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1907

CORRADO

CORRECTION FRATERNELLE

1908

3° Traclatits de indulgentiis, Camerino, 1583 ; 4° Tractalus de oralione cum expositions orationis Dorninicalis.

Quétif-Echard, Scriptores ord. prxdicat., t. II, p. 361 ; Hurter, Numenclator, t. I, p. 490, note 2.

R. Coulon.

    1. CORRECTION FRATERNELLE##


CORRECTION FRATERNELLE. - I. Nature. II. Obligation. III. Ordre à suivre.

I. Natip.e. — 1° Définition. — La correction, au sens théologique le plus large, est, d’après saint Thomas, Sum. theol., IIa-IIæ , q. xxxiii, a. 1, « le remède qu’il faut appliquer à la faute d’un particulier. » Correctio delinquentisestquoddam remedium quod débet adhïberi contra peccatwu alicujus. Or, on peut considérer un pécho de deux manières, en tant qu’il est nuisible au seul coupable, ou en tant qu’il nuit à un tiers ou au bien commun. Si, par un avertissement charitable, on veut porter remède au péché envisagé sous le premier aspect et qu’on ait alors principalement en vue le bien du seul coupable, c’est la correction fraternelle. Si, au contraire, on a surtout pour but de remédier au mal causé au préjudice d’un tiers ou du bien commun (ce qui est du ressort des supérieurs) et que l’on inflige au délinquant un châtiment proportionné, c’est la correction juridique, qui est un acte de la vertu de justice. S. Thomas, loc. cil.

La correction fraternelle peut donc se définir avec le docteur angélique, lnl V Sent., l.IV, dist. XIX, q, il, a. 1, Opéra, Parme, 1858, t. vii, p. 828 : un avertissement charitable donné au prochain pour le retirer du péché, admonilio fratris de emendatione delictorum fratema caritale. Adnwnitio fratris, c’est l’acte lui-même ; de emendatione delictorum, c’est le but proposé ; fratema caritale, c’est le motif. S. Thomas, loc. cit. La correction fraternelle est donc une œuvre de miséricorde, accomplie sous l’impulsion de la charité et la direction de la prudence. S. Thomas, Sum. theol., II a IL, q. XXXIII, a. 1, ad 2 Llm.

Division.

Si cette correction est faite par un

égal, elle porte le nom de correction fraternelle, proprement dite ; si elle est faite par un supérieur, elle est assez communément appelée correction paternelle. Marc, Jnstitutiones mor. alphonsianse, n. 498, 13e édit., Rome, 1906, t. i, p. 322 ; Lehmkuhl, Theol. mor., n. 610, Fribourg-en-Brisgau, 1893, t. I, p. 365 ; Bucceroni, ltistit. theol. mor., n. 409, Rome, 1898, t. i, p. 181 ; Delama, Instil. theol. mor., 1. II, n. 83, Trente, 1895, t. il, p. 49. Ce nom lui vient de ce que le supérieur agit alors comme père et non comme juge, et cette correction ne diffère de la correction fraternelle qu’en ce qu’elle ajoute parfois à l’avertissement charitable une pénitence légère, plutôt par manière de remède que de châtiment, et qu’ensuite, tout en ayant principalement en vue le bien du coupable, elle a pour but en même temps de sauvegarder le bien commun.

3 « Objet. — Saint Thomas, In IV Sent., l.IV, dist. XIX. q. ii, a. 1 ; Sum. theol., II a IIe, q. xxxiii, a. 1, assigne â la correction fraternelle comme seul objet les fautes commises par le prochain. On ne peut de fait corriger que ce qui est défectueux, répréhensible. Toutefois bon nombre d’auteurs rattachent au précepte de la correction fraternelle l’obligation de prévenir la faute du prochain. S. Alphonse, Theol. mor., 1. II, tr. 111, c. ii, dub. IV, n. 38, édit. Gaudé, Rome, 1905, t. I, p. 332 ; Laymann, Theol. mor., 1. II, tr. III, c. vii, n. 1, liamberg, 1699, p. 182 ; Marc, loc. cit., n. 191 ;.Krtins. Theol. mor., 1. II, tr. III, a. 2, n. 52, Paderborn, 1901, t. I, p. 141 ; Lehmlcuhl, loc. cit., n. 611. Rien de plus connexe, en clfet, que le devoir de relever un frère après sa chute et celui de l’empêcher de tomber. Aussi s, nui Alphonse, Homo apostolicus, tr. IV, c. ii, p. i, n. 20, Opère complète, Turin, 1887, t. vii, p. 80, dit-il : Materia correclionis est <jit<<tilihrt peccatum mortale,

in quod proximus oui lapturut est, aut jam in* et non adhtte emendatus est. Le saint docteur entend

ainsi la correction fraternelle dans un sens plus I embrassant la première des ouvres de miséricorde docere ignorantes, ou bien cette autre consulcre dubitantibus. Nous adopterons ici cette acception.

