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CRÉATION


cienne, soit désir d’expliquer le titre de navroxpecTup qui, à la différence de rt ! xv : oS’jvau.o ;, implique exercice actuel de puissance, et dessein de justilier Dieu, aux yeux des hérétiques, de toute apparence de changement, il admettra que Dieu a créé de toute éternité des mondes dont le notre n’est que l’évolution dernière. Periarch., 1. I. c. ii, n. 10, col. 138 ; 1. III, c. v, n. 1, 3, col. 323 sq. Telle était aussi la solution néoplatonicienne. Cette explication ne sauvegarde l’immutabilité divine qu’aux dépens de la liberté ; encore ne sauve-t-elle l’immutabilité que bien imparfaitement, si le créateur reste la raison de ces changements dans les mondes. Certaines formules donneraient aussi à entendre que la puissance créatrice est limitée : Dieu n’a crée d’êtres que ce que sa providence pouvait en embrasser. Periarch., 1. II. c. ix, n. 1, t. xi, col. 225. — L’objet de la création c’est tout ce qui est, même la matière. Dieu n’est pas l’auteur du mal, Cont. Cels., I. VI, c. i.v, col. 1382, mais, dans la solution de ce problème de l’origine du mal et de la nature de la matière, la pensée du philosophe est loin d’être toujours claire et toujours à l’abri de reproche. Pour enlever aux gnostiques l’occasion d’accuser Dieu de partialité, il admet qu’il n’a été créé à l’origine que des substances spirituelles toutes égales ; la matière créée est répartie suivant les mérites antérieurs des esprits. Periarch., ]. II, c. ix, n. 5, 6, col. 229, 230 ; 1. II, c. i, n.l, 2, col. 182 ; Huet, Origeniana, I. II, c. ii, q. xii, P. G., t. xvii, col. 1047 sq. La matière corporelle n’appartenait pas, ce semble, au plan primitif de Dieu, à moins, dit Origène, que l’incorporéité ne soit le privilège exclusif de la Trinité. Periarch., 1. II, c. ii, n. 1, 2, col. 186 sq. On sent combien intimement sont mêlées dans ces thèses les inlluences platoniciennes, philoniennes, stoïciennes. C’est à la même source qu’Origène prendra ses vues sur le monde intelligible, et sa conception du monde comme d’un grand animal. Periarch., 1. II, c. i, n. 3, col. 184.

Dans l’ensemble, Denis, op. cit., p. 150 sq. ; Prat, op. cit., p. 68 sq., plus le docteur alexandrin prend de liberté dans les questions qu’il ne juge pas tranchées par la foi, Periarch., 1. I, præf., n. 3, col. 116, plus son affirmation explicite et constante de la création ex 711hilo a de force pour établir l’apostolicité de ce dogme. Mais sa spéculation, en nombre de points, toute grecque, cf. Porphyre dans Eusèbe, H. E., 1. YI, c. xix, P. G., t. xx, col. 565, jointe à l’ascendant de son talent, prépare à l’Église les contradictions tenaces de l’origénisme. La tradition alexandrine se continue par Denys. Eusèbe nous a conservé sa réfutation de l’atomisme épicurien. Prsep. evang., 1. XIV, c. xxm-xxvii, P. G., t. xxi, col. 1272 sq. ; cf. t. x, col. 1249 sq. Platon — et ce fait peut éclairer sur l’exégèse reçue à Alexandrie — y est rangé avec ceux qui tenaient pour l’unicité du principe premier. Un autre extrait réfute l’éternité de la matière. Deux contradictions de ce système : s’il existe deux incréés, il faut, pour expliquer qu’ils sont deux, admettre un principe antérieur cause de leur ressemblance ; c’est l’argumentation platonicienne, l’unité principe du nombre ; s’ils sont deux par eux-mêmes, comment expliquer dans deux natures identiques de telles divergences. In Sabellium, P. G., t. x, col. 1269 ; Eusèbe, op. cit., 1. VII, c. xix, col. 564. Des hérésies nouvelles vont fournir l’occasion d’affirmer encore le dogme de la création, l’arianisme, le manichéisme, l’origénisme.

Du côté des orthodoxes, saint Alexandre d’Alexandrie reproche aux ariens d’étendre au Fils la condition des créatures tirées du néant, 1% ovx ovkov. Epis t., i, n. 2, 4, P. G., t. xviii, col. 552, 554. Entre les deux partis l’accord existe donc sur le bit de la création exiiihUo ; saint Alexandre se contente de marquer nettement les

prérogatives du Fils, où’x èx to-j [xv-, ovto ;, à’ù.’Èx toû

ôvtoj Hocrprfî. Epis t., i. o. 12. ibid., col. 505. Cf. Ilahn. Bibliothefe der Symbole, p. 19.

