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CRAINTE


nis, c. xxx, P. G., t. xl, col. 719 ; et de saint Augustin, De spiritu et Mitera, c. xxxi, n. 53, P. L., t. xuv, col. 234 : Quse per metum aguntur sunt volunlaria simplicité)’, involuntaria secundum quid. L’acte fait sous l’empire de la crainte est, en effet, considéré par son auteur comme écartant le mal redouté, et donc, absolument parlant, il est actuellement voulu. On connaît l’exemple classique du capitaine de navire qui, peur échapper au naufrage, fait jeter sa cargaison par dessus bord. Hic et nunc, cette détermination est en définitive volontaire. Il est assez évident que si on la sort des circonstances qui la motivent, si on la considère dans l’abstrait, elle répugne à la volonté, mais cette répugnance n’empêche pas l’acte actuel, concret, le seul qui compte en définitive, d’être voulu : il n’est involontaire que secundum quid, dans la supposition toute gratuite d’autres circonstances.

2. L’acte accompli sous l’empire de la crainte est, par suite, au point de vue de la responsabilité, dans une situation intermédiaire entre l’acte accompli sous la pression de la violence, et l’acte accompli sous la suggestion des passions du concupiscible. La violence se définit : Cujus principium est extra, nil conferente vim passo. L’acte accompli sous l’empire de la violence a pour cause totale l’influence extérieure ; la volonté violentée ne concourt en rien à cet acte. L’acte accompli par crainte subit effectivement une influence extérieure, celle d’un mal menaçant et certainement non voulu, mais il n’a pas la seconde condition de l’acte violenté, nil conferente vim passo. A un certain moment, le craintif se décide à apporter son concours à l’acte suggéré par la crainte, confert vim. L’acte accompli par amour ou désir voluptueux, au contraire, n’a aucun des caractères de la violence. Le premier lui fait défaut, car le bien sensible attire, et n’a pas, comme le mal redouté par la crainte, cette opposition à l’inclination de la volonté qui empêche l’acte accompli par crainte d’être tout entier l’effet d’un principe intérieur ; il n’a pas le second, puisque le fait d’agir sous cette influence manifeste le concours de la volonté, donc un acte de tout point volontaire. Sum. theol., I a 11’, q. vi, a. 5-7.’.'>. La crainte, ne supprimant pas le volontaire, n’excuse pas du péché commis sous son empire. Si donc, pour éviter un mal temporel, mort, blessures, perte de la fortune, on commet un acte défendu, c’est un péché. Il y aura cependant des diminutions de culpabilité proportionnées aux degrés d’irresponsabilité, comme pour toute passion. Sum. theol.. I » II", q. i.xxvii. D’où les recettes des moralistes modernes : metus gravis régularité » ’non tollit, sed minuit voluntari

non tollil orque m vrium.

C. Marc, lnslil. mor, alphons., *.)° édit., t. x, n. 286, Il est même des cas, en dehors de celui où la crainte opprime par sa violence toute délibération, dans lesquels il n’a |Mde bute. Ce sont les cas où l’on cède à un moindre mal. S ; iint Thomas cite celui du voyageur qui. i des brigands, leur donne une rançon

poin i vie. Encore qu’il soit mal d’enrichir des

criminels, c’est in casu an moindre mil. el c’est d’ailleurs la seule alti rnative qui soit laissée. Sum. theol., I’Il i. >, a. 4.

4. I un devoir strict de combattre la crainte

pour les autres passions,

principaux de résistance : a) excitei en soi’i’mIiiîv ; i la chasseï "H.i l.i calmer’;

1 cela ne i pratiquer

du us l’inhibition, défendre aui membres extérieurs

quiil’leur nature, obéissent mi ntUum, de suivre

l’impulsion de la crainti Sum. theol., h II", q. lxxvii,

, q.i.xxxi tique, lorsqu’on

ipable de I."-ii

qui sera i omi ni illicite,

c’est se rendre coupable d’un péché mortel. Ibid., a. 8.

