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EXTRÊME ONCTION DANS L'ÉCRITURE


on lit dans l'Épîtie à Tite, j, (5-8 : « Que le sujet [le presbytre] soit d’une réputation intacte, car il faut que l'épiscope soit irréprochable… saint, juste. » Le mot (le saint Jacques est redit.

Au reste, le choix de l’exemple est digne de remarque : Jacques rappelle l’efficacité de la prière d'Élie. Le personnage est fameux par sa sainteté. Mais Élie est célèbre surtout comme prophète ; selon l’expression même de l’apôtre, il a parlé au nom du Scii/neur, i, 10, de même que les presbytres oignent d’huile le malade et prient sur lui an nom du Seigneur, v, 14. La prière d'Élie dont parle saint Jacques, ce n’est pas celle qu’il a faite, en qualité d’homme privé, mais comme représentant de son Dieu, sur son ordre formel, pour appeler la sécheresse ou la pluie. L’exemple est donc choisi fort à propos pour montrer ce que peut la supplication ofllcielle, voulue par le Seigneur et adressée par les hommes de Dieu, par les justes des temps nouveaux. L’objet de la demande d'Élie n’est pas moins digne de reinarque : par la prière qu’il a faite au nom de Jahvé, il a ouvert et fermé le ciel. De même, semble vouloir dire l'Épître, la supplication des S^resbytres en faveur du malade peut l’introduire dans le royaume, lui ouvrir le ciel.

Tout naturellement, après avoir ainsi parlé de ce que font les chefs de la communauté jïour le salut de leurs frères, l’apôtre exalte l'œuvre de ceux qui convertissent un pécheur. C’est son dernier mot et il s’harmonise fort bien avec les enseignements sur l’onction et la rémission des fautes.

Conelusions.

1. Les concepts non catholiques de

l’onction des malades sont inacceptables. — Selon von Soden, les presbytres sont appelés non pour rendre la la santé, mais pour assurer le salut éternel. Op. cit., p. '201. L’hypothèse est inadmissible. Les preuves invoquées par ce critique sont insullisantes. C’est à tort qu’il voit dans le patieTit soulagé par l’onction un moribond incapable de faire des actes de foi, de prier, de confesser ses péchés et aux prises avec la mort à laquelle il n'échappera certainement pas. Saint Jacques parle de malades proprement dits ; ils appellent les presbytres, donc ils voient leur état, n’ont pas perdu connaissance et font acte de foi ; ils sont invités à avouer leurs fautes. Il est formellement parlé de leur fiuérison, elle est possible, elle doit être demandée à Dieu. Si la théorie de von Soden était vraie, le rite n’aurait aucune elhcacité quand celui qui reçoit l’onction revient à la vie. Or, le langage de l’apôtre est à trois reprises absolu, catégorique : « L’oraison de la foi sauvera le malade. Dieu le relèvera ; ses péchés, s’il on a, lui seront remis. « Une interprétation aussi manifestement contraire au texte n’a eu aucun succès. VoirWeinel, Die Wirkungen des Geistes und der Geister, Fribourg-en-Brisgau, 1899, p. 214.

C’est aux mêmes objections que se heurtent les interprètes qui voient dans l’onction des malades un simple dédoublement de la pénitence à l’usage de cette catégorie spéciale des fidèles. Telle paraît être la pensée de M. Loisy. Autour d’un petit livre, Paris, 1903, p. 251. L’application sacramentelle de ce rite « peut être, selon lui, considérée comme une détermination particulière du pouvoir de remettre les péchés. » C’est oublier tout ce qui est dit du salut, du relèvement et fie la guérisou tlu malade. Pourquoi ce dédoublement, pourquoi l’emploi de l’huile, si un elTet spécial distinct des fruits de la pénitence n’est pas attendu"? Pourquoi les chrétiens ont-ils employé il’autres rites que l’onction pour la réconciliation des pécheurs malades ? Nous aussi nous pensons que la rémission des fautes est ici mentionnée ; mais notre interprétation tient compte de toutes les données du texte. Saint Jacques fait allusion au rituel des malades qui se compose de deux actes : confession des péchés (sacramentelle on

non), extrême onction. Le second n’est pas un dédoublement, mais un complément du premier.