Cette distinction entre la procession par création et la procession par filiation naturelle, saint Athanaseen fait le centre de toute son argumentation. L’Ecriture, observe-t-il, ne connaît le temps que pour les créatures, la seule éternité pour le Fils. C’est que les unes sont tirées du néant, i oùx ôvtcov, tandis que le Fils est l’image du l’ère. Oral., i, n. 13, P. G., t. xxvi. col. 40. Comme il est avant toutes ses œuvres, c’est impiété que de le dire produit aussi i ovx ovtwv. Jbid., n. 20, col. 63. Le Verbe est œuvre nécessaire de la nature divine, la créature procède de la volonté libre de Dieu ; aussi est-il éternel, tandis que celles-ci sont temporelles ayant commencé par n’être pas. Ibid., n. 29, col. 72. Il est Dieu puisque seul il peut créer du néant, comme il l’a fait. Oral., ii, n. 21, -27. /’. G., t. xxvii. col. 190, 204. C’est parce que l’homme, tiré du ni ne peut comprendre Dieu, que le Seigneur a créé le monde par son Verbe pour se faire connaître dans son œuvre. Orat. cont. génies, n. 34, 35, P. G., t. xxv, col. 69. Toutefois Dieu n’a pas besoin d’un inten diaire pour produire. Oral., ii, n. 24. 25, P. G., t. XXVI, col. 197-200. L’n instrument de cette sorte, ordonné à la créature, lui serait subordonné. Ibid., n. 29, col. 208. Telle est la nature intime de tout ce qui est tiré du néant, qu’il tend à y retourner de son propre poids ; aussi Dieu qui est bon, cf. Platon, Timce, 29, édit. Didot, t. ii, p. 205, envoie-t-il son Logos pour soutenir toutes choses dans l’existence, non pas ce Aôyo ; n-.i :  ; j.arixd ; inné en toutes choses, mais le Aoyo ; image adéquate du Père, eIxùv àirapâXXaxto ;. Orat. cont. génies, n. 40, 41, P. G., t. xxv. col. 81. 84.

Il y a dans l’expression de ces pensées réminiscence visible du stoïcisme et du platonisme ; les divergences de doctrine sont par ailleurs assez sensibles. Dieu transcendant et principe unique : le dualisme est réfuté. Orat. cont. gentes, n. 6, 7. t. xxv, col. 12 sq. ; la parité établie entre Dieu et l’ouvrier humain qui ne peut rien faire sans matière première est proposée comme type d’objection ridicule, Cont. arian., I, n. 22, t. xxvi, col. 60 ; la création est prérogative exclusive de Dieu, œuvre du Verbe, mais dans l’unité indivise de la nature divine, et nécessairement temporelle.

A mentionner à la même époque Marcel d’Ancyre et son symbole. Hahn, Bibliothek der Symbole, p. 22.

Du côté des semi -ariens, Eusèbe de Césarée. Très justement il explique le dessein de Moïse : en ouvrant son code par l’histoire de la création, il voulait montrer au préalable dans le législateur de l’ordre moral, le législateur même de la nature. Præp. evang., . VII, c. ix, x, P. G., t. xxi. col. 532 sq. La création ex nil(do de la matière elle-même est présentée comme une doctrine propre aux Hébreux. Ibid., 1. VU, c. XVIII, col. 561. Puis pour démontrer que la matière n’est pas incréée, Eusèbe transcrit des fragments très précieux de Denys d’Alexandrie. d’Origène, de Philon, de Maxime. Ibid., c. xix-xxin, col. 564 sq. Le rôle du démiurge est abondamment décrit avec citation d’Aristolmle, de Philon, de Platon, de Numénius, de Plotin et d’Amélius. Ibid., I. VII. c. XII xvi, col. 5Il sq. ; 1. XL c. x -xxi, col. 884-901. De ces citations et des réllexions d’Eusèbe se dégage un subordinatianisme très net. Le stoïcisme est aussi réfuté, 1. XV. c. xiv sq., col. 1341 sq. On notera de plus, pour comprendre la pensée des Pères sur Platon, avec quel soin cet écrivain relève les réticences calculées du philosophe et les traces d’ésotérisme dans son enseignement. Op. cil.. 1. XI. c. xiii, xx. col. 881, 901 ; 1. XIII, c. v, xiii, col. 1060. 1105. Numénius avait fait la même remarque. Ibid.. 1. XIV, c. v. col. 1197. En empruntant aux penseurs grecs leurs vues sur la transcendance divine, l’exemplarisme, la bonté comme cause de la création, le rôle du Logos