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CONFESSION DU I" AU XIIIe SIÈCLE


tence (publique) par la persuasion. On nous reproche, ajoute-t-il, d'épargner telle personne coupable d’adultère ; on s’imagine que nous ne savons pas ce que nous savons ; mais peut-être sais-je ce que vous savez, et si je ne la reprends pas publiquement, c’est que je veux la guérir et non l’accuser. » Serm., lxxxii, c. vii, n. 11, P. L., t. xxxviii, col. 511. Cf. De fide et operibus, c. xxvi, P. L., t. xl, col. 228.

Augustin méritait ainsi la louange que Paulin adressait à saint Ambroise, lorsqu’il le félicite de ne rien révéler des fautes de ses pénitents, « donnant par là aux prêtres de l’avenir le bon exemple de se faire les intercesseurs des coupables auprès de Dieu, plutôt que leurs accusateurs auprès des hommes. » Vita Ambrosii, c. xxxix.

Saint Léon affirme que la révélation des péchés secrets est « contraire à la règle apostolique » . « Il suffit, dit-il, d’indiquer aux évêques seuls par une contession secrète l'état de sa conscience : » cum reatus conscientiarum suf/iciat solis sacerdolibus indicare confessione sécréta. Eplst. ad episcop. Campanise et Saninii, etc., c. ii, P. L., t. liv, col. 1211. Et, à ne prendre son assertion que comme un témoignage purement historique, il faudrait encore en conclure que la confession secrète était en usage à Rome de temps immémorial.

La confession auriculaire était donc en usage en Italie, en Afrique, à Constantinople, en Asie-Mineure, bref dans les principales Églises de l’Orient et de l’Occident, autant qu’on le peut constater par les documents, au ive et même au IIIe siècle. Sozomène est d’accord avec saint Léon le Grand pour affirmer que cette institution remonte aux origines. Nous ne possédons pas de texte positif qui nous permette de justifier leur assertion. Mais on ne saurait non plus apporter un document qui les contredise. Si la mention de la confession secrète, préparatoire à la pénitence, est extrêmement rare ou même fait défaut dans les textes primitifs, c’est qu’elle n’avait aux yeux des chrétiens de ce temps qu’une importance secondaire ; c’est que toute l’attention se portait alors sur les suites de cette confession, sur la pénitence proprement dite, sur le nombre des exercices laborieux et publics que Tertullien a décrits sous le nom d’exomologèse.

3. Exomologèse ou confession publique.

La pénitence, dans les premiers siècles de l'Église, comprenait non seulement une confession préliminaire, mais encore un aveu public de culpabilité qui consistait dans l’ensemble des exercices satisfactoires et dans l’exomologèse finale immédiatement suivie de la réconciliation. On peut se demander si cet aveu public et cette exomologèse finale impliquaient, comme la confession préliminaire, une révélation détaillée des péchés commis.

On ne voit pas que cette révélation ait été obligatoire. Sozomène déclare, nous l’avons vii, que l’office du prêtre péniteacier fut établi pour parer aux inconvénients de la confession publique. Le canon 34e de saint Basile, qui a trait à l’adultère secret, témoigne pareillement que les pénitents soumis en Asie-Mineure aux différents stages pénitentiels n'étaient pas tenus, loin de là, à révéler leurs fautes en public. Tertullien, si exigeant en matière d’exomologèse, ne demande nulle part que le pénitent mette les fidèles dans la confidence de ses péchés secrets. Les textes que nous avons cités de saint Cyprien et de saint Augustin donnent la même impression. En Italie, nous avons pour témoins de la discipline saint Ambroise et saint Léon le Grand. Saint Ambroise exhorte le pécheur à faire publiquement pénitence (ce qui comporte au moins un aveu général de culpabilité), dans l’assemblée des fidèles, dans l'église : in ecclesia, De psenilenlia, 1. II, c. x, mais il n’exige pas que les fautes soient révélées : si 'l"is crimina occulta liabens. Il rompt, nous dit son biographe, avec la coutume de publier les péchés des

