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sciences, aucune abdication de méthode, car elles gardent toujours liberté parfaite de suivre leur méthode en tout ce qui est vraiment de leur ressort. Si, de fait, quelques auteurs catholiques ont restreint, d’une manière excessive, le champ qui doit être laissé libre à la bonne et saine critique, l'Église ne doit pas en être rendue responsable.

/>) L’intolérance sociale ou politique, telle qu’on l’entend ici, est simplement la défense légitime de l’unité catholique, dans une société qui a le bonheur de la posséder. Cette unité, étant le bien le plus éminiiil qu’une société puisse posséder et un bien duquel procèdent d’immenses avantages, même au simple point de vue de la civilisation humaine, les pouvoirs civils qui comprennent leurs devoirs envers la vérité catholique et qui ont le souci de leurs meilleurs intérêts, ne doivent rien négliger pour la maintenir dans son intégrité, autant que la prudence le leur permet.

Quant à la tolérance politique, selon l’enseignement de Léon XIII dans son encyclique Liberlas du 20 juin 1888, elle peut être accordée par les pouvoirs civils, dans une société irrémédiablement divisée au point de vue religieux, seulement dans la mesure nécessaire pour empêcher de plus grands maux. Même au simple point de vue humain, on ne peut que louer cette sage prudence de l'Église, relativement à l’usage ou au nonusage de la tolérance dans les sociétés humaines. Il est d’ailleurs bien évident que cette doctrine ne peut être rendue responsable des mesures répressives, parfois excessives, ordonnées par le pouvoir civil, agissant d’ailleurs quelquefois beaucoup plus par intérêt humain que pour le bien de la religion.

IV. LE DOGME CATHOLIQUE SUR LE MAGISTÈRE INFAILLIBLE m- : L'ÉGLISE. — Laissant à un article spécial l'étude du pouvoir d’ordre dans l'Église, nous bornerons présentement nos recherches à son double pouvoir de juridiction : le pouvoir d’enseigner avec une autorité infaillible, et le pouvoir législatif.

Quant au magistère établi par Jésus-Christ dans son Église, il est manifeste que l’infaillibilité dont il a été divinement pourvu, n’est pas une simple inerrance de fait, même perpétuellement réalisée ; c’est une inerrance de droit, en vertu de laquelle l’autorité enseignante dans l’Eglise est préservée de toute erreur, par l’assistance surnaturelle qu’elle reeoit du Saint-Esprit. C’est cette infaillibilité active que nous devons étudier dans l’enseignement néo-testamentaire et dans l’enseignement traditionnel. Quant à l’infaillibilité passive, qui est la simple possession intégrale et constante de la vérité par la société chrétienne, nous n’avons point à l'étudier séparément, puisqu’elle découle nécessairement de l’infaillibilité active. On comprend d’ailleurs que, dans notre présente étude, nous omettrons tout ce qui concerne spécialement l’infaillibilité du pape, qui sera l’objet d’un article particulier.

h Existence du magistère infaillible de l’Eglise.— 1. Enseignement néo-testanientaire.

a) Promesses de Jésus-Christ. — Laissant pour le moment la promesse rapportée par saint Matthieu, xvi, 18, parce qu’elle concerne principalement le magistère infaillible de Pierre et de ses successeurs, nous ne nous occuperons présentement que de la promesse faite conjointement à tous les apôtres et rapportée par saint Jean : Et ego roijabo Palrem et alium Paraclctum dabit vobis, ut maneat vobiscum in ivlemum, Spiritum veritatis quem mundus non potest accipere, quia non miel eum née scit cum ; vos uutem cognoscetis eum, quia apud vos manebit vl in vobis erit, xiv, 16 sq. /L-ce locutus eum apud vos manens. Paracletus autem Spiritus Sanctus, quem mittet Pater in noniine meo, ille vos docebit omnia, et suggerei vobis omnia quæcumque dixero vobis, 25 sq. — a) Ce consolateur, iïapâxXY]To ; , selon le sens le plus fréquemment