Au contraire, beaucoup de protestants et de critiques non catholiques sont portés à croire que l’onction rendait la santé du corps et qu’elle n’avait pas d’autre efficacité. Luther, De caplivitate babylonien, édit.Weimar, 1884-1893, t. vi, p. 568 ; Calvin, De instilutione, 1. IV, c. XIX, § 18, 21, Corpus reformalorum, Brunswick, 18(53-1893, t. I, etc. Récemment Puller, op. cit., p. 13-40, a soutenu avec beaucoup de ténacité cette thèse. L’onction primitive guérissait les malades, lorsqu’il plaisait à Dieu, tel était son unique effet. Elle n'était donc pas un sacrement. Par un contre-sens des chrétiens, elle est devenue, vers le ix"e siècle, un rite qui remet les péchés et produit la grâce. Il est impossible d’appuyer cette hypothèse audacieuse sur le témoignage de saint Jacques. C’est le rite de l’onction luimême et non pas seulement l’aveu des fautes qui obtient rémission des péchés : l'Épître le dit en termes exprès. Il faut ou supprimer un texte ou modifier arbitrairement deux phrases pour soutenir le contraire. D’ailleurs, Puller est bien obligé du moins d’admettre que la prière des presbytres sauve et relève le malade : ces mots peuvent et doivent s’entendre du salut tlu corps, de son relèvement ; mais ils peuvent et, en conséquence, ils doivent aussi s’entendre du salut, du relèvement de l'âme. L’apôtre n’a pas distingué. Demeurer sur terre ne serait pas toujours pour le malade le salut et le relèvement, ce pourrait être le contraire. La santé n’est pas nécessairement une grâce, la mort est parfois une faveur de Dieu. Ou l’onction ne guérissait pas le malade et si elle n’avait eu que la vertu d’un remède religieux, elle aurait été alors dépourvue de toute elïicacité : le langage de l'Épître semble pourtant bien indiquer que le rite n’est pas souvent, n’est jamais vide de vertu. Ou l’onction devait toujours rendre la santé. Saint Jacques aurait donc cru que les chrétiens possédaient le secret de l’immortalité. Pourquoi ne trouvons-nous pas trace de cette croyance chez les chrétiens ? Pourquoi les fidèles de la primitive Église, pourquoi du moins les vrais et parfaits croyants ne sont-ils plus en vie ? Seuls auraient dû succomber ceux qui n’auraient pu recevoir l’onction. En réalité, saint.lacques se préoccupe beaucoup plus de la vie future que de l’existence présente. Son Épître est remplie de la pensée du salut de l'âme. Rien n’est plus éloigné des préoccupations des premiers chrétiens que la recherche d’une longue vie sur cette terre. Ils méprisent l’existence, attendent l’avènement de Jésus, aspirent au royaume, escomptent la couronne de la vie éternelle. Saint Jacques leur prêche la patience au milieu des épreuves du jour, l’espoir des récompenses de demain. Il tient le même langage que les autres écrivains du Nouveau Testament.

Cette théorie de l’onction, simple remède, est encore rendue plus inacceptable par l’addition que lui font subir certains protestants ou critiques pour expliquer son efïlcacité. Quelques-uns ont soutenu que l’huile est recommandée à cause des propriétés médicales qu’on lui attribuait. J. G. Rosenmuller, Scholia in N. T., Nuremberg, 1777-1782, t. v, p. 394, rappelle qu’en Orient et dans le midi, on avait l’habitude de traiter par des onctions diverses maladies. On attribuait à l’huile la vertu de rafraîchir, de fortifier et de guérir. Sans aller jusqu'à prétendre que saint Jacques se contente d’exalter les propriétés médicales de l’onction, l^lusieurs exégètes ont cm qu’il reconnaissait seulement à la prière des presbytres la puissance d’augmenter l’elficacité curative de l’huile. De Wette, A’i/yre Erkluruncj der Briefe des Pelrus, Judas und Jakobus, p. 247. S’il en était ainsi, pourquoi donc recommander l’onction à tous les malades, quelle que soit l’origine, la nature deleur mal ? Pourquoi faire