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VOCATION. S. IGNACE


Christum, quomodo vocantur a Christo ? Non vocantur, sed permittuntur. Quoniam vero non vocantur a Christo, ideo tam anxie prælationes quærunt, dignitates ambiunt, offerunt munera, adhèrent potentibus, et quod nequeunt virtute consequi pretio acqnirunt et prece. Indecorum arbitrantur sectari humilitatem Christi, qui, ut ait Apostolus, non stbi vindicavit honorem ut Pontifex fieret sed qui vocavit eum dicens : « Tu es sacerdos in jeternum secundum ordinem Melchisedech. » Nolunt vocari a Deo sed ab hominibus, et utinarn vocarentur ! Infulas appetunt, vocari domini congaudent, et quod divinum est o quam sœpe arrogant sibi ! Op. cit., Ie part., vers le dernier tiers.

Ce texte, malgré son ampleur, n’apporte, il est vrai, aucune idée nouvelle : il ne fait que confirmer les précédentes. Comme saint Grégoire, Laurent Justinien distingue dans l’appel extérieur par l’Église au sacerdoce une double vocation de Dieu : l’une positive et de bénédiction, qui consacre les sujets dignes ; l’autre simplement permissive et de tolérance, qui habilite les indignes mais en les réprouvant. Il maintient de même l’équivalence et la solidarité entre l’intention droite et la vocation intérieure. Pourquoi ces mauvais prêtres ne suivent-ils pas le Christ ? Parce qu’ils ne sont pas appelés par le Christ. Mais ce texte, répétition amplifiée des précédents, suggère une remarque. C’est que de ces deux termes : l’un, actif : l’intention droite ; l’autre, passif : la vocation intérieure, le second est de plus en plus mis en lumière. Or, il n’est pas sans intérêt de constater que la vocation intérieure prend ainsi de plus en plus de place dans la mystique du sacerdoce.

Saint Laurent Justinicn nous parle aussi de la vocation religieuse. Dans son Liber de obedienlia, comparant la vocation à la vie chrétienne et la vocation à la vie religieuse, il dit : « La première est commune, la seconde est très spéciale ; l’une impose l’observation des commandements si l’on veut entrer dans la vie éternelle, l’autre conseille de vendre tous ses biens et d’en donner le prix aux pauvres si l’on veut être parfait… Mais cela, ô doux Sauveur, on n’entreprendrait jamais de le faire si l’on n’y était intérieurement appelé et attiré par vous. Voilà ce qui fait que, de sa propre volonté, on prend le joug si suave de la sainte vie religieuse et de sa perpétuelle servitude. Hoc autem, o pie Salvalor, nequaquam actilare prsesumerent nisi inlrorsus vocarentur et traherentur a te. » Liber de obedienlia, xvi. Ici encore, ce qui paraît le plus remarquable, ce n’est pas tant l’idée même de vocation intérieure : nous y sommes habitués ; c’est la prédominance que prend cette idée sur celle d’intention droite.

5. Thomas a Kempis († 1471). — Une des idées les plus familières au pieux auteur de l’Imitation est celle de la vocation à la vie religieuse.

Qu’il épanche son âme devant Dieu : ainsi dans son opuscule du Soliloque ; qu’il instruise les novices dont il fut le maître, ou exhorte les religieux dont il fut le sous-prieur : ainsi flans ses Conférences ; qu’il raconte l’histoire édifiante de ses amis ou contemporains, ou qu’il écrive des lettres spirituelles, toujours il revient à la grâce de la vocation religieuse. Et c’est autant pour remercier Dieu de son appel intime à quitter le monde que pour exciter l’Ame à poursuivre la perfection. Il serait fastidieux de citer tous ces textes, qui répètent la même idée. En voici un qui peut les remplacer tous. On y verra comment, pour Thomas a Kempis, l’entrée en religion est la réponse de l’âme aux prévenance ! de la grâce et à l’action intime du Saint-Esprit sur la volonté.

