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DICTIONNAIRE

DE

THÉOLOGIE CATHOLIQUE

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TRINITÉ. — Plusieurs des questions qui se rattachent au dogme de la sainte Trinité ont déjà été touchées, plus ou moins abondamment, en des articles antérieurs auxquels le lecteur est renvoyé d’office. Dans l’art. Dieu, le problème de l’unité divine a été étudié au point de vue historique : quelles ont été sur ce point capital les réponses de la Bible, des Pères, des scolastiques, des théologiens et des philosophes modernes ? Par ailleurs, aux vocables Père, Fils de Dieu, Esprit-Saint, il a été question de chacune des personnes de la Trinité. Chemin faisant on a signalé à ces articles spéciaux : Appropriation, Noms divins, Relations, etc., les problèmes que pose l’existence en l’unique essence divine de trois hypostases distinctes et néanmoins unies.

Il n’est pas question de reprendre, dans cet article d’ensemble, tout ce qui a été déjà dit soit à propos de Dieu, soit à propos de chacune des personnes divines. Sans doute est-il à peu près impossible d’éviter entièrement les répétitions. On s’efforcera du moins de les réduire au minimum et, pour cela, on envisagera surtout ici bien moins les problèmes relatifs aux personnes divines considérées en elles-mêmes que les questions soulevées par leurs relations et par l’affirmation d’un seul Dieu subsistant dans leur Trinité. Cette étude concernera d’abord la révélation du mystère de la Trinité, avec son développement dans la Tradition ; puis l’élaboration scientifique du dogme dans la Théologie latine (col. 1702).

I. LA RÉVÉLATION DU MYSTÈRE : ÉCRITURE ET TRADITION.

Il semble incontestable que la révélation du mystère de la Trinité n’a pas été faite aux Juifs et qu’on ne la trouve exprimée dans sa pleine lumière que par le Nouveau Testament. Les Pères l’avaient déjà remarqué, et il suffira de rappeler quelques textes entre beaucoup d’autres. C’est ainsi qu’on lit chez Tertullien, Advers. Prax., 31, P. L., t. ii (éd. 1844), col. 190 : « Quel est le fruit de l’Évangile, quelle est la substance du Nouveau Testament, si, dans le Père, le Fils et l’Esprit, on ne confesse pas trois personnes distinctes et un seul Dieu ? Dieu a voulu renouveler ce mystère et nous faire croire d’une façon nouvelle à son unité par le Fils et l’Esprit, afin que désormais la divinité fût reconnue publiquement dans la propriété distincte de ses noms et de ses personnes. » De même, et plus clairement, chez saint Hilaire, De Trinit, v, 27 ; iii, 7, P. L., t. x, col. 147 et 85, dont nous ne citons que le second passage : « Les Juifs en effet, ne connaissant pas le sacrement du mystère de Dieu et par suite ignorant le Fils de Dieu, adoraient seulement Dieu, mais non le Père. » Chez saint Épiphane, Ancor., 73, P. G., t. xliii, col. 153 : « L’unité divine a été surtout annoncée par Moïse, la dualité, c’est-à-dire la distinction du Père et du Fils, a été fortement prêchée par les prophètes, la Trinité a été manifestée dans l’Évangile. » Chez saint Cyrille d’Alexandrie, In Joan., xii, 20, P. G., t. lxxiv, col. 84 : « Ceux d’Israël ne connaissaient pas d’abord les leçons de la sainte et consubstantielle Trinité, ni non plus la force de l’adoration spirituelle. »

Particulièrement célèbre est un passage de saint Grégoire de Nazianze, Orat., xxxi (theol. v), 26, P. G., t. xxxvi, col. 161. Après avoir montré, dans la révélation de l’Ancien Testament, une dispensation et comme une économie divine, par laquelle le peuple élu était amené du culte idolâtrique aux sacrifices légaux et de la circoncision à l’Évangile, non pas brusquement, mais doucement, avec des tolérances de fait qui ménageaient les transitions, le Théologien ajoute :

« A ce progrès, je puis comparer celui de la théologie,

sauf que l’ordre y est inverse. Là, le changement s’opérait par voie de soustraction ; ici c’est par manière d’accroissement que la perfection est atteinte. Et en effet, le Vieux Testament prêchait manifestement le Père et plus obscurément le Fils ; le Nouveau a manifesté le Père et insinué la divinité de l’Esprit. A présent, l’Esprit habite en nous et se manifeste à nous plus clairement. Car il n’était pas sûr, alors que la divinité du Père n’était pas encore confessée, de prêcher ouvertement le Fils et, avant la reconnaissance de la divinité du Fils, de nous imposer par-dessus le marché — je parle ici avec trop d’audace — le Saint-Esprit… (Bien plutôt convenait-il que) par des avances, et, comme dit David, par des ascensions partielles, progressant et croissant de clarté en clarté, la lumière de la Trinité illuminât ceux qui avalent déjà reçu des lumières… Tu vois les illuminations nousdict. de theol. cathou T. — XV. — 49.