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EXTASE


à toutes les lois de la statique et semble s’affranchir des lois de la gravité ; » cependant le célèbre médecin ne croit pas que de ce fait ou autre semblable il existe une démonstration scientifique, et il s’en tient à ce queBabinet écrivait voilà plus de cinquante ans : <i qu’au moyen de tant de médiums qu’il voudra, mais sans contact aucun et à distance (un sujet vienne annoncer à l’Académie des sciences) qu’il suspend en l’air, sans autre support que la volonté, un corps pesant plus compact que l’air et tout à fait en repos ; si son assertion est reconnue vraie, il sera proclamé le premier des savants du monde entier. »

10. Pesanteur extatique. — Sainte Marguerite du Saint-Sacrement, dans ses extases de la Passion, ne pouvait être soulevée de terre, quand, à l’exemple du Sauveur sur le chemin du Calvaire, elle tombait par trois fois ; saint Joseph de Cuperiino, dont je rappelais tout à l’heure la légèreté extatique, restait parfois étendu à terre, comme mort, et il fallait les efforts réunis de plusieurs personnes pour le soulever. Imbert-Gourbeyre, La stigmatisation, t. ii, p. 263. Le B. Gilles était suspendu, immobile, son compagnon et plusieurs autres ne purent le faire bouger, en y mettant toutes leurs forces. Acta scmctorum, au 14 mai, t. xvi, p. 409, n. 15.

Il existe des faits de pesanteur, en dehors de l’extase ; je rappelle seulement celui de sainte Lucie. Breviaiium romanum, au 13 décembre. Cf. La stigmatisation, t. II, p. 264, note.

Le P. Surin rapporte que les possédées de Loudun couchées à terre « se roidissoient et apesantissoient tellement qu’un homme bien robuste avoit peine à leur soulever la teste et leur faire perdre terre, le corps ayant une pesanteur que la nature n’eut sceu avoir. » Vie manuscrite du P. Surin, citée par le P. de Bonniot, Le miracle et ses contrefaçons, p. 411.

11. Bilocations. — Il y a bilocation quand la même personne occupe simultanément deux ou plusieurs lieux. Presque toujours les faits de bilocation se manifestent pendant l’extase. Sainte Lidwine, pour bien attester l’authenticité de ses pérégrinations en Terre Sainte ou à Rome, en montrait sur son corps d’irrécusables traces. Acta sanctorum, au 14 avril, t. XI, p. 280-281, n. 47-53. Les boUandistes citent deux cas de bilocation dans la vie de saint Josepli de Cupertino. Il était à Rome, et pourtant on le vit assister à la mort d’Octave Picino, au couvent de la Grotella, non loin de Cupertino ; il était au monastère d’Assise et cependant sa mère, sur le point d’expirer, le vit paraître près de son lit d’agonie, tout environné de lumière. Acta sanctorum, au 18 septembre, t. XLV, p. 1034, n. 87, 88. Je cite pour mémoire les faits nombreux rapportés dans la vie de Marie d’Agréda.

L’apparition de la vénérable Mère Agnès de Jésus à M. Olier est un fait de bilocation. Le curé de Langeac dépose au procès de béatification : « Dans le temps que la mère Agnès apparut à M. Olier à Paris, son corps demeura immobile à l’endroit du monastère où elle se trouvait. » Ribet, La mystique divine, t. II, p. 199.

Enfin on sait que, lors de la canonisation de saint Alphonse de Liguori, son apparition miraculeuse à Clément XIV qu’il assista et consola à ses derniers moments, pendant qu’il restait deux jours entiers à Arienzo, sur son siège, dans un doux et profond sommeil extatique, fut longuement examinée, l’avocat de la cause conclut à la réalité du prodige. Ribet, La mystique divine, t. ii, p. 201. ;

Certains phénomènes que l’on peut lire dans les revues spirites et occultistes, et dont l’authenticité n’a pu être démontrée scientifiquement, ont été rap)prochés par plusieurs auteurs des faits de bilocation.

