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CREDIBILITE


au long du sermon XXVIII. Le centurion a reconnu le Fils de Dieu à sa voix, et non ex facie. Non auteni credidit ex eo quod vidit, n. 5. C’est le procédé du Saint-Esprit de foi nier l’ouïe avant de réjouir la vue. Quid intendis oculunt : ’an rem para, n. 7. C’est avec raison que le Christ a défendu de le toucher à Madeleine qui croyait plus à ses sens qu’à la parole de Dieu : Quem enim mortuum vidit, ressuscitalum non credidit, cum tamen hoc promiseral ipse. P. L., t. ci.xxxiu, col. 922-920. Dans la lettre cccxxxvin à Haimeric, il reproche à Abélard de suspecter Dieu en ne voulant croire que ce qu’on peut démontrer. Il lui oppose la foi prompte de la bienheureuse Vierge, du bon larron. P. L., t. clxxxii, col. 543. Cependant la foi des mages qui n’ont pas vu de miracles, lui paraît supérieure à celle du centurion et du bon larron, in eo superexcellere videntur isti, quod jam tune miracula mulla fecerat. Et il conclut cette comparaison par le mot célèbre : Rogo vos, intuemini et videte quam oculata sit fides ; qnam lynceos oculos liabeat. In Epiphania Domini, serm. iii, P. L., t. clxxxmi, col. 149. Sa doctrine sur la nécessité du baptême dans la lettre à Hugues de Saint-Victor, P. L., t. clxxxii, col. 1034, renferme le germe de la doctrine des suppléances pour les infidèles de bonne foi que développera plus tard saint Thomas.

Guillaume de Saint-Thierry († 1148). — Le Spéculum fidei et VAÏnigma fidei sont consacrés à établir le caractère surnaturel, libre, indépendant, de la raison d’être de la foi. Ds formulent une méthode piétiste pour faire taire les doutes, par l’humilité, l’amour. L’auteur n’a pas eu en face de lui de purs incrédules. Malgré cela, il laisse une place, e nplusieurs endroits, pour la crédibilité rationnelle. Adsciscat sibi prudens animus munimentttm fidei ad confirmandum cor, ad illuminandam fide conscienliam magna Ecclesise luminaria, summos viros spiritualis scienlise, summse sapientise, sanctitatis probatse, doctrinas et scripta eorum, opéra eorum et martyria, dicalque sibi contra moins tentationum suorum : Tune islis meliorest, aut sapientior, sanctior aut perspicacior, qui hoc in mundo docuerunt quod a Deo didicerunt, magnifiée prxdicaverunt, luculenler descripta ad nos transmiserunt, vita et miraculis confirmaverunt, morte et martyrio consecraverunt ? Spéculum fidei, P. L., t. CLXXX, col. 388. Il ne croit pas pouvoir prouver le mystère du Christ par ses miracles, que les incrédules déclarent n’avoir point vus, ni par les miracles toujours actuels dans l’Église qui ne se font pas ad voluntatem hsesitantium, vel ad qusestiones increcUtlorum, et qui conviennent par là aux fidèles, non ut credant, sed quia credunt. Ibid., col. 389. Il regarde la conversion du monde comme le grand miracle et s’inspire pour le décrire de saint Augustin..Enigma fidei, ibid., col. 401402. Il donne cette formule de la crédibilité : Primas gradus (cognilionis divinse) in aucloritale fundatus, fidei est, habens formant fidei, probatse auctoritatis probabilibtts lestimoniis fundatam. *Enigma fidei, ibid., col. 414. Les mots probatse auctoritatis probabilibus testimoniis se rapportent à l’autorité de l’Église et des Pères, cf. § précédent, ibid., col. 413, qui ont souffert pour la foi. Cf. le passage du Spéculum fidei, col. 388, cité plus haut, pour avoir le sens plénier.

