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913 CONFESSION (DU CONCILE DE LATRAN AU CONCILE DE TRENTE) 914

clefs. Extravag. comm., 1. V, tr. VII, c. I. Et le concile de Trente a confirmé cette doctrine en déclarant que seules devaient être accusées les fautes dont le pénitent sentait sa conscience coupable. Sess. XIV, c. v, Denzinger, n. 779. Cf. Suarez, disp. XXII, sect.vi, n. 2, p. 495.

IV. Matière et intégrité.

La théologie scolastique a distingué soigneusement dès l’origine entre la matière nécessaire et la matière suffisante de la confession, de même entre l’intégrité matérielle et l’intégrité formelle.

Matière nécessaire.

1. Péchés mortels. — Que la

confession ait pour objet premier et indispensablement requis les péchés graves commis par le pénitent, secrets ou publics, c’est un point qui n’a été contesté, et ne pouvait l’être, par aucun théologien, car il appartient à la doctrine catholique, au même titre que le dogme de la nécessité même de la confession. Mais il ne suffit pas d’avouer ses péchés en général. Puisque la confession est la condition obligée du pardon de la faute, il est indispensable d’accuser la faute telle qu’elle est, avec sa malice propre, c’est-à-dire dans son espèce, et comme chaque faute en particulier macule d’une tache nouvelle lame qui s’en est rendue coupable et mérite un châtiment particulier, il faut dire également le nombre de ses péchés. Le sacrement de pénitence étant un acte judiciaire suppose et exige ces déclarations essentielles. Cf. S. Thomas, In 1 V Sent., dist. XVII, q. ii, a. 3, n. 2, ad 4um ; a. 4, n. 3 ; Upusc, I, c. iv ; VII, a. 6 ; Robert de Sorbon, Tractatus super confessione, dans Biblioth. Patrum, Lyon, t. xxv, p. 356 ; Richard de Middletown, dist. XVII, a. 3, q. iv, p. 257 ; Pierre d’Auriol, dist. XVII, q. i, a. 2, p. 145 ; Pierre de Bassols, dist. XVII, q. H, fol. 94 ; Cajetan, De materia tonfessionis, q. iv, Opusc, fol. 37 ; René Benoist, Catholique discours de la confession sacramentelle, Paris, 1566, p. 13-14.

Est-on tenu d’accuser aussi les péchés douteux ? Les anciens scolastiques n’ont pas accordé grande attention à ce point, qui devait être discuté surtout après les déclarations doctrinales du concile de Trente. Mais pour la plupart il serait facile de conclure de leurs principes tutioristes qu’il y avait obligation pour le pénitent de les accuser. Saint Bonaventure déclare qu’un péché douteux doit être confessé comme douteux, mais qu’il faut s’en repentir comme s’il était réellement grave et l’expier comme tel. El tune mens assecuratur et in nullo verilati prsejudicatur. In IV Sent., dist. XXI, p. ii, a. I, q. ii, ad 4um, p. 564. Saint Thomas enjoint également de déclarer comme douteuse une faute dont la gravité reste douteuse pour le pénitent. Quia qui aliquid commillit, in quo dubitat esse mortale peccatum, peccat mortalitcr, discrimini se commiltens. Dist. XXI, q. i, a. 3. C’est la règle de conduite qui dirigera les théologiens de l’Age suivant. Cf. Pierre de la Palue, dist. XVI, q. il, a. 1, fol. 78 ; Dominique de Soto, dist. XVIII, q. ii, a. 4, p. 440. Voir aussi Theologia dogmalica, dite de Wurzbourg, Paris, 1880, t. x, p. 184.

2. Circonstances aggravantes.

Loin de trouver dans l’IJglise, au moyen âge, une tendance à atténuer les obligations du pénitent, on remarque plutôt, et dans la plupart des grands docteurs, une propension à les rendre plus austères encore, en statuant que non seulement les péchés graves, mais aussi les circonstances aggravantes de ces mêmes péchés, doivent être révélés en confession : épineux sujet, qui n’a cessé, du concile <le Latran au concile de Trente, de soulever les plus vives discussions, quillaume d’Auxerre, visiblement, se rendait compte des graves difficultés inhérentes à cette thèse outrée et cherchait déjà une formule conciliante en déclarant qu’on est tenu d’accuser les circonstances qui, notablement et nettement, aggravent le cas du pécheur, omnes ciicumslanlias quse graviter et aper le

