Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.2.djvu/716

Cette page n’a pas encore été corrigée

2961

V I E E T E K N E L L E. L’E C H I ï l H E

2962

déjà quelques-unes sont placées au paradis ou même au ciel près de Dieu, tandis que certains pécheurs sont dès maintenant en possession de leur punition définitive et ne ressusciteront pas. Bonsirven, p. 330331.

Avec les Jubilés, nous retrouvons une note strictement archaïque. La mort est le sommeil éternel ; tous les morts vont dans le Se’ôl. Toutefois, durant l’établissement de l’ère messianique — laquelle ne comporte pas de résurrection — tandis que les ossements resteront en terre, les esprits des justes auront beaucoup de joie ( ?). Ibid., p. 331.

Les Testaments reprennent les anciennes formules : sommeil éternel, réunion aux pères, repos. Cependant l’âme coupable sera tourmentée ; juste, « elle connaîtra avec joie l’ange de la paix qui l’introduira dans la vie éternelle » Test. d’Azer, vi, 5-6. Ibid., p. 331.

Avec les psaumes de Salomon (voir J. Viteau, Les psaumes de Salomon, Paris, 1911), nous trouvons une doctrine déjà bien évoluée. Le malheur des impies est assuré aussitôt après leur mort. Immédiatement après la mort, il existe donc déjà une différenciation de sort entre justes et pécheurs. Le Se’ôl n’est plus considéré que comme le séjour des pécheurs. Les âmes justes attendent la vie éternelle qui leur est promise, xii, 5, 7 ; xv, 15 ; xiii, 9 ; cf. iii, 16 ; xiv, 1, 2, 6 ; ix, 9. Cette vie éternelle est précédée de la résurrection : oï 8è <po60u|j.evoi xûpiov àvaar/jaovToa stç Çc ! >"J)v aîwvoov (rapprocher cette phrase de II Mac, vu, 9). La vie éternelle ici envisagée appartient bien à l’au-delà, car en deux textes au moins, ix, 9, xiii, 9, elle est opposée à la perdition définitive. Les fidèles serviteurs du Seigneur auront, près de lui, cette vie en héritage ; oi Se oaiot xiipiou xXy ; povo|i.y)oouat Çcoyjv, xix, 1, 2, 7, Bonsirven, p. 332. Cf. M.-J. Lagrange, l.r judaïsme avant J.-C, Paris 1931, p. 162 ; Le messianisme chez les Juifs, Paris, 1909, p. 170 sq.

L’Apocalypse de Moïse fait preuve d’une doctrine cohérente en montrant l’âme d’Adam montant au troisième ciel jusqu’au jour de la résurrection, xxxii, 3 ; xxxvii, 5 ; Bonsirven, p. 333.

L’Ascension d’Isaïe (voir E. Tisserant, L’Ascension d’Isaïe, Paris, 1908) place au ciel les âmes justes ; mais ces âmes n’auront leur gloire définitive qu’après la résurrection, ix, 7-26 ; Bonsirven, p. 333.

D’après YHénoch slave, le bonheur des justes ne se réalisera que dans le dernier éon (siècle), c’est-à-dire dans l’éternité, au paradis du troisième ciel. En attendant, l’Hénoch slave conserve encore la doctrine archaïque du Se’ôl. Ibid., p. 333.

Le IVe livre d’Esdras enseigne la séparation Immédiate des justes et des impics. Les impies sont sans repos et condamnés à subir sept espèces de tortures avant le jugement ; les justes, pendant sept jours, jouiront de sept joies, puis seront placés dans les réceptacles gardés par des anges, en attendant leur récompense. Ibid., p. 333-334.

Enfin le Baruch syriaque s’attache d’abord aux formules archaïques ; mais il parle aussi de réceptacles îles âmes, distincts du Se’ôl, séjour des justes, dont les âmes sortiront quand aura sonné l’heure de la récompense. Les impies s’attristeront sachant qu’est venue l’heure de leur supplice et de leur perte. Ibid., p. 334 335.