pénitents, « donnant ainsi aux prêtres de l’avenir le bon exemple. » Vita Ambrosii, c. xxxix. La coutume dont parle Paulin avait pris une forme singulière dans certaines régions de l’Italie, notamment dans la Campanie. On y rédigeait par écrit la liste détaillée des péchés confessés, liste qu’on lisait ensuite publiquement dans l’assemblée chrétienne. Saint Léon proteste contre cet usage inconvenant et « contraire à la règle apostolique » , faisant remarquer « qu’il suflit d’indiquer aux évêques seuls, solis sacerdotibus, par une confession secrète l'état de la conscience » . Sans doute, ajoute-t-il, « il convient de louer cette plénitude de foi qui, par crainte de Dieu, ne craint pas de rougir devant les hommes. Mais comme les péchés de tous ceux qui demandent la pénitence ne sont pas de nature à être publiés sans que les coupables en redoutent la publicité, il faut abandonner cette coutume regrettable, de peur que beaucoup ne s'éloignent des remèdes de la pénitence, soit par honte, soit par crainte de voir révéler à leurs ennemis des faits qui peuvent tomber sous le coup des lois. Du reste, cette simple confession suflit, que l’on fait à Dieu, puis à l'évêque, sacerdoti, lequel prie pour les péchés des pénitents. Enfin plusieurs seront amenés plus facilement à la pénitence, si la conscience du coupable qui se coniesse n’est pas révélée aux oreilles du peuple. » Epist. ad episcop. Campanise, c. il, P. L., t. liv, col. 1211.

Tous ces textes témoignent qu’en principe l’aveu public des péchés, notamment des péchés secrets, dans 1 exomologèse, n'était pas de précepte. Tout au plus pouvait-elle être de conseil. Quelques textes font allusion à cette pratique. Nous citerons d’abord Origène. On se rappelle qu’il donnait au pécheur le conseil suivant : Si intellexerit et prseviderit (medicus animse tuse) talem esse languorem tuum qui in conventu lolius ecclesise exponi de beat et curari, ex quo fortassis et cseteri sedificari polerunt, et tu ipse forte sanari, multa hoc deliberalione et satis perito medici illius consilio procurandum est. In Ps. xxxvii, homil. il, n. 6. Selon certains critiques, Origène recommanderait ici seulement la pénitence publique, mais il semble que le sens obvie du texte indique plutôt une confession publique. Ce n’est pas « le pécheur » , mais « le péché » qui doit être « produit » , exponi, publiquement. Cf. Revue du clergé français, 15 mai 1905, p. 642, note 2. Nous retrouvons une allusion du même genre dans le texte suivant : Considéra quam sint prophetse can~ didi homines, non, sicut nos facimus, peccata propria occultantes, al palam non lantum sui sévi hominibus, sed cunctis generationibus dicentes si quid peccarunt. Ego quidem non audeo confiteri hic meas iniqui TALES CORAM PAUCIS, QUONIAM AUDIENTES ME CON demnatum sunt ; al Jeremias, cum aliquid deliquissel non erubescit, sed suum peccatum scriptis mandavil. In Jet :, homil. xix, n. 8, P. G., t. xiii, col. 517. Certes, si le pécheur dont parle Origène suit l’exemple qu’il lui met sous les yeux, il confessera aussi en public les péchés qu’il a commis, fussent-ils secrets.

Il semble que les femmes coupables d’adultère secret qui sur les bords du Rhône firent ensuite publiquement pénitence, d’après le récit de saint Irénée, révélèrent leur faute à l’assemblée chrétienne. Cont. hscr., 1. I, c. vi, n. 3, P. G., t. vii, col. 508.

Ne pourrait-on pareillement entendre d’une confession publique ce que Socrate écrit des pénitents de Constantinople qui se reprochaient mutuellement leurs fautes : iïiyyjiv àXX^Xbiv ta à|j.apTri[xaTa. H. E., 1. V, c. xix, P. G., t. i.xvii, col. 620.

En tout cas, les abus de la confession publique dont parlent le biographe de saint Ambroise et saint Léon le Grand ont eu vraisemblablement pour point de départ l’usage d’une confession de certains péchés faite par les pénitents pendant leur exomologèse avec le consen-