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ÉGLISE


la foi catholique, la discipline ecclésiastique, la correction des fidèles, la conversion des méchants et l'éloignement des maux prochains ou futurs. Enchiridion, n. 326. Le même enseignement, supposant évidemment dans l'Église une autorité visible et la nécessité de s’y soumetire visiblement, se rencontre dans le canon 21 du VIIIe concile œcuménique, IVe de Conslantinople, Enchiridion, n. 341, dans la lettre de saint Léon IX à Michel Cérulaire, n. 351 sq., dans la profession de foi proposée à Michel Paléologue par Clément IV en 1267, n. 466, et dans la bulle TJnam sanctam delioniface VIII du 18 novembre 1302, n. 468 sq.

Au commencement du XIVe siècle, les fraticelles, précurseurs de Wicleff sur ce point, soutenaient une Église spirituelle, frugaliUite mundam, virtute décorant, paupertatesuccinctam, qu’ils opposaient à l’Eglise charnelle, surchargée de richesses et souillée de crimes, où dominaient l'évêque de Rome et les autres prélats inférieurs. Cette erreur qui atteignait, par voie de conséquence, la visibilité de l'Église, fut condamnée par Jean XXII le 1e ' janvier 1317 dans la constitution Scinda romana atque universalis Ecclesia. Enchiridion, n. 485.

c) Toute la période, depuis le XVe siècle jusqu’aux temps actuels, est marquée par des affirmations très explicites de la visibilité de l'Église.

Au commencement du XVe siècle, Wicleff soutenant que tout prélat ou évéque, en état de péché mortel, est privé de toute autorité, Enchiridion, n. 595, que l’Kglise romaine est la synagogue de Satan et que le pape n’est pas le vicaire immédiat de Jésus et des apôtres, n. 617, aboutit logiquement à une Église invisible. Ces erreurs sont condamnées par le concile de Constance en 1415 ; et cette condamnation est renouvelée par Martin V le 22 février 1418. Loc. cit. De même, l’erreur de l’invisibilité de l'Église, formellement exprimée par Jean Huss dans les propositions suivantes : 1. Unica est sancta universalis Ecclesia i/use est prsedestinatorum universitas. — 3. l’rœscili non sunt partes Ecclesia', cum nuUa pars ejus finaliter excidet ab ea, eo quod prxdestinatumis caritas quæ ipsam ligat, non excidel. — 5. Præscilus, etsi aliquando est in gratta secundum prwscnlem justifiant, tamen nunquam est jiars sanctæ Ecclesia :  ; et prx-destinalus souper inanet membrum Ecclesiss, licel aliquando excidat a gratia advenlilia, sednon a gratia 2° 'sedestinationis. — 6. Sumendo Ecclesiam pro convocatione prædestinatorum, sive fuerinl in gratia, sive non secundum praisenlem juslitiam, isto modo Ecclesia est articulas fidei, est également condamnée par le concile de Constance en 1415 et de nouveau par Martin V en 1418. Encliiridion, n. 627 sq. Les théologiens de cette époque s’expriment dans le même sens, notamment Thomas Netter et le cardinal Turrccremata. Thomas Netter ou Waldensis (y 1430) prouve contre Wicleff, particulièrement par les paraboles évangéliques de Matth., xiii, xxv, et par l’autorité de saint Augustin, que, dans l'Église mililante, il y a mélange des bons et des méchants. Doctrinale antiquitatum fidei Ecclesia : catholiese, l. III, c. vin sq., Venise, 1571, t. i, p. 157 sq. Les réprouvés sont membres de cette Église, pourvu qu’ils ne sortent point de la société catholique par l’hérésie ou le schisme, ou qu’ils n’en soient point rejetés par des censures ecclésiastiques, l. III, c. ix, n. 3, p. 161. Mais ils sont dans l'Église, sicut sentina in navi, corruplum membrum in corpore aul macula in globo lunari, l. I, c. x, n. 6, p. 166.

