Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 3.djvu/94

Cette page n’a pas encore été corrigée

165

CLEMENT D’ALEXANDRIE

166

avec quel degré de certitude supérieure à toute certitude humaine et rationnelle, le croyant reconnaît en elles la voix divine : Celui qui croit en elles entend la voix de Dieu et cette voix s’impose à lui comme une irréfutable démonstration. Strom., II, c. iv, col. OU. La voix du Seigneur mérite notre créance, plus que toute démonstration ; ou plutôt elle est la seule démonstration ; il suffit d’avoir goûté les Écritures pour y trouver la foi, xaG’f, v éitt<rnr|ii.ï)v ot (J.èv àuoye’j<7à ; j.£vot u.6vov Ttiiv ypaçàiv jucttch. Strom., VII, c. xvi, col. 533.

Clément distinguait les livres inspirés des ouvrages des philosophes par leur contenu et la manière simple et sans fard, dont ils expriment la vérité. Voir t. ii, col. 1560-1561. Mais il ne regardait pas, comme on l’a prétendu, l’origine apostolique des livres du Nouveau Testament, comme le principe de leur canonicité. S’il n’a pas connu la II Pet., la III Joa. et peut-être l’Épitre de saint Jacques, quoiqu’il semble bien la citer, Strom., VI, c. XVIII, P. G., t. ix, col. 397, le critérium intrinsèque qu’il reconnaissait l’a induit en erreur et l’a amené à admettre comme inspirés des apocryphes proprement dits et même d’anciens écrits tenus pour canoniques en certaines Églises. Ainsi il cite la J a ad Cor., de saint Clément romain avec la formule consacrée : çï)rt. Strom., I, c. vii, P. G., t. viii, col. 33. Il cite encore Clément l’apôtre, Strom., IV, c. xvii, col. 1312, presque dans les mêmes termes que l’apôtre saint Paul. Ibid., c. xviii, col. 1320- Il regarde aussi le Pasteur d’Hermas comme Écriture ; mais peut-être est-ce en raison de sa forme apocalyptique et de son contenu, qu’il croit prophétique. Les indices sont moins nombreux et moins clairs pour la Didachè, Strom., I, c. xx, P. G., t. viii, col. 817, pour le Cérygme et l’Apocalypse de Pierre. Ailleurs, en effet, il emploie pour la Didachè la simple formule : yr<n yoûv, Strom., III, c. iv, P. G., t. viii, col. 1140, et il cite les apocryphes de Pierre avec des introductions de cette sorte : 6 Ilétpo ; Xéyei, h nérpoç çr, <ji. Strom., VI, c. v, P. G., t. ix, col. 257 ; c. vi, col. 269 ; c. xv, col. 352. Ces formules ne suflisent pas à prouver qu’il tenait ces écrits pour inspirés.

Notons enfin que des citations des Evangiles et des Actes recueillies des œuvres de Clément par M. Barnard, The biblical text of Clemens of Alexandrin, dans Texts and Sludies, Cambridge, 1899, t. v, fasc. 5, il résulte, au jugement de Burkitt, que le texte, que Clément lisait, n’était pas identique au texte du Vaticanus et des témoins les plus accrédités auprès des critiques, mais qu’il s’accorde souvent avec les témoins dits occidentaux, le codex I), les anciens manuscrits latins, la version syriaque du Sinaï, etc.

2. Obscurité de l’Écriture ; symboles et paraboles ; méthode allégorique. — Clément consacre une grande partie du Ve Stromate, voir le sommaire, col. 151, à ce qu’il appelle le genre symbolique, crup60Xixàv elôoç, c’est-à-dire l’usage de signes et de voiles mystérieux, dans renseignement de la doctrine. Il justifie ce procédé par l’exemple des Grecs et des Égyptiens, par des raisons de convenance, et des raisons d’autorité traditionnelle ; par la considération des vérités ainsi transmises, objets essentiellement mystérieux, sapientiam Dei ijuss est in abscondito. Il y revient vers’la fin du VIe Stromate. Les Écritures cachent leur sens, d’abord pour que nous cherchions diligemment, ensuite parce que, si tous comprenaient, il en résulterai ! quelque dommage pour les esprits moins bien préparés, /’. G., t. îx, col. 319. Aussi la parabole i si le procédé caractéristique de l’Écriture, et le Seigneur lui-même s’en servait habituellement. Car il lui fallait traiter avec l’homme élevé dans les conceptions de ce monde, avvrpofov toC xi(j|j.ou Kv6pitov, le conduire par la ejiose vers les intelligibles réalités, ird -.x vorjTà xa ! xvpia, le taisant i du monde sensible au monde spirituel, ex x6<t(aou ti ; x6v(tov. C’est pourquoi il s’est aussi servi d’une écri ture parabolique, col. 350. Suit la définition de la parabole : terminologie empruntée à ce qui est secondaire et dérivé, conduisant vers le vrai et le réel celui qui a compris, Xôyo ; àrcô tivo ; ctj xupt’ou uiv, éfjiçEpoûç Se xû> xvjpîtp ; ou bien, comme disent certains, une formule qui, au moyen de notions auxiliaires, rend efficacement intelligibles les réalités supérieures, rà xuptcoç Xeyôfj.Eva u.st’èvepyet’a ; Tcepiaxâvo’jaa. Ibid., col. 350.

