Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 5.2.djvu/310

Cette page n’a pas encore été corrigée

1919

EXTRÊME OiNCTlON DAiNS L’ECRITURE

I1120

Il semble que cette interprétation olUcielle si précise et si complète aurait dû décourager tous ceux qui veulent être catholiques de la tentation de comprendre saint Jacques autrement que l’a fait l'Église. M. Loisy, Autour d’un petit livre, Paris, 1903, p. 251, crut pouvoir écrire : « L’auteur [de l'Épître de Jacques] ne manifeste pas l’intention de promulguer un sacrement du Christ, mais de recommander une pieuse coutume ; s’il voit dans cet usage un moyen de grâce, il ne l’entend pa5.avec la même rigueur que les théologiens qui ont lixé la notion et le catalogue des sacrements. » C'était aller manifestement contre la doctrine du concile de Trente. Cf. Simples ré/lc.iions sur le décret du Saint-O/fice, Lamentabili sane exitu, etc., Ceflonds, 1908, p. 94. Aussi, le Saint-OfTice, par le décret Lamentabili (3 juillet 1907) approuvé par Pie X, condamnait ces affirmationspresque dans leur propre teneur, prop. 48 : « Jacques, dans son Épitre (ji. 14 et 15), n’a l’intention de promulguer aucun sacrement du Christ, mais seulement de reconunander une pieuse pratique et si, dans cet usage, il voit peut-être un luoyen de grâce, il ne le prend pas avec cette rigueur que lui ont donnée les théologiens qui ont étalîli Ja théorie et le nombre des sacrements. » Comme l’ont fait observer très justement les catlioliques qui ont expliqué le sens de cette condamnation, Harent, Univers du 8 août 1907 ; Lagrange, Le décret Lamentabili sane exitu et la critique historique, dans la Revue biblique, octobre 1907, p. 552 : de Guibert, art. Extrême onction, dans le Dictionnaire apologétique de la foi catholique, Paris, 1911, t. i, col. 1870, « le décret n’entend pas affirmer que saint Jacques enseigne ex' plicitement la notion de sacrement, telle que les théologiens l’exposeront plus tard ; ni même que l'étude purement critique de ce texte, indépendamment du secours de la tra<lition, pourrait démontrer avec certitude que c’est bien d’un sacrement ainsi entendu que parle saint Jacques. » En effet, la proposition condamne jI. Loisy ; et il ne disait pas seulement : Dans le texte considéré en dehors de toute tradition religieuse explicative et examiné à l’aide de la seule exégèse historique ou scientifique, étudié comme pourrait l'être un document profane quelconque, je ne réussis pas à découvrir ce que les théologiens appellent un sacrement catliolique. ! I. Loisy allait plus loin et disait :.Je vois dans le rite recommandé par Jacques une pieuse coutume qui peut-être était considérée connue un moyen de grâce, mais qui ne l'était pas à la manière dont, selon les théologiens catholiques, l’extrême onction sanctifie. C'était donc un usage primitivement autre que le nôtre, moins riche d’efficacité surnaturelle ou inférieur en infaillibilité productrice, Loisy ne précise pas ; mais pour lui c’est une coutume différente à l’origine, peut-être pourtant déjà sanctifiante et qui est devenue plus tard seulement notre extrême onction. C’est cette théologie évolutionniste qui ne maintient pas l’identité substantielle entre le point de départ et le terme d’arrivée que le SaintOfiice et le pape ont condamnée.

b) L’histoire prouve l’identité du rile de Jacques et du sacrement catholique. — Pour l'établir, il suffit de comparer les deux termes. LTne première constatation est très facile. Tout ce que dit V Épître de l’onction des malades se vérifie dems le sacrement ccdholique. Rien d’essentiel n’a été retranché. Si nous essayons de définir, d’après saint Jacques, le rite accompli, de son temps, nous aboutissons à la formule suivante : C’est une onction, accompagnée de prières, que les prêtres font sur les chrétiens malades jiour que le Seigneur leur donne le salut, le relèvement, et, s’il y a lieu, le pardon des péchés. Cette définition n’omet rien et reproduit littéralement le langage de l’apôtre. Or que font les catlioliques".' Les chefs des fidèles, évêques ou

