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EUPHRATÈS LE PÉKATIQUE — EUSÈBE D’ALEXANDRIE


matière, de même du cervelet découlent à travers la moelle épinière les semences et les éléments des êtres qui sont engendrés charnellement.

'A° Rien de chrétien. — On trouve bien dans la doctrine des pérates des expressions empruntées au christianisme, comme celles de Père, de Fils, de Christ, de Sauveur ; mais elles sont vides de tout sens chrétien. Étant donné le caractère ésotérique de cet enseignement et l’occultisme de la secte, de telles expressions ne pouvaient servir qu'à tromper les simples et à donner le change. Le monde est un, disaient les pérates, mais divisé en trois ; et le principe de cette division est comme une grande source que la raison peut diviser en d’innombrables segments. Le premier de ces segments est une triade, rpt^ç, composée du bien parfait, de la grandeur paternelle, inengendré, àyi/vriTov, et c’est le Père ; le second est le bien qui s’engendre lui-même, a-JToysviç, et c’est le Fils ; le troisième est sensible, ùoiv.ov, et engendré, vîwïitôvi et c’est la matière. Et ils concluaient, sans qu’on voie comment, qu’il y a trois dieux, trois logos, trois esprits, trois hommes ; car à chaque partie du monde, une fois la division opérée, ils attribuaient des dieux, des logos, des esprits, des hommes et le reste. Philosoph., V, II, 12, p. 185-187. Le monde de la matière ou des formes est bien déclaré ysvvriTov, mais on en fait l’un des trois éléments de la triade ; le dogme de la création est ainsi escamoté. L’idée de chute est passée sous silence ; et si l’on retient l’idée de salut, on la fait consister, comme dans les autres systèmes gnostiques, dans le salut de tout ce que le Fils a fait descendre du Père ici-bas. Le Christ lui-même est sans doute le Fils, mais on le proclame un homme composé d’une nature, d’un corps et d’une puissance triples, Tpi'^urj, xpicioixaTov, Tpio jvx^j.ov. Ce Christ sauveur ne meurt pas : il se contente de faire remonter vers son Père tout ce qui est descendu sur la terre, tout ce qu’il a fait descendre lui-même. Et s’il est question de l’abandon et de la punition de ceux qui ont tendu des embûches, il ne peut s’agir que de ceux qu’on appelait ailleurs des hyliques. Tout cela pour retenir quelques semblants d’idées chrétiennes, sauf à les dénaturer complètement et à leur donner la marque gnostique ; car la vraie pensée des pérates est ailleurs, dans leur théorie du serpent, qui les classe parmi les ophites. En identifiant le serpent avec la raison d’Eve, avec Ca’in, ils se rapprochent des gnostiques qui se servaient de l'Évangile d’Eve, et des ca’inites antinomistes ; en l’identifiant avec le Christ, ils laissent entrevoir plutôt qu’ils ne montrent l’impiété blasphématoire et obscène qui est au fond de la plupart des sociétés secrètes.

Philosophoumena, IV, i, 2 ; V, ii, 12-17 ; X, ii, 10, édil. Cniice, Paris, 1800, p. 54, 185-208, 481-842 ; Clément d’Alexandrie, Strom., VII, 17, P. G., t. ix, col. 553 ; Origène, Conlra Celsiim, vi, 28, P. G., t. xi, col. IXil ; ïliéodoret, Ilserel. lab., i, 17, P. G., t. Lxxxiii, col. 308-369 ; Wetzer et Welte, Dictionnaire de théologie catlioKque, trad. Goschler, Paris, 1863 ; Smilh et Wace, Dictionarij o/ Christian biograpluj, Londres, 1877-1887 ; U. Ctievaticr, Répertoire. Biobililiographie, Paris, 1905, t. i, col. 1408.

G. Bareille.

    1. EUSÉBE (Saint)##


1. EUSÉBE (Saint), pape, fut élu pour succéder à Marcel sur le siège de saint Pierre, lorsque celui-ci fut éloigné de Rome par ordre de Maxence, comme responsable des désordres suscités par les apostats romains qui voulaient rentrer dans l'Église sans pénitence. La date de son avènement est incertaine, 309 ou 310, car l’historien Eusèbe et l’auteur du Liber ponlificalis ne s’accordent pas sur la durée de son règne. D’après l'épitaphe que, longtemps après, lui consacra Damase, le parti hostile à la pénitence lui opposa un compétiteur, Héraclius. C'était un schisme : les troubles recommencèrent. Au bout de quatre mois, la

police intervint de nouveau, arrêta les deux chefs et les chassa de Rome. Eusèbe, interné en Sicile, y mourut peu après, sans doute le 26 septembre 310, jour indiqué dans les martyrologes.