5. La crainte grave est comptée parmi les motifs d’impuissance morale qui excusent de l’observation des lois humaines, ecclésiastiques ou civiles, sauf dans le cas de péril pour la religion ou la société. Elle supprime aussi l’effet des censures en enlevant la contumacité du délinquant. Elle exempte même de certains points des lois divines, soit positive (exemption de l’intégrité de la confession sacramentelle), soit même naturelle, pourvu qu’il s’agisse de préceptes affirmatifs (obligation de rendre un dépôt confié, par exemple une arme à un insensé). Voir Loi, Confession, Dépôt. — La crainte grave peut vicier certains actes, vœux, mariages, contrats. Voir ces mots.

2e cas. — La crainte antécédente ne laisse pas l’usage de la raison. Ce cas suppose toute une psychologie des passions, dont les principales positions se trouvent, chez saint Thomas, Sum. theol., Ia-IIæ, q. ix, a. 2 ; q. x, a. 3 ; q. xxiv, a. 3 ; q. lviii-lix ; q. lxxvii, a. 1, 3. Au point de vue moral, si la violence de la crainte antécédente est la résultante de lâchetés antérieures, d’une habitude contractée volontairement de céder à la peur, quelle que soit, au moment de l’acte, l’irresponsabilité, le péché commis est imputable, selon les principes qui règlent le voluntarium in causa. Si, au contraire, c’est affaire de tempérament congénital, suite de maladie, surprise totale, l’acte commis peut être totalement involontaire, la raison étant comme paralysée. Sum. theol., I » II æ, q. lxxvii, a. 7.

C’est en se basant sur cette loi que l’on peut ériger l’obéissance absolue en principe de direction pour les scrupuleux. La peur du péché anéantit, en quelque sorte, leur responsabilité. Voir Screpule.

IV. Mop.alisation de la crainte. — La volonté délibérée peut exercer son empire sur la crainte, comme sur toutes les facultés et opérations de l’homme. La crainte dite conséquente, soumise ainsi au gouvernement de la raison, soit de la raison naturelle, soit de la raison perfectionnée parla foi, l’espérance et la charité, devient morale, et cette moralité est ou purement rationnelle, ou surnaturelle. De l’exercice répété d’actes de crainte moralisée, naissent des vertus morales naturelles qui ont la passion de crainte pour matière et pour organe. L’ordre surnaturel ne devant pas être moins parfait que l’ordre naturel, selon le principe cher à saint Thomas, il y aura également des vertus surnaturelles de même caractèi e.

La crainte de Dieu.

1. La crainte a pour objet

propre un mil menaçant. Pour que le bien soit redouté, il faut donc qu’il nous apparaisse la cause ou l’occasion d’un mal. Et c’est ainsi que Dieu peut être craint.

2. Deux choses en Dieu sont susceptibles d’apparaître comme un mal pour l’homme : la justice divine, s’il est ur ; la séparation d’avec Dieu par le péché, s’il est juste. De là vient la division de la crainte en servile et filiale, division dont les termes sont empruntés par la mi Augustin, lu Joa., ir. I.WXV, n. 3, P. L., t. xxxv. col. 1849 ; De spirituel liftera, c. Xxx.il, n..Mi. /’. L., t. xi. iv. col. 236 ; et surtout, tn I I Joa., tr. IX. /’. /, .. i. xxxv, col. 3046, reproduits équivalemment par saint Bédé, Super Parabol. Salom., 1. I, c. i, /’. /.., t. mi. col. 939, el mis définitivement

en circulation par Pierre Lombard, Seul.. I. III, dis !.

XXXIV, /’. /.., i. cxcii, roi. « 23 s.|. T : nbard

y ajoute, d’après saint Augustin, lu Epitt. I Joa., !.. la crainte initiale, qui n’est à proprement parler, ns oii saint Augustin l’entend, qu’un mélange transitoire des deux autres ; enfin, d’après Cassiodore, il comme une quatrièmi ùnte humaine,

timor humanus, Cassiodore, Tn Pt. u/>, 13, I t. i w. col. 180, ou timor mundanus, în Pi. < w, I ; cf. I. /’.. i i a, I. /’. /… t. lxx, i I 031, qui i

rapporte qu’indirectement.i l’idée de crainte de Dieu.