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CONCORDATS (ÉTUDE D’ENSEMBLE) « 30

par le régime de la religion d'Élat, est de plus en plus abandonnée même parles partisans de la suprématie du pouvoir laïque : l’idée même de la neutralité de l'État implique reconnaissance de l'Église comme autorité distincte et autonome. On sait, par exemple, que les partisans de la dénonciation du concordat français se prévalent d’un argument très différent : ou bien les torts du saint-siège qui aurait le premier violé la convention, et ce n’est plus qu’une question de fait ; ou bien la doctrine même de l'Église se refusant, disentils, à tenir les concordats pour des contrats obligatoires pour elle-même, Roussel, dans la Revue politique et parlementaire, 10 mars 1905, d’où il résulterait la faculté pour l'État de ne pas se tenir, lui non plus, pour obligé.

On a soutenu en effet que l'Église ne s’engage pas juridiquement envers l'État en signant un concordat. Les concordats ne sont que des privilèges accordés par le pape, privilèges qui, d’après la stricte justice, ne le lient pas lui-même, dès qu’ils lui apparaissent comme inconciliables avec la liberté nécessaire de l'Église. 11 appartient, dit-on, à l'Église de résilier « un concordat, même exécuté de bonne foi par l'État… si l'événement montrait qu’il empêche l'Église d’atteindre sa fin » . Théry, dans la Revue catholique des institutions et du droit, 1904, p. 489. Nous répondons : peu importe que les concordats soient de la part des papes de pures concessions gracieuses ; la question est indifférente au point de vue juridique ; on s’oblige également par les dispositions à titre gratuit et par les opérations à titre onéreux. Il est clair que le saint-siège ne peut se considérer comme lié à perpétuité par un concordat tant que l'État contractant en remplit les obligations ; mais c’est là le droit commun à toute convention diplomatique. La vérité nous paraît donc être que, conformément aux principes du droit international public, mais d’ailleurs par simple analogie (les rapports de l'Église et de l'État n'étant pas de nature identique aux rapports des États entre eux), l’obligation du saint-siège « est perpétuelle de sa nature » tout comme celle du prince ; « elle ne cesserait qu’autant que les circonstances et les besoins en vue desquels le concordat a été passé changeraient essentiellement. » P. de Pascal, Pliilosophie morale et sociale, t. il, p. 348. Enfin, point de doute qu’un concordat puisse être annulé comme accepté sous l’empire de la violence ; l’exemple s’est présenté lors de la querelle des investitures et lors de la captivité de Pie VII.

II. Les plus anciens concordats.

I. les concordats carolingiens. — Sous ce titre, les auteurs signalent un certain nombre d’actes passés sous les gouvernements de Charles Martel, de Pépin, de Charlemagne, de Louis le Débonnaire, d’Otton I er et d’Otton III, lesquels contiennent, outre des donations au saintsiège, des concessions des papes touchant l'élection des souverains pontifes, des évéques et des abbés. Tardif, Hist. des sources du droit canonique, p. 251 ; Concordata nationis Germanicsc, t. ii, p. 5, 7. Il existe des doutes sur l’authenticité d’un certain nombre. Hergenrother, Hist. de l'Église, p. 717 sq., 731 sq. On trouvera le privilegium de Charlemagne et celui d’Otton I er au décret de Gratien, c. xxii, xxiii, dist. LXIII. Ce dernier conférait à l’empereur le droit d'élire le pape et de donner l’investiture aux évéques avant leur consécration. La première faveur fut réduite des le pontificat de Victor 11 (1055) à un simple droit de ratification et fut supprimée par Nicolas II. Les destinées de la seconde sont liées à la querelle des investitures.

