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CONFESSION DU I er AU XIII" SIECLE


col. 229. Et plus loin : « Il est une autre espèce d’idolâtrie au témoignage de l’Apôtre ; je ne sais comment sa guérison a été négligée par nos Pères… C’est l’avarice. Le divin Apôtre l’a qualifiée non seulement d’idolâtrie, mais encore de racine de tous les maux ; et cependant cette espèce de maladie a été laissée de côté sans surveillance et sans soin. De là vient qu’elle est fréquente dans les églises. » Can. 6, col. 232-233. Evidemment, Grégoire demande que les malédictions, l’avarice, etc., dont la gravité n’avait pas été assez remarquée jusque-là, deviennent matière de confession.

Origène qui recommande de recourir au sacerdos, voire à l’évêque pour obtenir le pardon des péchés commis, In Num., homil. x, c. i, P. G., t. xii, col. 635, estime que certains péchés sont réservés à Dieu : tels sont, par exemple, l’idolâtrie, l’adultère et la fornication, et l’homicide. Deoratione, c. xxvii, P. G., t. xi, col. 528. Il en faut conclure que les autres péchés de moindre importance et rémissibles par l’évêque doivent être confessés ; tels sont sans doute les communia, dont il dit : lsta communia crimina quse fréquenter incurrimus semper pxiiitentiam recipiunt et sine intermissione redimuntur. In Lev., homil. xv, c. ii, P. G., t. xii, col. 561.

L’Afrique de Tertullien, de saint Cyprien, de saint Augustin est très explicite sur l’obligation de confesser tous les péchés graves à l’évêque.

On sait que Tertullien divise les péchés en maxima, média (ou mediocria) et modica. De pudicitia, c. I, P. L., t. il, col. 983. Les premiers qui comprennent « l’homicide, l’idolâtrie, le vol, la négation, le blasphème, l’adultère et la fornication et toute autre violation du temple de Dieu » , ibid., c. xix, col. 1020, sont irrémissibles en ce sens que le pardon en est réservé à Dieu : De venia Deo reservamus. Ils n’en doivent pas moins être confessés et soumis à la pénitence publique. Ibid., C. iii, iv, col. 986. Voir une énumération un peu différente : Idololatria, blasphemia, homicidium, adulterium, stuprum, falsum testimonium, fraus, dans le traité Adversus Marcionem, iv, 9, P. L., t. il, col. 375. Ailleurs il les réduit à trois : l’homicide, l’idolâtrie et la fornication, en s’appuyant sur un texte des Actes légèrement dénaturé, xv, 28, 29. De pudicitia, c. xii, P. L., t. ii, col. 1002. Cf. A. d’Alès, La théologie de Tertullien, Paris, 1905, p. 240. Les média, mediocria, minora, péchés graves, mais non proprement mortels aux yeux de Tertullien, sont aussi la matière de la confession faite à l’évêque. Quæ aut Icvioribus delictis veniam ab episcopo consequi poterit. Ibid., c. xviii, col. 1017. A propos de la brebis égarée, Tertullien écrit : « Dire que ce qui est sauf a péri est une manière de parler. C’est ainsi que périt le fidèle qui s’est égaré dans le spectacle de la fureur du cirque, du sang des gladiateurs, des souillures de la scène, des vanités du ceste, qui a pris quelque part aux jeux, aux banquets d’une solennité séculaire, au service de l’idolâtrie du prochain, ou qui a laissé tomber par défaut d’attention une parole de négation et de blasphème. Pour une faute de ce genre, il

i été mis hors du troupeau (par qui, si ce n’est par

l’évêque ?) ou s’y est mis peut-être lui-même, par colère, par orgueil, par jalousie, et enfin, ce qui arrive souvent, par refus de l’épreuve (à laquelle on voulait le soumettre : , dedignatione castigalionis. On doit le rechercher et le rappeler. Ce qu’on peut recouvrer n’a pas péri, à moins qu’il ne demeure (volontairement) dehors. Le véritable sens de la parabole de la brebis égarée est donc qu’on ramène au bercail un pécheur encore vivant, » c’est-à-dire un coupable qui n’a pas commis de péchés proprement mortels. Dé pudicitia, c. vii, ibid., col. SH)3. Les péchés ainsi décrits sont donc des pèches média ou mediocria. Tels sont encore ceux dont parle Tertullien à propos de la drachme perdue et retrouvée. Ibid. On les reconnaîtrait pareillement, mêlés sans