La théorie qui précède semble étroitement apparentée avec les idées alexandrines, relatives au symbolisme des faits contingents, à l’opposition dualistique du monde sensible et du monde intelligible. De la sorte, l’allégorisme de Clément s’appuie aussi bien sur la métaphysique platonicienne que sur le principe exégétique du symbolisme. Voir Alexandrie (École chrétienne d’), t. i, col. 814, 815. Dans de nombreux passages, Clément pousse ses principes jusqu’aux applications les plus subtiles et les plus bizarres ; voir par exemple son interprétation mystique du décalogue, Strom., VI, c, xvi, P. G., t. ix, col. 357-380.

3. Intelligence.

- Si l’Écriture est pleine de mystères et d’énigmes, fctjTzl^ïztx : i/eSov 6t’aivty|j.âT(ov, Strom., V, c. vi, P. G., t. ix, col. 56, il est néanmoins nécessaire de la connaître : elle est pleine de choses, signes, préceptes, prophéties, P. G., t. viii, col. 925 ; elle contient la doctrine des mœurs, la connaissance naturelle de Dieu, çuffixïj Octopta, et la vision des grands mystères, Ë7T07rTe ; a. P. G., t. viii, col. 924. Ceux qui voudront trouver le sens logique, à/.oXou6s’av, de la doctrine divine, devront autant que possible employer l’aide de la dialectique. P. G., t. viii, col. 925. Sur cette dialectique véritable, qui examine des réalités, êuto-xoTtoCua xà TipâyjxaTa, qui monte jusqu’aux alentours de l’essence suprême, voir P. G., t. viii, col. 924. Mais l’aide du Sauveur est nécessaire ; il nous faut sa grâce pour remédier à la faiblesse de la nature. Ibid.

Apologie de l’Ecriture.

1. La défense de l’Écriture

est la défense de la philosophie barbare, jïâpêapoç çiXoffOîpîa ; c’est en un sens l’apologétique de Clément tout entière ; c’est sa préoccupation de montrer les vérités communes à la sagesse grecque et aux Ecritures, pour attribuer à celles-ci la priorité ; c’est encore toute la théorie de la méthode symbolique, c’est-à-dire justification de l’obscurité de l’Ecriture, voir le sommaire des Ve et VIe Stromates, col. 151-152 ; c’est tout particulièrement la défense de l’Ancien Testament contre ses détracteurs. La plupart des gnostiques attribuaient l’ancienne Loi à un principe mauvais, ennemi de Dieu, ennemi du christianisme lui-même ; en conséquence, ils attaquaient toutes les institutions du légalisme juif. Pour les marcionites, la Loi était juste, mais elle n’était pas bonne ; beaucoup de gnostiques attaquaient la crainte comme contraire à la raison, comme immorale. A chaque instant Clément se préoccupe de défendre la Loi et ses institutions, de concilier la justice et la bonté, de justifier la crainte. Voir les définitions et considérations générales sur la loi et le législateur, Strom., I, c. xxv, xxvi, P. G., t. viii, col. 913, 916 ; les éloges de Moïse, législateur, tacticien, politique, philosophe, Strom., I, c. xxiv, P. G., t. viii, col. 905 ; Platon s’est inspiré de lui pour sa législation, col. 212. et tout le c. xxv ; Moïse est la Loi animée, étant gouverné par le A.6yoç, col. 916 ; surtout c’est le Aoyo : lui-même qui est l’auteur de la Loi ; il est le premier exégète des ordonnances divines, col. 917. Les institutions légales ont un sens préfiguratif, Strom., VII, c. vi, P. G., t. ix, col. 145.

2. Théorie et apologie de la crainte.

La crainte était sous la Loi, pour l’ancien peuple, le moyen de pédagogie, et le Aôyoç était alors un ange ; au nouveau peuple un nouveau Testament est donné, le Aoyo ; a été engendré et la crainte est transformée en amour, et cet ange mystérieux, .lésus, vient au monde, ô jWo ; si ; ày17rr, v |j. : 7aTÉTpa71-ai, y.a’i ô u/jgtixo ; âxeîvo ; ayyeXo ; ’Iy)905{