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VOL. MALICE


termes de lier moralement les différents vols ; ce qui n’a pas lieu s’ils sont séparés par de trop grandes distances. Il fallait rappeler ce principe, parfois oublié, du traité des actes humains. Donc pour qu’il y ait coalescenlia, deux conditions sont nécessaires : somme considérable des torts obtenue par addition, lien moral unissant les petits vols.

2. Solution de la question.

Les deux conditions requises se réalisent en trois cas, à’savoir : la volonté formée d’avance d’arriver à un profit considérable au moyen de furtula ; la volonté de ne pas restituer le produit considérable de petits vols auparavant commis ; la coopération formelle, avec médiocre profit, à un vol considérable.

a) Le cas le plus simple de la coalescenlia des furtula est celui de l’intention de se procurer un profit injuste considérable au moyen de petits vols répétés plus ou moins fréquemment. D’avance ou à partir d’un certain moment, le voleur a visé un total et a déjà fixé en quelque sorte le nombre et la valeur des termes de cette frauduleuse addition. C’est le cas de la caissière désireuse d’une fourrure de prix, du commis ayant envie d’une bicyclette neuve, des deux employés voulant, en vue de leur prochain mariage, se monter en ménage à peu de frais, qui décident de prendre des marchandises par petites quantités ou de l’argent par petites sommes, jusqu’à ce qu’ils aient le moyen de s’acheter les objets désirés. Ou bien, c’est le commerçant qui, s’étant fixé dix années de travail pour faire fortune et prévoyant ne pouvoir y arriver en restant honnête, est résolu de commettre tous les jours toutes les petites injustices possibles au détriment de tous ses clients.

Comment juger ces petits vols dont chacun est et reste un petit vol distinct des précédents et des suivants ? Il y a union entre eux dès le commencement ou à partir d’un certain moment ; les voleurs les ont unis par leur volonté de commettre une injustice grave. Mais à quel moment le péché grave a-t-il été commis ? Distinguons entre péché interne et péché externe. In a/Jcctu le péché interne d’injustice grave a été commis sitôt la décision prise ; péché qui se renouvelle chaque fois que se répétera la résolution d’injustice grave, surtout s’il y avait eu rétractation et remords suivis d’une nouvelle faiblesse. Extérieurement, le péché de vol ne sera mortel qu’au moment où le voleur aura conscience d’avoir atteint la quantité qu’il considère comme grave, même si ce premier total est encore au-dessous de la somme convoi 1er. Au contraire, le péché de vol ne deviendra pas extérieurement grave, si le voleur, volontairement ou non, s’arrête avant la matière grave.

b) Le second cas de coalescenlia est celui de l’intention de retenir et de ne pas restituer le produit Considérable de petits vols commis auparavant. Calculant, Intentionnellement ou par hasard, les petits vols commis antérieurement et en faisant l’addition, le voleur constate qu’il a atteint ou même dépassé une quantité considérable. Si alors il se décide à garder tout ce qu’il a pris ou emprunté sans avoir jamais eu fini eut ion de rendre ou acheté avec l’intention de ne jamais payer, cette décision établit une eoaleteentia entre les vols précédents et distincts. Ce lien moral les unit et en fail un vol considérable, pourvu toutefois qu’il y ; iil possibilité morale de les lier il qu’ils ne soient pas séparés par un trop grand espace de temps. Ainsi, un vieil employé retraité. réfléchissant sur les torts causés ; ï sa maison en cin quante années de service et en faisant l’addition, arrive à un total d’environ cinquante francs or. Entre

letlts vols de marchandises, argent, articles de

bureau, etc…. la liaison morale ne peut si’[aire, car Il y a eu de longues Interruptions J les petits vols

restent petits vols sans s’agglomérer en un vol gravement coupable.

Au contraire, les deux conditions étant remplies, les petits vols antérieurs viennent faire une masse considérable devant la conscience du voleur : s’il se décide à tout garder, il se rend coupable d’un péché intérieur grave ; si, en fait, il ne restitue pas quand il en a les moyens, le péché de vol devient un vol effectif grave. Ainsi en est-il du jeune employé qui, sans plan, vole chaque jour au magasin tout ce qui lui tombe sous la main, le consomme ou le dépense ; après six mois, il constate qu’il a volé pour une somme de 1 500 francs, c’est à ce moment que, selon sa décision, il pourra y avoir coalescentia de ses furtula.

c) La coopération formelle à un vol considérable est le troisième cas de coalescentia, bien que les parts des complices soient insignifiantes, donc au-dessous de la matière grave. La formule elle-même indique lés conditions de la coalescentia : il est supposé que la part du butin pour certains complices a été relativement minime et au-dessous de la matière grave, mais leur coopération au vol et à tout le vol a été formelle, donc volontaire et libre, et même accompagnée de la connaissance de l’importance de l’affaire projetée et exécutée. Un péché intérieur de vol grave a été certainement commis, car la coopération formelle en principe fait encourir la responsabilité sur tout le dommage. Quant au péché extérieur, cela dépendra de la nature de la coopération plus ou moins immédiate, et la question du devoir de la restitution devra se résoudre d’après les règles si compliquées de la solidarité.

3. Questions particulières.

Deux questions secondaires peuvent se poser au sujet des furtula : est-on autorisé à fixer la matière grave du total au-dessus de la quantité grave moyenne ? qu’en est-il si les furtula ont été commis au détriment de plusieurs personnes ?

a) Les théologiens sont à peu près d’accord pour admettre le principe d’une quantité plus considérable comme matière à péché mortel quand il s’agit de furtula. La raison en est que le maître est censé moins invitus pour un tort qui lui est fait par l’enlèvement répété de petites quantités que pour un dommage d’égale grandeur fait en une seule fois ; en fait, le tort est moins vivement senti d’autant que, souvent, le volé ne s’aperçoit pas de tous ces petits vols. Aussi, généralement, les auteurs exigent-ils, pour le péché mortel, la quantité de 15(1 ", , de la matière grave commune, donc la moitié en plus ; quelques-uns vont jusqu’à doubler la quantité grave moyenne. Nous serions volontiers de ce dernier sentiment quant au péché extérieur ; toutefois, le péché grave intérieur est commis quand la volonté a conseil li au tort grave même si la matière est moindre. Noldin, n. ion sq., dislingue entre les cas, et il n’admet une quantité plus élevée que pour le second cas, el la rejette pour le premier et le troisième.

b) Si les furtula ont été commis au détriment de plusieurs personnes, il faut, croyons-nous, considérer tout d’abord le détriment que chacune a subi. S’il est grave dans le sens donné plus haut, nulle difficulté n’existe qliant au péché contre la justice coin mutative et la grave obligation de restituer. Mais si le lort n’csl que léger à l’égard de nombreuses personnes, qui sont par exemple les clients d’un cnmmcr çanl trop cupide, el que le total soit absolument grave, deux difficultés se présentent. Y a-t-il péché grave (outre la justice commutât ie ? Nous ne le pensons pas et nous ne voyons que (les ols légers cl

une grave violation de la justice légale. En consé quence, l’obligation de restituer ne peut être elle

même grave, mais elle se partage en aillant d’obligations légères qu’il y a eu de volés.