Duchesne, Liber pontificalis, t. i, p. 167 ; Jalîé, Reg. pont, rom., 1'" édit., p. 12 ; 2e édit., p. 26 ; Stilting, Acta sanctorum, 1760, t. vu septembris, p. 765.

A. Clerval. 2. EUSÈBE D’ALEXANDRIE. Ce nom désigne une biographie légendaire et une collection d’homélies du v « au vie siècle. D’après la biographie, cet lîusèbe a été évêque d’Alexandrie après saint Cyrille ; les homélies qui lui sont attribuées ont été éditées par Thilo et Mai et rééditées par Migne, avec la biographie en tête, P. G., t. lxxxvi, col. 287-462 ; elles traitent : 1° du jeiine ; 2° de la charité ; 3° de l’incarnation ; 4° des souffrances temporelles et du bienheureux Job ; 5° de celui qui peut donner la grâce à ceux qui ne l’ont pas, et des prêtres ; 6° de ceux qui meurent par accident ; 7° des néoménies et sabbats, et qu’il ne faut pas observer les cris des oiseaux ; 8° de la commémoraison des saints ; 9° de la nourriture, comment il faut la prendre ; 10° de la nativité du Christ ; 11° du baptême du Christ et des trois tentations ; 12° de la parole : Es-tu celui qui doit venir ? 13° de l’arrivée de Jean aux enfers ; 14° de la trahison de Judas ; 15° du diable et de l’enfer ; 16° du dimanche ; 17° du vendredi saint ; 18° de la résurrection ; 19° de l’ascension ; 20° de la seconde venue du Christ ; 21° de l’aumône, ou du riche et de Lazare ; 22° des astronomes. Ce recueil, d’après M. G. Kriiger, Realencyclopâdie, 3e édit., t. v, p. 603, n’appartient pas au bel âge de la littérature grecque, mais, comme il est cité j dès le viie siècle, il faut le placer du v"" au vi « . j D’ailleurs, il n’est pas homogène ; le plus souvent, j un laïque, nommé Alexandre, est censé interroger Eusèbe, qui lui explique divers points de la foi chrétienne ; telles sont les homélies i, ii, iv, vi, vii, viii, X, XVI, xxii, qui toutes mentionnent Alexandre et peut-être aussi iii, v, ix, avec, plus difhcilement, xi. Les autres figurent dans divers manuscrits sous le nom de saint Jean Chrysostome, xvii, xx, ou d’Eusèbe d'Émèse, xiii, xv (auxquelles il faut peut-être joindre xi) et on est donc amené à supposer qu’elles ont été introduites plus tard dans le recueil primitif. L'écrit primitif était, en somme, un enseignement ou une didascalie, tandis que les pièces, attribuées à saint Jean Chrysostome, sont plutôt des homélies proprement dites, et que les trois ou quatre, restituées à Eusèbe d’Iùiièse, mettent le démon en scène et constituent parfois de petites tragédies.

On a cherché inutilement un Eusèbe d’Alexandrie qui puisse avoir écrit les pièces i, ii, iv, vi, vii, viii, X, XVI, XXII et iii, v, ix, car, à cette époque, aucun évêque d’Alexandrie ne porte le nom d’Eusèbe ; on a supposé gratuitement qu’il pouvait s’agir d’une ville d’Alexandrie située en Asie. On aurait pu remarquer encore qu’Eusèbe de Dorylée est nommé « Eusèbe d’Alexandrie » par Nestorius, Le livre d’Héraclide, Paris, 1910, p. 296, et que l’homéhe xi.sur le baptême et les tentations du Christ, est d’une mentalité et d’une école analogues à celles de Nestorius écrivant ses homélies sur le même sujet. Ibid., p. 338 sq. D’ailleurs, l’homélie xxii, sur les astronomes, est attribuée dans un manuscrit de Paris à Eusèbe, « prêtre et moine » , et on est donc en droit de chercher notre auteur parmi les Eusèbe qui ont écrit sans être évêques, ce qui est le cas de certain hérésiarque d'Édesse et de l’auteur syrien du Livre des degrés, en cours d'édition dans la Patrologia stjriaca, t. iv. Le ton de l’ouvrage dénote aussi une composition palestinienne (ou syrienne) plutôt qu’alexandrine ; il y a de nombreux points de contact avec les ConsliUUions