usité dans le Nouveau Testament, est en même temps appelé -o 7tve0u.a t/, ; à'Lr/Jîta ; , parce qu’il possède la plénitude de la vérité et parce qu’il doit la manifester aux apôtres et à leurs successeurs ; le génitif -cîjç ai.r8s : a ; signifiant à la fois, selon l’usage scripluraiie, la possession et la causalité. — b) Ce consolateur dont le rôle bienfaisant doit, après l’ascension de Jésus, s'étendre à l’humanité entière et dans tous les temps, cet Esprit de vérité qui doit enseigner toutes choses el toute vérité, Joa., xiv, 26 ; xv, 13, est promis aux apôtres, et par conséquent aussi à leurs successeurs, ei ; tôv ocim-iy, c’est-à-dire, selon le sens habituel du Nouveau Testament, pour toujours ou jusqu'à la consommation des siècles. — c) La promesse de cet Esprit de vérité, qui doit rester jusqu'à la fin du monde, avec les apôtres et avec leurs successeurs, et leur enseigner toute vérité, implique en eux la pleine possession de la vérité, non seulement pour eux-mêmes, mais aussi dans l’enseignement qu’ils sont tenus de donner au nom de Jésus-Christ et avec son autorité. C’est ce qu’indique implicitement le rôle attribué par Jésus au Paraclet qui doit, jusqu'à la consommation des siècles et en l’absence du divin Maître, aider les apôtres à l’accomplissement de leur mission. C’est surtout ce qu’indiquent très clairement les divers passages ou les pouvoirs promis ou conférés aux apôtres sontsignalés comme devant durer perpétuellement, particulièrement le pouvoir d’enseigner la doctrine de, lésus-Christ avec une parfaite et intégrale fidélité, selon le texte de saint Matthieu que nous allons analyser.

I>) Institution de Jésus-Christ. — Data eit mihi omnis potestas in cœlo et in terra. Euntes ergo docele omnes gen tes, bapt i : an les eos innomme PatrisetFiliiet Spiritus Sancii, docentes eos servare omnia quæcumqne mandavi vobis, et ecce ego vobiscum sum onniibus diebus, usque ad consummationem sseculi. Malth., xxviii, 18 sq. — a. Jésus, en vertu de la mission qu’il a reçue de son Père, communique à ses apôtres le pouvoir d’enseigner à toutes les nations tout ce qu’il avait précédemment enseigné, docentes eos servare omnia quæcumque mandavi vobis. Ces paroles, ne contenant aucune restriction, comprennent aussi le complément d’instruction qui devait être donné plus tard, selon la volonté de Jésus, par l’illumination du Saint-Esprit, car ce complément d’instruction formellement promis par Jésus et donné par son Paraclet, Joa., xiv, 16 sq., 25 sq. ; xvi, 13, n'était, en fait, qu’une explication de ce qu’il avait lui-même prêché à ses apôtres et qu’ils n’avaient point encore suffisamment compris. — b. Ce pouvoir d’enseigner comporte, pour les apôtres, la prérogative de l’infaillibilité active dans l’enseignement qu’ils doivent donner aux fidèles en vertu de leur divine mission. Car la promesse divine : ecce ego vobiscum sum, d’après un usage scripturaire très fréquent, comme nous l’avons noté précédemment, signifie que Jésus lui-même assure l’heureux succès de la mission qu’il confie à ses apôtres. Or, dans le cas présent, le succès ne peut être suffisamment garanti par Jésus qu'à une condition : c’est que l’enseignement donné, en son nom et avec la plénitude de son pouvoir, reproduise fidèlement et intégralement son propre enseignement, omnia quæcumque mandavi vobis, et qu’il le reproduise sans aucun danger d’erreur pour les fidèles. Car une simple possibilité d’erreur, en une matière aussi grave, sur quelque point et en quelque circonstance que ce fût, suffirait pour ébranler toute confiance et empêcher fatalement le but que se propose Jésus, et dont il promet solennellement la constante et parfaite réalisation, du moins toutes les fois que renseignement sera donné en son nom et avec la plénitude de son pouvoir.

Le succès ainsi pleinement garanti par Jésus suppose donc l’infaillibilité active des apôtres, dans l’enseigne-