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DUNS SCOÏ


Le ministre du sacrement de pénitence doit régulièrement imposer une œuvre s ; itisfactoire à ceux qu’il absout. La pratique de l’église sur ce point et les enseignements de la tradition nous apprennent que le prêtre ubsolvit quidem a debito pœnse alternai, sed hgat ad solutionem pœnse temporalis, nisi sit sufficienter jam soluta. In IV Sent., 1. IV, dist. XVI, q. i, n. 7. A l’obligation du prêtre, correspond dans le pénitent l’obligation d’accepter la satisfaction imposée ; la même raison, la nécessité d’achever l’œuvre du sacrement, sert de fondement aux deux obligations. In IV Sent., 1. IV, dist. XIX, n. 27. Faudrait-il cependant regarder comme indigne du sacrement et priver de l’absolution celui qui ne semblerait pas disposé à accepter une pénitence modérée ? Duns Scot répond négativement dans la solution d’un curieux cas de conscience où il suppose un pénitent qui veut bien se submittere [sacerdoti] quantum ad commutationem pœnæ xternae in temporalem et non quantum ad laxationem pœnse totalis, sed lantum vult se subdere manui Dei vel in /toc, vel in purgatorio. Loc. cit. On ne peut voir dans cette solution qu’un cas exceptionnel, dans le but de sauver un pécheur, qui autrement rece deret desperalus, et non, comme on l’a voulu dire, un principe d’ordre général.

La prudence et la nature des fautes accusées doivent diriger le confesseur dans le choix des œuvres satisfactoires qu’il impose. En règle générale, ces œuvres doivent être pénales et externes, mais cela n’est pas absolument requis, potest per aliquem bonum non pœnalem satisfieri. In IV Sent., 1. IV, dist. XV, q. i, n. 8. Les maux inévitables de la vie, la mort par exemple ou la maladie, peuvent avoir le caractère de satisfaction, nec obslat quod est pœna necessaria, quia aliquis potest voluntarie acceptare n’ecessariam. In IV Sent., 1. IV, dist. XXI, q. i, n. 10. La valeur de nos actes satisfactoires vient beaucoup moins de notre mérite personnel que des mérites du Christ. Dieuaurait pu, de potentia absoluta, en disposer autrement, mais de potentia ordinata, non est possibile satisfieri Deo, de peccato, nisi virtute passionis Christi. Op. cit., dist. XV, q. i, n. 7. Avec ou sans le sacrement, c’est donc par les satisfactions du Christ que nos satisfactions ont de l’efficacité. Dans le sacrement, elles semblent avoir une valeur ex opère operato. Aussi Duns Scot enseigne-t-il que la satisfaction sacramentelle, accomplie en état de péché’après l’absolution, a une réelle valeur satisfactoire quant à la peine, bien qu’elle n’ait ex opère operanlis aucun mérite rigoureux : dico quod qui semel vere pmnitet et recipit picnitentiam condignam sibi impositam ab Ecclesia… si eam impleal in c/tarilate… non tantum solvit pœnam sed meretur ; si eam adimpleat vpluntarie extra charitatem, solril quidem pœnam sed non meretur gratiam. Ibid., dist. XV, q. i, n. 16.

Forme.

Le caractère judiciaire du sacrement de pénitence ne réclame pas de soi une forme strictement déterminée : communiter tamen ista verba suntapta : ego te absolvo ; quæcumque alia prsemittantur vel consequantur, secundum diversam consuetudinem in diversis Ecclesiis. In 1 V Sent., 1. IV, dist. XIV, q. iv, n. 4. Ces paroles sont prises dans leur sens naturel’obvie ; elles signifient : ablutionem animai a peccato, loc. cit., n. 2 ; d’une manière efficace, parce qu’elles sont sententia diffinitiva absolvais reum, n. 3. Elles doivent enfin être prononcées par le prêtre en présence du pénitent. In IV Sent., 1. IV, dist XVII n. 31.

Effets du sacrement.

L’effet premier et principal de la pénitence n’est autre que la rémission du péché et de la peine éternelle : sacerdos delet macnlam et pœnam mortis alternai. In IV Sent. 1. IV dist. XIX, q. ii, n. 32. Cette doctrine générale donne

occasion à des doctrines secondaires, dans lesquelles Duns Scot prend les positions que voici.

