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EUCHARISTIE D’APRÈS LE CONCILE DE TRENTE


ne doit demeurer assis ou debout ; tous doivent s’agenouiller et se découvrir. 2. Dans toute église paroissiale, il est ordonné de garder la sainte eucharistie dans un vase convenable, de tenir nuit et jour une lampe allumée devant la sainte réserve, de renouveler tous les quinze jours les saintes espèces. 3. Quand on porte la sainte eucharistie aux malades, on doit le faire avec décence et respect, jamais sans lumière. 4. Il faut instruire les fidèles des fruits de l’eucharistie et les cxliorter à la recevoir plus fréquemment, pourvu qu’ils le fassent avec la préparation convenable. Il faut leur rappeler en particulier que rien ne peut les excuser du précepte de la communion pascale. 5. Il appartient aux ordinaires de veiller à l’exécution de ces prescriptions et de punir les transgresseurs.

Un exemplaire de ces canons fut distribué à chaque Père, les 10, Il et 12 octobre 1547 ; on commença à les discuter le 24. Massarelli, Diariiim, IV, dans Merkle, op. cil., t. I, p. 709, 713.

A partir de ce moment, il semble qu’on les ait oubliés. D’après Sarpi, 1. IV, n. 13, il en fut de nouveau question en octobre 1551 ; mais ils ne furent pas publiés. Le Courrayer, commentateur de Sarpi, dit qu’on les renvoya pour le temps où l’on traiterait du sacrifice de la messe, et on n’y pensa plus.

4° Les discussions à Trente en 1562. La communion sous les deux espèces ci la communion des enfants. — La veille de la XIII" session, dans la congrégation générale du 10 octobre 1551, le légat Crescenzi avait indiqué aux Pères quatre questions dont il demandait qu’on différât la solution jusqu’au 25 janvier 1552 : 1. La communion sous les deux espèces est-elle nécessaire au salut et prescrite par la loi divine pour tous les fidèles du Christ et chacun d’eux ? 2. L'Église a-t-elle erré en donnant la communion sous une seule espèce aux laïcs et non aux prêtres qui célèbrent ? 3. Reçoit-on moins quand on communie sous une seule espèce que sous les deux ? 4. Doit-on donner la communion aux enfants ?

11 était donc logique qu’après la XIVi^ session, 25 novembre 1551, on remît à l’ordre du jour ces quatre questions pour les discuter en présence des ambassadeurs protestants. Le fit-on ? Les documents publiés jusqu'à ce jour ne permettent pas de répondre avec certitude. Sarpi, 1. IV, p. 30, l’affirme ; il est contredit par Pallavicini, 1. XII, 15 ; les Actes de Massarelli publiés par Theiner n’en parlent pas.

Quoiqu’il en soit, le délai fixé devait s'écouler sans que puisse s’achever la doctrine de la communion Les protestants étaient arrivés en petit nombre à Trente, envoyés par le duc de Wurtemberg, l'électeur de Saxe et quelques villes, particulièrement Strasbourg ; mais ils semblaient venus pour réclamer, non pour discuter, moins encore pour se soumettre. Le concile crut devoir faire droit à leurs nouvelles exigences ; et, dans l’espoir de les attirer plus nombreux, il leur accorda un nouveau sauf-conduit, plus large que le précédent. La XV « session, 25 janvier 1552, se passa sans qu’aucune définition fût prononcée ; on se contenta d’y lire le décret de prorogation et le texte du sauf-conduit. Theiner, t. i, p. 651.

Mais bientôt la guerre se ralluma entre la France et l’empire. Henri II s'était mis en rapport avec les princes protestants d’Allemagne pour concerter une action commune contre Charles-Quint. Tandis que le roi de France occupait les trois évêchés et s’avançait vers le Rhin, Maurice de Saxe entrait dans le Tyrol et poursuivait l’empereur jusqu'à Inspruck ; les Pères n'élaient plus en sécurité à Trente. Aussi, le 15 avril 1552, Jules III ordonna-t-il de suspendre le concile ; le 28, cette suspension fut promulguée dans la XV I « session. Theiner, t. i, p. 654 sq.