Ainsi, pouvons-nous conclure avec le P. Bonsirven, la conception n’est pas encore abandonnée, bien qu’elle soit de plus en plus concurrencée, du ie’ôl, séjour commun des morts. La Croyance s’accrédite qu’après leur mort, les Ames des justes sont réunies dans un réceptacle particulier ; là, leur étal est diva lement Imaginé, depuis une existence amoindrie ci un sommeil tranquille Jusqu’aux joies de la récompense ; ordinairement cette récompense est envi comme une préparation et une attente de la récompense définitive ; on incline à situer ces réceptacles des bienheureux dans le paradis terrestre ou dans le ciel. — Pour ce qui touche les impies, les conceptions sont moins nettes : on assure généralement que les anges pervers (cf. Hénoch éthiopien et Songes d’Hénoch ) sont déjà torturés dans un lieu de supplice ; on commence à peine à connaître un enfer où souffriraient déjà les pécheurs ; on les laisse souvent dans le Se’ôl, qui prend de plus en plus la figure du séjour des damnés ; parfois aussi leur peine paraît différée jusqu’au jour du grand jugement. De toute façon, « la théologie juive s’oriente nettement vers l’idée d’une rétribution immédiatement consécutive à la mort ». Ibid., p. 335-336.

Cette orientation est aussi, nonobstant la survivance de quelques conceptions archaïques, celle de nombreux rabbins qui n’hésitent pas à décrire les joies du paradis éternel sous des aspects flattant les sens. Ils répugnent au contraire à admettre un enfer éternel. Cf. Bonsirven, op. cit., p. 517 sq., 529-541.

J. Touzard, Le développement de la doctrine de ! ’immortalité, dans la Revue biblique, 1898, p. 207-241 ; A. Durand, Les rétributions de la vie future dans les psaumes, dans les Études, t. I.XXX1, 1899, p. 328-348 ; M.-J. Lagrange, Le messianisme chez les Juifs, Paris, 1909, surtout 3e part., c. iii, p. 158-175 ; Le judaïsme avant Jésus-Christ, Paris, 1931, p. 343-363 (La rétribution dans la vie future) ; Uici. apol. de la foi cath., .1. Touzard, art. Juif (Peuple), t. ii, col. 1590-1593 (La justice divine et le problème des rétributions) ; A. Vaccari, art. Psaumes, t. iv, col. 484486 (Destinée de l’âme ; la vie future).

En ce qui concerne la littérature extra-canonique, on trouve des indications abondantes dans.1. Bonsirven, Le judaïsme palestinien au temps de Jésus-Christ, t. I, Paris, 1935, p. 310-319 ; 517-541. Les rapports du jugement et de la résurrection aux rétributions de l’au-delà ont été exposés à JUGEMENT, t. VII, Col. 1748-1750 et à RÉSUR-RECTION, t. xiii, col. 2507-2512.

Nouveau Testament.


La prédication du Christ projette une lumière nouvelle et définitive sur « la vie éternelle dans le siècle à venir ». Luc, xviii, 30. Mais c’est beaucoup plus sur « la vie éternelle » que sur « le siècle à venir », qu’il convient de mettre ici l’accent. Dans le Nouveau Testament et particulièrement dans saint Paul, la conception du monde et du siècle présent joue un rôle d’une importance exceptionnelle : le monde, c’est ici bas le royaume de Satan, le siècle, c’est la durée assignée à ce règne. Cf. F. Prat, La théologie de saint Paul, t. ii, Paris, 1923, p. 74-75. Le siècle à venir qui, dans l’Ancien Testament, prenait un relief considérable en raison de sa synonymie avec les temps messianiques, n’a pas, à beaucoup près, dans le Nouveau, la même importance : « Pour les écrivains du Nouveau Testament, le siècle présent ou le monde présent n’ont plus qu’une valeur morale ; le siècle présent a perdu la notion de durée et le monde présent, la notion d’espace ; dès lors, le siècle présent et le siècle à venir peuvent se compénétrer ; il n’y a plus entre eux d’intervalle chronologique ; il n’y a qu’une opposition d’influences contraires. D’un autre côté, l’idée d’une catastrophe soudaine Inaugurant le règne du Messie et d’un bouleversement opéré par Dieu seul, sans le concours de l’homme qui ne serait que spectateur passif, fait place peu à peu.i celle d’un royaume messianique se développant par degrés jusqu’à la consommation des siècles. Dans ces conditions, le concept judaïque du siècle ou du monde à venir était presque inapplicable et il fallait le remplacer par la vie et ci nelle. i F. Prat, op. cit., p. 432.

1. Les synoptiques.

thème de la prédication du Christ est le royaume de Dieu à Venir, mais déjà commence, royaume annoncé et établi par Jésus pour