Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.2.djvu/687

Cette page n’a pas encore été corrigée

2 « )o ; î

    1. VICTORINUS AFKR##


VICTORINUS AFKR. LES SOURCES DE LA FOI

2904

s’en serait défendu, car i] pensait bien expliquer le sens historique des épîtres, « raconter les choses comme elles se sont passées, c’est utile, c’est nécessaire ». Ad Gal., col. 1153, 1157, 1162. Souvent, il arrête un développement historique pour rester iidèle à la pensée de l’Apôtre hic et nunc. Ad Gal., iv, 4, col. 1177 D. Seulement, sa perspective est justement trop courte : saint Paul, qui est l’objet de sa leçon, est aussi son seul guide. Il connaît mal le milieu historique, assimilant sans plus les judaïsants de l'épître aux Éphésiens à ceux des Églises de Galatie. Enfin et surtout, il n’a aucun souci du développement de la discipline ecclésiastique : l'Église dont il parle n’a pas d'évêques, mais des apôtres élus par le peuple. Col. 1215 B, 1293 C.

La règle de foi.

On a voulu faire de Victorin

tantôt un illuminé, qui en appelle à l’Esprit de sagesse et de révélation, col. 1036, 1048 A, tantôt un partisan du libre examen, à cause de ses définitions péremptoires. Col. 1076 A, 1242 B. Mais c’est la discussion même qui l’amène aux positions catholiques sur la nécessité, l’autorité et l’organisation de la règle de foi.

1. Sa nécessité.

Dans un passage récapitulatif, col. 1076 B, parce que précisément Victorin affecte d’y mettre en conflit le sens privé du lecteur semiarien avec son orthodoxie personnelle, il recourt d’abord à l'Écriture, « qui a tout dit sur Dieu et le Christ », mais « d’où ont pullulé cependant de multiples hérésies », col. 1076 B ; ayant alors fait appel à ce qu’on pourrait appeler ses « articles fondamentaux », « au mystère du salut », qui devrait faire l’unanimité, il finit par réciter son Credo : « Nous croyons donc Dieu Père tout-puissant. » C’est donc la tradition de l'Église qui se présente comme la seule issue de cette enquête sur les sources de la doctrine.

L’auteur est bien catholique, au moins d’intention, quand il affirme que « nous sommes enseignés par l'Évangile », col. 1094 B, et dans le même sens par la prière de l’oblation liturgique », l’anaphore d’Hippolyte en grec, « tout cela faisant partie des lectures » (oflicielles). Loc. cit., col. 1094 D. Il enseigne que les termes du Symbole, « il faut les admettre de toute nécessité, pour durs qu’ils nous paraissent », col. 1097 C, bien plus, qu’ils sont, tout comme les Écritures, « paroles de Dieu », loc. cit. Col. 1097 A.

2. Son autorité.

Sauf certaines exagérations oratoires de ce genre, Victorin est loin d’accorder aux enseignements de l'Église la valeur que leur donneront les grands docteurs qui le suivent. Et d’abord, le Credo de l'Église, les multiples Credo d’alors, n’ont pas par eux-mêmes une autorité décisive : c’est plutôt une expression heureuse de la croyance générale, col. 1097 B, le terme « nécessaire » d’un raisonnement, qu’il faut « prouver par l'Écriture ». Col. 1097 C. On dira que Victorin s’adresse ici aux ariens ; mais dans les Commentaires, il ne fait pas état du tout des définitions de l'Église.

3. Sa formule.

Il ne s’astreint jamais — et ceci est plus significatif — à citer le Symbole textuellement, comme il le ferait pour un texte magistral. Sa formule de Credo, Adv. Arium, t. I, c. lxvii, col. 1076 D, ne se réfère à aucune version latine du Credo de Nicée, qui portent toutes : unum Deum visibilium… conditorem, justement parce qu’il ne trouve pas que « creator convienne à Dieu le Père ». Col. 1266 A. Sa formule est plus longue même que la formule « macrostiche » de 345. Elle contient cependant le mot consubslantialum, comme le vieux Credo romain de la fin du iiie siècle. Cf. A. d’Alès, Le dogme de Nicée, p. 116. Elle rassemble tout le dogme sur les trois personnes : Et in Spiritum Sanctum, et donne un résumé trinitairc, avant de réciter les articles sur le