Les fautes, effacées par l’absolution, le sont à tout jamais : elles ne revivent pas, si l’âme dans la suite retombe en état de péché : non redit idem rcatus vel eadem obligalio ad pœnam quai prias remittebatur in co>ifessione, nec eadem numéro, >iec eadem specie. Report., 1. III, dist. XXII, n. 4. Le docteur subtil, on le voit parce texte, envisage surtout la reviviscence de la peine, puisque c’est la relatio ad pœnam qui constitue, à ses yeux, le formel du péché habituel. Il admet cependant que ce reatus ad pœnam est en fait une souillure réelle : il se refuse seulement à en faire une réalité d’ordre physique. Pourquoi le péché ne revit-il pas, après une faute nouvelle ? Duns Scot n’en donne d’autre raison que la volonté divine : Drus statnit per legem clementise suai ut actus peccandi semel extinctus nunquam amplins reviviscat. Luc. cit.

Par contre, les œuvres méritoires, accomplies en état de grâce et mortifiées par le péché, revivent immédiatement lorsque l’âme retrouve l’état de grâce. Elles revivent toutes, avec l’absolution sacramentelle : omnia illa opéra priora reviviscunt… in ordvne ad vitam et gloriam seternam, Report., 1. IV, loc. cit., n. è’ ; elles revivent, non avec une valeur amoindrie, n’ayant de prix que pour les accidents de la béatitude, comme quelques théologiens l’enseignent, mais avec une valeur complète, identique à celle qu’elles avaient avant la chute : nec tantum correspondet operibus meritoriis gloria et præmium accidentelle, sed etiam esseutiale. Loc. cit. Duns Scot est moins aflirmatif sur la reviviscence immédiate de la grâce habituelle. L’âme qui vient de se relever a plus de mérites qu’au moment même où elle est tombée, »’/ per consequens ad majorent gloriam ex ea parte ordinal ur. La grâce et la gloire étant dans les mêmes rapports et proportions, il semblerait doncque.au moment de la conversion, l’âme retrouve immédiatement toute lagrâce antérieure et un accroissement nouveau, auquel correspond un degré nouveau de gloire. Cette conclusion ne paraît pas rigoureuse au docteur subtil, soit qu’il importe de tenir compte des dispositions du pénitent : secundum ejus dispositionem in detestando peccalum commissum, intense, vel remisse datur sibi nunc major vel minor gratia, In IV Sent., 1. IV, dist. XXII, n. 10, soit que l’on doive appliquer au cas présent, la doctrine théologique dont il se fait le champion et d’après laquelle certains mérites, dits remissa, n’augmentent pas immédiatement la grâce sanctifiante. In IV Sent., 1. IV, dist. XXI, q. ï, n. 10. Dans cette hypothèse, toute la grâce doit cependant revivre un jour, ne serait-ce qu’au momenl de la mort : non semper Deus posi qnemeumque aclum meritorium auget gratiam proporlionatam merito, videtur quod augmentant débitant meritis remisais reservet usque ad instans mortis. Loc. cit.

Le sacrement de pénitence ne remet pas seulement le péché et la peine éternelle : il remet aussi, en partie du moins, la peine temporelle. Cette remise partielle s’accomplit non seulement en vertu de la première absolution, mais encore par toute absolution subséquente. Après avoir regardé l’opinion contraire comme plus probable, In IV Sent., 1. IV, dist. XIX, n. 31, Duns Scot enseigne explicitement quod per fréquentes absolutiones, potestas clavium potest multum de pœna alterna débita remittere, Report., 1. IV, dist. XIX, n. 31, et par le contexte, il est évident que la pœna selerna dont il s’agit est celle qui est commuée par l’absolution en peine temporelle.

Le ministre.

Seul, le prêtre est le ministre du sacrement de pénitence. Sans condamner absolument la confession faite par dévotion et humilité à un simple clerc ou à un laïc, Duns Scot la juge plutôt avec sévérité, car il y voit plus d’inconvénients que d’utilités,’In