In me hsec considéra, qui contemptlbilis et inutllii hule mundo, tua sancta vocatione ereptus mm de ipsins naufragio, et ad serviendnm tibi Hiam tuo merul lOClart

collegio… Quod utique non meis meritis sed tu* deputo providentiae. De quo te magnifiée laudo et benedico, qui dignatus es me vocare per gratiam. dans mihi voluntatem tamen bonam et abjiciens a me peccatorum sarcinam. Nam et suavi jugo me subjecisti, emolliens mentem meam unctione Spiritus tui, quam mundus nescit, nec videt, nec sapit… Sentio quod non omnibus datur sed quibus paratum est a Pâtre, quia non est volentis neque currentis sed miserentis Dei. Solilor/iiium (inimæ, xxv, 11.

De la vocation sacerdotale, Thomas n’a guère eu l’occasion de parler, l’institut des Frères de la vie commune ne comportant le sacerdoce que pour le père spirituel : on n’en trouve dans ses écrits que quelques mots sans importance. Mais tout ce qu’il dit de la vocation religieuse montre combien pour lui, comme pour ses contemporains, l’idée de vocation intérieure tient de place dans la vie spirituelle.

6. Les Exercices spirituels de saint Ignace († 1556).

— En 1548, par lettres apostoliques de Paul III, était approuvé, loué et recommandé, quant aux enseignements et aux méthodes y contenus (documenta et exercitia) dans son ensemble et dans ses détails (quoad omnia et singula) le petit livre des Exercices spirituels de saint Ignace. On sait l’autorité et la faveur croissante de ce manuel de retraite, que Pie XI proclamait sans rival en son genre dans l’encyclique Mens nostra.

a) L’idée de la vocation y occupe une place centrale. Car le but des Exercices est justement d’aider le retraitant à trouver la volonté de Dieu sur son âme, c’est-à-dire sa vocation, et à ordonner toute sa vie à la réalisation de cette divine volonté. De là une manière nouvelle, à la fois théorique et pratique, d’envisager la vocation sacerdotale et religieuse. Elle se réduit aux points suivants :

Il convient de rechercher la volonté de Dieu sur l’état de vie à choisir : mariage, sacerdoce, profession religieuse : Opportunum erit nos vestigare et efflagilare proprium vitæ genus in quo Majestati suæ nos servire malit. ( Præludium de diversis vitæ generibus). — Cette volonté est une vocation divine, qui se traduit en une élection bien faite : Electio non videtur esse vocatio divina (quæ) sit inordinata et obliqua, omnis vocatio divina est semper pura et munda sine admixtione carnis neque alterius cujusdam afjectionis inordinuhr. Introd. ad eligendar. rerum notitiam. — L’élection sera l’expression de la vocation divine si elle se fait : ou par une lumière miraculeuse, ou par des attraits portant la marque du bon esprit, ou par des raisonnements conformes à la prudence surnaturelle. De Iriplici tempore ad eleclionem. — L’affaire de l’élection doit se traiter entre Dieu et l’âme sans aucune ingérence humaine : Consisteras (instruclor) in medio ad instar bilancis sinal Creatorem cum creatura et creaturam cum suo Crealore ac Domino operari. Annot. 15.

b) Étant donné le but des Exercices, saint Ignace n’avait pas à s’occuper directement de la vocation extérieure. Il en touche cependant un mot. C’est pour dire que, au cas où l’on se serait engagé dans le sacerdoce pour des motifs indignes, comme l’intérêt ou l’ambition, et par conséquent sans une vraie vocation divine, il ne convient pas d’en résilier les fonctions, mais qu’il faut implorer la miséricorde de Dieu et. avec le secours de sa grâce, s’efforcer de bien remplir les devoirs que l’on a assumés.

(.’est de la vocation intérieure qu’il traite principalement. Il l’envisage d’abord par le côté humain et actif, c’est-à-dire comme l’acte psychologique et moral de choisir un étal de Vie ; et sons cet aspect, il l’appelle élection. Mais il la considère aussi par le côté divin et passif, c’est à dire comme 1e concours de la grâce prévenante à ce choix ; et sous ici aspect