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EXODE


fondateur de la nation d’Israël et de sa religion, admettent bien qu’il dut donner à son peuple quelques règlements, qui furent considérés comme provenant de Dieu, puisque à cette époque il n’y avait encore aucune différence entre le droit humain et le droit divin. Mais la plupart n’attribuent à ce législateur aucune des lois qui sont contenues dans le Pentateuque. On trouvera à l’art. Lévitique la discussion des principales raisons qu’on invoque contre l’origine mosaïque du code sacerdotal, dont une minime partie se trouve dans le livre de l’Exode. Nous n’avons à parler ici que de la légi-slation du document éloliiste. Elle comprend le Décalogue moral et le code de l’alliance. Sur le Décalogue moral, voir t. iv, col. 163-164. Quant au code de l’alliance, la plupart des critiques, tout en le tenant pour la plus ancienne législation d’Israël, ne le rapportent cependant pas à Moïse. Ils ont fait diverses hypothèses sur sa date, et les plus modérés reconnaissent en lui le résumé du droit coutumier d’Israël sous la royauté pleinement constituée ; il aurait donc été fait après David, vers la fin du ixe siècle ou au commencement du vin", et vraisemblablement, suivant Wildeboer, dans les cercles sacerdotaux de Béthel. Cependant, Driver fait remarquer avec raison que les lois de ce code sont simples et conviennent à une société peu développée, quoique déjà relativenrent avancée en civilisation. Les préceptes concernant le culte sont assez élémentaires ; certaines dispositions, telles que le droit du talion, Exod., xxi, 23-25, sont primitives et beaucoup ont trait à l’agriculture. L’ensemble présente un réel cachet d’antiquité. Einleilung in die Literatur des allen Testaments, trad. Rothstein, Berlin, 1896, p. 37 Ce cachet d’antiquité est encore plus marqué depuis qu’on a pu comparer le code de l’alliance avec le code d’Hammourabi, qui est contemporain d’Abraham. Dans les deux codes, « ce sont les mêmes principes, et lorsque l’application tombe sur les mêmes objets, la rencontre est presque littérale, sans qu’il soit nécessaire de supposer un emprunt littéraire. » J. Lagrange, Le code de Hammoiirubi, dans la Revue biblique, 1903, p. 50. Il y a des différences qui, pour la plupart, sont à l’avantage du code hébreu, surtout au point de vue de la pureté du sens moral et de la délicatesse du sentiment religieux. D’autre part, Hammourabi légifère pour une société opulente, agricole, commerçante ; le livre de l’alliance est fait pour une société patriarcale de semi-nomades, qui pratiquent l’agriculture et l'élevage des troupeaux, mais ignorent les complications de la vie urbaine. Ibid. La promulgation du Décalogue, xx, 2, et quelques prescriptions du livre de l’alliance, qui concernent les étrangers, xxii, 27 ; XXIII, 9, sont motivées sur la condition d'étrangers que les Israélites avaient eue en Egypte et dont le souvenir était encore très vivace. Aussi le P. Lagrange reconnaît que ce code est aussi ancien que Moïse. La méthode historique, 2e édit., Paris, 1904, p. 177. Ed. Klostermann a admis la même conclusion, BeiIruge zum Vcrstàndnis der Enlstehungsgeschichte des Pentaleuchs, nouvelle série, Leipzig, 1907, ainsi que Ed. Konig, Gcschichte dcr ultesicmenilichen Religion, Gutersloh, 1912. Pour ce dernier, le Décalogue et le code de l’alliance ont été rédigés par Moïse lui-même ou au moins sous sa direction. Moïse n’a donc pas été un législateur sans code, et en particulier la législation du livre de l’Exode est son œuvre. Cf. E. Mangenot, op. cit., p. 69-76.

3° Moïse, auteur du livre de l’Exode. — 1. Preuves positives. — Ce livre lui-même donne des indications formelles sur l’activité littéraire de Moïse. Après la défaite des Amalécites à Raphidim, Dieu ordonna au chef des Hébreux d’en écrire le récit en souvenir dans u 1 livre et de l’inculquer dans les oreilles de Josué.