aggravant peccatum. L. IV, q. ii, fol. 270. Guillaume d’Auvergne, plus rigide, pose en principe qu’il faut déclarer toutes les circonstances aggravantes. Supplément, tract, novi de psenit., c. xxiii, p. 242. Enfin, à côté de ces deux opinions et sans se prononcer théoriquement lui-même, Pierre de Tarentaise signale la doctrine, qu’il dit plus commune, mais moins sûre, de ceux qui rejettent simplement pareille obligation. Secundum alios vero communius, sed non tulius opinantes, non oportet, quia suf/icit innotescere quantilatem peccali in specie, nec oportet secundum tolam quantitateni peccati, pxiiitentem taxare. Dist. XVII, q. ii, a. 4, p. 193.

Ces trois opinions, nettement posées dès le début, devaient se partager inégalement les esprits.

La thèse rigoriste de Guillaume d’Auvergne trouva peu d’adhérents nettement résolus : pratiquement, elle se heurtait à d’insurmontables difficultés. Elle eut pourtant, dans Alexandre de Halès, un défenseur de haute marque. « Pour taxer la pénitence, il faut, dit-il, connaître la qualité des fautes. Mais serait-ce possible, si on ne connaissait les circonslances ? » Dès lors le pénitent est tenu de déclarer s’il a commis le péché d’impureté un jour de jeûne ou un jour de fête ecclésiastique, q. xviii, m. iv, a. 3, § 1, p. 579. Toutefois les simples fidèles ne sont soumis à cette loi que dans le cas où ils seraient interrogés par le confesseur ou bien si par ailleurs ils sont instruits de cette obligation, § 3, p. 581. Rien de plus complexe pour le pénitent, même instruit, que la solution du problème. Albert le Grand n’énumère pas moins de quinze circonstances qui peuvent aggraver la faute :

Aggravât ordo, locus, mera causa, scientia, tempus, Lucta pusilta, modus, culpa, genus et status altus, Conditio, numerus, œtas et scandala, sexus.

Lui-même est d’avis qu’il est plus sûr d’accuser ses fautes avec ce luxe de détails. Compendium lheol., . VI, C. xxv, p. 487. A cette énumération, Robert de Sorbon ajoute une seizième circonstance, à savoir si le péché a été commis avec un plaisir intense, cum magna libidine. Tract, super confessione, p. 359. Au siècle suivant, après Richard de Middletown, dist. XVI, a. 3, q. v, p. 257, Jean Bacon applique encore à sa doctrine la même rigidité. Débet exprimi sexus, quia magis vir quam mulier peccat. Dist. XVI, q. I, a. 1, p. 418. CI. Pierre d’Auriol, dist. XVII, q. i, a. 4, p. 149. Mais de plus en plus, cette théorie est abandonnée et l’Ecossais Jean Mayr (Major) (fl540) est un de ses derniers tenants. In IV Sent., dist. XVII, q. iv, Paris, 1516, fol. 131.

Le rigorisme mitigé de Guillaume d’Auxerre rencontre de plus larges sympathies. Pierre de Tarentaise admet, comme étant le parti le plus sûr, l’obligation pour le pénitent de déclarer les circonstances notablement aggravantes. Dist. XVII, q. ii, a. 4, p. 193. Duns Scot, dist. XVII, q. I, n. 21, p. 292, se rallie, assez timidement d’ailleurs, à cette doctrine, que soutiennent également Gilles de Rome, c. xxv, p. 295, et Jean de Eribourg, De sacramentis psenitentise, ordinis et malrimonii, 1. III, § 13, Rome, 1619, p. 448. Au xvi c siècle, cette thèse était de plus en plus abandonnée. François de Victoria n’ose ni la combattre ni la défendre. Sumnia sacramentorum Ecclesise, n. 177, Barcelone, p. 120. Melchior Cano, qui s’y rallie encore, exprime son grand embarras, in re vehementer ambigua. L’autorité de saint Thomas, qui lui est contraire, pèse d’un grand poids sur sa décision ; mais il se rassure en pensant que l’ange de l’École, s’il avait pu mettre la dernière main à sa Somme, aurait modifié sur ce point son premier sentiment. Nam Divus Thomas, ut mea Jert o/iintii, seuteutiam ri’trnrtassrt, si trrtiic parti exlremam maman imposuisset. Atque olim juvenis opiniones sœpe communes sut sxculi sectabatur. De