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CYRILLE D’ALEXANDRIE SAINT ;

écrire directement. Tout en cherchant à le calmer, il tâchait par de fraternels avertissements de le ramener dans le droit chemin. « Les fidèles, lui dit-il, l’évêque de Rome Célestin lui-même, sont fort scandalisés… Conseillez, je vous en prie, à donner à Marie le titre de θεοτόκος. Ce n’est pas une doctrine nouvelle qu’on vous demande de professer, c’est la croyance de tous les Pères orthodoxes. » P. G., t. LXXVII, col. 41. Nestorius répondit par quelques lignes dédaigneuses, et continua ses prédications et sa propagande. Pour discréditer son rival, il alla même jusqu’à payer des gens tarés pour répandre sur « l’Égyptien » toutes sortes de calomnies. Cyrille s’en plaint doucement au début de sa Seconde lettre à Nestorius. P. G., t. lxxvii, col. 41 sq. Cette seconde lettre, qui sera bientôt approuvée à Éphèse, mérite, par son exposé clair et concis de la doctrine christologique, une attention toute spéciale. On y apprend ce que signifie « le Verbe s’est fait chair » ; comment le Verbe éternel est né dans le temps ; comment il est vrai de dire que Dieu a souffert, est mort, est ressuscité ; pourquoi il est impie de partager en deux le Verbe incarné ; comment enfin la Vierge Marie est véritablement θεοτόκος. La réponse de Nestorius fut plus longue, mais aussi acerbe et méprisante que la première ; elle cherchait à justifier le dualisme par des textes scripturaires, que Cyrille était prié de méditer avec soin. P. G., t. lxxvii, col. 49 sq.

Cyrille avait perdu tout espoir de gagner le novateur par ses conseils. Il voulut au moins arrêter les effets de sa propagande. C’est dans ce but qu’il écrivit au vieil Acace, évêque de Bérée ; ce vénérable centenaire, à cause de son grand âge et de ses travaux, jouissait d’une grande autorité sur ses collègues. C’est dans ce but également qu’il s’adressa à l’empereur et lui envoya un long traité très précis Sur la vraie foi, P. G., t. lxxvi, col. 1133-1200, pour le prémunir contre les subtilités de son patriarche. Il fit parvenir aussi dans le même temps à la cour deux autres traités semblables, le premier pour les Princesses Vierges, Arcadie et Marine, sœurs de Théodose, P. G., t. lxxvi, col. 1201-1335, et le second pour les Impératrices, Pulchérie et Eudocie. ibid., col. 1335-1420.

Le pape Célestin Ier avait demandé dès le milieu de 429 au patriarche d’Alexandrie des renseignements sur la doctrine de Nestorius. Pendant près d’un an, Cyrille avait hésité à répondre, par désir sans doute de ne pas donner à l’affaire de trop grandes proportions. Il se décida enfin à rompre le silence au printemps de 430, d’autant que Nestorius s’était lui-même adressé à Rome. Le diacre Posidonius partit d’Alexandrie avec une lettre qui racontait toutes les péripéties de la lutte depuis les débuts. P. G., t. lxxvii, col. 80 sq. Il était en même temps chargé de remettre au pape un Commonitorium résumant en quelques lignes les points fondamentaux de l’hérésie nestorienne, et tous les écrits publiés par son maître pendant la controverse, c’est-à-dire les diverses lettres dont nous avons parlé : aux moines et à Nestorius, puis les Scholia de incarnatione Unigeniti, P. G., t. lxxv, col. 1369-1472, les trois traités De recta fide, et probablement aussi les cinq livres Adversus Nestorium. P. G., t. lxxvi, col. 9-218.

Le messager alexandrin arriva vraisemblablement à Rome au commencement de l’été de 430. Au mois d’août suivant, Célestin réunit auprès de lui un synode d’évêques occidentaux pour examiner les pièces qui venaient de lui être remises et juger le cas de Nestorius. Sur ce concile romain, nous avons fort peu de documents ; nous savons du moins que la doctrine de Cyrille y reçut pleine approbation et que les opinions de Nestorius y furent condamnées. P. G., t. L, col. 161.