doute aux péchés légers, modica, dans l’énumération qu’il fait ailleurs, c. xix, col. 1028 : « Il y a, dit-il, des tentations et, par suite, des péchés de chaque jour, auxquels nous sommes tous exposés. A qui n’arrive-t-il pas de se mettre en colère injustement et jusqu’après le coucher du soleil, ou de mettre la main sur quelqu’un, ou de maudire (trop) facilement, ou de juger témérairement, ou de violer la foi d’un pacte, ou de mentir par crainte ou par nécessité ? Dans les affaires, dans les devoirs, dans le gain, dans la nourriture, dans ce que nous voyons, dans ce que nous entendons, combien sommes-nous tentés ? S’il n’y avait pas de pardon de ces péchés, il n’y aurait de salut pour personne. » Ibid., c. xix. En d’autres termes, c’est sur ces sortes de péchés que s’exerce le pouvoir de pardonner que le Christ a confié aux évêques.

Saint Cyprien engage ses frères à confesser leurs péchés pendant qu’il en est temps : Confiteantur singuli, quæso vos, fratres, delictum suum, dum admitti confessio ejus potest, dum satisfactio et remissio per sacerdotes apud Dominum gratæst. De lapsis, c. xxix, P. G., t. iv, col. 489. Et par ces péchés, il entend non seulement les fautes énormes comme l’idolâtrie, l’adultère ou l’homicide, mais encore des péchés moindres : cum in minoribus peccatis agant peccatores psenitentiam justo tempore et secundum disciplinée ordinem ad exomologesim veniant, etc. Epist., ix, n. 2, P. L. t t. iv, col. 251. Sur ces peccata minora, cf. Vacandard, La pénitence publique dans l’Eglise primitive, Paris, 1903, p. 28-29.

Saint Augustin a eu cent fois l’occasion d’exprimer sa pensée sur la nature des péchés et toujours il les a divisés en trois catégories, par comparaison avec les différents moyens que Dieu a établis pour leur rémission. Outre le péché originel et les péchés actuels que remet le baptême, « il y a, dit-il, les péchés véniels, sans lesquels cette vie n’est pas concevable : sunt venialia sine quibus vita ista non est ; De symbolo ad catechumenos, serm. i, c. xv-xvi ; cf. Enchiridion, c. xvii ; Serm., lvi, inMatth., ri, c. xii ; Serm., ccclii, n. 7, 8, etc., et les péchés pour lesquels il est nécessaire de séparer le coupable du corps du Christ, c’est-à-dire de l’Église. » Mais quels sont les péchés légers et quels sont les péchés graves ? « Cela doit se peser non au jugement de l’homme, mais à celui de Dieu. » Enchiridion, c. xxi. Et le saint docteur essaie de déterminer les péchés qui donnent la mort spirituelle à notre âme et méritent l’enfer. De diversis qumst. lxxxui, q. xxvi, P. L., t. XL, col. 17.

Le remède de ces péchés n’est autre que la confession, suivie de l’absolution sacramentelle. Enchiridion, c. liv, lxix, P. L., t. xl, col. 242, 265. Voir Augustin, t. i, col. 2426-2429.

L’Église d’Espagne paraît avoir été, en matière pénitentielle, l’héritière du rigorisme africain. On peut voir par le concile d’Elvire (vers 300) quels péchés elle soumettait à la pénitence publique, can. 1-7. Mansi, Concil., t. il, col. 5-7. Saint Pacien, évêque de Barcelone (seconde moitié du ive siècle), nous apprend lui-même qu’il s’inspirait de Tertullien et de saint Cyprien. Epist., m. ad Semproniamtm, c. xxiv, /’. L., t. xiii, col. 1079 ; cf. Parsenesis ad psenilentiam, c. xx-xxii, ibid., col. 1086. Il relève, en effet, de Tertullien pour la détermination des péchés mortels, qu’il réduit à trois : l’adultère ou la fornication, l’homicide et l’idolâtrie. Parsenesis ad psenitenl., c. iv, col. 1083. On devine quelle « forêt de délits » , pour employer son expression, il classait parmi les péchés non mortels. Ceux-ci comprenaient évidemment les fautes vraiment légères et celles que Tertullien appelait média, mediocria ou minora. Et nul doute qu’il ait rangé ces dernières parmi celles que le pécheur devait confesser à l’évêque. Tel est, selon nous, le sens de sa pensée quand il déclare que l’Église a le