Christ « incarné, crucifié…, assis à la droite du Père et juge à venir des vivants et des morts. Amen ». Col. 1077 C. Elle n’est pas complète, et ne contient ni la naissance ex Maria virgine, col. 1176 C, ni la rémission des péchés, col. 1294 D, ni la résurrection de la chair, col. 1088 B, que l’auteur admet par ailleurs, et qui avaient déjà leur place dans le Credo romain. Par contre, il farcit son formulaire de multiples considérations métaphysiques. Y a-t-il là mépris pour l'Église ou orgueil personnel ? Non, cela tient simplement à une théorie particulière à Victorin, sur la distribution des dons dans l'Église : les formules d’un docteur privé sont homogènes aux formules officielles, sans pourtant pouvoir les bousculer, In Ephes., i, 8, col. 1244 A.

4. Les organes de l’enseignement.

Il’a la conception mystique de tous les Pères latins du iv c siècle. « La tête de l'Église, c’est le Christ ; et l'Église même, c’est tout fidèle, tout baptisé qui est assumé dans la foi : donc dans le Christ l'Église, et tous deux sont in unaquaque una carne. » Col. 1287 C, 1289 B. Chaque chrétien ayant en lui l'Église et le Christ qui enseigne et agit, « c’est à chacun d’annoncer l'Évangile à soimême et aux autres », et « l’unanimité s'établit dans l’Esprit ». Col. 1202 A.

Dans cette conception, l'Église est d’abord un organisme de sanctification collective ; si le pouvoir d’administration, assez vague en ses attributions, est limité au personnel dirigeant des « pasteurs », la fonction d’enseignement semble encore à l'état embryonnaire et diffus de l'âge apostolique. Col. 1275 B. « Les évêques n’ont pas à distribuer la nourriture au troupeau », col. 1275 C ; ce sont plutôt les docteurs, « les prophètes du Nouveau Testament, les évangélistes, qui peuvent même être des femmes ». Col. 1228 B.

Parmi ces pasteurs, quel peut être le privilège de l'évêque de Rome ? Victorin n’a jamais trouvé l’occasion d’en parler. Pour saint Pierre, son texte, qu’on aime à citer au sujet de « la grande autorité que le Christ lui a donnée » même sur les autres apôtres, est bien moins net pour le magistère doctrinal : non ut ab eo aliquid disceret, col. 1155 A.

Mais que penser des évêques assemblés en conciles ? et des docteurs de l'Église ?

5. Les conciles.

Les conciles — ou plutôt le concile de Nicée, qui seul jusqu’ici réalise la notion de concile universel — valent, semble-t-il, par « la science et la sainteté » des évêques qui y sont assemblées et qui y parlent par l’Esprit-Saint. Col. 1097 B. Leurs définitions dogmatiques, on l’a vii, ne sont pas néanmoins irréformables pour notre auteur ; à plus forte raison ne sont-elles pas définitives en une matière toujours susceptible d’approfondissements. Leurs décisions gagnent en autorité par l’adhésion des « Églises du monde entier », et profitent grandement de celle du pouvoir impérial, loc. cit.

6. Les docteurs dans l'Église. — Les « raisons » théologiques ne sont pas hétérogènes aux définitions dogmatiques, puisque c’est là encore « l’Esprit de sagesse inspiré par Dieu », col. 1247 D, aussi bien chez les simples évangélistes, col. 1212 C, '1228 B, que chez les prophètes du Nouveau Testament, col. 1275 B, 1273 A, « privilège qui peut se reproduire encore aujourd’hui », col. 1262 D, enfin chez les docteurs qui « établissent la doctrine à force de raisons ». Col. 1151 D. Victorin est du nombre et se prévaut de l’assistance de l’Esprit. Col. 1036 B, 1040 C, 1076 B, 1088 A, 1102 D. « Les vrais maîtres du troupeau sont les docteurs ». Col. 1275 C.

7. L’erreur doctrinale.

L’hérésie, blasphemia, col. 1055 B, 1061 C, sacrilegium, 1032 C, « l’erreur agitée, rebelle et toujours en guerre avec elle-même, est imprudence et ignorance », col. 1106 A ; elle a pour-