ni dans les passages où il fait l’éloge de saint Exupère, saint Jérôme ne fait la moindre allusion à l’intervention de l’évêque de Toulouse et à son zèle pour la défense de la foi.

Exupère vivait-il encore quand les Goths s’emparèrent de la ville de Toulouse et en firent leur capitale ? On ne saurait le dire. Il avait eu du moins le temps d’achever l’édifice que son prédécesseur, saint Syive, avait commencé en l’honneur de saint Saturnin, fondateur de l’Église de Toulouse ; il le dédia après y avoir transféré les restes de l’évêque-martyr, Surius, Vilæ sanctorum, 1618, t. ix, p. 311, 312, non pour violer son repos par une témérité criminelle, observe Tillemont, Mémoires, t. x, p. 620, mais afin qu’on l’honorât avec plus de dévotion et de décence. Après sa mort, son nom, comme celui de la plupart de ses contemporains, devait êtreinscrit au catalogue des saints. Il n’y paraît pourtant pas encore dans cet amalgame de calendriers et de martyrologes qu’est le Martyrologe dit liiéronymicn de la fin du vie siècle ; mais, dès la fin du ix"", il se trouve dans celui d’Usuard, P. L., t. cxxiv, col. 515, d’où il est passé dans le Martyi’ologe romain. Toulouse célèbre sa fête le 28 septembre ; l’une des églises paroissiales de la ville porte son nom.

II. Sa lettke au pape Innocent P^ — C’est une consultation adressée au pape sur divers points de discipline, de morale et d’Écriture sainte ; elle ne nous est connue que par la réponse d’Innocent P’, du 20 février 405, mais elle prouve que saint Exupère aima mieux, selon les régies de la sagesse, consulter le pape que de demeurer dans l’incertitude par la honte d’avouer ce qu’il ignorait ou de décider témérairement par lui-même. Elle est particulièrement importante pour l’histoire de la discipline ecclésiastique, de l’administration des sacrements aux mourants et du canon tes Livres saints. Episl., vi, P. L., t. xx, col. 495-502.

Sur l’incontinence des clercs.

A Toulouse du

temps de saint Exupère, comme à Taragone du temps d’Himérius, et dans le sud de l’Espagne à l’époque du concile d’Elvire, le clergé devait comprendre, à côté de clercs célibataires, des clercs mariés, qui usaient du mariage, malgré la sublimité de leurs fonctions ; ils avaient des enfants, ce qui était une preuve de leur incontinence. Or la question avait déjà été tranchée à Elvire, voir t. iv, col. 2387, par l’interdiction faite aux membres du clergé d’avoir des rapports conjugaux avec leurs femmes, sous peine d’être exclus de l’honneur de la cléricature. Tant que le