I. concorda /s isscs de la q< f.reli.e des investitures. — 1° Convention de Sutri [ilii). — La législation bénéliciale faisait rentrer le clergé dans la hiérarchie féodale. Le bénéfice était pour le clerc ce

qu'étaitle fief pour le vassal. Comme le vassal, le béné ficier devait recevoir l’investiture de son suzerain ou tout au moins du prince. L’investiture des vassaux se faisait ordinairement par la remise des armes ; ces symboles ne convenant pas pour les évéques, on leur substitua la crosse et l’anneau. De là naquit une confusion. L’anneau est le signe du mariage spirituel de l'évêque avec son Église ; la crosse, le signe de ses fonctions pastorales ; il semblait donc que l’investiture laïque conférât l’autorité spirituelle. LeSaint-Siègedut réagir contre cet état de choses ; la première solution à laquelle il consentit était absolument radicale. Le pape, aux termes du concordat de Sutri, interdisait aux évéques de posséder des fiefs de l’empire ; l'Église achetait son indépendance au prix d’immenses sacrifices matériels. Henri V, de son côté, devait renoncer au droit d’investiture, et moyennant cette renonciation, recevoir la couronne impériale. Henri V n’accepta cette convention que sous la réserve de l’approbation des prélats. Les prélats l’ayant refusée, Pascal II refusa de son côté le couronnement, fut fait prisonnier, et, après soixante jours de captivité, abandonna à Henri V l’investiture par la crosse et l’anneau, lui accorda le couronnement, et s’engagea à ne jamais prononcer l’anatlième contre lui. Concordata nationis Germanicse, t. il, p. 9. Deux conciles de Latran (1112 et 1110) annulèrent cette convention conclue sous l’empire de la violence.

2° Concordat de Worms (11"2 U 2). — Les négociations reprirent sous le pontificat de Calixte II et aboutirent le 23 septembre 1122 à un concordat signé dans la plaine de Worms et ultérieurement confirmé en 1177 par une convention passée entre Alexandre III et Frédéric I er, à la suite de la longue querelle qui se termina par la défaite de Frédéric. Concordata nationis Germanicse, t. H, p. 23 sq.

En voici les principales clauses : 1. Élection des évéques et des abbés. — Les élections auront lieu en présence de l’empereur. Quant aux contestations, le texte ambigu de la professio papai souleva des discussions : d’après une opinion, les contestations étaient tranchées par l’empereur, qui devait seulement prendre l’avis du métropolitain et des évéques de la province ; d’après une autre opinion, la décision appartenait aux synodes provinciaux, et l’empereur n’avait qu'à en assurer l’exécution. Koch, Sanctio pragmatica, p. 214, n. 10.

2. Investiture.

On distingua l’investiture spirituelle par la crosse et l’anneau, qui correspondait à la consécration, et l’investiture laïque par le sceptre, qui conférait le bénéfice. Il fut décidé que le prélat élu recevrait l’investiture par le sceptre, en Allemagne avant la consécration — dans les autres pays de l’empire après la consécration. L’empereur renonçait à l’investiture par la crosse et l’anneau.

Cette solution était empruntée au concordat anglais de H05- négocié à l’abbaye du Dec en Normandie entre le pape Pascal II, le roi Henri 1 er et l’archevêque de Cantorbéry, Anselme, au sujet des difficultés que la question des investitures avait soulevées en Angleterre comme en Allemagne.

/II. CONCORDATS M VERS DE LA MÊME PÉRIODE. —

Angleterre.

Concordat de 1170 à la suite des réclamations soulevées par les statuts de Clarendon.

Normandie.

Concordat analogue au concordat

anglais. P. Fournier, Les of/icialilés au moyen âge, p. 65, 66.

Portugal.

Concordat de 1288 à la suite d’une

ère de persécution violente.

III. Les concordats se rattachant aux conciles de Constance et de Bale. — I. les concordats de CONSTANCE. — l 1 Leur histoire. — Ces concordats, d’une nature toute spéciale, passés, non point entre les représentants de la puissance spirituelle et les représentants de la puissance temporelle, mais entre les