Roland Bandinelli (Alexandre III en 1159). — Malgré la dépendance de ses Sen lences vis-à-vis de la Théologie d’Abélard, Roland suit la doctrine d’Hugues de Saint-Victor sur la crédibilité. Il reproduit mot à mot le passage de la Summa Sententiarunt déjà cité : Veluli si quis quæreret, P. L., t. clxxvi, col. 43. Il corrige en l’interpolant heureusement la définition de la foi donnée par Abélard : fides est (certa) existintatio rerum absetilium, et déclare que cette définition, si elle convient à la foi catholique, ne convient pas à elle seule. A. M. Gietl, O. P., Die Sentenzen Rolands, Fri bourt.’. 1891. p. 10-12. Il remarque que lorsque la foi semble avoir pour objet quelque chose d’évident, ce n’est pas ce qui est évident qui est cru, non tamen quod creditur apparet. Ainsi lorsque je crois qu’un homme est juste et sage, parce que c’est évident, ni la justice ni la sagesse ne m apparaissent. Ibid., p. 13-11. Par ces distinctions il échappe aux inconvénients de la théorie d’Abélard, et tout en conservant son langage se rapproche de la doctrine commune.

Pierre Lombard ( j 1160). — On s’attendrait à trouver chez le grand sententiaire une doctrine de la crédibilité. Elle fait à peu près complètement défaut. Sous l’influence de la réaction contre Abélard, et spécialement de Hugues de Saint-Victor, il s’attache principalement à manifester quod proprie fides non apparentium est, Sent., 1.111, dist. XXIII. 7 ; dist. XXIV, 1, P. L., t. exen, col. 806-809 ; et l’antériorité de la foi sur l’intelligence : nisi credideritis non intelligetis. Ibid. On voit cependant par son commentaire sur l’Épitre aux Hébreux, II, 1-5, qu’il avait une juste idée de la portée de la preuve par les miracles. Per quod ostenditur quod non simpliciter est eis creditum, sed per signa et prodigia. Ideoque, dum credimus, non illis, sed Deo nos credere declaratur. P. L., t. CXCII, col. 115. C’est complet, mais c’est court.

Robert Pulleyn (-J-.4150). — A signaler au 1. III de ses Sentences le c. xxviii. où la force probante des miracles du Christ en matière de doctrine est à plusieurs reprises mise en relief, par exemple dans ce trait : Ut per miraculum quod ab ipsa fiebat visibiliter, invisibilis peccaminum dimissioab eadem fieri crederetur. P. L., l. clxxxvi, col. 803.

Richard de Saint-Victor († 1173). — II mérite une mention à part à cause de la fortune qu’a eue dans la théologie le célèbre passage du c. n du I. I de son De Trinitate : Nonne cum omni confidenlia Deo dicere polerimus ? Domine si error est teipso decepti suntus : nam ista in nobis tantis signis et prodigiis confuinata sunt et talibus, quse nonnisi per te fieri possunt. P. L., t. exevi, col. 891. Tout ce chapitre est à lire comme expression parfaite de la notion devenue classique : rôle formel de révélation ; confirmation par les miracles et autres signes à l’appui ; leur effet immédiat qui est la certitude naturelle, hujusmodi fidem faciunt et dubilare non sinunt ; leur effet conséquent, à savoir la sécurité de la conscience de celui qui croit ; rôle de ces motifs de crédibilité vis-à-vis des Juifs et païens ; enfin, cette conclusion, que les vérités de la foi sont authentiquement attestées par Dieu. L’auteur tient d’ailleurs la doctrine caractéristique de son école sur l’indépendance et l’antériorité de la foi-volonté vis-àvis de la raison : Nisi credideritis non intelligetis. Ibid., c. i. Il semble que chez les Victorins l’usage des motifs de crédibilité est surtout de confirmer la foi que l’on a déjà. Cependant ils admettent, on vient de le voir, leur efficacité sur ceux du dehors. Vtinam attenderent Judœi, utinam adverterent pagani. Ibid., c. h.

Innocent III (1199). — Il décrit brièvement, mais lucidement, la crédibilité ressortissant au témoignage, et la nécessité de prouver la véridicité divine du témoin, en ces termes : Nonsuf/icil cuiquam ntide lantum asserere quod >i>se sit missus a Deo cum hoc quilibet hæreticus asseveret : sed oportet ut adstrual illam invisibilem missionemperoperationem miraculi vel per Scriptural testimonium spéciale. Unde cum Dominus vellet mitlere Moysen in Egyplttm ad filios Israël, ut crederetur et quod mitteretur ab ipsa, dédit ci signum ut converteret virgam in colubrum et colubrum iterunt reformaret in virgam. liegistrum, 1. II, exil, anno 1199, P. L., t. ccxiv, col. 697. Cf. Décrétai. Greg., 1. V, tit. viii, De hxret., c. XII.

Yen. Moneta, O. P.. 1230. — Il s’applique à prouver contre les manichéens, cathares et vaudois que les mi-