Il fallait attendre dix ans pour que le concile se

réunît de nouveau. Ce fut seulement le 18 janvier 1562 en effet, qu’il reprit ses travaux, et encore les premiers mois se passèrent à recevoir des ambassadeurs, à vérifier des pouvoirs, et toujours à attendre les protestants auxquels on avait donné un sauf-conduit.

Enfin, le 6 juin, le cardinal de Mantoue, Hercule de Gonzague, premier président, annonça que l’on allait reprendre la discussion des articles qui restaient à traiter sur l’eucharistie. Cinq questions furent posées aux théologiens : 1. Y a-t-il un commandement divin nécessaire au salut obligeant tous les chrétiens à recevoir la communion sous les deux espèces ? 2. Les raisons qui ont amené l'Église à refuser l’usage du calice à tout autre qu’au prêtre qui célèbre sontelles de telle nature qu’on ne puisse faire aucune concession sur ce point ? 3. Si, par charité chrétienne, on faisait une concession en faveur d’un pays, convient-il de poser quelques conditions et quelles sontelles ? 4. Reçoit-on moins en communiant sous une seule espèce ou sous les deux ? 5. Est-il nécessaire de droit divin de donner la communion aux enfants avant l'âge de discrétion ? Raynaldi, Annales, an. 1562, n. 49 ; Le Plat, t. v, p. 202 ; Theiner, t. ii, p. 7.

Du 10 au 23 juin, matin et soir, les théologiens exposèrent leurs avis. Soixante et un orateurs, d’après les Actes publiés par Theiner, soixante -treize, d’après Pallavicini, 1. XVII, 6, se firent entendre, et, remarque ce dernier, « comme il arrive souvent, chacun parlait très longuement et ne se bornait pas à ajouter ce qui avait pu être omis par ceux qui l’avaient précédé, mais paraissait ne se souvenir des raisonnements des autres que pour allonger son propre discours en y mêlant quelque réfutation. » Les plus connus de ces orateurs furent Salmeron qui parla le 10, et Canisius, le 15 ; le discours du premier est presque textuellement reproduit dans Raynaldi, an. 1562, n. 50-51, et dans Le Plat, t. v, p. 272-276. Cf. Merkle, op. cit., t. II, p. 643.

Dans cette longue joute oratoire, les idées les plus variées furent émises. Nous en retiendrons seulement ce qui peut être utile à l’histoire du texte. A la première question, tous ou à peu près s’accordèrent à répondre que la communion sous les deux espèces est, de droit divin, prescrite au prêtre, qui célèbre, parce que, dirent quelques-uns, le sacrifice requiert la séparation du corps et du sang ; cf. Theiner, t. ii, p. 8 ; dans les autres cas, elle 'est pas nécessaire. La deuxième et la troisième question furent résolues dans des sens différents. Personne ne refusa à l'Église le pouvoir de légiférer en pareille matière et de faire à qui elle veut des concessions spéciales ; mais les avis se partagèrent sur l’opportunité ne la concession demandée par les Allemands et sur les conditions auxquelles il convenait de la faire. Les uns se déclarèrent opposés à tout privilège qui n’aurait d’autre résultat, disaient-ils, que d’accroître l’orgueil des hérétiques et d’exciter les plaintes des nations moins favorisées ; tel fut l’avis de Salmeron, de Ferdinand de Bellosillo, de Jean Ramirez et d’autres. Cf. Theiner, t. II, p. 9, 12. Un seul, l’Espagnol Pierre Morcato, ibid., p. 33, demanda que l’on supprimât la loi disciplinaire qui réduit tous les laïcs à la communion du pain et qu’on laissât chaque évêque libre d'établir dans son diocèse le mode de communion qui lui paraîtrait le plus opportun. Un certain nombre s’abstinrent de formuler une opinion et déclarèrent s’en remettre à la sagesse des Pères. La plupart furent d’avis que l’on ferait bien d’accorder la communion sous les deux espèces là où ce serait utile pour le bien de la paix et la réunion des dissidents ; mais il fallait imposer certaines conditions préalables, exiger en particulier que les bénéficiaires de cette concession reconnussent qu’il s’agissait d’une faveur, et non d’un