Quand Posidonius se remit en route, il emportait pour Cyrille une lettre du pape qui lui donnait commission de notifier à Nestorius les décisions prises à Rome : Nestorius devait, sous peine d’excommunication et de déposition, se rétracter dans l’espace de dix jours après réception de la sentence, Ibid., col. 463.

Au mois d’octobre, Cyrille appela les évêques d’Égypte en synode ; à la suite de leurs délibérations, une Lettre synodale fut rédigée le 3 novembre, pour être remise à Nestorius en même temps que la sentence papale : c’était un exposé de toute la doctrine christologique ; elle se terminait par douze anathématismes que Nestorius devait souscrire, pour prouver son orthodoxie. Epist., xvii, P. G., t. lxxvii, col. 105-121. Ce document, l’un des plus graves et le plus discuté de tous les écrits de Cyrille, sera examiné plus loin, col. 2492.

Cependant la convocation d’un concile général avait été décidée, et l’empereur avait expédié le 19 novembre à tous les métropolitains les lettres d’indiction ; la ville d’Éphèse était désignée comme lieu de réunion et tous les évêques devaient y être pour la Pentecôte. Une lettre spéciale était adressée à Cyrille ; c’était moins une invitation à venir siéger en juge de la foi, qu’une sommation de comparaître pour justifier sa conduite. Nestorius avait donc, semble-t-il, réussi à perdre son rival dans l’esprit de Théodose.

À la réception de cette lettre, Cyrille fut un peu inquiet de la tournure que prenaient les choses ; il écrivit au pape pour savoir s’il y avait lieu de revenir sur les décisions prises contre Nestorius et qui lui avaient déjà été notifiées. Célestin, avec indulgence, répondit qu’il fallait attendre, accepter le concile et essayer d’amender le coupable ; s’il refusait de se soumettre, les anciennes résolutions seraient reprises, et il ne devrait alors imputer sa perte qu’à lui seul. P. G., t. L, col. 501 sq. Le pape désigna trois légats pour le représenter à Éphèse.

Aussitôt après les fêtes de Pâques, Cyrille se mit en route, afin d’arriver à destination avant la Pentecôte. Il était à Éphèse dans les premiers jours de juin. Nestorius l’y avait déjà devancé. À la date du 7 juin, fixée pour l’ouverture du concile, on n’avait encore aucune nouvelle du patriarche Jean d’Antioche et de ses suffragants. Les évêques attendirent une quinzaine de jours ; à la fin, voyant que les retardataires n’arrivaient pas, on décida de commencer les séances : une lettre de Jean d’Antioche semblait d’ailleurs autoriser les Pères du concile à délibérer sans lui. Cf. P. G., t. lxxvi, col. 472. La première réunion eut lieu le 22 juin, sous la présidence de « Cyrille, évêque d’Alexandrie et représentant de Célestin, évêque de Rome ». Mansi, t. iv, col. 1124. On y lut les lettres de saint Célestin et celles de saint Cyrille à Nestorius ; on compara les écrits du novateur avec des extraits empruntés aux Pères orthodoxes ; puis, en son absence, puisqu’il avait, au mépris des sommations canoniques, refusé de comparaître, on prononça contre lui une sentence de déposition et d’excommunication. Mansi, t. iv, col. 1211. Les textes patristiques, présentés et lus par le diacre Pierre d’Alexandrie, avaient sans doute été recueillis par Cyrille, puisque tous se rencontrent dans ses autres ouvrages. Comparer Mansi, t. IV, col. 1184 sq., avec P. G., t. lxxvi, col. 324 sq., 341 sq., 381 sq. Les Orientaux arrivèrent quatre ou cinq jours après (26 ou 27 juin) ; en apprenant ce qui venait de se passer, ils refusèrent de se joindre aux autres évêques et se formèrent en conciliabule sous la protection des agents impériaux : ils reprochaient à Cyrille et à ses partisans d’avoir condamné Nestorius avec trop de précipitation et d’avoir, en approuvant les anathématismes, proclamé une doctrine apollinariste. Mansi, t. iv, col. 1372 sq. Ils lancèrent l’excommunication contre tous les membres du concile et prononcèrent la déposition de Cyrille et de son ami Memnon d’Éphèse. Par leurs faux rapports et par leurs intrigues auprès de l’empereur, ils réussirent même, au commencement du mois d’août, à