Le cardinal Turrecremata († 1468) définit l'Église, la société des catholiques ou l’universalité des fidèles, qu’ils soient prédestinés ou non, qu’ils soient ou non dans la charité, pourvu qu’ils professent la foi catholique intégrale et qu’ils ne soient point retranchés de

l'Église par la juste sentence de leurs pasteurs. Summa de Ecclesia, l. III, c. ni, Rome, 1489, sans pagination. Il justifie aussi, dans l'Église, le mélange des bons et des méchants par les paraboles évangéliques du filet jeté dans la mer et ramassant des poissons de tout genre, bons et mauvais, Matth., xiii, 47 sq., du champ contenant le bon grain et la zizanie, 38 sq., et des dix vierges parmi lesquelles se rencontrent cinq folles et cinq sages. Matth., xxv, 2 sq. Il confirme sa doctrine par l’autorité déjà citée de saint Augustin, et s’appuie finalement sur cet argument de raison que, dans l’hypothèse contraire, toute autorité dans l'Église deviendrait absolument incertaine, l. I, c. m. Quant aux pécheurs, fidèles injusti et peccatores, conformément à l’enseignement de saint Augustin, ils sont dans la sainte Église de Dieu comme des membres desséchés et morts, ou comme des humeurs malignes, l. I, c. v.

Au commencement du XVIe siècle, Luther et Calvin, suivant l’exposé que nous avons donné précédemment de leurs systèmes, niaient, l’un par voie de conséquence et l’autre très ouvertement, la visibilité de l'Église ; et l’Kglise visible et tout humaine que tous deux essayèrent de maintenir ne pouvait sauvegarder le caractère divin de la visibilité de l'Église.

Contre toutes ces erreurs, les théologiens catholiques, depuis le xvr siècle jusqu'à noire époque, soit dans des ouvrages spéciaux, soit dans leurs sommes ou traités théologiques, expliquent et démontrent le véritable concept de la visibilité de l’Kglise.

Pighi († 1542) insiste sur la notion catholique de l’unité de l'Église, consistant non dans le lien de la charité ou de la grâce qui unit tous les membres entre eux et avec leur chef, mais dans la profession de la même foi et dans la soumission à la même autorité. D’où il conclut que les pécheurs sont membres de l’Kglise ; ce qu’il confirme par les paraboles évangéliques que rapporte saint Matthieu, XXII, xxv, et par la parole de saint Paul appliquée à l’Kglise : in magna autem donio non solum sunt rasa aurca et argentea, sed et lignea et fictilia, II Tim., II, 20. Hiérarchise ecclesiasticse asserlio, I. II, c. i, Cologne, 1558, p. 58 sq.

Melebior Cano († 1560) montre que l’erreur prédestinatienne de Wiclelf et de Jean Huss sur l’invisibilité de l'Église, déjà condamnée par le concile de Constance, rend tout exercice de l’autorité dans l’Kglise pratiquement impossible en le faisant dépendre du fait de la prédestination individuelle qui reste nécessairement inconnu ou incertain. Le mélange des bons et des méchants dans l'Église est prouvé par les paraboles évangéliques que rapporte saint Matthieu, xiii, xxii, xxv. De locis theologicis, l. IV, c. iii, Opéra, Venise, 1759, p. 95 sq.

Sta piéton (-j- 1598), dans sa démonstration de la visibilité de l'Église, insiste particulièrement sur le témoignage de l'Écriture de l’Ancien et du Nouveau Testament. De l’Ancien Testament il cite principalement les textes qui prédisent le royaume universel du libérateur ou rédempteur futur, s'étendant visiblement sur toute la terre, depuis la première annonce de cette libération, Gen., iii, 15, jusqu’aux prophélies de David, Ps. xvin, 5 ; xxi, 28 ; xuv, 17 ; xlvii, 2 sq. ; d’Isaïe, ii, 2 ; xlix, 12 ; lii, 10 ; i.iv, 1 ; lx, 1 sq. ; lxi, 9 sq. ; de Jérémie, xvii, 12 sq. ; d'Ézéchiel, xxxvii, 27 sq ; de Daniel, H, 35, vii, 27 ; d’Aggée, ii, 8 ; de Zacharie, ix, 10, et de Malachie, I, 10 ; prophéties que l’auteur applique à l'Église catholique, en s’appuyant surtout sur les interprétations données par saint Augustin. Les principales preuves empruntées au Nouveau Testament sont la double affirmation de Jésus-Christ rapportée par saint Matthieu : Non potest civilas abscondi super montem posita, v, 14 ; Quod si non audieril eos, die