II. Obligation.

1° La correction fraternelle est obligatoire. — 1. La simple raison en fait un précepte qui est essentiellement de droit naturel. Si, de par la loi de la charité, nous sommes tenusde venir en aide à notre prochain dans ses nécessités corporelles, à plus forte raison le sommes-nous quand il s’agit de ses besoins spirituels. — 2. Ce précepte est aussi de droit positif divin, puisqu’il se trouve nettement formulé dans la sainte Écriture. La sagesse juive faisait déjà cette recommandation : « Reprends ton ami, de peur qu’il n’ait pas compris et dise : Je n’ai rien fait, ou s’il l’a fait, pour qu’il ne recommence pas. Reprends ton prochain, qui peut-être n’a rien dit, mais pour que, s’il a parlé, il ne recommence pas. » Eccli., xix. 13, 14. Jésus-Christ dit à ses disciples : « Si ton frère a péché contre toi, va et reprends-le… ; s’il t’écoute, tu auras gagné ton frère, corripe eum, dans le grec è>.iv ; ov, convaincs-le de sa faute. Matth., xviii, 15. Saint Luc, xvii, 3. emploie un verbe plus énergique encore : ÈTtiTt’jiYjo-ov x-L-m, increpa illum. La leçon in te n’est peut-être pas originale. Mais les interprètes, qui la retiennent, prouvent eux-mêmes que Notre-Seigneur, tout en ne parlant que des péchés commis contre nous par le prochain, a voulu comprendre aussi toute offense faite à Dieu. Cf. Corneille de la Pierre, In Mollit.. xviii. 25. Paris. 1857, t. xv, p. 406 ;.1. A. Van Steenkiste, SancluntJ. C. Evang. sec. Matth., 3<= édit., Rruges, 1880. p. 698 ;.1. Knabenbauer, Comment, in Evang. sec. Matth., Paris. 1893. t. il, p. 120-121. Merz, Thésaurus biblicus, Paris, I p. 120-122. a réuni tous les textes et les exemples bibliques relatifs à la correction fraternelle. — 3. On peut dire en un sens que le devoir de la correction fraternelle est également un précepte ecclésiastique, car il est clairement énoncé dans le droit canon, caus. XXVI, q. iii, c. Tarn sacerdotes quam reliqui fidèles, texte que saint Thomas cite pour prouver que le précepte de la correction atteint tous les hommes. Sum. theol., II 1 If’, q. xxxiii, a. 3. Enfin les Pères y ont toujours vu un véritable précepte. S. Augustin, De "correptitme et gratia, c. ix, n. 25, P. L., t. xi.iv. col. 931 ; Contra epist. Parmeniani, 1. III, c. i, P. L., t. xliii, col. 82 ; S. Ambroise, E.rpositio Evang. secund. Lucam, 1. VIII, n. 21, P. L., t. xv, col. 1771 ; S. Bernard, Sermo in nativ. S. Joannis, n. 9, P. L., I. CLXXXIU, col. 402.

2° Pour qui est-elle obligatoire- ? — Le précepte de la correction fraternelle s’impose â tous ceux à qui s’impose la charité. Il atteint donc tout le monde sans exception. Talis correctio pertinel ad quemlibet charitem habentem, sive sit subditus, sire prselalus. S. Thomas, loc. cit. Il atteint en particulier les supérieurs qui, en vertu de leur charge, ont une obligation spéciale, « En effet, dit le docteur angélique, loc. cit., ad l" iii, de même qu’on doit des bienfaits temporels plutôt à ceux dont l’existence temporelle nous est confiée, ainsi devons-nous de préférence accorder les bienfaits spirituels, tels que la correction et l’enseignement, à ceux dont oousavonsla charge spirituelle. - Cf. K/ech.. xxxiii, 8 : xxxiv, i-10. Cette obligation spéciale fera que, dans certains cas, la correction fraternelle sera île précepte pour un supérieur, alors qu’elle serait seulement de conseil pour un égal. Tous ces cas sont traités longuement dans Mayol, Præambula ad decal., q. ni, a. i. dans Migne, Cursus théologies, t. xiii, col. 914-916. Les inférieurs eux-mêmes ne sont pas dispensés de ce précepte. La correction, en effet, doit s’exercer envers tous ceux qu’on doit aimer et en qui l’on voit quelque péché â reprendre, aussi saint Thomas. Sum. theol.. II » II 3 -’,