prêtres oignent d’huile, en prononçant des fornuiles qui sont de véritables prières, les malades chez lesquels ils sont appelés. Que veulent-ils produire"? Laissons de côté toute discussion d'école, consultons l’enseignement officiel du concile de Trente, sess. XIV, De extrema unclione, c. ii. Les effets du sacrement catholique sont : la grâce, la disparition des restes du péché et même celle du péclié s’il le faut ; le soulagement et l’affermissement de l'âme par la confiance, source tle patience dans la douleur et de force contre les tentations, parfois la santé du corps. Or, saint Jacques a nommé la rémission des fautes et la guèrisou. La grâce, c’est véritablement le salut ; soulager, alîermir, donner confiance, inspirer patience, renouveler, entretenir, augmenter les forces, c’est, au meilleur sens du mot, relever quelqu’un. Saint Jacques parle donc comme nous. Et si on cherche dans la coutume catholique actuelle le primitif aveu des fautes, on obtient satisfaction. Ou bien on considère la confession recommandée par Jacques comme un sacrement proprement dit : aujourd’hui l'Église ordonne au prêtre de recevoir les confidences du malade et de l’absoudre avant de lui conférer l’onction. Ou bien, on croit que l’aveu dont parle l'Épitre n’est pas une partie de la pénitence, mais bien un rite annexé au sacrement des malades : or, la liturgie romaine fait réciter le Confiteor avant que le prêtre verse l’huile.

Les protestants ont objecté longtemps (Luther, lac. cit. ; Calvin, Inst., 1. IV, c. xix) que l’onction était conféréepar un seul prêtre et qu’elle n'était pasdoimée aux malades, mais aux moribonds, à des cadavres. Cette seconde affirmation est inexacte. L'Église catholique ne demande pas que les pécheurs attendent le dernier moment pour recevoir l’onction. Elle lutte contre la négligence des chrétiens coupables cjui cèdent à la tentation de le faire. Pour elle, tous ses théologiens le disent, le sujet est, comme pour saint Jacques, le fidèle atteint de maladie grave. Que la pluralité de ministres soit condition essentielle de la validité du rite, il est impossible de le démontrer à l’aide de l'Épitre ; certains catholiques, les orientaux, ont d’ailleurs conservé l’habitude de recourir à plusieurs prêtres et l'Église approuve leur usage.

Reste à faire la contre-épreuve : Ce que l'Église catholique enseigne de l’extrême onction concorde-t-il avec ce que nous apprend saint Jacques du rile appliqué, de son temi>s, inix midades ? Rien d’essentiel n’a été ajouté. Nous laissons de côté tout ce qui est opinion libre, théorie d'école, [lour ne considérer que la doctrine admise par tous les catholiques d’Occident et d’Orient. Nous ne tenons pas compte de ce qui est l)ropre à l’une ou à l’autre des diverses liturgies qui furent ou qui sont en usage : nous ne regardons que le fond commun sur lequel toutes ont travaillé. L’historien n’usant que de ses propres méthodes est obligé de convenir, croyons-nous, que des croyances ainsi obtenues, les unes sont de tout point identiques à celles des premiers chrétiens, que d’autres sont équivaleiument semblables, qu’aucune n’est contredite par saint Jacques, et que celles qu’il n’exprime pas sont affirmées implicitement par lui ou constituent un développement normal, harmonieux de sa pensée. L'Église catholique enseigne que la matière éloignée du sacrement des malades est l’huile, la matière prochaine l’onction : saint Jacques parle autrement, mais dit la même chose. Nous croyons que l’huile doit être bénite par un membre de la hiérarchie : l’apôtre n’exige pas cette condition ; mais rien dans l'Épitre ne permet de condamner cet usage : tout l’appelle et les effets religieux de l’onction et l’aniriuation que le rite est confié à la hiérarchie.

Les catholiques estiment que la forme doit être une prière prononcée pendant l’onction, prière ayant vrai-