Il existerait des médiums dont le corps fiuidique jouirait d’une merveilleuse puissance : au cours d’une séance, il se dégagerait si pleinement du corps réel, qu’il irait à des distances étonnantes et en reviendrait en quelques instants. Pendant que le corps réel du médium reste dans la salle d’expérience, le corps fiuidique se livre à Babylone à des recherches archéologiques, ou chasse les oiseaux en pleine forêt d’Australie. Grasset, Idées médicales, l’occultisme, p. 182. Ce sont là d’audacieuses affirmations ; quand elles seront démontrées, nous les croirons.

12. Stigmates. — Il est arrivé à certains extatiques — le D Imbert-Gourbeyre en compte plus de trois cents — de porter dans leur chair blessée, aux mains, aux pieds et au côté, la marque des plaies de NotreSeigneur ; saint François d’Assise est le premier et le plus illustre de ces crucifiés de l’amour. On lit dans la Legenda sancti Francisci, c. xiii, de saint Bonaventure : « Oui, on vit ses mains et ses pieds percés de clous dans le milieu ; les têtes des clous se montraient à l’intérieur des mains et à la partie supérieure des pieds, les pointes sortaient sur la face opposée. Les têtes des clous étaient rondes et noires ; les pointes étaient longues, recourbées et comme rabattues au marteau, dépassant le reste de la chair. Et cela à tel point que, dans la courbure des pointes, il était aisé d’introduire le doigt. Et son côté droit, comme s’il eut été percé par une lance, s’ouvrait d’une plaie rouge, et souvent elle jetait un sang sacré qui trempait sa tunique et ce qu’il portait à la ceinture. » Trad. des Études, du 20 février 1911, p. 473, 474.

Il arrive aussi de trouver reproduits sur le corps des stigmatisés, ou même dans leur cœur, les instruments de la passion : la croix, la couronne d'épines, la lance, les fouets. Dans le cœur de sainte Claire de Montefalco, voici ce que ses compagnes contemplèrent après sa mort : In parte cordis dextera, Jesu Cljristi cruciflxi imago magnitudine muliebris poUicis, licet atiquanto longior, extenta tenens brachia aliquantulum sublata, caput extra Immeros déclive ci dejlexum… Vulnus in Icdcre multo cruore manabat. In hac eadem parte circulase ncrviculis conjectus spineam delineabat coronam, quie hirsutis spinis tortuosisque constabat aeuleis, etc. Acta sanctorum, au 18 avril, t. xxxvii, p. 685, n. 50, 51. Cf. Imbert-Gourbeyre, La stigmatisation, t. i, p. 35 sq. Sainte Claire de Montefalco a été béatifiée le 8 décembre 1882 ; le miracle de la stigmatisation du cœur a été l’un des six miracles étudiés par la commission nommée par Léon XIII ; ce miracle peut encore se constater de nos jours. Voir d’autres exemples, rapportés par Imbert-Gourbeyre, La stigmatisation, t. i.

Le docteur Pierre Janet a observé sur l’extatique Madeleine, qui probablement est une hystérique, certains stigmates qui ne sont que de légères excoriations : des bulles se forment, puis crèvent, avec, pendant quelques jours, une sérosité sanguinolente. Bulletin de l’Institut psychique, juillet 1901, p. 219227. En 1911, il est moins afiirmatif et se contente d'écrire : « Beaucoup de malades ont sur la peau des plaques rouges légèrement saillantes, beaucoup présentent un gonllement notable des glandes vasculaires. » État mental des hystériques, p. 432. M. Georges Dumay affirme que « chez les névropathes (la suggestion) provoque des lésions de la peau à l’endroit précis qu’un expérimentateur désigne. » Revue des deux mondes, 1^' mai 1907.

13. Parfums mystiques, liqueur, transformation des sens. — Pour être complet, je devrais faire mention de certains autres effets merveiUeux de l’extase ; il serait trop long d’insister, je me borne à les indiquer. Pendant les extases de la B^ » Christine de Stommeln, un parfum tout céleste s'échappait de son corps