Exod., XVII, 14. Cf. Deut., xxv, 17-19. Le texte massorétique est ponctué de telle sorte qu’il faudrait traduire : « Écris dans le livre, » et on l’entend souvent du Pentateuque, déjà commencé et rédigé en forme de journal ou d’annales. Les massorètes avaient sans doute en vue ce livre, quand ils ponctuèrent ainsi ce passage. Mais la version des Septante n’a pas l’article ; elle porte : si ; (iio/.iov ou èv [ito), ! w, et ses auteurs n’avaient en vue qu’un livre indéterminé. J. Kley a prétendu toutefois que cette signification exigerait la leçon -isc '- :, employée. Deut., xiite 18 ; xxxi, 24 ; Is., xxx, 8 ; Jer., xxx, 2 ; xxxvi, 2. Die Pentateuchfrage, Munster, 1903, p. 217. Néanmoins, la leçon massorétique, fût-elle originale, ne désignerait pas nécessairement le Pentateuque commencé ; elle pourrait viser un livre dans lequel Moise aurait joint ce récit à d’autres déjà rédigés et qui serait reproduit dans le Pentateuque. Plusloin, Exod., xxiv, 4, il est dit que Moïse écrivit toutes les paroles du Seigneur. Or il ne s’agit pas de toutes les révélations diverses faites à Moïse.puisqu’ellesn’avaient pas encore toutes eu lieu, ni même de toutes celles qui s'étaient produites antérieurement, mais de celles qui précèdent immédiatement et qui contiennent les conditions de l’alliance conclue entre Dieu et le peuple, ainsi qu’il résulte clairement de la liaison entre le verset 3 et le verset 4 de ce récit. Il est clair, dès lors, que le Décalogue et le livre de l’alliance sont présentés ici comme ayant été écrits par Moïse lui-même. Un autre code de l’alliance est encore expressément attribué à une rédaction de Moïse. Dieu ordonna une autre fois au législateur d’Israël d'écrire les paroles qu’il venait de prononcer, Exod., xxxiv, 10-26, et qui contiennent les bases de l’alliance proposée au peuple, 27. Moïse obéit à l’ordre reçu et écrivit les dix paroles de l’alliance sur deux tables de pierre qu’il avait préparées, xxxiv, 1, 4, qu’il tenait en mains à la descente du Sinaï et dont il imposa l’observance aux Israélites, 28, 29, 32. C’est le Décalogue jéhoviste, voir t. iv, col. 162163.

Des passages, dits élohistes ou jéhovistes, du livre de l’Exode attribuent donc expressément à Moïse lui-même la rédaction d’une partie de son contenu. Mais ils ne restreignent pas, comme on l’a prétendu, cette part de rédaction à ces passages exclusivement. Il ne s’agit, en effet, que des morceaux historiques ou législatifs, rédigés par ordre de Dieu. Cet ordre, qui s’explique par l’importance du sujet, ne signifie pas que Moïse ne devait écrire que ces événements historiques et les dispositions fondamentales de l’alliance de Dieu avec Israël, et il n’empêchait pas le chef des Hébreux de consigner par écrit toute l’histoire de son peuple au désert et d’autres dispositions législatives moins importantes. Moïse a donc pu écrire aussi ou faire écrire tout le livre de l’Exode. Cf. G. Hoberg, Moses undder Pentateuch, dans Biblische Sludien, Fribourg-en-Brisgau, 1905, t, x, fasc. 4, p. 39-40.

Il n’y a pas dans l’Ancien Testament d’autre attestation formelle de la rédaction de l’Exode par Moïse lui-même ou par son ordre, puisque les témoignages des autres livres semblent viser seulement la rédaction mosaïque du Deutéronome. Voir t. iv, col. 655-656. Mais la composition mosaïque de l’Exode, attestée dans ce livre lui-même, est confirmée par son contenu. L’auteur du livre est, en effet, très au courant des choses égyptiennes. Il nomme les villes de Pithoni et de Ramessès, i, 11, qui ont eu Ramsès II pour restaurateur. Les travaux en briques et les corvées dont il parle, 14, répondent bien à l'œuvre de restauration de ces villes, telle que l’ont révélée les fouilles de M. Naville et que l’indiquent les monuments de ce Ramsès. Cf. v, 6-18. Il connaît le nom des sages-femmes, Séphora et Phua, qui n’obéissaient pas